Armel Duteil

Vie religieuse

Commission Justice et Paix : Vie religieuse




Justice et Paix et vie religieuse (L27)

L27 : Commission de Coordination des Religieuses/Religieux
Archidiocèse de Conakry

Journée de la vie consacrée
Rencontre des religieux, religieuses au CFP de la Salle

Samedi 2 Février 2008

Thème : « L’engagement de la vie religieuse pour le Justice et la Paix

(par le P. Armel DUTEIL)

Nous avons commencé notre rencontre par une prière méditée à partir de la Parole de Dieu : les béatitudes(Mat 5, 1-12) : Heureux les pauvres de cœur (c’est le vœu de pauvreté), heureux les doux (c’est le vœu d’obéissance), heureux les cœurs purs (c’est le vœu de chasteté), heureux les miséricordieux(c’est la vie communautaire). Maisnotre consécration religieuse nous demande aussi de vivreles autres béatitudes : avoir faim de justice, bâtir la paix et consoler ceux qui pleurent…et rester heureux si nous sommes persécutés. Nous avons terminé par des intentions de prières libres.

Pourquoi parler de justice et de paix ?

D’abord le concile Vatican 2 nous rappelle que les joies, les espoirs et les souffrances des hommes sont aussi ceux de l’Eglise. C’est pourquoi Paul 6 a demandé à chaque diocèse de mettre en place une commission justice et paix

C’est le 4° objectif stratégique de plan d’action des diocèses d’Afrique de l’Ouest,

C’est le thème du 2° synode pour l’Afrique :réconciliation, justice et paix, vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde ».

Ces questions de justice et de paix prennent une importance toute spéciale pour nous, vue la situation actuelle du pays

Notre consécration religieuse nous demande de vivre la justice et la paix d’une façon toute spéciale. Nous vivons en communauté. C’est un appel pour faire grandir cet esprit communautaire, partout où le Seigneur nous envoie. Faire grandir les communautés chrétiennes et l’Eglise –Famille. Mettre la réconciliation dans nos lieux de travail et partout où nous vivons avec nos frères et nos sœurs. Et il n’y a pas de vie communautaire dans la paix sans justice.

Notre vœu de pauvr

eté ne nous demande pas seulement de tout mettre en commun entre religieux, mais, comme dans la première communauté chrétienne, de partager avec les pauvres, chacun selon son besoin(Actes 2, 45), pour qu’ils n’y ait plus de pauvres parmi nous (4, 34). Non seulement d’avoir un cœur de pauvre, mais de nous engager avec eux contre toutes les formes de pauvreté. Et de créer un monde où les pauvres seront reconnus, accueillis, écoutés et heureux. Car la pauvreté est la 1° injustice

Par notre voeu de célibat consacré, nous nous donnons totalement au Christ, pour vivre dans son amour et aimer nos frères comme lui. Cela nous appelle à les libérer de tout ce qui les écrase. Nous acceptons de ne pas connaître un amour conjugal, aussi beau soit-il, entre mari et femme et avec des enfants. Ce renoncement creuse un vide en nous, la soif d’un amour humain qui ne sera jamais satisfait. Nous l’acceptons librement et volontairement car nous croyons que ce choix est fécond et source de vie. Mais cela doit nous rendre attentifs et plus proches de tous ceux qui ne peuvent pas vivre cet amour conjugal parce qu’ils sont prisonniers, émigrés loin de leur pays ne pouvant pas faire venir leur famille, célibataires forcés et même parfois exploités…. Et aussi de tous ceux qui sont blessés dans leur amour ou ne peuvent pas vivre leur sexualité d’une façon humaine et épanouissante, de tous ceux qui sont touchés par le Sida, etc…

Par notre vœu d’obéissance, nous nous engageons à obéir à nos supérieurs mais aussi aux appels que l’Esprit nous adresse à partir de la vie de nos frères et sœurs et de la vie du monde : les signes des temps. Et donc d’être à l’écoute spécialement de tous ceux qui souffrent, pleurent ou sont traités injustement autour de nous

A partir de là nous nous sommes mis en carrefours à partir de 2 questions :

  1. Quelles situations d’injustices et de manques de paix constatons-nous autour de nous ?

  2. Que pouvons-nous faire en tant que religieux : personnellement, en communauté et en congrégation ?

Quelles situations d’injustices et de manque de paix constatons-nous autour de nous ?

  • En société : Pas de soin pour les pauvres dans les hôpitaux et dispensaires ; Conséquences néfastes de la polygamie ; Exploitation des personnes fragiles (veuves, pauvres, petits…) ; Exploitation des étrangers ; Manque d’espaces de jeux.

  • Au travail : Non respect des contrats ; Différences de traitement salarial et d’avantage matériel entre l’Europe et l’Afrique ; Fraude, corruption, incompétence, détournement ; Payer pour un service normalement gratuit ; Service public non assuré (eau, électricité, route ; santé…) ; Recrutement frauduleux ; Bourses détournées.

  • En Eglise : Distinction dans le service des banquets ; Prêtres malades et abandonnés au soin de leurs familles.

  • En prison : Mauvais traitement des prisonniers ; Prisonniers sans jugement ; Détournement de vivres.

  • A l’école : Enseignants mal payés, exploités ; Violence verbale et physique ; Fraude.

  • En communauté : Différence de traitement entre les membres d’une même communauté ; Tribalisme ; Favoritisme.

Que pouvons-nous faire en tant que religieux : personnellement, en communauté et en congrégation ?

  • cultiver et favoriser le dialogue ;

  • donner la bonne information ;

  • comprendre l’autre et l’accepter ;

  • dénoncer l’injustice sans préjuger ;

  • ne pas pactiser avec le mal ;

  • témoigner du Christ ;

  • cultiver l’esprit de paix ;

  • se convertir ;

  • être exigent envers soi ;

  • être vigilant ;

  • se former ;

  • favoriser l’éducation de base : le sens de la justice ;

  • avoir plus de compassion envers nos travailleurs ;

  • visiter les malades, prisonniers…

Durant sa vie terrestre, Jésus a souffert des situations d’injustice. Mais, Jésus a surtout lutté contre l’injustice dont était victimes les pauvres et les petits (il défend la prostituée, l’étranger…). On ne peut donc pas suivre Jésus si on ne lutte pas contre l’injustice.

Nous pouvons nous impliquer

  • en créant au niveau de l’assemblée des religieux/religieuses, un comité Justice et Paix ;

  • en participant à la commission Justice et Paix dans nos paroisses ;

  • en priant Dieu, le Juste Juge pour QU’ENFIN REGNENT LA JUSTICE ET LA PAIX DANS LE MONDE.

Pour finir, Mgr Coulibaly, Archevêque de Conakry, a invité les religieux/religieuses à se retrouver régulièrement pour réfléchir sur leur mission au sein de l’Eglise de Guinée, pour la gloire de Dieu et le salut de l’homme guinéen. Il a poursuivi en magnifiant la vie communautaire dans les communautés religieuses qui sont «les lieux par excellence de communion », thème de l’Eglise de Conakry pour cette année pastorale 2007/2008.

« Le religieux/religieuse est sel de la terre et lumière du monde ». Nous sommes invités à travailler pour une communion plus profonde et «plus contagieuse » dans l’Eglise-famille de Dieu. Mgr Coulibaly invite donc les religieux/religieuses à s’impliquer davantage dans la vie paroissiale et diocésaine, dans l’animation de la liturgie de la parole et pourquoi pas dans les célébrations liturgiques au niveau des quartiers.

La journée du 2 février 2008 finissait alors par une prière, animée par le Sœurs Apostoliques de Saint Jean (Kendoumayah) et un repas partagé.

Le Président Frère Pedro

Le Secrétaire Frère Stéphane




Interventions du père Armel. A la rencontre des religieuses ( 24 Janvier 2009 - L31)

Soutien mutuel

Dans une première intervention, le Père Armel a noté l’importance d’une vie amicale et d’un soutien fraternel entre prêtres, frères et sœurs, basés sur la prière en commun et le partage de la Parole de Dieu. C’est cela qui nous permet de baser nos actions sur une foi commune. C’est aussi ce qui nous a permis de tenir, par exemple au moment de l’assassinat du frère Joseph.

Au service du Royaume

Dans les résolutions et recommandations de la session d’ouverture de la session pastorale, il a relevé un certain nombre de mots importants : « Le témoignage des religieux à la communauté chrétienne et humaine » (n° 1). Notre consécration nous met au service de tous les hommes sans exception. Nous ne pouvons pas nous limiter à la communauté chrétienne. « Ils annoncent le Royaume de Dieu » (n° 2). Un Royaume ouverts à tous les hommes et où les pauvres ont la première place (Mtt V, 3) ; un Royaume de justice et de paix, d’amour et de Vérité, de pardon et de joie (Voir la Préface du Christ Roi, et Galates 5 : les fruits de l’Esprit). C’est cela « le champ du Seigneur (n° 4), pour que « chacun vive profondément son charisme » et cela « au service de la communauté humaine » (n° 8). Enfin, « les religieux auront le souci de développer la dimension missionnaire de la paroisse, pour un meilleur témoignage et une évangélisation plus profonde (n° 9). Ces trois derniers ont un sens très profond et il nous faudrait voir comment les vivre aujourd’hui, en vérité, comme le disait Jésus à Nazareth (Luc IV, 21) : C’est aujourd’hui que cette Parole s’accomplit.

Vivre notre charisme aujourd’hui

Nos fondateurs ont lancé leurs ordres religieux pour répondre aux besoins de leur temps, selon leur charisme. Les malades pauvres étaient abandonnés, les enfants du peuple n’étaient pas éduqués : ils ont lancé les écoles et les hôpitaux. Mais maintenant ces services ont été repris (en partie et avec des problèmes) par l’Etat. En même temps, de nouvelles formes de pauvreté et de maladie (traumatismes, SIDA…) sont apparues. Etre fidèles au charisme de nos fondateurs, n’est-ce pas prendre en compte tout cela, au lieu de nous limiter à nos œuvres traditionnelles : « écoles, dispensaires, centres de formation » (n° 2) ? Le sage, dans le Royaume de Dieu, c’est celui qui tire de son trésor du nouveau et de l’ancien.

Elargir nos oeuvres traditionnelles

Même pour nos œuvres, pouvons-nous nous contenter de bien faire marcher nos propres écoles, sans soutenir les enseignants chrétiens de l’enseignement public ? Et sans nous demander comment améliorer toutes les écoles, et pas seulement la nôtre, pour le bien de tous les enfants de Guinée ? Dans de nombreux pays existent, par exemple des équipes enseignantes (action catholique des enseignants). Et n’est-ce pas la même chose pour nos dispensaires par rapport aux hôpitaux d’état ? Certaines religieuses y travaillent avec de grandes difficultés. Elles sont admirables. Sont-elles assez nombreuses ? Le levain doit être dans la pâte, et le sel dans les aliments, pas à côté. Donner l’exemple ne suffit pas. Il s’agit de s’engager, avec tous les autres, ensemble, pour construire un monde de justice et de paix.

Lire les signes des temps

Jésus, dans l’Evangile, nous demande de lire les signes des temps. C’est ce qu’a fait le Concile Vatican 2. Notre pays est en train de vivre une mutation très importante. En quoi notre Eglise, et d’abord nous les religieux, nous sentons-nous concernés ? Saurons-nous lire les signes des temps ? Comprendrons-nous les appels que l’Esprit-Saint nous adresse ? « L’Esprit vous conduira sur des routes nouvelles ». Et on parle souvent de la dimension prophétique de la vie religieuse. Alors ? Ne serait-il pas important de réfléchir sérieusement à cela ? Et de nous réunir régulièrement pour chercher ensemble ce que nous allons faire.

Un suivi dans notre action

L’année dernière, notre rencontre portait sur le thème : Justice et Paix. Mais apparemment, il n’y a pas eu de suivi. Et aucune évaluation des actions menées, ni même de compte rendu. Ne faudrait-il pas prévoir des rencontres de travail et de réflexion régulières : au moins une par trimestre ? Par exemple pour répondre aux questions posées plus haut ?... : à déterminer. Il faudrait aussi préparer la session de lancement de l’année pastorale 2009-2010 début octobre, en envoyant un questionnaire suffisamment à l’avance pour une préparation sérieuse.




Commission de Coordination
des Religieuses/Religieux
Archidiocèse de Conakry
FÊTE DE LA VIE CONSACRÉE
Anticipée au samedi 24 et dimanche 25 janvier 2009

Samedi, 24 janvier : Rencontre des religieuses et religieux à St Joseph de CLuny

Thème : Débat autour des résolutions de l'ouverture de la session pastorale 2008-09(voir en annexe)

(Participants : Mgr. Vincent + 41 religieuses/eux)

Après lecture des résolutions, les participants sont invités à réagir.

Questions soulevées

Comment en tant que Religieux (ses) pouvons-nous être sel de la terre et lumière du monde ?

1 - Se soutenir mutuellement

Importance d’une vie amicale et d’un soutien fraternel entre prêtres, frères et sœurs (prière commune et partage de la Parole de Dieu).

2 - Etre au service du Royaume

Dans les résolutions, quelques expressions ont retenu notre attention :

« Le témoignage que les religieux (ses) laissent à la communauté chrétienne et humaine … » (résolution N°1). Notre consécration nous met au service de tous les hommes sans exception. Nous ne pouvons pas nous limiter à la communauté chrétienne.

« Les religieux (ses) annoncent le Royaume de Dieu » (résolution N°1), un Royaume ouvert à tous les hommes et où les pauvres sont à la première place (Mt 5, 3) ; un Royaume de justice et de paix, d’amour et de vérité, de pardon et de joie (voir la préface du Christ Roi et Galates 5, les fruits de l’Esprit). Voilà le champ du Seigneur (résolution 4) pour que chacun vive profondément son charisme et cela « au service de la communauté humaine » (résolution N°8).

Enfin, « les religieux (ses) auront le souci de développer la dimension missionnaire de la paroisse, pour un meilleur témoignage et une évangélisation plus profonde » (résolution N°9). Ces trois derniers (mis en relief), ont un sens très profond et il nous faudrait voir comment les vivre aujourd’hui, en vérité, comme le disait Jésus à Nazareth (Luc 4, 21) « C’est aujourd’hui que cette parole s’accomplit ».

3 - Vivre notre charisme aujourd’hui

Nos Fondateurs ont lancé leurs ordres religieux pour répondre aux besoins de leurs temps, selon leur charisme. Les malades, les pauvres… étaient abandonnés. Sous leur impulsion, des écoles, des orphelinats et des hôpitaux sont créés. Aujourd’hui, les autorités publiques assurent tant bien que mal ces services. En même temps, de nouvelles formes de pauvreté et de maladies sont apparues. Ces réalités nous interpellent. Comment pouvons-nous demeurer fidèles au charisme de nos fondateurs ? Comment répondre aux interpellations de nos contemporains ?

4 - Elargir nos œuvres traditionnelles

Pouvons-nous nous contenter de bien gérer nos œuvres et de fermer les yeux sur toutes les pauvretés qui gravitent autour d’elles ? Que faisons-nous, par exemple, pour les enseignants chrétiens des écoles publiques ? Les enfants qui ne fréquentent pas nos institutions ont-ils une place dans nos projets éducatifs ? Le levain doit être dans la pâte et le sel dans les aliments, pas à côté. Donner l’exemple ne suffit pas. Il s’agit de s’engager, avec tous les autres, ensemble, pour construire un monde de justice et de paix.

5 - Lire les signes des temps

Jésus, dans l’Evangile, nous demande de lire les signes des temps. C’est ce qu’a fait le Concile Vatican II. Notre pays est en train de vivre une mutation très importante. En quoi notre Eglise, et d’abord nous religieux (ses), nous sentons-nous concernés ? Saurons-nous lire les signes des temps ? Comprendrons-nous les appels que l’Esprit Saint nous adresse ? Et la dimension prophétique de la vie religieuse ? N’y a-t-il pas motif d’une réflexion plus approfondie de notre part en tant que communauté de foi et d’action ?

6 - Un suivi dans notre action

L’année dernière, notre rencontre portait sur le thème « Justice et Paix ». Apparemment, il n’y a pas eu de suivi. Ne faudrait-il pas prévoir des rencontres de travail plus régulièrement ?

Questions pratiques

Pour permettre une meilleure coordination de la commission des religieuses / religieux, il est prévu une cotisation annuelle de GNF 10 000 (Dix mille francs guinéens) par religieuses / religieux. Les cotisations de cette année devront être versées avant Pâques 2009 auprès de Sœur Marie Jeanne Camara ou Sœur Emilienne Camara.

Agenda

Cette année, nous sommes invités à nous unir à la Communauté bénédictine des moines de St Joseph de Ségueya à l’occasion des ordinations sacerdotales, le 25 avril 2009.

La journée du 24 janvier 2009 finissait alors par une prière, animée par les Frères du Sacré Cœur et un repas partagé.

Dimanche, 25 janvier 2009 : A la cathédrale Ste Marie de Conakry

Dimanche, 25 janvier 2009, l’assemblée des religieuses/religieux s’est jointe à la Congrégation des Sœurs de Saint Joseph de Cluny à l’occasion des Vœux Perpétuels des Sœurs Elisabeth Basile CAMARA et Marie Angeline MANSARE, des Noces d’Argent de la Sœur Marie Louise BARRY et des Noces d’Or de Sœur Marie Bernard BANGOURA. Nous rendons grâce à Dieu pour ses merveilles accomplies en Jésus Christ et en faveur des jubilaires et de son peuple. A l’issue de la Célébration Eucharistique, la commission de coordination, au nom des religieux (ses) de l’Archidiocèse a adressé un message aux jubilaires et à l’assemblée chrétienne. Une occasion de témoigner de notre présence dans cette Eglise de Guinée.

« De la Misa a la mesa » : de la Messe à la table. Un grand merci aux Soeurs de Saint Joseph de Cluny.

Félicitations !!!

Le Président : Frère Pedro María

Le Secrétaire : Frère Stéphane Léon

Annexe :

Rencontre des prétres et religieux (ses) de l'archidiocèse de conakry (Journées de Pastorale 2008-09, Conakry, le 09/10/2008)

Résolutions

  1. La Vie Religieuse est un don que Dieu fait à son Eglise. Qu’Il soit béni pour cette grâce. Nous voulons saisir l’occasion de cette rencontre des Prêtres, Religieux et Religieuses pour remercier toutes les personnes consacrées au Seigneur dans la Vie Religieuse. Par leur présence et le témoignage qu’ils laissent à la Communauté chrétienne et humaine, ils annoncent le Royaume de Dieu parmi nous.

  2. Les Religieux et Religieuses sont au service de tous, plus spécialement des personnes fragiles de notre société (les pauvres et les malades). Ils œuvrent principalement dans les écoles, les dispensaires, les centres de formation et de promotion humaine.

  3. Il est important de reconnaître la vocation des personnes consacrées au Seigneur dans la vie religieuse, de même que le charisme et la spiritualité de chaque Congrégation.

  4. Il est tout aussi important que tous les agents pastoraux paroissiaux collaborent dans le champ du Seigneur (prêtres, religieux, religieuses et laïcs engagés) mais surtout que leur collaboration les enrichisse mutuellement. D’où l’importance de la prière commune (prière du temps présent) et surtout une vie fraternelle empreinte d’amitié, d’accueil et de solidarité. Dans chaque paroisse, on prendra donc soin d’aménager des temps de rencontres et d’échanges.

  5. Dans le domaine pastoral, les religieux auront à cœur de répondre à l’appel et aux interpellations du conseil pastoral paroissial, selon leur moyen et leur disponibilité.

  6. Mais c’est d’abord au sein même de leurs communautés et de leurs œuvres que les religieux et religieuses s’évertueront à mettre en pratique les enseignements de l’évangile et de l’Eglise, les orientations du Diocèse et la pastorale de la paroisse.

  7. Les communautés religieuses seront représentées aux réunions du conseil paroissial. Selon leur disponibilité, ils participeront à la vie de leur Communauté Chrétienne de Base (CCB) et aideront à l’animation des mouvements d’apostolat.

  8. L’équipe apostolique (prêtres, religieux et religieuses) se rencontrera régulièrement, pas seulement pour évaluer sa participation aux activités de la paroisse, mais pour prier ensemble et se soutenir afin que chacun vive profondément son charisme et l’appel qu’il a reçu du Seigneur, au service de la Communauté humaine, pour le bien de tout le peuple de Dieu.

  9. Les religieux et religieuses auront le souci de développer la dimension missionnaire de la paroisse, pour un meilleur témoignage et une évangélisation plus profonde (3ème objectif stratégique).

  10. Au début d’une nouvelle année apostolique, prêtres et religieux se retrouveront pour s’accueillir et poser les bases de leur collaboration, dans le respect de la personnalité de chacun et la spécificité de chaque communauté.


Religieuses engagées pour la justice

Après un 1°article : La réconciliation, Mission de la vie consacrée pour une Afrique réconciliée avec elle-même, je voudrais aborder la question de la Justice dans la vie religieuse, à partir spécialement de l’exhortation de Benoit 16 « l’engagement de l’Afrique », suite au 2° synode pour l’Afrique « l’Afrique au service de la réconciliation, de la justice et de la paix : vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde »

Réconciliation et Justice : Il n’y a pas de réconciliation vraie sans justice. Dieu est le juste. C’est Lui qui nous rend justes. Je ne peux pas croire en un Dieu qui est juste, si je ne cherche pas à être juste moi-même, comme Lui et avec Lui. L’exhortation de Benoit 16 « L’engagement de l’Afrique » explique (AM 117 « Par les vœux de chasteté, pauvreté et obéissance, la vie des personnes consacrées est un témoignage prophétique. Même dans les circonstances de grandes tensions et d’opposition, elles peuvent être un modèle de réconciliation, de justice et de paix ».

Le plan d’action proposé par la COSMAM (Confédération des religieuses d’Afrique et Madagascar) pour les années 2012 à 2015 explique : » nous sommes engagées, pour le bien de toute notre société dont nous nous sentons responsables, de notre pays et de l’Afrique toute entière. Comme nous le rappelle le thème du deuxième Synode pour l’Afrique, « Réconciliation, Justice et Paix », la réconciliation ne sera pas possible sans justice. Il est donc nécessaire de nous engager dans les commissions justice, paix et respect de la création. C’est le chemin que nous offre l’Eglise pour construire la justice et la paix. Pas toutes seules, mais toutes ensemble avec les autres”.

Mais à l’inverse, il n’y a pas de justice et de paix, sans réconciliation et purification intérieure : L’exhortation de Benoit 16 « l’Engagement de l’Afrique » (AM 19) explique : « si l’on ne met pas dans le cœur la force de la réconciliation, l’engagement en politique pour la paix n’aura pas de force intérieure. La purification intérieure de l’homme est la condition essentielle, pour construire la justice et la paix. Mais cette purification et cette force, pour arriver à une véritable humanité, ne peuvent pas exister sans Dieu ». (voir mon article précédent)

La Justice : c’est la justice qui permet de guérir les cœurs blessés, de ceux et celles qu’on a traité injustement. La justice permet à l’autre de reconnaître sa faute, sans être écrasé ou humilié. A ce moment-là, il trouve le courage de réparer le mal que l’on a fait. Le but de la justice ce n’est pas d’opposer et de diviser des gens, mais de les réunir. C’est la justice qui permet la réconciliation et le pardon.

« L’Engagement de l’Afrique » rappelle : « Le Seigneur nous a dit : « Je vous laisse ma paix, c’est ma paix que je vous donne ». Mais il ajoute : « Je ne vous la donne pas comme le monde vous la donne » (Jean 14, 27). La paix des hommes que l’on obtient sans la justice est une illusion, elle ne peut pas durer. La justice des hommes qui ne prend pas sa source dans une vraie réconciliation, par la vérité de l’amour (Ephésiens 4, 15), n’est pas complète. Seul l’Esprit Saint peut nous conduire à la vérité toute entière (Jean 16, 13). Et c’est l’amour de cette vérité qui trace le chemin que toute justice humaine doit prendre, pour refaire des relations de fraternité, dans « une famille qui soit une communauté de paix » réconciliée avec Dieu par le Christ. La justice n’est pas en l’air, elle doit être bâtie sur l’intelligence humaine. Une charité qui ne respecte pas la justice et le droit de tous, est fausse. J’encourage donc tous les chrétiens à devenir exemplaire pour la justice et la charité » (Matthieu 5, 19-20) (AM 18).

L’exhortation de Benoit 16 « l’Engagement de l’Afrique » (AM 19) explique encore : « La Justice n’est pas désincarnée (en l’air). Elle s’ancre  (s’attache) nécessairement dans la cohérence (l’intelligence) humaine « (AM 18).

Quelles en sont donc les conditions ? La première chose, c’est bien sûr de relire et de méditer, personnellement et en communauté, les N°s 22 à 27 de l’Engagement de l’Afrique (Africae Munus). Je les suppose connus.

Vivre la justice en dieu

Vivre avec le Christ

Il est bien évident que, surtout pour nous religieuses, c’est le Christ qui nous aide à vivre tout cela en vérité. Notre vie religieuse et communautaire est un très grand soutien, et le chemin qui nous mène vers Dieu et vers nos frères et sœurs. C’est le Christ qui nous apprend à écouter et à comprendre la souffrance de nos frères et de nos sœurs. Lui qui, non seulement a guéri ceux qui étaient malades dans leurs corps, mais tous ceux qui souffraient et pleuraient dans leur cœur. Il nous dit encore aujourd’hui : « Venez à moi vous tous qui souffrez, et qui êtes écrasés par le poids de la vie, et je vous soulagerai. Prenez sur vous mon joug, et mettez-vous à mon école. Car je suis doux et humble de cœur, et votre âme sera soulagée » (Matthieu 11, 28). En méditant son exemple vivant dans la prière, et en nous laissant conduire par son Esprit, nous devenons capables de faire les mêmes choses que Lui, et d’abord d’écouter la souffrance de l’autre lorsqu’il est blessé dans son cœur.

La prière

Bien sûr, elle a une place absolument essentielle dans notre vie. Religieuses apostoliques, nous avons aussi à être des contemplatives. Mais d’abord, nous cherchons à contempler et à découvrir le Seigneur à l’œuvre dans la vie de ce monde (lire les signes des temps).

Méditer la Parole de Dieu

Elle est la base de notre vie religieuse. « Le Synode sur la Parole de Dieu nous a rappelé ce devoir important des disciples du Christ, qui nous appelle à travers sa Parole. Ainsi les fidèles apprennent à entendre le Christ. Ils se laissent conduire par l’Esprit Saint, qui nous fait connaître le sens de toutes choses (Jean 16, 13). En effet, la lecture et la méditation de la Parole de Dieu nous enracine plus profondément dans le Christ. Elle construit notre ministère de serviteur (servante) de la réconciliation, de la justice et de la paix. Pour devenir frères et sœurs de Jésus, il faut écouter la Parole de Dieu, et la mettre en pratique (Luc 8, 21). Ecouter vraiment, c’est obéir et passer à l’action. C’est faire naître dans la vie, la justice et l’amour. C’est donner dans la société un témoignage qui correspond à l’appel des prophètes. Eux qui unissaient sans cesse la parole de Dieu et la vie, la foi et le bon comportement, la prière et l’engagement dans la société. Ecouter et méditer la Parole de Dieu, c’est la laisser entrer dans notre cœur. C’est transformer notre vie, pour nous réconcilier avec Dieu, et pour permettre à Dieu de nous amener à nous réconcilier avec nos frères et nos sœurs. C’est un chemin nécessaire, pour construire une vraie communauté des personnes et des peuples. Que la Parole de Dieu devienne vraiment vivante sur nos visages et dans nos vies » (AM 16).

Cela nous pose plusieurs questions.

  1. Est-ce que nous cherchons à transformer notre vie, à partir de la Parole de Dieu, pour entrer dans la paix et la réconciliation, avec justice et amour ?

  2. Quand nous méditons la Parole de Dieu, personnellement et en communauté, est-ce que nous cherchons vraiment à la comprendre, à partir de la vie du monde d’aujourd’hui ? Cherchons-nous à lire les signes des temps, comme nous l’a demandé le Concile Vatican II, et déjà Jésus lui-même (Luc 12, 54) ?

  3. Est-ce que nous cherchons vraiment à porter témoignage de la réconciliation, de la justice et de l’amour dans la société, et à être prophète pour le monde d’aujourd’hui ? Est-ce que nous cherchons à transformer la société, et à construire un monde de réconciliation, de justice et de paix ?

Religieuses apostoliques

Nous ne sommes pas des contemplatifs, nous sommes des religieux engagés dans le monde. Dans la ligne de Matthieu 5, 1 à 15 : Les Béatitudes, mais aussi le sel de la terre et la lumière du monde.

D’abord, le vrai sel de la terre, c’est Jésus lui-même. Il est venu rendre le monde meilleur, comme le sel rend meilleur nos aliments. Il est venu nous donner le goût des choses de Dieu.

Jésus est la lumière du monde. C’est lui qui nous remplit de la lumière de Dieu, pour que nous puissions à notre tour éclairer nos frères et nos sœurs. C’est pourquoi, comme la lampe, nous vivons branchés sur le Christ. Et nous faisons tout pour protéger la lumière que nous avons reçue. Sinon, elle va s’éteindre.

Jésus a prononcé ces paroles sur la montagne, devant toute la foule (Mat 5,1). C’est donc un appel à tous les hommes, pas seulement aux chrétiens. Jésus dit bien : « Vous êtes le sel de la terre (de toute la terre, pas seulement de la communauté chrétienne). Vous êtes la lumière du monde (du monde entier, pas seulement de l’Eglise). Jésus nous appelle à nous engager dans la société, à tous les niveaux, chacun selon les possibilités que Dieu lui a données : famille, quartier, lieu de travail, loisirs et amis. Et dans tous les domaines : culturel, social, économique et aussi politique. Avec la force (le sel) et la lumière du Saint Esprit, nous prenons nos responsabilités, en adultes dans la foi.

Nous sommes une minorité. Mais il suffit d’un peu de sel pour donner du goût à tout le plat. Pour cela, il nous faut apprendre en nous situer comme minoritaires dans la société : le sel fond et disparaît. On ne le voit plus. Et pourtant, il continue à agir ! Nous nous mettons véritablement au service de nos frères et sœurs dans la société, comme Jésus. A la suite de Jean Baptiste qui disait de Jésus : » Il faut qu’il grandisse, et que moi je diminue ! » (Jean 3, 30).

Dans la nuit, on dort. A la lumière, on reste éveillé. Restons éveillés. Demandons-nous : Comment pouvons-nous être le sel et la lumière, dont le monde a besoin ? Qu’ensemble, solidaires les uns des autres, nous soyons là où les hommes et les femmes travaillent, là où ils souffrent, là où ils essayent de construire l’avenir. Et enfin, là où ils célèbrent ensemble la vie de Dieu et celle des hommes. Nous sommes chacune et chacun appelés à prendre des engagements et à assumer nos responsabilités, personnellement et en communauté.

Soyons à la fois dans le monde, mais aussi différents du monde.  Jésus nous demande d’être des chrétiennes et des religieuses authentiques, de ne pas nous affadir. Un Chrétien qui a perdu son « goût de Dieu », sa seule saveur véritable, il ne sert plus à rien. Nous ne pouvons pas nous contenter d’être comme tout le monde. Si nous nous mettons à adopter les modes et les mentalités du monde, si nous n’avons plus le goût de l’Evangile, nous devenons inutiles.

Soyons des gens ordinaires, proches des pauvres, des petits et des rejetés, mais, remplis de Dieu,

Nous ne sommes pas meilleurs que les autres. Nous devenons Sel de la Terre et Lumière du Monde, en accueillant en nous le sel et la lumière de Dieu … pour que la gloire du Père des cieux resplendisse à travers notre vie.

Nous sommes comme un fil électrique conducteur de courant, une courroie de transmission entre Dieu et le reste du monde. Nous avons le pouvoir de laisser passer le courant à travers nous, mais à condition d’être branchés sur le Christ. Nous pouvons nous laisser conduire et transformer par l’Esprit Saint, pour faire briller la Lumière du monde, Jésus. Ou bien refuser d’être ce fil et laisser les ténèbres se répandre.

La Vierge Marie, à qui vous êtes consacrées, fut le fil conducteur le plus merveilleux qui soit! Aujourd’hui, Jésus nous demande de dire “ oui ” à la vie en Dieu. De la même façon que la Vierge Marie a dit “ oui ” pour accueillir la Parole de Dieu faite chair, pour le bien de l’humanité.

Jésus avant de se faire connaître comme Fils de Dieu et Sauveur, commence par agir et par répondre aux besoins matériels et physiques des gens. Il demande à boire à la Samaritaine avant de lui annoncer qu’il est la source de l’eau vive qui jaillit pour la vie éternelle. Il donne d’abord à manger à la foule, avant de lui dire qu’il est le Pain de la vie. Il guérit les malades, et c’est à partir de là qu’il leur fait découvrir le salut de Dieu. Notre évangélisation passera donc par nos actions apostoliques vécues dans l’amour du Christ, avec Lui et comme Lui.

Comment, nous, religieux, pouvons-nous participer à tout cela ? Ne sommes-nous pas trop limités et enfermés dans nos Congrégations ?

Le plan d’action proposé par la COSMAM (Confédération des religieuses d’Afrique et Madagascar) pour les années 2012 à 2015 demande :

  1. d’organiser des formations Justice et Paix.

  2. d’envoyer un questionnaire sur la justice, la paix, la vérité et la réconciliation en Afrique, à travailler personnellement et en communauté,

  3. de réfléchir à l’instrument de travail du 2ème Synode pour l’Afrique (et maintenant au document « l’Engagement de l’Afrique »),

  4. que l’on organise une réflexion sous régionale, et que l’on fasse remonter les expériences au niveau régional, pour élaborer une réflexion théologique sur les trois axes : justice et vérité, justice paix et réconciliation, justice paix et communion. Avec des priorités à présenter à l’Assemblée Générale.

Une nouvelle évangélisation demande d’abord une foi plus profonde, plus vraie mais aussi plus ouverte au monde et aux autres religions. Il faut que l’Eglise devienne vraiment missionnaire, et non pas fermée sur elle-même, se souciant seulement des chrétiens, et limitée à la catéchèse, aux sacrements et aux cérémonies religieuses. Cela nous demande en particulier d’affronter les problèmes des jeunes : le chômage, l’influence de la mode et des médias, les déviations sexuelles, etc...

Evangéliser, ce n’est pas faire des discours. C’est simplement vivre en vrai chrétiens « pour qu’ils voient vos bonnes actions et qu’ils disent merci à votre Père »(Mat 5,15). Devenir des vrais témoins du Christ dans le monde : avoir des amis des autres religions, et ne pas avoir peur de nous engager dans la société.

Cela nous demande un engagement plus profond, plus sérieux et mieux formé dans la politique (Justice et Paix), dans de vraies actions de développement, dans le secteur de l’économie, en faveur des plus pauvres (Caritas) et pour la réconciliation autour de nous. Offrir aussi aux plus démunis une vraie éducation (pas seulement dans des écoles catholiques « formelles ») ; lancer de vraies actions pour le respect de l’environnement et de la Création que Dieu nous a donnée ; un dialogue plus vrai avec les autres cultures et les autres religions, sans oublier la religion traditionnelle, qui aboutisse à des engagements concrets au service du pays.

A travers nos actions communes pour la justice et la paix, nous aidons des musulmans et des musulmanes, mais aussi des gens de religion traditionnelle ou des autres religions, à agir dans l’esprit de l’Evangile. Et quand ils mettent en pratique les valeurs de l’Evangile, ils sont évangélisés. Ils sont déjà dans le Royaume de Dieu. Même s’ils ne se font pas baptiser. Car l’Eglise ne doit pas travailler pour elle-même : elle est au service du Royaume. Relisons l’histoire de la guérison du serviteur de l’officier romain (Mat 8,5-11). Car « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés » (Rom 10, 8-13). Et « il y a beaucoup de demeures dans la Maison de mon Père » (Jean 14,2). Jésus disait : »Quand je serai élevé de terre, j’attirerai tous les hommes à moi » (Jean 12,32). C’est donc cela notre travail de religieuses missionnaires : vivre nous-mêmes l’Evangile en vérité, agir avec tous sans rejeter personne, travailler dans la ligne de l’Evangile, pour que tous soient évangélisés, et que tous puissent entrer dans le Royaume

Savoir lire les signes des temps

Pour cela, il s’agit d’abord d’ouvrir les yeux et de partager la vie de notre société. Excusez-moi de donner un exemple personnel. J’habite à Dakar, dans la zone de captage. Trois fois par semaine, je vais dans l’une des prisons de Liberté 6. Je descends vers la Route du Front de Terre, en compagnie des réfugiés maliens qui ont quitté leur pays à cause de la guerre, et qui vivent en mendiant au bout de l’Avenue Bourguiba. Arrivé au carrefour, le samedi je tombe sur le marché, avec tous ceux qui font des petits métiers, en particulier ceux qui vendent des fripes. Et je croise tout le long de la route, des handicapés et des mendiants. Puis je passe devant deux centres pour les enfants de la rue : un du gouvernement GINDDY, et un autre tenu par les Pères Maristes APEF. Je passe aussi devant la Communauté des Frères de Taizé, qui cherchent à être présents dans le quartier aux familles les plus pauvres, et à responsabiliser les enfants. Je continue ma route et j’arrive devant tous les artisans, les petits métiers, les réparateurs de voitures ou de roues crevées, à côté du terrain de foot-ball. Juste en face du dispensaire et du jardin d’enfants des Sœurs de Saint Joseph de Cluny, qui accueillent les malades et les enfants, y compris là aussi les plus pauvres. En remontant la Route du Front de Terre, j’arrive au rond point de Liberté 6, et là je vois toutes les femmes des villages qui sont venues en ville pour gagner leur vie, en pilant ou en faisant la lessive. Elles sont là assises ensemble, en attendant qu’on vienne leur donner du travail, qui souvent sera très mal payé. Il y aa là aussi, les jeunes filles, qui cherchent à être embauchées comme employées de maison, et qui souvent seront exploitées à tous les niveaux. Et enfin j’arrive à l’une ou l’autre des prisons. Cela veut dire qu’autour de nous, il y a beaucoup de gens pauvres mais aussi exploités, des gens qui souffrent c’est-à-dire que l’on fait souffrir, que l’on écrase, que l’on ne respecte pas. Et dans ces mêmes quartiers, aux mêmes endroits, il y a des communautés religieuses et des paroisses. Est-ce que nos communautés et nos paroisses rejoignent ces gens, qui nous attendent et qui ont besoin de nous ?

Différents lieux d'engagements

A la réunion des délégués des Congrégations masculines du Diocèse de Dakar, le 22 Mai 2012, nous avons commencé par la lecture de l’Evangile sur la mission de Jésus (Luc 4, 14 à 21). Après avoir lu le texte, nous avons pris le temps de le méditer phrase par phrase. Ensuite, nous avons dit :

Si nous sommes en paroisse, il est important d’intensifier notre soutien aux Mouvements d’Action Catholique et aux Communautés de quartier (CEB/CCB). Et de nous engager davantage dans la Commission de Justice et Paix, et celle des relations avec les musulmans. Pour le travail auprès des prisonniers et des malades, nous y sommes déjà engagés ; mais les choses sont toujours à intensifier et à revoir. Nous nous posons aussi la question des médias et de notre participation aux émissions de radio et de télévision. Mais la question de fonds, reste la présence et le travail avec les petits et les pauvres, ceux qui sont mis à l’écart et écrasés.

Nous avons aussi noté la nécessité de ne pas rester enfermés dans nos paroisses et communautés. Etre davantage présents dans les quartiers, auprès des organisations laïques : associations de jeunes et de femmes, syndicats, centres culturels, écoles, postes de santé. Etre en contacts réguliers avec les imams et les délégués de quartier. Des questions nous préoccupent plus spécialement, comme en particulier le chômage des jeunes et leur éducation sexuelle. Il y a aussi les problèmes des femmes. Ce sont plutôt nos sœurs, les religieuses, qui les prennent en charge, bien que nous travaillions ensemble

Un simple témoignage, parmi beaucoup d’autres : «  Je repasse voir un couple de réfugiés. La femme qui faisait une forte dépression, et l’enfant qui avait de la fièvre vont mieux au point de vue santé, ce qui me réjouis beaucoup. Le problème qui reste, c’est les papiers. Lui est Sénégalais ; elle est Ivoirienne. Leurs papiers français ne sont plus valables, alors qu’ils ont vécu de longues années en France, qu’ils s’y sont mariés et que leur enfant est né dans ce pays. Mais on fait tout pour bloquer les choses, aussi bien du côté des Services du pays que de l’ambassade de France. La première chose bien sûr c’est de leur trouver du travail, au moins pour le mari, car la jeune femme n‘est pas en état de travailler. Et pour le moment, prendre en charge la location de la maison et leur assurer un minimum de nourriture, sans oublier les médicaments ».

Après la mise en commun, nous avons célébré l’office du milieu du jour (Vendredi 1) en lien avec cette réflexion, éclairés par les psaumes que l’Eglise nous proposait ce jour-là. Le psaume 118 : notre engagement personnel et communautaire au service du Seigneur, le psaume 25 : la prière de l’innocent, notre volonté de servir nos frères de tout notre cœur, et le psaume 27 : la supplication en union avec tous ceux qui sont rejetés et traités injustement.

Parfois des prêtres font des reproches aux religieuses en disant « elles ne font même pas de catéchèse ». C’est vrai que la catéchèse est importante, que c’est une activité essentielle de l’Eglise, et que nous avons à y participer, dans la mesure de nos possibilités. Mais notre premier lieu d’engagement et notre premier endroit d’évangélisation, c’est là où nous travaillons. Ce sont nos activités professionnelles, à l’école, au dispensaire, dans les foyers de jeunes filles, dans les groupes de femmes et partout où nous sommes engagés. C’est là que nous avons à vivre l’Evangile, et à l’annoncer en premier. C’est donc très important que nous nous demandions, comment nous vivons nos engagements professionnels. Car c’est d’abord là, que nous vivons notre vie chrétienne et religieuse. Simplement quelques réflexions au sujet de nos engagements les plus fréquents.

Les écoles

il ne suffit pas que nous soyons de bonnes enseignantes qui préparent leurs cours, qui suivent bien leurs élèves et qui cherchent non seulement à les enseigner mais à les éduquer. Cela c’est la base. De même qu’il est essentiel que nous vivions une vraie vie de charité, pas seulement avec les élèves mais aussi avec les enseignants et les employés de nos écoles. Sans oublier les parents, en commençant par les plus pauvres.

Nous cherchons à former des élèves ouverts à la diversité, engagés selon leur âge pour la justice, la paix et le respect de la Création, agents de réconciliation et de dialogue vécus dans la foi et la prière, dans le respect de la religion de chacun. Pour les chrétiens, nous voulons qu’ils construisent leur vie sur l’Evangile et la vie de Jésus.

Au point de vue méthodologie, nous ne pouvons pas nous contenter d’un enseignement par cœur. Nous voulons leur apprendre à regarder ce qui se passe autour d’eux, à développer leur sens critique et la soif de vérité et de justice dans leur comportement. Nous voulons former leur personnalité pour qu’ils soient capables de s’engager, en respectant les autres, surtout les plus faibles et les plus pauvres.

Mais nous devons aussi nous demander quel type d’école voulons-nous ? Dans quel type d’enseignement et d’éducation voulons-nous nous engager ? Un exemple personnel. A chacune de chercher là où elle vit. Dans ma paroisse de Grand Yoff, il y a en particulier les bureaux de Enda Graff, qui travaille au niveau des écoles informelles : tout ce qui touche la formation des apprentis et des enfants de la rue, de tous les exclus qui n’ont pas la possibilité d’aller dans les écoles officielles. Ce qu’ils appellent les formations coin de rue, l’atelier école (pour les apprentis), l’amélioration des daaras (les écoles coraniques), la lutte contre l’analphabétisme, les écoles communautaires prises en charge par les parents et les quartiers, etc. Nous aurions certainement des choses à apprendre de ce côté-là, pour ne pas nous limiter à l’enseignement formel traditionnel.

Même au sujet des écoles formelles et officielles, dans quelle mesure nous sentons-nous concernés par ce qui se passe actuellement dans le pays ? Pouvons-nous nous contenter de dire : « les gens nous félicitent, parce que nous donnons un enseignement de qualité ». Qu’avons-nous fait par rapport à toutes ces grèves de l’année dernière ? Et en particulier avec certains enseignants, dont un certain nombre de chrétiens, qui faisaient grève dans les écoles publiques, mais continuaient à enseigner et à se faire payer dans des écoles privées, et à donner des cours particuliers ? Avons-nous cherché à conscientiser nos enseignants, et surtout nos associations de parents d’élèves, par rapport aux grèves dans le public ? Car nous sommes responsables de tous les élèves. Sans oublier qu’il y a déjà des enfants chrétiens et des enseignants chrétiens dans les écoles officielles. Nous sentons-nous concernées, au sujet des orientations du Ministère de l’Education et de la marche des écoles en général. Car il s’agit bien de notre pays et de notre société. Et le Christ nous appelle à faire quelque chose. A nous d’écouter le Saint Esprit et de réfléchir ensemble, pour voir quoi faire.

Cette éducation ne doit pas se limiter aux écoles formelles. Au contraire, il est urgent et essentiel que nous nous engagions dans l’éducation informelle : auprès des enfants de la rue, des apprentis, des enfants non scolarisés, sans oublier l’éducation des adultes. Car bien sûr, l’éducation ne se limite pas à l’enseignement.

La santé

D’énormes efforts et un travail de qualité se font dans les dispensaires privés catholiques, pas seulement pour soigner, mis aussi par rapport à la prévention, à l’éducation sanitaire, à la vaccination, etc… Et d’abord pour permettre aux plus pauvres d’être soignés. C’est très bien. Mais là encore, nous sentons-nous concernés par les problèmes et les difficultés des dispensaires, et des hôpitaux publics ? Que faisons-nous pour qu’eux aussi marchent mieux, et prennent davantage les malades en charge avec leurs familles ? Comment réagissons-nous contre les grèves incessantes dans la santé ? Sommes-nous présents dans les organisations de la santé publique et des ministères ? Nos employés sont-ils engagés dans les syndicats de la santé ? Participons-nous aux réflexions gouvernementales et aux programmes sur la santé ? Ou ne nous contentons-nous pas trop facilement de bien faire marcher nos propres dispensaires, sans penser aux autres ?

Nous ne pouvons pas oublier aussi que la majorité des habitants de ce pays, surtout dans le monde rural, ne peuvent pas se soigner dans les dispensaires parce qu’ils sont trop pauvres, parce qu’il n’y a pas de médicaments ou même qu’il n’y a pas de dispensaire dans leur village. Ils se soignent donc avec la pharmacopée traditionnelle, qui est valable et qui est une très bonne chose, mais avec le risque qu’elle soit détournée par des « charlatans » et par des gens qui soient plus des féticheurs que des guérisseurs. Est-ce que nous n’aurions pas à nous engager également dans ce secteur ? Déjà certaines d’entre nous ont valorisé et utilisent la médecine traditionnelle.

Et bien sûr, par exemple, il n’est pas question pour une religieuse travaillant dans la santé, de prendre ses congés pendant l’hivernage, dans la mesure où c’est le moment où il y a le plus de maladies.

Les centres de formation féminine

La formation est évidemment très importante. Mais il ne s’agit pas seulement d’apprendre la couture ou la broderie, il s’agit bien de former des femmes, à l’aise dans leur féminité adulte et capables de s’engager dans la société. Et d’abord de prendre leurs responsabilités dans leurs familles et dans leurs quartiers. Et pas seulement dans l’Eglise, dans les associations des femmes catholiques, qui d’ailleurs trop souvent se limitent aux fêtes et aux cérémonies, aux cotisations et aux uniformes. Des femmes et des jeunes filles qui s’engagent dans les associations de quartier. Mis elles ne pourront le faire que si nous les soutenons, et si nous-mêmes nous sommes en lien avec ces associations. Que ces jeunes filles et ces femmes que nous formons ne se contentent pas de travailler pour elles-mêmes, mais qu’elles cherchent à partager la formation reçue avec les autres femmes, dans leur quartier ou leur village. C’est la seule solution pour que le pays avance. Est-ce que nous aidons ces femmes et ces jeunes filles à gagner ensuite leur vie ? Comment nous sentons-nous concernés par le chômage des jeunes, et les souffrances, les violences et l’exploitation des femmes ? Que faisons-nous contre cela ?

Le 3 mai 2011, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi publiait une lettre circulaire : ‘Pour aider les Conférences épiscopales à établir des Directives, pour le traitement des cas d’abus sexuel commis par des clercs à l’égard de mineurs’. La lettre rappelle que l’évêque a la tâche d’ ‘assurer le bien commun des fidèles et la protection des enfants et des jeunes en particulier’. Et qu’il a le devoir de réagir de façon appropriée aux cas d’abus sexuel de mineurs, commis par des clercs dans son diocèse. La responsabilité des évêques s’étend aussi aux Supérieurs religieux et aux congrégations, comme le dit explicitement la lettre circulaire. Cette lettre commence par mettre l’accent sur le bien des enfants, cibles et victimes de tels abus.

En paroisse

Notre premier engagement est donc dans notre milieu professionnel. Cela ne doit pas nous empêcher bien sûr, de participer aux activités de la paroisse. Mais là aussi nous pouvons nous demander, comment y vivons-nous notre charisme religieux et prophétique ?

Nous devons déjà nous demander, où le Seigneur nous appelle-t-il. Qu’est-ce qui est le plus important : d’être dans la chorale ou dans une commission Justice et Paix ? D’être dans une amicale ou de faire la catéchèse ? D’organiser des fêtes et des sorties ou de participer à la vie d’une CEB ? De participer à un groupe de prière ou d’être engagé dans la Caritas ? C’est à chacune de réfléchir, avec ses sœurs et sa Supérieure, et tout le monde n’a pas à faire la même chose. Mais nous avons au moins à vivre tous nos engagements dans la paroisse en tant que religieux, et à le partager en communauté. Pour vivre nous-mêmes la vérité de l’Evangile, et aider nos frères et nos sœurs à avancer dans ce sens.

Si nous sommes à la chorale, nous ne pouvons pas nous contenter de chanter, d’être une bonne choriste. Nous veillerons à faire grandir l’esprit missionnaire, de créer une vraie fraternité dans la chorale, et une mixité respectueuse et enrichissante entre garçons et filles. Et aussi par exemple de faire lire l’Evangile au début de la répétition, pour que les chants choisis soient en rapport avec la Parole de Dieu, à la messe du dimanche. Ou de prendre le temps de méditer l’un ou l’autre chant, et de voir comment le vivre. De faire une vraie prière au début et à la fin (pas seulement réciter un je vous salue Marie), mais surtout que toute la répétition se passe dans un esprit de prière. Car chanter, ce n’est pas toujours prier deux fois ! Et surtout ne pas transformer l’eucharistie en un concert, mais au contraire faire chanter et participer toute la foule.

La chorale peut être pour nous, non seulement l’occasion de créer des liens d’amitié mais aussi de mieux comprendre la vie concrète des gens avec leurs difficultés, et de pouvoir ainsi les aider d’une façon réelle et pas seulement par la prière. A condition d’être attentives aux personnes. Là aussi se pose la question de l’évangélisation par les chants. Au Congo, j’ai connu les scholas populaires : des chorales qui ne cherchaient pas d’abord à chanter dans la liturgie à l’église, mais dans les cérémonies traditionnelles pour les christianiser : à la présentation de l’enfant aux ancêtres (« baptême » traditionnel), aux mariages traditionnels sans attendre la célébration du sacrement du mariage, aux veillées mortuaires, aux fêtes traditionnelles de la circoncision, de la levée du deuil, etc. A partir du chant, qui prenait en compte les traditions, pour les transformer et les évangéliser.

Les CEB/CCB/CEV

Ces communautés sont devenues de simples groupes de prière, où l’on se contente souvent de réciter le chapelet. N’est-ce pas de notre faute, prêtres comme religieux et religieuses ? Nous avons trop souvent déserté ces CEB. Comme les laïcs ne savaient pas quoi faire, ils se sont repliés sur le chapelet. Alors que l’essentiel devrait être le partage d’Evangile, et la prière à partir de la vie de tous les jours.

Une CEB c’est une communauté de quartier, ce n’est pas une simple subdivision de la paroisse. Son rôle est donc d’être attentif à ce qui se passe dans le quartier, et de s’y engager. En lien avec les autres associations de quartier (Associations de jeunes, associations féminines, etc...), et en coordination avec les autres responsables du quartier (chef de quartier, imam etc.). Dans la zone de captage où j’habite, j’ai la chance d’avoir une CEB qui travaille dans ce sens, qui s’est engagée pour l’aménagement et la sécurité du quartier (par exemple, en laissant la lampe d’entrée de la maison allumée la nuit, car il n’y a pas d’éclairage public), pour l’enlèvement des ordures et pour l’assainissement, pour la lutte contre le paludisme (nous sommes inondés par les moustiques à partir du lac de rétention), qui planté des arbres dans tout le quartier et même à la mosquée en construction, etc…. Et qui réfléchit aux problèmes de l’école, de la décentralisation et des élections locales à venir, des enfants mendiants, de la pollution du quartier, et tant d’autres choses. Et dimanche prochain, je suis invité à une conférence des femmes musulmanes du quartier, dans le cadre du Ramadam. L’Amicale des jeunes de notre CEB travaille pour les enfants de la rue et les bébés abandonnés. Notre communauté n’est pas parfaite, mais au moins elle cherche à s’engager concrètement. Dans ce sens nous avons réfléchi à ce que nous pourrions faire pour le monde rural, en particulier pendant le temps de vacances, où nous voyageons et retournons dans les villages. En particulier pour lutter contre l’accaparement des terres, qui fait que les jeunes n’auront plus de terrains à cultiver, et viendront grossir les rangs des chômeurs et même des délinquants de la ville. Nous cherchons que faire, face au chômage des jeunes et pour la mise en place de groupements et de petits projets, comme pour la santé du quartier: ce sont par de telles petites actions, que les choses avancent. Et pour la rentrée nous sommes bien décidés à nous engager par rapport au problème de l’enseignement, en lien avec l’association des » parents indignés ».

Nous essayons aussi de faire de notre CEB une communauté, une vraie famille où chacun se sent à l’aise. Et je suis dans l’admiration, en voyant tous les efforts que font dans ce sens, aussi bien les enfants et les jeunes que les adultes, leurs parents.

(Celles qui sont intéressées par ces questions peuvent me demander de leur envoyer l’un ou l’autre compte-rendu, aussi bien au sujet des CEB que des autres questions abordées ici. Mon mail : armelduteil@hotmail.fr; vous pouvez aussi consulter mon site http://armel.duteil.free.fr ou You Tube : armel duteil  ).

Dans la paroisse il y a aussi les commissions. Je prendrai seulement l’exemple de la commission de Justice et Paix. Au Sénégal, comme dans beaucoup d’autres pays, un gros travail a été fait pour la formation des citoyens, au moment des élections présidentielles et législatives, et aussi pour l’observation de ces élections. Dans chaque paroisse doit exister une telle commission de Justice et Paix. Elles ont besoin, non seulement de notre soutien mais de notre présence active, pour mener des actions concrètes. Ainsi dans notre paroisse, nous avons commencé à faire réfléchir les gens par rapport aux élections municipales, car nous pouvons agir concrètement et efficacement à ce niveau. Nous voulons également lutter contre l’augmentation du prix des loyers, en intervenant auprès de l’Assemblée Nationale, pour conscientiser les nouveaux députés. Nous avons déjà rencontré des maires et des députés sur ces questions, et beaucoup d’autres ! Et il y a toutes les actions proposées par le 3° PAP (Plan d’Action Pastoral). Ce ne sont pas les actions qui manquent, ce sont les prêtres, les religieux et les religieuses.

Evangéliser la culture

La première chose que nous devons faire quand nous allons dans un autre pays (mais aussi dans notre propre pays), c’est de connaître et d’accepter les orientations diocésaines. Mais aussi de connaître la culture et la langue des gens, là où nous travaillons. Alors nous pourrons nous mettre de tout notre cœur, au service de l’Eglise locale. Mais là aussi, nous le ferons en tant que religieuses apostoliques et missionnaires, sans nous laisser enfermer dans les paroisses, et sans nous limiter aux chrétiens. Nous le ferons en respectant et en faisant respecter notre charisme, ce pour quoi nous avons été faits : le service de l’Eglise locale, mais aussi de la femme africaine et des plus pauvres, en acceptant les lieux d’implantation les plus difficiles, quelles que soient les difficultés psychologiques et matérielles que cela comporte. C’est cela notre vocation. Et de chercher à construire une Eglise de plus en plus ouverte, de plus en plus attentive aux réalités de ce monde et de la société. Pas seulement être prophètes nous-mêmes, mais rendre chacun des chrétiens prophètes, là où il vit. Car depuis notre baptême, nous sommes tous prêtres (le sacerdoce des fidèles), prophètes et rois. Roi cela ne veut pas dire commander, mais organiser la société, et construire le pays comme Dieu le veut, pour y faire grandir le Royaume de Dieu  : « Voici que je vais créer des cieux nouveaux et une terre nouvelle, où la justice habitera (2ème Pierre, 3,13) ». En quoi sommes-nous vraiment prophètes actuellement ? dire Comment retrouver le prophétisme de la vie religieuse ? Comment également éduquer à la non violence active selon l’Evangile ? N’est-ce pas cela l’une de nos premières responsabilités ?

Souvent on prie pour les malades en réunion de CEB, mais on va beaucoup moins souvent prier avec les malades. Bien sûr toute la communauté ne peut pas se déplacer chaque jour. Mais après une prière commune, qu’est-ce qui nous empêche d’envoyer un délégué de la communauté chaque jour. Pas seulement pour prier avec la famille, mais pour voir comment ils vivent ce temps de la maladie. Pour éviter en particulier toutes les pratiques magiques, le maraboutage et les accusations de sorcellerie et pour vivre la maladie dans la foi. Une simple prière en réunion de communauté ne peut pas transformer tout cela.

De même on passe beaucoup de temps aux enterrements : la veillée le soir, la levée du corps à l’hôpital, la prière à l’église, l’enterrement au cimetière, les condoléances dans la famille. Comment les gens qui ont un travail salarié vont-ils assurer leur travail, dans ces conditions ? Mais surtout, on vient au moment de l’enterrement et ensuite la communauté chrétienne disparaît complètement. Ne serait-ce pas beaucoup plus important d’être présent à la veillée mortuaire, mais surtout de s’asseoir ensuite, ensemble avec la famille. Pour voir comment ils vont régler les problèmes laissés par le défunt, les questions d’héritage, la condition de la veuve et des orphelins…Et là aussi, éviter les pratiques traditionnelles païennes, les accusations de sorcellerie et autres habitudes incompatibles avec la foi. Et que la communauté envoie chaque jour pendant tout le temps du deuil, au moins une ou deux personnes à tour de rôle, pour visiter la famille, les conseiller, les soutenir, les encourager et prier avec eux.

Il y aurait donc toute une réflexion à faire, aussi bien pour l’inculturation de l’Eglise que pour la conversion de nos cultures. Nous religieux et religieuses, nous avons une famille. N’est-ce pas à l’intérieur de nos propres familles que nous pouvons agir en premier ?

Annexe 1 : Forum des religieux du Sénégal

Ces réflexion devront bien sûr être reprises, adaptées et approfondies, personnellement, en communauté, en congrégation et en Assemblée Générale. Ainsi, pendant le week-end du 1er Novembre 2011, a eu lieu une grande rencontre (forum) des religieux et religieuses du Sénégal, sur le thème « Liberté, vérité et responsabilité, pour une mission féconde et épanouissante ». Au cours des interventions, j’ai été amené à prendre la parole. En voici des extraits :

  1. Au cours de ce premier jour, nous avons surtout insisté sur notre identité religieuse, notre vie « interne » avec ses conditions : les trois vœux, la prière, la vie de communauté. Tout cela est très important. Mais qu’en est-il de notre présence dans le monde, comme nous le demande le titre de ce forum : « Pour une mission féconde et épanouissante » ?
    On a parlé des « nouveaux aéropages de la mission ». D’abord, il faudrait peut-être utiliser un vocabulaire plus simple et compréhensible par tous ! Ensuite, quels sont ces nouveaux secteurs de la mission ? Que pouvons-nous y faire ?
    On a dit aussi : « Témoigner du Christ dans les milieux défavorisés ». Sommes-nous vraiment présents dans ces milieux ? Est-ce que nous partageons la vie des défavorisés. Est-ce que nos communautés ne sont pas trop souvent des enclaves, avec un niveau de vie supérieur aux autres, malgré notre vœu de pauvreté ?
    Savons-nous lire les « signes des temps » (Mt 16,2-3), pour découvrir les appels du Seigneur dans le monde d’aujourd’hui, comme nous le demande le document du Concile dont nous fêtons le 50ème anniversaire : « l’Eglise dans le monde de ce temps » ?

  2. Nous avons parlé de « nous enraciner dans le Christ ». C’est absolument nécessaire. Mais quelle image avons-nous du Christ et de sa vie ? Quelle compréhension avons-nous de son Evangile, en particulier des Béatitudes et de sa mission ? (Voir, par exemple, Luc 4, 14 à 21 ; et Luc 7, 19 à 23).
    Le Christ a prié, il a vécu en communauté avec ses apôtres, il a annoncé l’Evangile pas seulement en paroles, mais en actes, il a guéri les malades et chassé les démons. Mais le Christ, c’est aussi celui qui a défendu tous ceux qui étaient traités injustement : les pauvres, les petits, les étrangers, les écrasés ; il les défend et il les fait grandir. De même que les femmes et les enfants : Il défend la femme adultère, et aussi la prostituée  devant Simon, le pharisien. Il dit : laissez venir à moi les petits enfants. Il a su encourager et louer le 10ème lépreux samaritain, le seul venu lui dire merci. Et il donne en exemple un autre païen, le bon samaritain. Repartir du Christ, cela veut donc dire aussi, pour nous : être les défenseurs des pauvres et de tous ceux qui sont rejetés et méprisés. L’annonce de l’Evangile nous oblige parfois à dénoncer. Dénoncer ceux qui calomnient, parce que nous les dérangeons. Dénoncer les pensées uniques et imposées, qui transforment les gens en machines. Dénoncer les situations qui emprisonnent ou baissent nos frères et nos soeurs. Mais dénoncer aussi la qualité de nos propres vases, quand ils se fendillent. Quand nous dénonçons, est-ce pour proclamer le Royaume ou pour nous annoncer nous-mêmes 

  3. Jésus nous dira à la fin du monde : « J’étais prisonnier et vous m’avez visité ». Que faisons-nous pour les prisonniers, les réfugiés, les émigrés de retour, et déjà les étrangers présents parmi nous (les étrangers pauvres, pas seulement ceux qui sont dans les ONG ou les grandes organisations internationales) ?

  4. Aujourd’hui, nous avons dit : « Avançons au large, dans la vérité, la liberté et la responsabilité ».
    Il n’y a pas de liberté sans libération. Comment d’abord nous laisser libérer nous-mêmes par le Christ, pour vivre à plein (Jean 10, 10) ? Le Christ est venu pour que nous ayons la vie totale. Que faisons-nous pour libérer nos communautés, nos congrégations et notre Eglise, de tout ce qui pèse sur elles, et qui alourdit leur pas ? Prenons-nous, chacun d’entre nous, nos responsabilités pour cela ? Vivons-nous dans la vérité de la vie religieuse ? (il ne s’agit pas seulement de dire la vérité, mais de faire la vérité, comme nous le demande le Christ).
    Comment libérer notre société, au milieu de toutes les tensions actuelles et les risques de violences ? Que faisons-nous pour libérer en premier les écrasés, les opprimés, les étrangers et tous les rejetés ?
    Nous avons dit qu’il s’agit pour nous de vivre avec le Christ. Jésus disait à ses apôtres : « Qui vous accueille, m’accueille » (Mat 10,40). Et aussi : »Celui qui accueille un enfant en mon nom, c’est moi qu’il accueille » (Luc 9,48). C’est dans les hommes et les femmes qui nous entourent, et d’abord dans les petits de notre société, que nous pouvons rencontrer le Christ chaque jour. Pour cela, il est essentiel que nous gardions l’espérance. Mais n’avons-nous pas un regard trop négatif sur notre société ? Il est essentiel de voir le positif, les bonnes choses que font les gens. Il s’agit de nous laisser interpeler par le monde, et pas seulement par notre propre conscience.
    Et aussi de changer nos façons de faire, pour commencer des activités nouvelles, et des nouvelles façons de vivre notre vie religieuse et nos engagements. Jésus disait : « le sage dans le Royaume de Dieu, c’est celui qui tire de son trésor du neuf et de l’ancien » (Mat 13,52). Est-ce que nous savons faire du neuf ? Est-ce que nous essayons même de le faire ? Ou est-ce que nous ne nous contentons pas de faire marcher nos œuvres comme nous l’avons toujours fait, pour « faire tourner la boutique » ?

« Soyons des prophètes et des mystiques aux yeux ouverts et aux oreilles attentives…capables de fleurir même en hiver ». Un beau défi à relever ensemble !

Annexe 2 : Réligieux et religieuses dans la pastorale du tourisme.

Le mardi 24 avril 2012, Benoît XVI a invité à développer la nouvelle évangélisation à travers le tourisme, dans un message pour le VIIe Congrès mondial de la pastorale du tourisme à Cancun.

Le pape exhorte « à redoubler de vigilance, à prévenir et à contrer ces aberrations (…) de façon urgente », citant le tourisme sexuel comme « l’une des formes les plus abjectes de ces déviations ». Il dénonce en ce sens « la traite d’êtres humains pour des motifs sexuels ou pour des greffes d’organes, l’exploitation des mineurs, les abus, la torture ». C’est le passage du message de Benoît XVI le plus cité par les médias.

Mais en premier lieu, il invite à promouvoir « une culture de tourisme éthique et responsable », à la lumière de la doctrine sociale de l’Église. Il souhaite que le tourisme soit « respectueux de la dignité des personnes et des peuples, accessible à tous, juste, durable et écologique ». Les vacances sont « un droit », ajoute-t-il, qui doit devenir une « réalité » pour tous, y compris « les plus défavorisés ».

En février 2.012, les religieux et religieuses du Sénégal se sont retrouvés pour réfléchir à cette question du tourisme. En voici quelques conclusions (vous pouvez me demander le texte entier).

  1. Quel doit être notre engagement de religieux dans le tourisme ? Il se situe à tous les niveaux. En effet, nous sommes d’abord des citoyens et des citoyennes. Nous devons donc nous engager pour l’avancée du pays dans tous les secteurs, le tourisme y compris. Nous agissons avec tous les chrétiens, sous la direction de notre évêque, en union et en collaboration avec les laïcs dans les mouvements, dans les CEB, dans les commissions, partout où nous allons. A ce sujet, beaucoup de chrétiens se plaignent que nous ne soyons pas engagés, par exemple dans les CEB, dans les mouvements d’adultes, dans les commissions Justice et Paix, les aumôneries des malades ou de la prison, etc. Nous aurions certainement des choses à revoir à ce niveau-là. Aujourd’hui le Seigneur nous adresse un appel très fort, pour nous engager aussi auprès des touristes et dans tout ce qui se fait. Pas seulement sur la Petite Côte, mais aussi à Dakar où il y a beaucoup de gens de passage, de nombreux hôtels, de nombreux séminaires et congrès.

  2. Nous nous engageons en tant que religieux, pas seuls mais ensemble, en communauté, et tous les religieux ensemble. A notre dernier Forum de la Toussaint 2011, nous avons dit que nous ne pouvons plus nous contenter de nos activités traditionnelles. Il faut nous engager dans les nouveaux secteurs de la société. Nous avons dit aussi que nous devons être les prophètes de ce temps. Le Concile Vatican 2 nous a demandé de revenir à notre charisme. Non pas faire matériellement ce que notre fondateur ou notre fondatrice ont fait, mais voir comment vivre son esprit et ses intuitions dans la société moderne actuelle. Si notre fondateur revenait, que ferait-il aujourd’hui ?

  3. Il s’agit pour nous d’agir dans l’espérance et de préparer l’avenir. Par notre vie religieuse, nous sommes les signes du Royaume. Pas seulement les signes du ciel et de la vie éternelle, mais le signe du Royaume qui vient aujourd’hui sur terre. Pas seulement attendre « des cieux nouveaux » mais aussi construire une « terre nouvelle où la justice habitera » (2ème Pierre 3, 13). Nous sommes appelés à construire le Royaume de Dieu, à l’évangélisation, à la sanctification de la mondialisation actuelle. Et donc, d’être frères et sœurs de tous les touristes du monde, quelle que soit leur nationalité.

  4. Nos trois vœux nous situent en plein cœur du tourisme pour une action prophétique. Notre vœu de pauvreté est une réaction vivante et concrète à tous les problèmes d’argent du tourisme : le luxe, les travailleurs mal payés, les femmes mais aussi les hommes, les jeunes et les enfants qui se prostituent pour de l’argent etc. 
    Notre vœu de célibat consacré et notre chasteté sont une action profonde et très efficace contre toutes les déviations sexuelles qui gangrènent le tourisme. Et plus profondément une force active dans le monde du tourisme, pour que touristes et habitants puissent vivre une véritable rencontre, dans un amour vrai et désintéressé.
    Notre vœu d’obéissance ne nous demande pas d’obéir seulement à notre supérieur de communauté, mais d’abord d’obéir à Jésus Christ. Et donc d’écouter les appels que Dieu nous adresse dans la vie du monde, en particulier dans le tourisme : savoir lire les signes des temps et les écouter, et y être fidèles dans nos engagements religieux.
    Enfin notre vie de communauté est le signe que la vie est réussie et heureuse quand on la vit ensemble avec les autres, en réaction contre l’individualisme de certains touristes, qui cherchent leur plaisir tout seul. Et quand nous vivons en communauté internationale, c’est la preuve actuelle et concrète, que l’on peut se rencontrer entre touristes et habitants du pays, et entre personnes de culture différente.

  5. Pour arriver à cela, la première chose c’est essayer de connaître la réalité de ce qui se passe, savoir ouvrir les yeux, écouter, parler avec les gens pour mieux les comprendre.
    Il ne s’agit pas de faire des choses extraordinaires, c’est dans les petites choses que nous ferons avancer l’esprit de l’évangile et l’amour de Jésus Christ. Jésus nous dira à la fin du monde : « Bon et fidèle serviteur, parce que tu as été fidèle dans les petites choses, je t’établirai sur des plus grandes. Entre dans la joie de ton maître » (Math. 25, 23).
    Il nous suffit dans tout cela de suivre l’exemple de Jésus qui partageait la vie des gens, mangeait avec eux, allait de village en village et accueillait tout le monde. Jusqu’à maintenant, même les gens déchristianisés, ont confiance dans les religieux et les religieuses. Ne décevons pas cette confiance. C’est un talent que le Seigneur nous a donné, nous devons le faire fructifier (Mat 25, 14-30).

  6. Beaucoup d’entre nous ont fait des études sociales et ont reçu une formation en ressources humaines. Nous devons mettre cette formation et cette expérience au service de tous, en particulier des touristes. Ne pas l’enfermer dans les seules œuvres ou activités de notre communauté, ni dans les seules activités de la paroisse. Ce n’est pas dans les synagogues ou au temple de Jérusalem que Jésus a été chercher ses apôtres, mais bien dans la vie de tous les jours, quand ils revenaient de la pêche ou de leur travail.
    Pour les religieux prêtres, le tourisme est un appel à nous engager dans de nouveaux secteurs de vie et dans toutes les branches de la société, pas seulement à être prêtre de paroisse.

  7. Ce secteur du tourisme n’est qu’un exemple d’engagement possible pour nous, et des appels que le Seigneur nous adresse aujourd’hui. Nous avons le même type de réflexion à faire, pour nous engager dans tous les autres secteurs de la vie et toutes les autres branches de la société, avec le même esprit et les mêmes orientations.

P. Armel Duteil, spiritain, missionnaire au Sénégal
Tel : 00 221 77 960 93 07. Mail : armelduteil@hotmail.fr