Nous connaissons la parabole des talents (Mat 25, 14-30). Dieu ne fait pas de différence entre ses serviteurs. Il récompense aussi bien celui qui a gagné cinq talents, que celui qui n’en a gagné que deux. Du moment que chacun a fait ses efforts. Cette parabole nous montre donc que Dieu nous a donné des talents. Mais que notre joie et notre avenir, c’est de les faire grandir. Cela nous demande donc de travailler. Cela nous pose aussi la question : Comment gagnons – nous notre argent ? Et comment l’utilisons-nous ? Le Royaume de Dieu c’est aussi un Royaume d’amitié et de partage, d’amour et aussi de justice. Pour l’argent, comme pour les autres choses de notre vie.
1- Cette parabole, Jésus Lui-même l’a mise en pratique. Il a voulu être homme et connaitre toute notre vie d’homme, depuis la naissance jusqu’à la mort. Il grandissait en sagesse et en âge depuis son enfance (Luc 2,52). Jésus a travaillé. Il a gagné son argent par son travail de menuisier. Il a demandé à Pierre d’aller pêcher, pour payer l’impôt Tu temple, pour Pierre et pour Lui-même. Jésus a toujours mené une vie simple. Il disait lui-même : « les oiseaux ont leur nid. Mais moi je n’ai pas de maison. Je n’ai même pas une pierre, sur laquelle poser ma tête pour dormir la nuit ». C’est la vie de Jésus qui est notre modèle et notre soutien, dans le travail et dans tous les problèmes d’argent. De même Paul disait : » je n’ai demandé l’aide de personne, pour annoncer l’évangile. J’ai travaillé de mes propres mains pour gagner ma vie » (pour cela il faisait des tentes).
2- Mais pourtant, Jésus a dit : « vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’argent » (Matthieu 6,24) ! Un proverbe dit : « l’argent est un bon serviteur, mais un mauvais maitre ». Le problème c’est donc de savoir comment nous servir de l’argent que nous gagnons. Pour le mettre à notre service, mais aussi au service des autres. Je travaille pour nourrir ma famille. Le travail et l’argent que je gagne me permet aussi d’aider les gens qui sont autour de moi. Pas seulement par l’aumône, mais en travaillant pour eux et avec eux. J’ai aussi le souci de travailler pour l’Eglise et pour notre pays. Avec l’argent que je gagne et par mon travail je peux lancer des projets, des activités économiques, des ateliers, des sociétés et des entreprises. Cela donnera du travail à de nombreuses personnes. C’est cela qui développe et fait avancer le pays. Mais à condition de se servir de l’argent pour faire avancer les choses, pour aimer et pour aider. Et non pas servir l’argent et devenir son esclave et de ne vivre que pour l’argent, en cherchant en avoir toujours d’avantage. D’abord cela m’empêche de vivre dans la paix, car je cherche à avoir toujours plus. Cela m’empêche d’être libre, à la fois pour servir Dieu et pour servir les autres. Comme le dit cet autre proverbe : « il faut manger pour vivre, mais pas vivre pour manger ». Car si tu vis pour l’argent, d’abord tu n’en auras jamais assez. Tu vas devenir esclave de l’argent. Tu perdras toute liberté, toute paix et toute joie.
3- Mais il y a tous les pauvres et les nécessiteux. Tous ceux du secteur informel. Tous les « goorgoorlu ». Ceux qui doivent chercher jour après jour, ce qui est nécessaire pour vivre. Ils sont nombreux et cela les empêche d’être heureux, et même de vivre d’une façon humaine. Alors comment comprendre cette parole de Jésus : « ne vous faites pas de soucis pour votre vie. Votre père du ciel sait ce dont vous avez besoin. Cherchez d’abord le royaume de Dieu et sa justice, et vous aurez tout le reste en plus ».
Dans cette parole, Jésus ne nous dit pas de rester à rien faire. Et encore moins d’être paresseux. Comme Lui, nous devons travailler pour gagner notre vie. Et nous avons le devoir de nous former et d’apprendre un métier, pour être capable de gagner notre vie par nous-mêmes. C’est cela notre dignité. Mais en même temps, Jésus nous demande de faire confiance à Dieu notre Père, dans notre travail comme dans toutes nos autres activités. De penser à Dieu, et aussi de penser à nos frères et à nos sœurs. Ne pas penser seulement à l’argent.
4) Lorsque nous travaillons, nous cherchons d’abord le Royaume de Dieu et sa justice. Dans le travail et au sujet de l’argent, il y a beaucoup d’injustices. Certains sont riches, parce qu’ils ont beaucoup travaillé. D’autres sont riches en profitant de leurs travailleurs et en les payant mal. D’autres en volant, ou en détournant l’argent. D’autres par la corruption. Il est clair que Dieu ne peut pas bénir un argent qui est gagné de cette façon-là. Donc si nous cherchons vraiment le Royaume de Dieu et sa justice, nous cherchons à gagner et à utiliser notre argent comme Dieu le veut.
Et nous luttons contre toutes les mauvaises choses qui se font dans le travail : les manques d’entente, les mensonges et les méchancetés. Les jalousies. Le maraboutage pour prendre la place des autres. Les relations sexuelles pour avoir une bonne place, etc…
Cela veut dire aussi que nous sommes prêts à faire avec courage le métier que nous pouvons avoir, même un petit métier. En faisant tous nos efforts et tout notre possible. Sans rêver à travailler obligatoirement dans un bureau, ou être fonctionnaire. Ce sont les petits métiers qui font vivre et grandir notre pays. Et si nous avons la chance d’avoir un bon métier et de bien gagner notre vie, nous respectons ceux qui travaillent dans le secteur informel, car ils sont très courageux. Ils travaillent très dur pour gagner très peu d’argent. Comme ces mamans qui passent toute la journée au marché pour vendre des petits produits pour payer l’école pour leurs enfants. Comme les apprentis et les artisans qui doivent se débrouiller pour avoir de quoi vivre d’une façon très simple. Comme les paysans qui travaillent en plein soleil, sans que leur production soit payée à un prix juste. Sans oublier les chômeurs, qui ne trouvent même pas de travail.
Donc s’il le faut, commençons par un petit métier que nous pouvons faire. A partir de là, nous cherchons à nous former davantage, à la fois pour grandir nous-mêmes, mais aussi pour rendre plus heureux notre famille et ceux qui nous entourent. A ce moment-là, nous pourrons lancer des activités pour aider les plus petits, les plus fragiles et les plus pauvres.
Cela pose aussi la question de l’avenir de notre société. Nous nous préparons aux prochaines élections municipales. Comment allons-nous choisir nos candidats ? Allons-nous chercher des gens qui sont vraiment des travailleurs, et qui vont chercher à donner du travail aux autres pour faire avancer notre pays. Et d’abord bien sûr des gens qui sont honnêtes. Car encore une fois, l’argent est nécessaire pour vivre, mais comme le dit cet autre proverbe « l’argent ne fait pas le bonheur ». Et encore moins pour faire le bonheur des autres, de ceux dont nous avons la responsabilité, ni du pays tout entier..
5- Chercher d’abord le royaume de Dieu et sa justice, cela veut dire aussi accepter notre pauvreté. Comme Jésus le dit « heureux ceux qui ont un cœur de pauvre, le Royaume de Dieu est à eux ». Avoir un cœur de pauvre qu’est – ce que c’est ? C’est accepter notre pauvreté de tout notre cœur, dans la paix. Et non pas mettre notre cœur dans l’argent. Il y a des gens qui sont pauvres, mais qui ne pensent qu’à l’argent. Ils ne peuvent pas vivre en paix ? Ni réussir leur vie. Le Pape François a beaucoup insisté dans sa lettre « loué soit tu « sur la nécessité de vivre une vie simple. Pas seulement pour nous-mêmes, mais pour l’avenir de la terre et de tous les hommes. En effet, en cherchant à avoir de plus en plus d’argent, de machines et de matériel pour être à l’aise, nous sommes en train de tuer notre terre. Et aussi ses habitants. Nous abattons la forêt amazonienne qui fait respirer tout notre terre, et supprime le carbone qui réchauffe la terre. Et elle nous redonne l’oxygène dont nous avons besoin. Pourquoi abattons-nous cette forêt d’Amazonie ? Et pourquoi nous tuons surtout les populations indiennes qui y vivent, sans hésiter à les faire mourir de faim ? C’est pour avoir des terrains pour produire du soja, qui va servir à nourrir les animaux en Europe. Et donc pour avoir avantage de viande alors que nous savons que manger trop de viande est mauvais pour notre santé.
Ici au Sénégal, il y a de plus en plus d’usines qui viennent prendre des poissons que normalement la population mange, pour en faire de la farine, et nourrir les poissons cultivés dans les piscicultures en Europe. Pour nourrir des pays riches, on prend la nourriture des gens qui sont déjà n’ont pas assez à manger. Dieu ne peut pas accepter de telles choses. Ce n’est pas cela la justice du Royaume que Dieu nous demande. Et déjà nous-mêmes dans nos pays pauvres nous sommes responsables. Nous faisons avancer le désert par nos feux de brousse. Nous coupons de plus en plus d’arbres, ce qui est nécessaire. Mais nous ne plantons pas d’autres arbres pour les remplacer. Et nous ne protégeons pas les arbres, que nous avons plantés. Il y a de moins en moins de poissons dans la mer, il n’y a plus d’animaux dans la brousse. Nous-mêmes, nous cassons notre terre, nous la salissons avec nos ordures, nous la polluons avec nos usines, nos voitures et toutes nos activités. Nous devons absolument diminuer notre consommation, et lutter contre la société de consommation. Sinon nous allons tuer notre terre, et tous mourir avec elle. Il s’agit donc de travailler, et de gagner notre argent d’une façon juste. Ne pas mettre notre cœur dans l’argent, mais dans le partage, l’amour de nos frères et la confiance en Dieu. Et de vivre une vie simple en respectant la terre, la création que Dieu nous a donnée, et dont nous sommes responsables.
1- Sans argent peut-on vivre heureux dans le monde ?
Sans le minimum d’argent, bien sûr, nous ne pouvons pas vivre, nous allons mourir de faim. Mais à l’inverse, est ce que l’argent suffit à nous rendre heureux ? Rappelons-nous l’histoire du jeune homme riche (Luc 18,18). Il vient demander à Jésus : « Bon Maitre, qu’est – ce que je dois faire pour avoir la vie éternelle ? ». Que faire pour être d’abord heureux sur cette terre, et pour être heureux pour toujours dans le ciel ? Nous connaissons la réponse de Jésus. La première, respecte les commandements. L’un des commandements nous dit : » tu honoreras ton père et ta mère ». Nous devons travailler pour nos parents, en particulier nos vieux parents. Il y a des gens en ville qui ont de très bons salaires, qui dépensent tout leur argent, et qui oublient complétement leurs parents qui sont au village, et qui n’ont pas de quoi vivre. Un autre des commandements c’est : « Tu ne voleras pas ». Nous devons donc gagner notre argent dans l’honnêteté : gagner un argent juste. Dès la création, Dieu disait à Adam : » tu gagneras ton pain à la sueur de ton front ».
Quand le jeune homme riche dit à Jésus : je garde tous ces commandements depuis ma naissance, Jésus lui dit : « Va, vends ce que tu as et donne le aux pauvres ». L’argent que nous gagnons, c’est grâce à nos efforts, mais c’est aussi grâce à Dieu. Il s’agit donc de rendre grâce à Dieu, de Lui dire merci. Et ensuite, à cause de Dieu et comme Dieu nous le demande, d’utiliser notre argent pour aider les pauvres, comme le dit ce proverbe : » celui qui donne aux pauvres, il prête à Dieu « (Dieu te le rendra). Mais nous devons comprendre aussi, comment aider les pauvres. Il ne suffit pas de faire l’aumône. Nous connaissons cet autre proverbe : » j’ai faim, ne me donne pas à manger, mais apprends-moi à pêcher ». Car si tu me donnes à manger, dès le soir ma nourriture sera terminée, je serai toujours aussi pauvre, et j’aurai faim à nouveau. Si tu m’apprends à pêcher, je pourrai gagner ma nourriture par moi-même. Ce sera ma dignité. Aider les pauvres, c’est donc d’abord les respecter, car ils sont enfants de Dieu comme moi. Nous les accueillons et nous les écoutons. Car ils ont beaucoup de choses à nous apprendre, même s’ils n’ont pas beaucoup d’argent. Ils savent vivre courageusement, malgré leurs problèmes. Malgré leur pauvreté, ils savent garder leur dignité. Très souvent ils partagent ce qu’ils ont.
Pour aider les pauvres nous ne venons pas avec nos idées, ou avec nos projets, pour qu’ils fassent ce que nous avons décidé pour eux. Ce sont eux qui connaissent les meilleures choses à faire pour sortir de la pauvreté, parce que ce sont eux qui vivent la pauvreté. Si nous voulons aider les pauvres, nous leur proposons une formation Et ensuite, nous leur donnons les moyens de travailler par eux-mêmes. Mais d’abord, il s’agit de les écouter, de leur demander de nous dire qu’est-ce que eux même veulent faire pour sortir de leur pauvreté. C’est eux qui vont trouver les meilleurs moyens pour cela.
La valeur de l’homme ne dépend pas de son argent ou de sa richesse. Pour nous les chrétiens, notre richesse, c’est la parole de Dieu, c’est l’évangile. C’est le Saint Esprit que Jésus a mis dans nos cœurs. Notre richesse, c’est l’amour de Dieu et l’amour de nos frères et de nos sœurs. Et toutes les bonnes choses que nous faisons pour eux.
Revenons au jeune homme riche. Jésus lui dit « quand tu as donné ce que tu possèdes aux pauvres, viens et suis moi ». Pour être heureux il ne suffit pas d’avoir beaucoup d’argent. C’est Jésus qui peut nous rendre heureux. Etre heureux c’est donc le servir dans toute notre vie. Et aussi de servir les pauvres avec lui, comme lui et à cause de lui. Avec l’argent que nous avons dépensé en suivant Jésus, nous aurons le vrai bonheur. Car Jésus nous demande justement d’aider les pauvres, et de construire un monde de justice : un monde où chacun pourra avoir du travail, gagner son argent par lui-même et avoir une vie digne et honorable.
Par exemple : « malheur à vous les riches car vous avez déjà votre consolation. Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu » (Mat 15,24). Que veulent dire ces paroles ? Jésus disait ces paroles en particulier aux pharisiens qui mettaient leur dignité dans l’argent, et qui méprisaient les pauvres les petits, Nous connaissons la parabole du pharisien et le publicain. Le pharisien qui méprise ce pauvre publicain (Luc 18,10). Rappelons-nous Simon le pharisien (Luc 7,36) : c’était un homme qui priait beaucoup, qui jeûnait, qui faisait l’aumône. Il invite Jésus à manger, mais il reste attaché à son argent et à la fausse « dignité » que cela lui donne. D’abord Simon méprise Jésus en disant : » si Jésus était vraiment un prophète, il ne se laisserait pas toucher par cette prostituée. Et il méprise cette pauvre femme qui est une femme de péché. C’est tout le contraire de l’attitude de Jésus, qui voit sa dignité de fille de Dieu, malgré son péché. Il dit à Simon : » tu vois cette femme. Elle a beaucoup péché. Mais il lui sera beaucoup pardonné, parce qu’elle a beaucoup aimé ». Jésus ne regarde pas son péché, mais il voit sa volonté d’aimer et de changer sa vie. Il voit tout l’amour qu’elle a pour Lui.
Pourquoi Jésus est-Il sévère avec les riches ? C’est parce que souvent les riches oublient Dieu Ils veulent avoir de plus en plus, et peu à peu ils se laissent corrompre. Pour avoir de l’argent, ils utilisent des moyens de moins en moins honnêtes. Ils s’enfoncent dans la corruption. Ils deviennent orgueilleux et ils méprisent les pauvres, au lieu de les aider à vivre et à s’en sortir.
Cela ne veut pas dire que Jésus rejette et condamne tous les riches. Au contraire, il va manger chez Zachée (Luc 19), alors que la foule et même ses apôtres sont contre lui. Ils disent : » Zachée est un voleur : il récupère l’impôt pour le donner aux romains nos colonisateurs. Il nous exploite. Et en plus il vole la moitié de l’argent qu’il récupère ». Mais Jésus ne les écoute pas, Il ne condamne pas Zachée. Au contraire, il va manger chez lui. A ce moment-là, Zachée va pouvoir se convertir et changer de vie. Il dit : « l’argent que j’ai, je vais en donner la moitié aux pauvres «. Et il va encore plus loin. Il ajoute : » si j’ai été injuste envers quelqu’un, je vais le payer quatre fois ». Donc il laisse son injustice et l’amour de l’argent, après avoir rencontré Jésus. C’est cela notre responsabilité : comme Jésus, ne pas condamner les riches, mais les aider à réfléchir et à changer leur vie, leur apprendre à partager et à rendre les autres plus heureux. Et savoir que s’ils s’attachent à l’argent, bien sûr ils seront heureux sur terre : ils auront de nombreux plaisir. Mais ils auront déjà reçu leur consolation, comme Jésus le dit. Il ira plus loin en s’adressant à l’homme riche qui a fait une très bonne récolte et qui dit : » aujourd’hui je n’ai plus de place dans mes greniers. Je vais construire des greniers encore plus grands pour conserver mes récoltes ». Dieu lui dit : « Tu n’es pas intelligent, car aujourd’hui Dieu va t’appeler. Et tout ton argent tu le laisseras après toi ». Nous ne pouvons pas apporter notre richesse avec nous. Alors soyons intelligents, réfléchissons, partageons notre argent, utilisons le temps que nous sommes vivants sur cette terre pour aider tous ceux qui en ont besoin.
Il y a une fois un homme riche. Il s’habille avec les plus beaux habits, ceux qui coûtent le plus cher. Il vit chaque jour dans le luxe, il fait de très bons repas. Un homme pauvre appelé Lazare est couvert de plaies. Il reste couché devant la maison du riche. Il voudrait bien manger des morceaux, qui tombent de la table du riche. En plus, les chiens viennent lécher ses plaies. Le pauvre meurt. Les anges le portent à côté d’Abraham, dans le ciel. Le riche meurt aussi, et on l’enterre. Le riche souffre beaucoup dans le monde des morts. Il lève les yeux. Il voit au loin Abraham, et Lazare à côté de lui. Alors il crie : « père Abraham, aies pitié de moi. Envoie Lazare tremper le bout de son doigt dans de l’eau, pour venir me rafraîchir la langue. Car je souffre beaucoup dans ce lieu ». Mais Abraham lui répond : « souviens-toi, que tu as reçu beaucoup de choses, pendant ta vie. Lazare lui, il n’a eu que des malheurs. Maintenant ici, il est consolé. Pendant que toi, tu souffres. De plus, il y a un grand trou, entre nous et vous. C’est pourquoi, ceux qui voudraient passer d’ici pour aller chez vous, ils ne le peuvent pas. Et l’on ne peut pas non plus venir chez nous, depuis là où tu es ». Alors le riche dit : » père, je te demande d’envoyer Lazare, dans la maison de mon père, là où j’ai cinq frères. Qu’il aille les prévenir, pour qu’eux aussi, ils ne viennent pas dans ce lieu de souffrance ». Abraham répond : » tes frères ont Moïse et les prophètes, pour les conseiller. Ils n’ont qu’à les écouter ». Le riche répond : »Père Abraham, cela ne suffit pas. Mais si quelqu’un revient de chez les morts pour les trouver, alors ils changeront de vie ». Abraham lui dit : « s’ils ne veulent pas écouter Moïse et les prophètes, ils n’écouteront pas, même si un mort redevient vivant ».
« Seigneur apprends-nous à voir les pauvres qui sont autour de nous »
Cette histoire du riche et du pauvre Lazare est claire. Quelles conclusions en tirer ! D’abord nous voyons que le pauvre a un nom, Lazare. Le riche lui on ne connait pas son nom. Pourquoi cela ? C’est parce qu’il ne faisait pas attention aux autres, autour de lui. Il ne connaissait pas le nom de ceux qui l’entourent. Si tu ne connais pas le nom de tes frères, tu perds ton propre nom devant Dieu, et devant les autres. Tu n’es plus une personne humaine. Car l’homme est fait pour vivre avec les autres. L’homme, ce n’est pas seulement l’argent. C’est l’amitié. Pourquoi le riche n’a pas de nom dans cet évangile ? Un ami, on l’appelle par son nom. Mais les riches sont souvent trop pris, par l’argent et la recherche du pouvoir. On ne connait pas leur nom. On dit : c’est le Directeur, c’est le Président ou le Secrétaire général. Ou bien c’est celui qui a la belle voiture rouge, ou la maison à étage la plus belle du quartier. Ils ont beaucoup de choses, mais ils n’ont pas de nom. Ils sont devenus eux-mêmes une chose, un numéro de compte à la banque. Rappelons-nous ce que Jésus nous a dit sur l’argent, dans l’Evangile de ces derniers dimanches.
La leçon de cette histoire est claire : DIEU nous demande de faire attention aux pauvres, qui sont autour de nous. Et de tout faire, pour les aider. Pensons à ce que dit Abraham : « tu as eu beaucoup de bonheur dans ta vie, Lazare a eu beaucoup de malheurs. Maintenant DIEU le console. Et c’est toi qui souffres ».
Nous remarquons qu’Abraham n’attaque pas les riches. Il appelle même le riche « mon enfant ». Il dit seulement ce qui se passe, avec les conséquences, qui arrivent obligatoirement. Il ne suffit pas de dire : « DIEU m’aime, je suis son enfant. DIEU est bon, Il me pardonnera ». Nous ne pouvons pas faire n’importe quoi dans la vie. Notre façon de vivre a obligatoirement des conséquences, pour nous mais aussi pour les autres. Abraham ajoute : « En plus, il y a un grand trou, entre nous et vous. Aussi, celui qui voudrait aller vers vous, il ne le pourrait pas». Il faut réfléchir à ce que nous faisons. Car sinon après, c’est trop tard : on ne peut pas revenir en arrière. Si nous voulons être Vraiment heureux, vivons comme Jésus nous l’a montré. On ne peut pas vivre, en pensant seulement à nous-mêmes, et ensuite prier Dieu pour être sauvé.
Il nous faut aussi apprendre à écouter, les appels que DIEU nous adresse, dans notre vie. Là encore, Abraham est clair : « s’ils ne veulent pas écouter Moïse et les prophètes, ils ne croiront pas, même si un mort revient à la vie ». Trop souvent, nous attendons que DIEU fasse des miracles pour nous. Nous attendons des signes extraordinaires. Nous voulons des rêves, des paroles mystérieuses et des révélations. Mais nous avons déjà l’Evangile, qui est la Parole de DIEU. Il ne faut pas attendre des choses en plus : l’Evangile nous suffit, pour conduire notre vie. A condition de l’écouter, d’y repenser dans notre cœur, de le prier et de le mettre en pratique. N’attendons pas des signes spéciaux de DIEU. Protection, bénédiction, signe, aide, assistance. JESUS nous a donné un signe qui dépasse tous les autres : c’est celui de SA RESURRECTION. Et Il nous a dit : « vous ne recevrez pas d’autres signes, que celui de Jonas » (Mt 12,39). A nous de prendre nos responsabilités. Et de savoir ce que nous voulons faire, dans notre vie.
Il nous faut bien comprendre, que ce riche n’était pas mauvais. Il n’insultait pas le pauvre Lazare. Il ne l’avait pas chassé. Il ne l’avait même pas vu ! C’est cela, le grand péché : ne même pas voir, ceux qui souffrent autour de nous. Penser seulement à nous-mêmes. Bien sûr, il pense à ses 5 frères, pas aux autres Mais Jésus est venu ouvrir notre cœur. Il nous demande d’aimer tous ceux qui nous entourent, surtout les pauvres, ceux qui souffrent, et ceux qui ont besoin de nous. Et pas seulement nos parents. Cela nous arrive souvent. Nous ne voyons même pas, ceux qui souffrent autour de nous. Aimer les autres, c’est d’abord ouvrir les yeux. Et voir ce qui se passe autour de nous, pour connaitre les souffrances de nos frères et de nos sœurs.
Le pauvre Lazare n’est pas parfait. Il est certainement pécheur, lui aussi. Mais il a beaucoup souffert. Et Dieu ne veut pas que les hommes souffrent. « C’est pourquoi, maintenant il reçoit sa consolation ». C’est cela que Jésus nous demande : consoler ceux qui pleurent, aider ceux qui souffrent
-Bien sûr, cette parabole n’est pas seulement pour les chrétiens. Elle est pour tous. Nous cherchons à la partager, avec tous ceux qui nous entourent. En particulier avec nos frères et sœurs musulmans, qui sont enfants d’Abraham comme nous. Et qui eux aussi, connaissent Moïse et les prophètes. Les aider nous donner
-Enfin, cet Evangile nous rappelle que, c’est vrai, il y a bien une vie après la mort. Et que Dieu nous consolera de toutes nos tristesses, et de tous nos malheurs. Mais déjà, qu’est-ce que je fais maintenant, pour consoler ceux qui pleurent et qui souffrent, autour de moi.
« Merci Seigneur, de consoler ceux qui pleurent et qui souffrent »
En résumé, nous avons besoin d’argent pour vivre, cet argent doit être propre. Nous devons donc travailler pour le gagner. Et nous demander comment nous le gagnons, et aussi comment nous l’utilisons et le dépensons. En nous rappelant que cet argent, même si nous l’avons acquis par nos propres efforts, c’est aussi grâce à Dieu. Donc il faut l’utiliser comme Dieu le veut, dans l’amour et le partage, à la suite de Jésus Christ l’ami des pauvres et des petits. Jésus nous rappelle que l’argent est nécessaire, mais que l’argent ne fait pas le bonheur. Au contraire, il risque de nous détourner aussi bien de Dieu que de nos frères et sœurs, et du développement du pays. Et même d’oublier nos propres parents. Jésus nous appelle à être pauvre, de cœur (Mat 5,3-12), à accepter notre pauvreté de tout notre cœur, et à ne pas mettre notre cœur dans l’argent. Pour mener une vie simple, une vie de partage. Pour nous mettre à l’écoute et au service des pauvres. Et pour ne pas tuer la Création, ce monde que Dieu nous a confié dans sa bonté. Pour vivre en vérité ces paroles de Jésus Christ au jeune homme riche : « tu gardes déjà les commandements. Si tu veux être parfait, donne ce que tu as aux pauvres, puis viens et suis moi ».
Que pensez–vous des dépenses de prestige et de gaspillage lors des cérémonies, en particulier de sacrements ?
Quand on est heureux on cherche à faire la fête, pour partager sa joie avec les autres. C’est normal. Mais si nous sommes enfants de Dieu, sœurs et frères de Jésus Christ et conduis par l’Esprit Saint nous ne pouvons pas faire la fête n’importe comment. Je ne cache pas que je suis absolument scandalisé, par la façon dont un certain nombre de chrétiens célèbrent les sacrements ici au Sénégal. En effet, on a l’impression que lors de ces fêtes se tient une véritable concurrence : on cherche à se montrer plus riche, et à faire mieux que les autres. Et ce sont les dépenses inutiles de prestige, ou l’on minimise et abaisse ceux qui n’ont pas les moyens.
Cela entraîne des dépenses énormes qui ont des conséquences graves sur la vie des familles. Elles ont ensuite des dettes qu’elles ne peuvent pas rembourser. Elles ne peuvent plus répondre à leurs responsabilités, ni même nourrir normalement leurs enfants, payer les frais d’école, ou les soigner si l’un d’entre eux tombe malade. La conséquence, c’est d’abord une véritable déformation des sacrements. Cela ne devient plus un temps de grâce, ni d’action de grâces. On ne pense pas à ce que nous avons vécu lors du sacrement, la vie nouvelle que le Seigneur nous a apporté, et cette communion qu’il met entre nous. On ne pense plus qu’aux repas et aux cadeaux. On ne pense plus au Seigneur. Où est le respect du sacrement dans cela ?
C’est aussi une déformation grave de notre vie chrétienne. Jésus nous dit : » heureux les pauvres de cœur, le Royaume des cieux est à eux ». Mais en ce jour on ne pense pas à partager. On fête la première communion, mais il n’y a pas de vraie communion dans notre communauté chrétienne. Et le repas se termine parfois lorsque l’on a trop bu, par des disputes et des manques de respect. Cela est vraiment très grave.
De même, si l’on reçoit le baptême, c’est pour entrer dans l’Eglise, la famille des enfants de Dieu. Une Eglise qui doit être au service des pauvres et des petits, et au service du Royaume de Dieu : un Royaume d’amitié, de partage et de communion. Si cette communion n’existe pas avec les autres, quel sens peut avoir la communion que l’on reçoit dans l’eucharistie ?
Cela a des conséquences graves. De nombreuses personnes n’ont pas le courage de célébrer le sacrement de mariage, parce qu’ils n’en n’ont pas eu les moyens, quand ils voient comment au cours de ces mariages et les jours qui suivent, il y a tant de dépenses : il faut aller dans un grand restaurant, avec des tas de dépenses inutiles. Ces gens qui se marient en faisant une grande fête, ils empêchent les plus pauvres de se marier, parce qu’ils n’nt pas les moyens de faire une telle fête. Cette fête n’est pas absolument pas nécessaire, ni demandée par l’évangile. Elle serait plutôt inutile et même condamnable.
On doit reconnaitre que les religieux et les religieuses font eux aussi la même chose. Il y a aussi des dépenses de prestige pour se montrer lors des ordinations des prêtres, des premières messes d’action de grâces dans des villages ou des professions religieuses.
On retrouve cela même au moment des enterrements. Bien sûr, si un de nos frères ou de nos sœurs est décédé, nous allons à la veillée, à la messe d’enterrement et au cimetière, c’est normal. Et aussi d’aller présenter nos condoléances. Mais le problème, c’est qu’au moment de ces condoléances, on attend de recevoir de la boisson, et d’avoir un repas. Et ceux qui viennent d’ailleurs n’hésitent pas à rester plusieurs jours se faire nourrir par la famille en deuil. Et ils ne cherchent pas à prier avec eux, à les encourager, ni à voir comment vivre ce temps de deuil dans la foi, et surtout continuer à prier pour celui qui est mort. On ne pense même pas à lui, on a des conversations inutiles sur des sujets qui n’ont aucune valeur, en attendant qu’on nous fournisse à nouveau un repas. C’est pour cela que je suis non seulement scandalisé, mais découragé.
Les CEB, elles non plus, ne font pas leur devoir. Si la famille le demande, elles animent la veillée mortuaire. Mais souvent elles s’arrêtent là. Alors qu’il y a souvent des problèmes, des disputes et des injustices au moment du deuil. Sans parler des sacrifices traditionnels et autres cérémonies païennes. Puisqu’on les a demandé pour la veillée et la messe d’enterrement, est-ce qu’elles ne devraient pas aussi aider, pour voir comment vivre le deuil dans la foi. Et comment soutenir les orphelins, et prendre en charge la veuve ? Et même, comment s’entendre pour l’héritage ? Et les jours suivants envoyer au moins deux ou trois membres de la CEB pour prier avec la famille en deuil, les conseiller et les encourager ?
Dans la dernière paroisse où j’ai travaillé, nous avons cherché d’autres solutions. Par exemple au moment des mariages. D’abord à faire les mariages en commun. Pas seulement pour partager les frais, mais d’abord pour célébrer ensemble dans la joie, après s’être préparés ensemble au sacrement. Ensuite, en proposant après la célébration du mariage de se retrouver ensemble dans la salle paroissiale, pour faire une fête simple, dans la joie et dans la simplicité, et même si possible sans alcool, simplement avec des jus naturels comme le bissap et du bouy. Pour chanter et danser à partir d’un magnétophone, dans la simplicité et dans la joie. Malheureusement la plupart du temps, les mariés et surtout la famille de la mariée ont refusé, tenant à faire leur propre fête à part avec leur propre repas avec de plus grandes dépenses. De même, après trois ans de catéchèse ensemble, pourquoi les nouveaux baptisés ne fêtent-ils pas leur sacrement ensemble ?
Les prêtres et les évêques nous ont déjà donné des tas conseils à ce sujet, mais on n’a pas pris cette question au sérieux. Parce qu’on ne prend pas le problème de la pauvreté et du sous-développement au sérieux, et que l’on ne prend pas l’amour et le respect des pauvres au sérieux. Il est temps que nous réfléchissions, et que nous changions nos façons de faire. Pas seulement nos coutumes païennes traditionnelles, mais surtout nos coutumes païennes modernes actuelles, qui ne sont pas chrétiennes, même si nous les vivons à l’occasion des sacrements.