Armel Duteil

Non violence


Déguerpissement

 

Opération désencombrement de la cite « imbécile »

Dakar, 5 juillet 2023

Nous avons appris par la presse (voir par exemple Le Soleil des lundi 3 juillet 2.023, page 12 et mardi 4 juillet page 14 ( LS 3 et 4) et l’Observateur du 3 juillet, pages 8 (Obs 8) et 9 (Obs 9). Sous le titre, la démolition de la cité « Imbécile » : Une opération de salubrité publique qui vire au drame social. (Obs 8). Déjà, le nom attribué à ce quartier nous montre combien ses habitants étaient méprisés et humiliés, dans le rejet de tout respect et de toute dignité.

On nous présente ce quartier comme un lieu de « banditisme de grand chemin, de prostitution et d’usage et vente de drogue « (Obs 8). Mais qu’ont fait les services sociaux pour assainir le quartier ?

Mais on nous parle aussi de « mécaniciens, de vendeuse de poisson présente depuis 12 ans, d’une boutique de vêtements et de Mbaye Sène qui a perdu 11 millions dans sa boutique sans compter les marchandises « (LS 4). Il n’y avait donc pas que des délinquants ! La cité a été entièrement rasée. Tous les habitants ont tout perdu. Pas seulement les marchandises et l’argent, mais aussi leurs papiers. « Une mère de 5 enfants a été tirée du lit par les forces de l’ordre, le dimanche. Elle a eu juste le temps de prendre ses enfants et de sortir… Nous n’avons rien mangé depuis deux jours. Nous voulons juste récupérer nos affaires ».

L’opération a été menée par la Direction de la lutte contre les encombrements du Ministère de l’Urbanisme. Est-ce que personnes chassées sont des objets encombrants ou des personnes humaines ?

Les déguerpis se sont plaints de ne pas avoir été avertis à l’avance pour se préparer et préparer leurs bagages. Le ministère de l’Urbanisme a répondu que « ce n’était pas une obligation, car ces gens squattaient illégalement la voie publique et des domaines privés…Si on les avait avisés, cela allait prendre une autre allure. Nous sommes intervenus à 4 heures du matin pour les prendre au dépourvu « (LS3)

Pape Faye était parti à Fatick dans sa famille pour la Tabaski. A son retour, il ne retrouve plus rien : « Je ne veux qu’une seule chose : récupérer mes affaires. Mais les forces de l’ordre disent que nous n’avons pas le droit d’entrer « (LS4). On peut s’étonner que cette action ait été menée juste après la Tabaski, fête de la foi, du sacrifice d’Abraham et de grandes prières.

Khady Diouf raconte : « J’ai voulu prendre mon sac à main avec mes papiers. Un gendarme me hurle dessus : Jetez le sac. Vous n’allez rien emporter. Mon mari est gêné de me voir ainsi traitée, dehors avec mon bébé dans les bras, alors que je porte juste ma robe de nuit. Nous sommes embarqués de force dans un bus Dakar Dem Dikk et tenus en respect par les forces de l’ordre ». (Obs 9)

« Certains pleuraient, d’autres rouspétaient à haute voix pour dénoncer le traitement qui leur était réservé, pendant que la voix des muezzins invitaient les fidèles à la prière. Nous sommes acheminés comme du bétail conduit à l’abattoir ... Il fallait hurler pour se faire entendre. Aucune facilité n’a été prévue. Ce fut un véritable calvaire pour se restaurer. Nos parents ont eu toutes les difficultés du monde pour nous envoyer des sachets d’eau » (Obs 9).

Un conducteur de taxi est sidéré d’y découvrir « sa mère de 75 ans et son beau-père qui vivaient à la cité « Imbécile » au milieu d’honnêtes gens… Elle tenait à peine sur ses deux pieds et a été obligée de rester sous le soleil sans aucune assistance » (Obs 9).

Nous sommes sidérés et révoltés de voir la façon dont ces personnes ont été traitées sans respect de leur dignité, dans un pays qui se dit le pays de la Téranga, un pays de croyants et qui a signé la Déclaration Universelle des Droits de L’homme. Nous demandons avec insistance que les forces de l’ordre et les autres responsables de l’ordre public soient formés pour que de tels comportements ne se renouvellent pas.

Et qu’il y ait davantage d’humanité et de respect des personnes, en particulier des marginalisés et des plus faibles : les petits de la société, les étrangers, les chômeurs, les talibés et les enfants dans la rue, les apprentis, les petits métiers et tous les travailleurs du secteur informel.

Déguerpissement (suite) :

Nous lisons dans le même journal national « Le soleil » du 4 juillet 2.023 : « Les occupants d’un grand immeuble déguerpis ». ‘ Un tas de bagages sont superposés : des sacs, des valises, des seaux, des bassines, des matelas…Les habitants de cet immeuble ont reçu la visite surprise des gendarmes, qui ont déguerpis tous les occupants. Des hommes et des hommes s’empressent de sauver ce qui peut l’être avant le retour des gendarmes. Personne ne veut piper mot. Il ne faut pas filmer, avertit un occupant.

En effet, les opérations de démantèlement des quartiers flottants et des immeubles occupés illégalement continuent dans Dakar. Après la cité « Imbécile » dimanche dernier, les gendarmes étaient hier au quartier Maristes. Plus d’une centaine de personnes, toutes étrangères, vivaient dans cet immeuble sans électricité ».

Et bien sûr comme d’habitude, quand il s‘agit d’étrangers, un interlocuteur affirme : « l’immeuble est un refuge de bandits et de drogués « !!!

Le déguerpissement de la cité « Imbécile n’est donc pas une exception ou un hasard, il s’agit d’un programme élaboré à l’avance et tout à fait voulu.

La sous-commission Justice et Paix des religieux du Sénégal.

Les nouvelles qui nous sont arrivées, par les journaux, sur le soi-disant « désencombrement » de la très mal nommée « cité imbécile » sont effrayantes. Le communiqué de la commission Justice et Paix des religieux du Sénégal, rédigé à cet effet, est impactant. N’importe quel simple et honnête citoyen sénégalais sera bien choqué en le lisant.

Multitude de questions me viennent à ce propos :

-Qui peut avoir organisé une opération pareille ? La salubrité publique est au-dessus du respect des personnes humaines et de leurs biens ? Où sont-ils les droits des enfants, des mamans qui portent leurs petits, des vieillards ?

-Qui va restituer toutes les pertes abondantes qui ont laissé nombre de familles dans une pauvreté encore plus profonde ?

-Si dans un quartier existent la drogue, le banditisme, la prostitution… (et malheureusement, il y en a un bon nombre), faut-il terrasser jusqu’à supprimer toutes les habitations dudit quartier ? Où est-il le professionnalisme des agents de l’ordre public et de leurs responsables ?

Ce drame ne peut que provoquer l’indignation de toute personne honnête et croyante.

Et on se demande : quoi faire ? Les injustices sont déjà là, comment les réparer ?

D’abord, il faudrait demander des explications aux responsables. Nous sommes dans un pays démocratique et nous avons un parlement : il faut exiger les responsabilités. Et s’il y a des dédommagements à faire, les obliger.

Une façon concrète de demander des responsabilités serait un document rempli des signatures du maximum de citoyens, à faire circuler dans toutes les communes de la région de Dakar au moins, et dans toutes les entités et institutions.

En troisième lieu et de façon urgente et provisoire, il faudrait ouvrir un compte pour soutenir les familles, en attendant que justice soit faite.

Envoyé aux supérieurs/es des RELIGIEUX.

 Contribution de la sous=commission Justice et Paix, suite à l 'expulsion des habitants de la cité "Imbécile" et de la campagne de déguerpissement menée par les autorités.

"Merci après en avoir pris connaissance, de communiquer ces 2 pièces jointes à chacune de vos communautés en leur demandant :

1°) D'abord de lutter nous=mêmes pour le respect et la dignité de toute personne, en particulier des pauvres, des petits de la société et des étrangers

2°) De faire passer l'information et ce message auprès du maximum de personnes autour de nous, chrétiennes ou non pour le respect des droits de l'homme

3°) de réfléchir aux actions à mener avec les ONG et organisations de la société civile avec lesquelles nous sommes en contact

4°) de voir en communauté et avec nos paroisses et nos Caritas comment aider les victimes de ces déguerpissements programmés. Merci pour votre soutien et tout ce que vous pourrez faire. Et que l'Esprit de Jésus nous éclaire et nous fortifie ».

Opération cité "Imbécile" Les réactions ont été immédiates

En lisant le terrible déguerpissement du quartier TRÈS MAL NOMMÉ "imbécile" (rien que le nom va déjà contre la dignité de ceux et celles qui y habitent) on pense aussitôt à une intervention de Justice et Paix. Combien de droits ont été conculqués avec la démolition des baraques et l'entassement de vieux, femmes enceinte, enfants...dans un stade ? Quoi faire ?

Mar 04/07/2023 16:06

Je trouve le texte très correct de dénonciation très frappant. On ne peut pas rester tranquille devant des injustices pareilles. Il faut exiger des explications aux autorités compétentes. Diffuser le texte partout. Pourquoi ne pas en faire mention dans les messes ? Ouvrir un compte pour aider serait bon mais les responsables de cette violation des droits humains sont les premiers à devoir rembourser... En tout cas je suis prêt à signer le texte..

Vraiment quelle honte !!! Nous n'avions rien attendu de cette nouvelle !. 

Merci beaucoup pour votre engagement. Nous nous sentons pleinement impliqués dans cette action de plainte des faits contre les droits humains.

Merci pour l'engagement de Justice-Paix.

Notre communauté est disponible pour signer quel que soit le document, pour dénoncer cette injustice!

A propos de "cité imbécile" quels sont les religieux/euses qui étaient proches de ces gens évacués, qui connaissent bien ce quartier et ses situations difficiles ? Ce serait un témoignage direct encore plus efficace contre cette façon injuste d'agir vers ces gens... Quel sera le destin de ces gens délogés ? L'Etat a-t-il prévu où ils pourront habiter, dans des conditions dignes ?

Réponse : Les sénégalais vont être renvoyés dans leur famille ou village d’origine, les étrangers remis à leur ambassade !!!!! Que vont faire les ambassades ? Avec quels moyens. La plupart du temps elles ne font rien en prétextant que leurs concitoyens ne sont pas inscrits à l’ambassade !

Témoignages «Cité Imbécile» rasée :

le bonheur des uns, le malheur des autres

« Il y a toujours des gens qui se réjouissent du malheur des autres, surtout s’ils sont étrangers, mais qu’ont-ils fait pour les aider ?




Réunion Justice et Paix du 25 Mars 2023

 

Thème : la protection des enfants et personnes en situation de vulnérabilité.

Voir aussi les 2 autres pièces jointes : prière pour la paix à partager autour de nous et le document : modification du droit canonique

On a commencé la réunion vers 16h avec la lecture de Luc 4,16-23 : L’Esprit du Seigneur est sur moi...Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres.., suivi d’un chant et d’une prière.

Après les présentations, on a expliqué aux nouveaux et nouvelles que nous sommes une sous-commission (Justice et Paix) de la Commission de Pastorale Sociale des Religieux du Sénégal. Cette commission a été créée par la Conférence des Supérieurs Majeurs et elle fonctionne depuis trois ans. Nous présentons toujours aux supérieurs les rapports de nos réunions et chacun/e les transmet aux communautés de sa congrégation.

Dès le début, une sœur a affirmé souffrir fortement des accusations portées contre saint Jean Paul II pour n’avoir pas dénoncé ni suspendu des prêtres coupables d’abus sexuels, en ajoutant que la plupart des accusations portées contre les prêtres et l’Église sont fausses. En étant d’accord que ces accusations contre Jean Paul II, et aussi contre Benoît 16 ont été réfutées, et même si nous voulons défendre l’honneur de l‘Église, nous devons reconnaître que des cas d’abus sexuels, de pouvoir et de conscience existent dans l’Église. Le pape François l’affirme avec force et a réuni les représentants de tous les évêques à Rome à ce sujet, en leur demandant avec insistance de lutter contre ce grand scandale qui défigure l’Église de Jésus Christ. Il nous faut donc voir en face, cette grande souffrance et injustice causées par des membres de nos Églises et congrégations et chercher à les régler dans la miséricorde mais d’abord dans la justice et la vérité (voir ci-dessous l’intention de prière du pape François pour le mois de mars). Ensuite, nous avons continué l’ordre du jour :

1 - Protection des enfants et personnes en situation de vulnérabilité : qu'avons-nous pu déjà faire à ce niveau ?

Voici le résumé du tour de table. Nous avons :

  • Sensibilisé les enfants du primaire sur ce thème.

  • Parlé à l’intérieur de la Congrégation, comme une formation, à partir du document des évêques.

  • Participé à une Journée Scientifique organisée par le centre Saint Augustin sur les réseaux sociaux et les fausses nouvelles et attaques personnelles contre les personnes.

  • Enseigné les séminaristes dans les cours de Morale affective et sexuelle.

  • En début d’année, une formation à nos collaborateurs (enseignants des écoles, moniteurs des colonies de vacances, etc.)

  • Certaines congrégations ont fait signer un document d’engagement .

  • Travaillé le document des évêques avec des groupes de jeunes, dans les Centres Sociaux, etc.

  • Rencontré des prisonniers sur ces violences vécues en prison

  • Parlé aux personnes vulnérables qui cherchent du travail et que l’on cherche à exploiter,

  • Partagé avec des jeunes filles qui sont dans la rue, etc.

Conclusion : Ce partage nous donne autant de propositions de sensibilisations et d’actions à mener chacun et chacune d’entre nous. Et à le partager dans nos communautés et avec toutes les personnes prêtes à agir que nous rencontrons, chrétiennes ou non.

Jusqu’ici, nous avons parlé de la SENSIBILISATION. Maintenant, tout en continuant cette sensibilisation, il nous faut passer à des actions: Nous avons déjà sur place proposé des actions à mener, qu’il faudra compléter. Déjà :

  • Au Pari (Point d’Accueil des Réfugiés et Immigrés) de la Caritas, on a fait une formation à ce niveau, mais en y ajoutant aussi d’autres abus comme l’exploitation sociale -ne pas payer le salaire dû- et autres.

  • À ce niveau, portons une attention particulière à notre personnel -chauffeurs, cuisinières, gardiens, etc-. Pour respecter les horaires et leurs droits, les inscrire et cotiser pour eux à la sécurité sociale

  • Chercher à être prudents dans nos actions : ne pas rester avec les enfants de chœur à la sacristie avec la porte fermée, éviter de caresser les enfants, etc. Car il y a de mauvaises volontés prêtes à dénoncer, même sans qu’il y ait une base. Soyons bien prudents pour ne pas tomber dans de possibles fausses dénonciations.

Ne pas accepter que des prêtres s’amusent avec des religieuses ou d’autres femmes et jeunes filles.

2 - Nous avons revu un premier texte qui peut servir de base pour cette sensibilisation, dans nos contacts personnels ou dans des rencontres et réunions :

  • " Les abus sexuels, de pouvoir et de conscience sur les enfants mineurs et les personnes vulnérables sont nombreux dans notre société. L’Église a le devoir de lutter d’abord à l’intérieur d’elle-même contre tout ce qui peut faire tomber les enfants et adultes innocents dans de graves problèmes psychologiques et des souffrances morales qui les poursuivent toute leur vie. C'est pourquoi en tant que membre participant directement au travail de l’Église nous vous demandons de vous engager à un respect total des enfants et personnes vulnérables, chacun et chacune dans ses responsabilités propres".

  • Il faudrait ajouter d’autres abus comme l’exploitation sociale. À ce niveau, nous avons essayé de faire une liste d’AUTRES ABUS DE POUVOIR :

  • Les violences physiques ou verbales : disputes, insultes...

  • Les menaces de punitions exagérées aux élèves.

  • Faire peur aux enfants et les minimiser. On a donné l’exemple d’un enfant du catéchisme qui refusait de participer aux activités parce que son enseignante à l’école lui avait dit qu’elle ne valait rien.

  • Faire 3 heures de cours sans arrêt.

  • Les châtiments corporels (pourtant interdits par la loi)

  • Un supérieur ou supérieure ou un curé peuvent aussi abuser de leur pouvoir.

  • Le cléricalisme : on en a beaucoup parlé dans la préparation du synode.

  • L’autoritarisme (pour nous, chrétiens, autorité signifie service)

Les abus sexuels ne se limitent pas au viol et aux relations sexuelles imposées (que ce soit par le mari ou une autre personne). Cela concerne tous les actes et gestes de manque de respect, allant contre la dignité de la personne ( voir Mat 5,27 s ;1 Cor 6,15-20)

Les abus de conscience : Ne pas utiliser les secrets qui nous sont confiés, par exemple quand un enfant nous confie les problèmes qu’il vit dans sa famille.

3 - Pour aller plus loin : "Comment détecter en toute discrétion des cas d'enfants ou personnes vulnérables abusées, parmi les personnes avec qui nous travaillons ou que nous côtoyons" (catéchèse, école, mouvements, etc.) ?

Inclure dans les abus les mauvais traitements: violence physique et verbale, punitions sévères et exagérées.

Gagner la confiance des enfants et des personnes vulnérables, en partageant d’abord avec eux les choses ordinaires de leur vie.

Faire comprendre qu’il vaut mieux parler, plutôt que se taire soi-disant pour défendre l’honneur de la famille

Pour les élèves : voir les changements dans leur comportement, signes de problème : le sommeil, mauvaises notes, indiscipline…Sensibiliser les enseignants à cela.

Former des spécialistes sur le thème des abus et en médiation de conflits.

Créer une cellule d’écoute en chaque œuvre ou institution.

Travailler en collaboration : quand les enseignants remarquent un changement de comportement de l’élève, ils le signalent à cette personne ressource.

Parler du milieu familial où habite l’enfant: le connaître avec ses difficultés et ses dangers.

Voir aussi comment les problèmes se posent au niveau des postes de santé et des paroisses : catéchèse, mouvements, différentes associations et organisations.

Nota Bene. On nous a recommandé un livre : “Une profonde blessure. Les abus sexuels dans l’Église Catholique“ De Jean-Guy Nadeau. Médiaspaul Canada, 14-08-2020

4 - Suite de cette action :

Plusieurs congrégations religieuses ont déjà fait signer un engagement par leurs membres à rejeter tout acte d’abus sexuel, de pouvoir et de conscience. Et qu’en cas de faute reconnue, tout en restant soutenu par sa congrégation et défendu en cas de fausse accusation, chacun sera responsable personnellement devant la justice. Nous demandons à chaque congrégation de faire signer ce document, préparé par les supérieurs majeurs, après explication et conscientisation, par chacun de ses membres.

Nous voudrions faire signer un tel document également par les enseignants, personnel de santé, moniteurs, catéchistes et responsables de mouvements avec qui nous travaillons.

Nous avons confié la tâche de sa rédaction à un juriste, pour que ce document ait une valeur juridique reconnue par tous. Nous attendons ce document que nous vous communiquerons dès réception pour acceptation.

5 - Divers : la situation de violence politique actuelle. Quoi faire devant ce qui s’est passé le 16 mars ? et ce qui peut nous arriver le 29 et le 30 (jugement d‘Ousmane Sonko : voir les nouvelles dans ce site)?

-Profiter du début du Ramadan pour envoyer aux musulmans une lettre d’encouragement et de solidarité et un appel à la Paix.

-Trois principes :

1) La Justice ne se rend pas sur les réseaux sociaux

2) La non-violence. Arrêter les violences verbales et physiques. En parler avec les jeunes avec qui nous sommes en contact et demander aux parents que nous connaissons de conseiller leurs enfants

3) Chercher le dialogue. La politique ce n’est pas les accusations pour détruire la réputation des adversaires. La politique c’est la recherche ensemble du bien commun.

La réunion s’est terminée à 17h.

RAPPEL : INTENTION DE PRIÈRE DU SAINT-PÈRE Mars 2023 : Pour les victimes d’abus

Prions pour toutes les personnes qui souffrent à cause du mal subi par des membres de la communauté ecclésiale : afin qu’elles puissent trouver dans l’Église elle-même une réponse concrète à leur douleur et à leur souffrance.

Ces dernières années, la vie de l’Église catholique a été marquée par des scandales liés à des violences et à des abus sexuels. Dans de nombreux pays, les abus sexuels sur mineurs commis par des prêtres catholiques ont fait la Une des journaux et ont circulé sur les réseaux sociaux. L’Afrique est aussi touchée par ces scandales et ici et là, des bureaux de signalement ou des Centres de protection des mineurs et personnes vulnérables ont été ouverts. Avec le Pape François, prions pour toutes les personnes qui souffrent à cause de ce mal.

Prière pour la paix au Sénégal

« Seigneur Dieu de paix, écoute notre prière ! » :

Seigneur, aide-nous ! Donne-nous la paix, enseigne-nous la paix, guide-nous vers la paix. Ouvre nos yeux et nos cœurs et donne-nous le courage de construire un pays de paix et de tolérance. Seigneur, Dieu d’Abraham et des Prophètes, Dieu Amour qui nous a créés et nous appelle à vivre en frères et sœurs, donne-nous la force d’être chaque jour des artisans de paix ; donne-nous la capacité de regarder avec bienveillance tous les humains que nous rencontrons sur notre chemin. Rends-nous disponibles à écouter le cri de nos concitoyens qui nous demandent de transformer nos armes en instruments de paix, nos peurs en confiance et nos tensions en pardon. Que notre concurrence entre partis consiste à présenter des programmes qui rivalisent pour un meilleur service du pays, pour arriver à une plus grande égalité entre tous les citoyens et rendre meilleures les conditions de vie des plus faibles de la société. Seigneur, aide-nous à rejeter la méchanceté, les médisances et les mensonges, pour travailler dans le respect de chacun au bien commun du pays tout entier, dans le respect des droits de l’homme et de la dignité de tous. Maintiens allumés en nous la flamme de l’espérance pour accomplir avec une patiente persévérance le choix du dialogue et la réconciliation, afin que la paix règne dans notre pays le Sénégal ! Et que du cœur des concitoyens soient bannis ces mots : division, haine, guerre, violence et torture ! Seigneur, désarme la langue et les mains, renouvelle les cœurs et les esprits, pour que la parole qui sort de notre bouche soit constructive pour dire : « paix, salam ! Amen. »

Reflexions au sujet des troubles et casses au senegal

Jésus dit aux sadducéens : « Dieu n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants » (Marc 12,27). Dieu ne veut pas la mort Et il y a eu 16 morts au cours de ces émeutes. Dieu nous demande de construire une société de paix et un pays de concorde et de réconciliation. Un pays de « Téranga » et d’accueil mutuel. Que faire pour cela ? La paix commence par nous-mêmes, dans les petites choses de notre vie. « La paix naît dans le coeur des hommes «. 

  • Vivre dans la paix personnellement. Faire grandir la paix dans notre cœur par la prière et la méditation de la Parole de Dieu

  • Vivre en paix dans nos familles, au travail et dans le quartier. Nous réconcilier si nécessaire.

  • Accepter les autres avec leurs différences d’idées et de comportement.

  • Parler ensemble calmement et en nous écoutant. Faire grandir le dialogue autour de nous.

  • Parler aux jeunes pour qu’ils laissent la violence et les casses.


La non-violence

 

Commentaire du Mardi de la 11° semaine ordinaire (Mat 5, 38-42) : « Seigneur apprends–nous à lutter contre la violence » : Jésus nous montre des façons d’agir, qui sont très importantes. Essayons de comprendre cet enseignement de Jésus, qui nous étonne sans doute. Que signifie « œil pour œil, dent pour dent » (38) ? C’est la loi de Moïse. Au temps de Moïse, c’était la guerre sans fin et sans limites, entre les hommes et les familles. Si on avait tué quelqu’un d’une famille, celle-ci cherchait à se venger à tout prix. Elle n’avait pas peur de tuer toute la famille de l’ennemi, pour un seul. Moïse a voulu limiter la vengeance, en disant : si on crève un œil dans ta famille, tu crèves seulement un œil chez ceux qui ont fait cela. Mais pas plus. C’est pourquoi on dit : œil pour œil, dent pour dent. C’était déjà un progrès pour limiter la méchanceté. Mais bien sûr, Jésus nous demande d’aller beaucoup plus loin. Il faut arrêter de se venger. Sinon, la méchanceté ne s’arrête pas. Au contraire, elle ne fait que grandir. C’est absolument nécessaire, si nous voulons vivre ensemble en paix. Nous arrêtons la méchanceté, la guerre, les bagarres et toutes les formes de la violence. Nous refusons de nous venger. Cela nous rend trop malheureux, et entraîne une violence sans fin.

Mais si nous sommes nous-mêmes attaqués et frappés,

que faire à ce moment-là ? Jésus dit : « quand quelqu’un te frappe sur la joue droite, montre lui aussi ta joue gauche » (39). Ces paroles sont souvent mal comprises. Cela ne veut pas dire se laisser faire, et tout accepter sans rien dire. Au contraire, c’est lutter contre la méchanceté et arrêter les coups : tu réagis en montrant ta joue gauche. Comment comprendre cela ? Chez les juifs, on frappait les gens à revers, avec le dos de la main. Jamais avec l’intérieur (la paume). Donc si quelqu’un est en face de toi, tu peux le frapper sur la joue droite. Mais s’il te présente la joue gauche, tu ne peux pas le frapper du dos de la main, il faudrait pour cela se mettre derrière lui. C’est donc un moyen très efficace d’arrêter celui qui te frappe : sans te battre, sans te venger, sans rendre le mal, mais en l’empêchant de continuer à frapper. Parce qu’il peut te frapper sur la joue droite, mais pas sur la joue gauche. Ainsi, tu l’obliges à arrêter sa méchanceté, mais d’une manière non violente (c’est ce que l’on appelle la non-violence évangélique active).

Jésus lui-même, quand on le frappe au tribunal, au moment de sa mort, Il ne se met pas en colère. Il ne cherche pas à frapper à son tour celui qui l’avait giflé. Mais il résiste. Il dit (Jean 18,22) : » Si j’ai mal parlé, montre-moi ce que j’ai dit de mal. Mais si j’ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu ? ». Et Il dit à ceux qui viennent l’arrêter : »C’est moi ! Mais est-ce que vous étiez obligés de prendre des épées et des bâtons, pour venir m’arrêter ? Comme si j’étais un voleur ! Tous les jours, j’étais dans le Temple à enseigner ». Alors ils reculent et tombent à terre. Et Jésus ajoute : « Si c’est moi que vous voulez arrêter, laissez partir mes apôtres ». C’est toute la différence avec saint Pierre, qui prend son coupe-coupe et tranche l’oreille du serviteur Malchus. Et Jésus lui dit : » Range ton coupe-coupe. Car tous ceux qui prennent l’épée, mourront par l’épée. Tu ne sais pas que je pourrais appeler mon Père à l’aide ? Et aussitôt, Il m’enverrait plus de 12 armées d’anges. Est-ce que je ne vais pas boire le verre de souffrances que le Père m’a donné ? (Jean 18,10 et Mat 26,53).

-(40) De même, au temps de Jésus, la Palestine était colonisée par les Romains. Les soldats romains avaient le droit de forcer une personne à porter leurs bagage, mais seulement pendant 1 km. Comme on a forcé Simon de Cyrène, à porter la Croix de Jésus. Jésus n’est pas d’accord que l’on force ainsi les gens. Alors il dit : « si un soldat t’oblige à porter son bagage pendant 1 km, porte-le pendant 2 km ». Mais après, tu vas l’accuser auprès de ses chefs, parce qu’il t’a fait faire plus que ce qui est permis. Et il sera puni. C’est de cette façon très intelligente que Jésus veut faire respecter le droit des gens, 

Et arrêter de les forcer ou de les faire souffrir. D’une manière très efficace, mais sans se battre, et sans paroles violentes

La non-violence ce n’est pas de la passivité ou de la peur, ni accepter la situation, sans rien faire et sans rien dire. C’est une non-violence active. Nous connaissons les exemples célèbres de GANDHI qui a ainsi obtenu l’indépendance de l’Inde. Celui de Martin Luther KING qui a obtenu le respect des droits civiques des Noirs aux Etats-Unis. Celui des Philippines où une action non violente a fait tomber la dictature de Marcos. Et nous savons que Gandhi a commencé son action en Afrique du Sud. Les exemples d’actions non violentes efficaces ne manquent pas en Afrique non plus. Par exemple, avec Desmond Tutu, pour ne parler que des acteurs les plus connus.

La non-violence est efficace pour changer les sociétés,

par exemple au Brésil. Helder Camara et beaucoup d’autres Evêques l’ont utilisée en Equateur, au Chili, en Amérique Centrale. La non-violence a fait tomber des dictatures sans faire couler le sang. Ainsi, Solidarnosc en Pologne en 1980, le Mouvement People Power aux Philippines en 1989, l’action menée par les chrétiens en Allemagne de l’est en 1990, le Soutien Œcuménique des Eglises à Madagascar en 1991, l’action des moines bouddhistes au Cambodge et en Birmanie…

Dans tout cela la non-violence est à l’œuvre. Même si elle ne donne pas toujours des résultats immédiats et complets, comme les mouvements du printemps arabe, les efforts de paix dans les conflits entre Israël et la Palestine, l’engagement des femmes musulmanes et chrétiennes ensemble pour réclamer la paix en Syrie. Mais comment faire passer cela à la base ? Aussi bien dans la vie de chaque jour des chrétiens, que dans la réflexion théologique. Il reste beaucoup à faire encore à ce niveau.

Ces actions non violentes peuvent amener une paix véritable, et nous mettre dans une situation favorable pour trouver des solutions à nos problèmes, en agissant sur les causes profondes. Ce sont aussi ces actions qui permettent une réconciliation véritable. En effet, dans la non-violence active, on ne cherche pas à avoir raison, encore moins à vaincre l’adversaire. Au contraire, on l’accepte tel qu’il est, et on cherche à comprendre ses motivations. On croit qu’il est capable de réfléchir, de se mettre en cause et de changer son comportement. Et en même temps, nous-mêmes nous nous mettons en cause. Et nous cherchons à nous convertir pour avancer ensemble. Ainsi on arrive à une vraie réconciliation.

La non-violence ce n’est pas seulement une technique, c’est une transformation intérieure profonde, qui permet de reconnaître d’abord ses propres limites, et ses violences intérieures. La non-violence demande la recherche de la sagesse (Qohélet 9, 16-18) : » La sagesse est meilleure que la force, même si la sagesse du pauvre est méprisée, et que ses paroles ne sont pas écoutées. Les paroles pleines de douceur des sages sont écoutées, plus que les cris pleins de folies des dirigeants. La sagesse est meilleure que les armes de guerre. Mais un seul péché peut détruire beaucoup de choses ».

Quels en sont les principes de base de l’action non-violente ?

D’abord reconnaître qu’il y a conflit. Il y a des chrétiens qui, sous prétexte de charité, ne veulent pas reconnaître le conflit. C’est s’empêcher de trouver une solution. C’est la politique de l’autruche. En premier, il nous faut voir clair et nommer le problème, en voyant ce qui nous empêche d’atteindre le but fixé. Ensuite, voir si le groupe peut trouver par lui-même une solution, en impliquant les personnes qui peuvent aider. Et en se redisant quel but on veut atteindre : notre idéal, et pas seulement l’intérêt égoïste du groupe. A ce moment-là, on peut chercher les moyens qui sont à notre portée, en cherchant l’accord avec le plus grand nombre de personnes possibles. Mais en sachant qu’il n’y a pas de solution parfaite. Et que l’on ne trouvera jamais une solution qui sera valable pour tous.

Les quatre temps de la communication non violente :

  1. Regarder la situation en vérité, dire ce que l’on veut vraiment et non pas ce que nous imaginons. Voir le positif chez l’autre, et non pas le négatif. Par exemple si tu es malade, tu ne dis pas à celui qui est venu te visiter : » cela fait 15 jours que tu n’es pas venu me voir, pourtant tu sais que je suis malade ». Tu lui dis : » il pleut, tu habites loin, et tu es quand même venu me voir. Merci pour la visite ». Quand je parle, je dis « je » et non pas eux ou vous, et surtout pas « on ».

  2. Appeler les choses par leur nom. Et reconnaître les sentiments qui m’habitent à ce moment-là. Par exemple, pour le vote au dernier référendum pour le changement de constitution au Sénégal. Les gens ont voté beaucoup plus à partir de leurs sentiments, par rapport au choix du président de rester 7 ans et non pas 5. Beaucoup plus qu’à partir du contenu du referendum, sur lequel ils étaient appelés à voter. Là aussi, il ne faut pas avoir peur d’exprimer ses bons sentiments. Par exemple : en cas de visite quand on est malade : « je suis très touché que tu fasses attention à moi. Cela me fait beaucoup de bien, et déjà je me sens mieux ».

  3. Reconnaître le besoin qui est derrière, et qui fait naître ce sentiment : « ta visite m’a fait comprendre que j’ai besoin de soutien en ce moment difficile, parce que je me sens très seul ».

  4. Face à ce besoin, faire une demande concrète, précise, et réaliste. Une proposition, et non pas un ordre. Et cela sans agressivité. Le but de la demande, c’est d’exprimer calmement mon besoin. Et alors, on peut réfléchir ensemble dans la paix, pour voir ce qui est possible : « est-ce que tu pourrais venir me voir tous les deux jours, au moins une heure ?». N’est-ce pas ce qui manque souvent : des demandes concrètes et réalistes, faites sans agressivité, par exemple de la part des syndicalistes, des enseignants ou des étudiants. Et une réponse réaliste et concrète à leur demande, de la part du gouvernement, qui pourra alors respecter ses engagements. Et c’est la même chose entre les travailleurs et leurs patrons, dans la famille, ou dans le quartier et à la mairie.

La communication non violente nous apprend à nous respecter nous-mêmes,

en étant attentif à nos sentiments et à nos besoins. Elle nous apprend aussi à respecter l’autre, en reconnaissant ses sentiments et ses besoins. Elle nous apprend non seulement à partager nos idées, mais ce que nous pensons en profondeur, sans chercher qui a tort et qui a raison. A ce moment-là, les autres nous comprendrons mieux. Nous nous respecterons davantage, et nous éviterons les conflits et les violences inutiles. Cette façon de communiquer nous apprend à écouter l’autre avec un cœur ouvert, à accueillir l’autre pour ce qu’il est vraiment, sans le juger mais avec empathie. Elle nous apprend à être bon envers l’autre, et à mettre l’unité entre nous. Jésus nous dit : « la Vérité vous rendra libre » (Jean 8, 31-42). Serons-nous capables de parler en vérité, pour définir les conflits ? Il faut le vouloir, et s’y préparer, quelle que soit notre histoire et les blessures que nous avons subies. Cela demande beaucoup de patience, envers soi-même et envers les autres. Jésus, Lui-même a été découragé, par le manque de foi de ses apôtres, et de la foule. Il a été jusqu’à se plaindre : « Combien de temps encore je vais devoir rester avec vous, et vous supporter ? » (Marc 9,19). Cela demande du courage. Mais c’est un chemin de conversion pour changer notre vie, nos relations et d’abord notre cœur.

Martin Luther King a prononcé les mots suivants :

« A nos adversaires les plus farouches, nous disons: A votre capacité d’infliger la souffrance, nous opposerons notre capacité d’endurer la souffrance. A votre force physique, nous répondrons avec notre force d’âme. Faites-nous ce que vous voulez, et nous continuerons à vous aimer. Nous ne pouvons pas, en toute bonne conscience, obéir à vos lois injustes, car la non-coopération avec le mal est une obligation morale, tout comme la coopération avec le bien. Jetez-nous en prison, et nous vous aimerons encore. Envoyez vos miliciens à minuit dans nos communautés, pour accomplir la violence et nous laisser à demi morts, et nous vous aimerons encore. Mais soyez assurés que nous vous conduirons à l’épuisement, par notre capacité de souffrir. Un jour nous gagnerons la liberté, mais pas pour nous seuls. Nous lancerons à vos cœurs et à vos consciences un tel appel, que nous vous aurons gagnés en chemin, et que notre victoire sera une double victoire. L’amour est la puissance la plus durable du monde. Cette force créatrice, si admirablement exemplaire dans la vie de notre Christ, est l’instrument le plus puissant qu’on puisse trouver dans la recherche par l’humanité de la paix et de la sécurité ». La force d’aimer p. 72/73

A l’occasion du congrès intitulé :

« Non-violence et paix juste : une contribution à la compréhension de la non-violence, et à l’engagement envers celle-ci de la part des catholiques » (cf. Zenit du 12 avril 2016), le pape François encourage le « renouveau du témoignage actif de non-violence comme une « arme » pour réaliser la paix ».

Il rappelle l’objectif de parvenir au désarmement total « en rejoignant l’âme même des gens, en construisant des ponts, en luttant contre la peur et en poursuivant un dialogue ouvert et sincère ». Il encourage aussi la « pratique du dialogue », dont il explique les exigences, notamment de pardon et de miséricorde.

N.B. Ceci n’est qu’une simple introduction à la non-violence. Il faudra se former plus largement –et mieux – sur cette question si importante.

NON-VIOLENCE : Abdul Ghaffar Khan

Il est une autre grande figure musulmane de la non-violence. Dirigeant politique et spirituel pachtoune, il s’est opposé pacifiquement à la domination britannique.

Le pape François lui a rendu hommage dans son message pour la Journée mondiale de la paix en 2017 : « Les succès obtenus par le Mahatma Gandhi et Khan Abdul Ghaffar Khan dans la libération de l’Inde (...) ne seront jamais oubliés. »

Jawdat Saïd, la voix d’un islam non-violent

Un penseur d’une grande liberté. « Dès ses études, il regrette que ses professeurs enseignent la doctrine de manière dogmatique et qu’ils se montrent incapables de faire le lien avec la justice sociale », « Conformément aux appels du Coran à rejeter ”l’imitation aveugle des pères”, il juge, lui, indispensable de trier, dans la tradition, ce qui est utile et ce qui ne l’est plus. »

Jawdat Saïd a fui en Turquie après avoir refusé de « réviser » ses points de vue comme le lui demandaient les services secrets syriens. Fadi Daou

La force de sa pensée est d’être enracinée dans les sources de l’islam : « D’autres musulmans ont traité le sujet de la non-violence, mais il est celui qui est allé le plus loin dans sa légitimation doctrinale »,


Tous frères «fratelli tutti»: pour construire une société plus juste

Réflexion sur la fraternité universelle 

« L’effort pour construire une société plus juste implique une capacité de fraternité, un esprit de communion humaine ». Le pape invite à « réfléchir » et à « réagir » avec les maîtres mots de « fraternité » et d’« amitié sociale »: pour que, face aux manières diverses et actuelles d’éliminer ou d’ignorer les autres, nous soyons capables de réagir par un nouveau rêve de fraternité et d’amitié sociale. » L’amitié sociale revient « une quinzaine de fois dans le texte » qui prône une « bienveillance » profonde : l’amour devient une force politique.

L’encyclique part d’un constat sans concession (chapitre 1 : « les ombres d’un monde fermé »), mais pas sans « espérance », dans le contexte de la pandémie « sans frontières ». On notera un paragraphe intitulé « l’illusion de la communication ».

Le deuxième chapitre propose la lumière de l’Evangile du Bon Samaritain sur ce constat : « Un étranger sur le chemin » qui propose un « prochain sans frontières » et de se laisser interpeller par « l’étranger ».

Le troisième chapitre « penser et gérer un monde ouvert » propose l’exemple d’un « amour universel » comme moteur du « droit des peuples ».

Le quatrième chapitre propose une dialectique entre local et universel : « Un cœur ouvert au monde ». Autrement dit, le pape invite à repartir du cœur et de l’ouverture pour penser la société de l’après pandémie.

Le cinquième chapitre évoque « la meilleure politique » : en ce sens, l’encyclique sociale est aussi éminemment politique, et elle propose là aussi l’amour comme moteur de la politique, non pas de façon naïve, mais par un discernement, un diagnostic où populismes et libéralismes sont épinglés. L’universalisme prôné n’est pas uniformité, car « les diffe?rences cre?ent des conflits, mais l’uniformite? ge?ne?re l’asphyxie ».

Le sixième chapitre reprend un thème cher au pape François, celui du dialogue comme moteur social : « Dialogue et amitié sociale ». Il prône la culture de la « rencontre » et la « bienveillance », antidote à la « cruauté »: « La bienveillance est une libe?ration de la cruaute? qui caracte?rise parfois les relations humaines, de l’anxie?te? qui nous empe?che de penser aux autres, de l’empressement distrait qui ignore que les autres aussi ont le droit d’e?tre heureux. »

Dans le septième chapitre, le pape propose « des chemins », à partir de « la vérité », pour construire la paix, comme des « artisans »…, dans la dynamique du pardon  (force politique !), de la mémoire, dans le refus de la peine de mort et de la guerre, de « l’injustice de la guerre ».

Le huitième et dernier chapitre souligne le rôle des religions « au service de la fraternité dans le monde » et reprend l’appel d’Abou Dhabi.

Ce que le pape souligne dans l’introduction c’est le lien entre cette encyclique et l’anniversaire de la visite de saint François d’Assise au sultan égyptien  Malik-el-Kamil (1219) et sa propre visite aux Emirats arabes unis, avec la Déclaration sur la fraternité humaine, signée avec le grand imam Ahmad Al-Tayyeb, le 4 février 2019 « pour rappeler que Dieu « a cre?e? tous les e?tres humains e?gaux en droits, en devoirs et en dignite?, et les a appele?s a? coexister comme des fre?res entre eux ». D’autres leaders religieux – juifs, bouddhistes – ont également signé la déclaration.

Le pape indique comment l’encyclique développe les fondements de cette Déclaration et tient compte de ses échos: « Ce n’e?tait pas un simple acte diplomatique, mais une re?flexion faite dans le dialogue et fonde?e sur un engagement commun. Cette encyclique rassemble et de?veloppe des the?mes importants aborde?s dans ce document que nous avons signe? ensemble. J’ai e?galement pris en compte ici, dans mon langage personnel, de nombreuses lettres et documents contenant des re?flexions, que j’ai rec?us de beaucoup de personnes et de groupes a? travers le monde. »

Pour le pape une des clefs c’est l’universalité, mais l’universalité évangélique, dans un langage capable de rejoindre chacun : « Bien que je l’aie e?crite a? partir de mes convictions chre?tiennes qui me soutiennent et me nourrissent, j’ai essaye? de le faire de telle sorte que la re?flexion s’ouvre au dialogue avec toutes les personnes de bonne volonte?. »

Vue l’importance de cette lettre Encyclique du Pape François, nous avons cherché à la présenter pour la faire vivre d’une façon adaptée à différents groupes.

Avec les postulantes spiritaines, des adultes et jeunes volontaires

Nous avons d’abord fait une présentation résumée de chaque numéro, chapitre par chapitre. Ensuite, nous avons laissé un certain nombre de jours pour leur donner le temps de lire ce chapitre intégralement par chacune des postulantes.

A la rencontre suivante, chacune lit le numéro qui l’a le plus marqué et elle explique pourquoi.

Ensuite, nous répondons tous ensemble aux questions que chacune se pose.

Puis, nous voyons comment mettre ce chapitre en pratique dans leur situation de jeunes filles qui se préparent à la vie religieuse.

A la fin de l’étude de chacun des chapitres, on termine par une célébration communautaire sur le thème du chapitre (prières avec des gestes, des rites et des symboles adaptés, intentions de prières, chants, Eucharistie, etc.).

Présentation à la télévision :

A partir de cette première expérience avec les postulantes, nous avons présenté l’Encyclique chapitre par chapitre (une émission pour chaque chapitre) à la télévision, sous forme d’interview, avec des questions d’explications suivi d’exemples concrets pour une mise en pratique par les laïcs, adultes et jeunes dans le contexte actuel et selon les différentes cultures du Sénégal et leurs relations (cousinage à plaisanterie, relations historiques et actuelles…).

Présentation de l’Encyclique

sous forme de méditation à la radio catholique « Radio Espérance » pendant le Carême, pour une mise en pratique dans l’Eglise par les laïcs en particulier, spécialement ceux qui sont engagés dans la société.

Nous avons aussi organisé plusieurs rencontres avec les Frères de Taizé dans leur quartier.

Pour cela, on a choisi à chaque fois certains passages qui nous semblent plus importants et significatifs par rapport à ce que nous vivons au sein de la population. Etaient présents à ces rencontres : le chef de quartier et ses assistants (les autorités locales), l’Imam du quartier et son équipe et tous les adultes et jeunes volontaires musulmans aussi bien que chrétiens selon le schéma suivant :

  • Lecture des numéros choisis, un par un, d’abord en français suivie d’une traduction et explication en ouolof, la langue locale.Ensuite pour chaque numéro, réaction libre des participants, pour dire comment ils le comprennent et comment ils veulent le mettre en pratique.

  • Puis lecture de quelques versets du Coran et de passages de l’Evangile sur le thème présenté par le numéro en question.

  • Une reprise de ce qui a été dit par deux rappeurs sous forme de rap (chanté).

  • Pour terminer, la lecture des deux prières finales de l’Encyclique.

Chaque rencontre a été suivie d’une prière, à l’église pour les chrétiens et à la mosquée pour les musulmans.

Nous préparons maintenant une présentation plus simple et adaptée pour les enfants

Pour l’utiliser dans les rencontres de catéchèse et aussi les mouvements scout et les mouvements d’action catholique.


Violences 3 : quelles solutions proposer ?

 

Le chemin qui conduit à l’espérance c’est l’attention aux plus pauvres, l’écoute de l’autre, le dialogue entre religions, et les efforts de construction de la paix avec tous. Examinons d’abord des pistes de solutions au niveau de la société.

Face aux attentats.

C’est un danger réel et c’est une grande violence. La solution au niveau du gouvernement a été d’augmenter le budget de la police et de l’armée. Mais cela ne fait qu’augmenter les moyens de guerre, et répondre à la violence par une autre violence. Le Général Lamine Cissé essaie d’aller plus loin. Il explique : « la loi contre l’insécurité et le terrorisme, ce n’est pas attendre et riposter. C’est découvrir les dangers et agir à l’avance. Mais surtout il faut renforcer la démocratie, pour regrouper toutes les forces vivantes de la nation, et que chacun sache que la sécurité est importante pour sa survie. Que chacun là où il vit, empêche l’insécurité de s’installer » (Projet Promotion d’une gestion inclusive de la sécurité en Afrique de l’Ouest. Journal Enquête du 26 /02/2016). « La sécurité est nécessaire au développement du pays et à la paix dans les villes»  Khalifa Sall, maire de Dakar, au séminaire sur les stratégies locales de lutte contre la violence et la criminalité pour une gouvernance urbaine en Afrique de l’Ouest.

« La sécurité est nécessaire au développement du pays, et à la paix dans les villes»  Khalifa Sall, maire de Dakar, au séminaire sur les stratégies locales de lutte contre la violence et la criminalité, pour une gouvernance urbaine en Afrique de l’Ouest.

« La violence est une manière d’exprimer sa haine contre un autre, ou une manière de régler ses problèmes par la force. Cette méthode est bannies dans une société organisée. C’est pourquoi il faut la combattre. Quand on parle de l’extrémisme, de la violence ou du terrorisme, la jeunesse est la plus vulnérable. Ce sont souvent les jeunes qui sont souvent les acteurs du terrorisme. C’est pourquoi, il faut leur proposer des formations. C’est une manière d’immuniser la jeunesse contre la violence et l’extrémisme».

La CEDEAO se dote de systèmes nationaux d’alerte (12-5-16) « en vue de la consolidation de la paix et de la sécurité régionales, par la mise en place de systèmes nationaux d’alerte précoce et de mécanismes de réponses rapides qui sont opérationnels dans les cinq pays pilotes que sont le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée Bissau, le Libéria et le Mali. Cette disposition permet ainsi à la Commission de la CEDEAO d’être proactive dans la prévention et la gestion des crises susceptibles de perturber la stabilité de notre espace communautaire et d’hypothéquer tout progrès dans le développement économique»,

Michaelle Jean présente ainsi les solutions de la francophonie au rendez-vous international  pour la prévention contre l’extrémisme violent (Genève, 7-8 avril 2016) : »le terrorisme est un « cancer «  qui ne devrait être associé à aucune religion, à aucune nationalité, à aucune civilisation, à aucun groupe ethnique. Face à cette « peste qui est de retour », il nous faut avoir un diagnostic sans complaisance, des moyens de prévention et de réaction efficaces ancrés solidement et solidairement dans le respect des valeurs qui fondent la démocratie et la dignité humaine

Face à tous ceux qui prêchent et qui pratiquent la haine de l'autre, la terreur et la destruction, il faut donner la parole à ces centaines de millions de femmes, d’hommes et surtout de jeunes qui voient le monde autrement, et qui opposent à l’obscurantisme, toutes leurs forces de vie et de création, tout leur attachement à ces principes et à ces valeurs universelles qui honorent l’humanité: la  liberté et l’égalité, la solidarité et la fraternité, la diversité et l’universalité,  la stabilité, la concorde et  la paix

Il faut agir préventivement, en acceptant, aussi, de reconnaître nos erreurs et nos manquements, et en acceptant de changer nos comportements, nos mentalités, nos certitudes. Agir préventivement par un développement durable et surtout équitable. Une croissance à deux chiffres n’est pas synonyme d’éradication de la pauvreté, une pauvreté qui se compte aujourd’hui en centaines de milliers de migrants. Le creusement intolérable des inégalités nourrit toujours plus le ressentiment dans un monde devenu transparent ».

Agir préventivement par l’éducation et la formation pour toutes et pour tous, pour garantir un accès à l’emploi pour ces femmes et ces jeunes que nous abandonnons au chômage, à la désocialisation et à la désespérance.

Agir préventivement  par l’enracinement de la culture de la démocratie, de l’Etat de droit et des droits humains tant à l’échelle nationale qu’internationale, dans le dialogue et le respect de la diversité et de l’égale dignité de toutes les cultures.

 Agir préventivement, par la résolution de toutes les crises et de tous les conflits latents, avant qu’ils n’éclatent. « Il vaut mieux prévenir que guérir ! ». Comme l’explique églement le 4° objectif de notre 3° PAP : La Paix - Actions à 3 niveaux :

  1. Analyser les conflits actuels et rebâtir la paix

  2. Dénoncer les conflits latents et les désamorcer (prévention)

  3. Eduquer à la paix et à la non-violence

Dietrich Bonheffer disait déjà à la Conférence Mondiale des Eglises de 1937 à Oxford : « On confond Paix et Sécurité. On veut la sécurité par des traités politiques, des aides économiques et des investissements, par les banques  et l’argent, « par les armements pacifiques » (sic !). Tout cela est bon, en partie, dans certaines conditions. C’est sans doute nécessaire, mais ce n’est pas la paix. La paix est audacieuse et courageuse. C’est un risque à prendre, elle n’est jamais assurée. Il nous faut la construire chaque jour dans la ténacité, en commençant par les petites choses et elle passe par la croix et la souffrance. Elle naît dans l’espérance ».

Lutter contre l’extrême pauvreté :J’ai été invité à une rencontre organisée par le mouvement ATD/Quart-Monde sur le thème : « Extrême pauvreté et droits de l’homme ». A cette rencontre étaient invités des représentants des différents ministères et d’un certain nombre d’ONG, y compris la Caritas. Le but était de travailler « les principes directeurs sur l’extrême pauvreté et les droits de l’homme » adoptés aux Nations Unies le 27/09/2012, mais qui ont de la peine à être mis en pratique.

L’extrême pauvreté qu’est-ce que c’est ?

Un certain nombre de gouvernements et d’ONG ont le souci des plus pauvres et mettent en place pour les aider des projets de développement. Mais on s’est aperçu que ces projets ne rejoignent pas les gens qui vivent dans l’extrême pauvreté (les plus fatigués dans la société). En effet, parmi les plus pauvres, il y a des gens tellement découragés qu’ils n’ont plus la force de chercher à s’en sortir. Car ils sont renvoyés de la société, mais en plus ils sont humiliés, écrasés, ce qui leur a fait perdre toute espérance et le fait vivre dans la honte. Ils disent : tout est perdu, il n’y a plus d’avenir. Ils ont l’impression que les projets de développement ne sont pas pour eux. Ils n’ont même plus le courage d’aller au dispensaire quand ils sont malades, ou à la mairie pour régler leurs problèmes. Ils ont trop peur d’être renvoyés. Ils ne peuvent pas envoyer leurs enfants à l’école car ils n’ont pas de quoi acheter des fournitures, et ils pensent que de toute façon, leurs enfants n’y arriveront pas. D’ailleurs ces enfants n’ont pas le temps d’aller à l’école car ils doivent se débrouiller chaque jour pour trouver un peu à manger. Ces gens avec leurs familles se trouvent ainsi entraînés dans un cycle sans fin : une maison inondée par les eaux, un manque de nourriture, des problèmes de santé, tout cela les empêche de travailler et de s’en sortir. Cela est une très grande violence et une violation des droits humains. Il est donc absolument nécessaire de faire quelque chose.

« Les personnes qui vivent dans la grande pauvreté ne souffrent pas seulement d’un manque de moyens, mais leurs droits fondamentaux ne sont pas respectés, en particulier le droit à l’alimentation, au logement, au travail, à la santé et à l’éducation. A cause de cela, elles sont obligées d’accepter des conditions de travail dangereuses, des logements insalubres, un accès très limité aux soins de santé et de subir les conséquences d’un manque de bonne alimentation. Elles n’ont pas un accès à la justice et n’ont aucun pouvoir politique. Ces difficultés et ces manques de respect de leurs parts sont liés les uns aux autres et ils s’aggravent mutuellement pour aboutir au cercle vicieux de la pauvreté, de l’absence de pouvoir, de la stigmatisation, de la discrimination et de l’exclusion… Il s’agit notamment des femmes, des minorités raciales, ethniques et linguistiques, des migrants, surtout des émigrants en situation irrégulières, des réfugiés et des demandeurs d’asile, des apatrides, des minorités, des personnes handicapées, des personnes vivant avec le VIH Sida. Ces personnes sont souvent méprisées simplement parce qu’elles sont pauvres » (extrait des principes des Nations Unies sur l’extrême pauvreté et les droits de l’homme).

Comme le disait une femme, le plus dur quand on vit dans la misère, c’est qu’on est méprisé : on te traite comme si tu ne valais rien, on te regarde comme si tu ne valais rien du tout, on te traite comme un ennemi. Nous et nos enfants nous vivons cela chaque jour. Cela nous fait mal, nous humilie et nous fait vivre dans la peur et dans la honte. Des personnes vivant dans l’extrême pauvreté ont expliqué que les travailleurs sociaux ne leur donnent pas les services qu’ils demandent, parce que « quand ils parlent, ils sont trop agressifs ». Alors que c’est justement à cause de leur tristesse et de leur trop grande souffrance, qu’ils ne peuvent pas parler calmement et lentement. D’autres expliquent qu’ils ont bien essayé de mettre leurs enfants à l’école, mais leurs enfants étaient humiliés par l’enseignant. Et les autres élèves se moquaient d’eux parce qu’ils étaient mal habillés. Ces enfants ont fui l’école et ils ne veulent surtout pas y retourner.

Il ne s’agit pas seulement d’aider ces personnes les plus écrasées et rejetées de notre société, mais d’abord de les écouter pour comprendre un peu leurs problèmes et leurs mentalités. Ensuite, les soutenir pour qu’ils retrouvent le courage de s’en sortir. Puis leur permettre de se prendre eux-mêmes en mains d’une façon responsable pour participer activement à la préparation, à la mise en œuvre et à l’évaluation des programmes de lutte contre la pauvreté. Au lieu de venir simplement avec des projets tout faits qui tombent d’en haut et qui les laissent entièrement passifs et inactifs. Au cours de cette rencontre, des actions ont été proposées, par exemple travailler avec les collectivités locales à partir des possibilités offertes par l’Acte 3 de la Décentralisation, et la mise en place d’un comité de suivi pour cela.

Cette rencontre a ravivé en moi le souci de ces personnes vivant dans l’extrême pauvreté. Car nous ne rejoignons pas les plus pauvres, qui vivent en dehors de la société. Pour cela il nous faut un choix solide et continu, une volonté ferme, beaucoup de réflexions et d’efforts et beaucoup de temps, de patience et de courage pour rejoindre ces personnes et gagner leur confiance. Car elles ont été trop souvent trompées par des promesses non réalisées ou simplement inadaptées.

La première étape c’est de prendre conscience de la situation de ces personnes complètement écrasées et mises à l’écart, dans nos mouvements, nos associations de femmes, nos organisations de jeunes et nos  amicales, nos groupes de prière et nos autres structures, et d’abord dans nos communautés CEB. C’est à cette conditions que les choses remonteront peu à peu jusqu’au sommet  de l’Etat et entraîneront des actions concrètes valables vécues dans la miséricorde de Dieu.

L’accaparement des terres

Voici l’appel de la Journée internationale des luttes paysannes le 17 avril 2014 : Unissons-nous et luttons toutes et tous ensemble :Pour mettre fin aux accaparements de terres et pour reprendre le contrôle des terres spoliées- la terre doit appartenir à celles et à ceux qui la travaillent.

Pour mettre en œuvre une réforme foncière afin d’apporter la justice sociale en milieu rural.

Pour mettre fin au contrôle exercé par une poignée d’investisseurs et de sociétés transnationales sur les vies de milliards de personnes.

Pour renforcer et promouvoir un modèle de production agricole basé sur l’agriculture familiale et la souveraineté alimentaire.

Responsabiliser les communautés

Dans la région de Kolda comme dans les autres régions du Sénégal, les enfants sont victimes de violences, comme par exemple l’excision, la mendicité, le mariage précoce, le travail des enfants, le manque d’acte de naissance et même le trafic des enfants. On a voté des lois contre ces différentes violences, mais on doit bien constater qu’elles ne sont pas mises en pratique. L’une des raisons, c’est qu’on n’a pas cherché à comprendre pourquoi les personnes et les communautés pratiquent ces violences. Par exemple, on considère la mendicité comme un moyen d’éduquer l’enfant à l’humilité. De même l’excision n’est pas vue comme une mutilation, mais comme un passage à l’âge adulte, et le moyen de fixer l’enfant dans son sexe masculin ou féminin. Le mariage forcé est vu comme une possibilité d’assurer l’unité et l’agrandissement de la famille, et également l’autorité des parents. Bien sûr ces raisons ne sont pas valables ou, en tout cas, les inconvénients sont plus importants que les avantages. Encore faut-il trouver les moyens, pour que les gens eux-mêmes en prennent conscience. Et non pas venir de l’extérieur imposer des lois, que ce soit en faisant des cadeaux ou en punissant.

L’ONG World Vision a choisi de passer par l’art et la culture, en utilisant la peinture, le théâtre et la musique, pour parler de ces thèmes qui sont souvent tabou et dont les gens ne veulent pas parler directement en public. Cela sous la direction d’une artiste, Sister Fa. Elle cherche à former des artistes locaux capables d’animer, à la fois les enfants victimes de ces violences et les communautés qui les commettent, sur le thème de la protection des enfants. Pour arriver à un véritable changement de vie, aussi bien des enfants que des adultes, et des communautés elles-mêmes. Ils ont compris qu’il est nécessaire de respecter les communautés et leurs traditions, de comprendre les raisons pour lesquelles ils agissent de cette façon sans culpabiliser les gens ni les diaboliser, et ensuite d’amener les différentes personnes à se rencontrer, à parler et à réfléchir ensemble avec trois objectifs : faire connaître les lois existantes, en particulier celles sur la protection de l’enfant, en en expliquant la nécessité et la valeur. A partir de là, mettre en place un dispositif qui guide les communautés en responsabilisant les enfants eux-mêmes, pour renforcer leurs capacités à agir. (Journal Le Quotidien du 3/03/2016 n° 3921).

Conclusions d’une réunion de l’aumônerie des prisons :

  • Les séances d’écoute que fait l’aumônerie des prisons sont très importantes, même s’il faudrait aller plus loin. Et aussi les réunions des détenus pour apaiser le climat de la prison. De même que les rencontre entre gardiens et détenus, pour éviter ou au moins diminuer les violences

  • Le soutien des familles des détenus est absolument nécessaire.

  • Il faut préparer la sortie et la réinsertion, pour éviter la récidive

  • On demande des sanctions plus sévères, envers les coupables. Mais souvent ces sanctions ne servent à rien. Il faut l’éducation, mais l’éducation à un coût. Les associations qui veulent le faire ne sont pas soutenues par l’Etat, et l’Etat ne fait pratiquement rien dans ce domaine.

  • Il faudrait aussi surveiller Internet, sur lequel la pornographie prend des proportions très importantes.

  • Les jugements prennent beaucoup trop de temps. Les gens trainent en prison avant d’être jugés, et surtout pour passer en appel (ceux-ci sont sans arrêt renvoyés ce qui fait que les détenus sont de plus en plus déstabilisés et entraînés par les mauvais conseils ou les mauvais exemples des autres prisonniers).

  • Il faudrait absolument mener une action au niveau de l’école. Ce n’est pas normal que des enseignants enceintent leurs élèves. Il faut moraliser l’enseignement. Mais il faudrait déjà que les associations des parents d’élèves jouent leur rôle, et interviennent quand c’est nécessaire. Nous qui sommes venus à cette rencontre, il est très important que nous parlions de ces questions autour de nous, que nous fassions réfléchir les gens, en particulier dans nos communautés de quartier - CEB, et que nous commencions à agir d’abord dans nos propres familles.

  • La traite des femmes est en fait très répandue autour de nous, mais nous n’y faisons pas attention. Par exemple, chaque matin, il y a tout un groupe de femmes venues des villages qui sont assises au rond-point de la place de Liberté 6. Elles attendent qu’on vienne leur donner du travail : laver le linge ou piler le mil. C’est de la traite. La mendicité c’est aussi une forme de traite. Les employées de maison sont soumises aussi à la traite et même aux violences sexuelles, quand ce n’est pas la prostitution. Les écoles coraniques ont aussi une grande responsabilité dans tout cela. Elles sont utilisées en fait, plus pour rapporter de l’argent au marabout, que pour apprendre le Coran. Cela tout le monde le sait, mais on ne fait rien pour que ça change réellement.

Les violences faites aux femmes 

Il y a de grands changements dans la société actuelle, suite à l’évolution moderne et à la mondialisation. Il y a beaucoup de positif dans les actions menées dans ce sens. Souvent les intentions sont bonnes. Mais il est nécessaire de revoir les façons de faire.

Dans les traditions africaines, la femme était beaucoup respectée en tant que mère. C’est très important de garder cette valeur et de réagir contre les manques de respect. Mais ce qu’il faut développer aussi, c’est le respect de la femme en tant que personne et en tant qu’épouse, et pas seulement en tant que mère. Et respecter également les jeunes filles, même si elles n’ont pas encore mis au monde.

Le respect de la femme passe par la fidélité dans le couple, car trop souvent on demande à la femme d’être fidèle, mais le mari se permet d’aller avec d’autres femmes.

Il est également nécessaire de responsabiliser davantage la femme dans la vie de la famille, en accord avec son mari. Quand Joseph et Marie retrouvent leur fils Jésus au Temple de Jérusalem, c’est Marie qui parle (Luc 2,48). Mais elle dit bien : »Ton père et moi, nous étions très inquiets en te cherchant ».

Trop d’hommes imposent leur volonté à leur femme et à leurs enfants en disant : c’est moi le chef de la famille. Saint Paul dit bien que l’homme est le chef de la femme. Mais il ajoute tout de suite, « comme Jésus est le chef de l’Eglise » (Eph 5,21-24). Et il commence par dire : « Soumettez-vous les uns aux autres, à cause du respect que vous avez pour le Christ ». Pour Jésus, le chef doit se mettre au service des autres, et même donner sa vie pour eux comme Il l’a fait lui-même, jusqu’à  laver les pieds de ses apôtres, ce qui était le travail des esclaves. Le mari donne donc sa vie pour sa femme et ses enfants. Et il cherche à les rendre saints, comme Paul le demande. Cela nous demande donc de changer complètement notre conception du chef de famille. De l’autre côté, Saint Paul demande  à la femme d’aimer son mari, non  par peur d’être frappée ou par crainte d’être renvoyée, mais « comme l’Eglise aime le Christ ».

Une autre forme de violences faites aux femmes, c’est le refus d’espacer les naissances quand c’est nécessaire, parce que le mari ne veut pas prendre ses responsabilités. Trop de femmes sont épuisées par des naissances trop nombreuses et trop rapprochées. C’est une violence très grave qu’on leur fait. D’où l’importance de mettre en place une vraie régulation des naissances, à partir d’un dialogue respectueux dans le couple. Et pas seulement de prendre des contraceptifs, parfois même en se cachant. Et bien sûr, de se demander d’abord, si les raisons pour lesquelles on veut espacer ces naissances sont valables. Et quelle méthode on va utiliser.

Il est important aussi de résister à la sexualisation de la société, où la femme est utilisée comme un moyen de vendre des produits, en excitant le désir sexuel. De même au travail, trop de femmes et de jeunes filles subissent un véritable harcèlement sexuel. Il faut donc moraliser notre vie de société.

De plus en plus de femmes travaillent à l’extérieur, et elles se retrouvent avec un double travail. Quand elles reviennent du bureau ou de l’atelier, elles doivent assurer tout le travail de la maison. Trop d’hommes restent en ville après le travail, ou s’assoient à la maison sans aider leurs femmes. Autrefois au village, l’homme et la femme travaillaient ensemble aux champs.

Une autre nécessité, c’est de revoir la théorie du genre. Ce qu’elle a de bon, c’est de vouloir libérer la femme d’un modèle figé et imposé de l’extérieur. Mais il y a beaucoup d’exagération et d’incompréhension à ce niveau. Il est effectivement important que la femme soit libérée et traitée à égalité, dans la sexualité comme dans le reste de sa vie. Mais en même temps, elle doit rester elle-même, et garder sa féminité. L’homme et la femme sont égaux mais différents. Etre égal ce n’est pas être semblable ! Et la différence est une grande richesse, quand on sait vivre la complémentarité. La société a besoin des valeurs et des qualités féminines et masculines, et non pas d’un mélange qui fait perdre à chacun sa personnalité. Voici les conclusions d’une rencontre Justice et Paix :

  1. Mieux vivre nos relations entre mari et femme et en particulier faire de nos relations sexuelles, de vrais gestes d’amour où l’on se donne à l’autre, et non pas chercher à le prendre ou à en profiter.

  2. Dans le mariage, échanger davantage pour mieux se comprendre. C’est ce qui permet d’éviter les oppositions et les violences.

  3. Veiller à une bonne éducation des enfants, en particulier ne pas laisser les garçons commander leurs sœurs, ni se faire servir par elles. Ne pas permettre aux petits garçons de se conduire comme des patrons, envers les employés et les bonnes.

  4. il y encore beaucoup à faire pour que les droits des femmes rejoignent les droits des hommes, et que les droits des filles soient les mêmes que ceux des garçons  Parmi les femmes, les veuves sont les plus démunies. Elles sont quasiment sans droit. Les orphelines ont peu de chance de poursuivre des études au-delà du CM2, et donc de prétendre au métier de leur choix.

  5. Le mariage forcé : la solution c’est de changer nos idées sur le mariage. Et de chercher l’amour dans la famille.

  6. Les disputes entre époux. La solution : d’abord, la préparation au mariage. Ensuite, c’est de se parler : établir un véritable dialogue dans le couple (le devoir de s’asseoir des Foyers Notre Dame)

  7. Que faire en cas de viol ou d’agression des femmes ou des jeunes filles ? Souvent elles ont peur de se retrouver devant les mêmes personnes au tribunal. Et de plus, les familles tentent à cacher les choses. On cherche à régler le problème à l’amiable, soit par un mariage plus ou moins forcé, soit par des amendes. Il faut avoir le courage d’en parler publiquement, et de juger les coupables, pour que ces choses diminuent.

Actuellement des boutiques de droits et des maisons de justice se mettent en place dans les municipalités, pour défendre les femmes et les jeunes filles victimes de violences et régler les problèmes à l’amiable.  Dans plusieurs paroisses des associations de veuves se sont organisées.

Les Principes directeurs sur l’extrême pauvreté des Nations Uniesaffirment : Les femmes sont surreprésentées parmi les pauvres en raison des formes multiples et cumulatives de discrimination qu’elles subissent. Les Etats sont tenusà la fois d’éliminer la discrimination à l’égard des femmes, et de mettre en place des mesures pour réaliser l’égalité entre les hommes et les femmes dans la société (n° 23)… Dans le mariage et les relations familiales, faciliter la prise de décision par les femmes, y compris en ce qui concerne le nombre et l’espacement des naissances, librement et sans contrainte. Et que la nourriture et d’autres ressources soient également réparties au sein du ménage (n° 29). Les femmes doivent se voir garantir l’égalité d’accès au service public (30). Etant donné que la plupart de ceux qui vivent dans la pauvreté sont des enfants, et que la pauvreté dans l’enfance est une des causes profondes de la pauvreté à l’âge adulte, les droits des enfants doivent être une priorité (32).

Les violences faites aux enfants :

De plus en plus de parents se sentent désemparés devant leurs enfants, surtout s’ils n’ont pas été eux-mêmes à l’école. Les enfants sont éduqués par la rue ou par les médias, où il y a trop de violences, aussi bien à la télévision que sur internet. Certains enfants sont soumis à toutes sortes de violences dans la famille.  Ils sont souvent frappés. Sans parler des violences sexuelles familiales. Les talibés et les enfants de la rue ne sont pas respectés.

Il ne suffit pas d’analyser les problèmes, il faut chercher des solutions. Cela commence par la vie de tous les jours. Par exemple respecter la petite fille, quand elle va aux toilettes. Et apprendre à parler aux enfants sans agressivité, comme à tout le monde d’ailleurs. Il y a trop de violences verbales dans les rencontres, les réunions et les partis politiques.

Le Sénégal a signé pratiquement tous les instruments juridiques de protection des droits des femmes, comme la Convention des Droits de l’Enfant. Et d’abord la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et la Charte Africaine des Droits Humains. Mais les violences continuent malgré tout, parce que ces déclarations ne sont pas mises en pratique. En France, la loi du 25 janvier 2013 rend obligatoire la formation à la prévention et à la résolution non violente des conflits, pour tous les enseignants et personnels de l’éducation. Au Sénégal, qu’en-est-il ? Même l’enseignement des droits humains est resté un beau rêve. Malgré tous les moyens pédagogiques qui ont été composés pour cela. Ils ne sont donc pas vraiment mis en pratique.

Quant à la mendicité et à l’exploitation des talibés qui est une forme très grave de violence, beaucoup de personnes n’y font même pas attention. Il ne suffit pas de faire l’aumône, ou d’offrir un repas de Noel aux enfants de la rue, pour régler le problème. Des associations s’engagent dans ce domaine, mais comment sont-elles soutenues ? Et certains se lancent dans ces actions, comme pour la lutte contre le SIDA ou Ebola, uniquement pour récupérer des fonds.

Les médias et les films. Beaucoup poussent à la violence. C’est important d’en parler avec les enfants pour leur demander ce qu’ils sentent et ce qu’ils en pensent, et les aider à réfléchir. Interdire ne sert à rien.

C’est la même chose par rapport à la sexualité, un domaine où il y a aussi beaucoup de violence. Mais trop souvent l’éducation sexuelle n’est pas assurée par la plupart des parents. Et à l’école ou dans les centres sociaux, on,se limite à une simple information sur le fonctionnement des organes génitaux. Et à expliquer comment éviter les grossesses et les maladies sexuellement transmissibles. Quand on ne se contente pas d’une distribution de condoms aux jeunes. Est-ce de l’éducation ? Mais que font nos communautés chrétiennes et religieuses dans ce domaine ?


Violence ! Que nous dit la parole de Dieu ?

 

La Bible est pleine de violences. Dès le début du monde, Caïn tue Abel. Et même le roi David pour marier Bethsabée fait tuer son mari. En cas de victoire, on tue les ennemis, y compris les vieillards, les femmes et les enfants. On y trouve même des paroles de violences de la part de Dieu. Car les hébreux ont compris la Parole de Dieu, à partir de leur mentalité et de leur culture. Mais peu à peu, les violences ont diminué, au moins dans les paroles, suite à une meilleure compréhension de la Parole de Dieu. Ce qui nous appelle à approfondir nous aussi, notre compréhension de la Parole de Dieu, pour faire diminuer les violences et faire grandir la paix, la miséricorde, le pardon et la réconciliation.

Déjà dans l’Ancienne Alliance, on trouve des paroles qui nous disent que Dieu nous sauve de la violence, comme le psaume 17, 3 « Yaveh est mon roc et ma forteresse. Mon libérateur, c’est Dieu.Je m’abrite en Lui, mon rocher, mon protecteur, la force qui me sauve ».2ème Samuel 22, 3 «Mon Sauveur, tu m’as sauvé de la violence » ; Isaïe 60, 18 »On n’entendra plus parler de la violence dans ton pays. Plus de ravages ni de ruines dans tes frontières ».Le Psaume 85, 9 prie ainsi :»J’écoute ce que dit le Seigneur. Ce que dit Dieu, c’est la paix pour son peuple, et pour ceux qu’Il aime »

Dieu condamne la violence :

voir par exemple Lévitique 19, 13 ; Abdias 10 ; 1ère Samuel 2, 9 + 24, 12 ; Sirac 20, 1 + 3 ; 2ème Lamentations 3, 30 ;Ezéchiel 34, 4…Voir aussi l’enseignement de Jean Baptiste aux soldats « Ne frappez personne. Ne prenez pas leurs biens de force. Contentez-vous de votre solde »(Luc 3, 14). On pourrait multiplier les citations.

Notre modèle et la base de notre action, c’est la Trinité, où les 3 personnes vivent un  don total de soi et un accueil total de l’autre dans l’amour.

Dans la Nouvelle Alliance,à Noël, les anges chantent : « paix sur la terre, aux hommes que Dieu aime ». Ce n’est pas un souhait, c’est une chose réalisée effectivement par la naissance du Christ. Il nous dit : « Je vous donne ma paix… mais pas comme le monde la donne ». Depuis que le Christ est mort, nous somme sauvés, et nous sommes tous frères, libérés intérieurement de la violence. Mais il nous reste à réaliser cette libération, partout et pour tous.

Jésus a supporté beaucoup de violence de la part des pharisiens et des chefs de son peuple. Il n’a pas répondu avec agressivité. « Maltraité, il n’a pas ouvert la bouche. Comme l’agneau qui se laisse conduire à l’abattoir » (Isaïe 53, 7). Au contraire, Il a pris la violence sur Lui. Et par sa mort sur la croix,Il a fait de la violence une force de salut: voir la parabole des vignerons méchants (Matthieu 21,42) « La pierre que les bâtisseurs ont rejetée est devenue la pierre principale. Voilà ce qu’a fait le Seigneur. Et c’est merveilleux pour nous de voir cela ! «. Il a été jusqu’à prier : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font »(Luc 23,34).

Jésus nous sauve de la violence

comme il a tendu la main, pour sauver Pierre dans le vent violent de la mer(Matthieu 14, 30). Il y a de la violence contre ceux qui sont attachés au Christ, et qui suivent le bon Berger. Mais la sécurité de l’Eglise est assurée, comme Jésus l’affirme(Jean 10, 27-20) : « Personne n’arrachera mes brebis de ma main. Car mon Père qui me les a données est plus grand que tout et personne ne peut les arracher des mains du Père ». Ainsi notre force s’enracine dans le Père, qui a donné les hommes au Christ. Notre réponse à la violence, c’est notre unité. Et Jésus va jusqu’à nous demander « d’aimer nos ennemis, et de prier pour ceux qui nous font souffrir,pour être les enfants de notre Père » (Mat 5,43). C’est ainsi que nous serons vraiment « heureux, en acceptant de souffrir pour la justice » (Mat 5,6+10-12) pour vaincre la violence par la force de l’Amour de Jésus qui se donne à tous.

Jésus a su rassembler dans la même équipe des apôtres, des gens très différents : un riche comme Matthieu et des pauvres, des patrons de pèche comme Pierre et des gens simples, des vieux et un jeune comme Jean, des gens traditionnels comme Jacques et un révolutionnaire comme Simon le Zélote. Jésus a accueilli, enseigné et guéri des tas de personnes différentes. Il ne juge personne, même pas le jeune homme riche qui refuse de le suivre. Au contraire, Il le regarde et Il l’aime (Marc 10, 31). Et même à Judas, Il offre une bouchée de pain à son dernier repas avant de mourir, pour qu’il réfléchisse une dernière fois. Il dit : « Ne jugez pas et vous ne serez pas jugés » (Matthieu 7, 1-5). Il ne juge ni Zachée (Luc 19, 7), ni la Samaritaine (Jean 4, 27), ni la prostituée (Jean 7, 39), ni le Centurion (Luc 7, 9). Alors que les pharisiens et les enseignants de la loi eux au contraire, jugeaient et condamnaient les gens.

Saint Paul affirme que la paix est possible, car la violence est vaincue (Eph 2,14-18). Il explique : « Par sa mort, Jésus a tué la haine…. Laissez-vous réconcilier par le Christ…. Vous êtes les ambassadeurs du Christ. Mais cela nous demande de vraiment aimer le Christ, le mieux possible et en premier : »Qui aime son père et sa mère plus que moi, n’est pas digne de moi ». Le Christ ne vient pas supprimer les conflits, « Je suis venu apporter un feu sur la terre » (Luc 12,49), mais Il nous apprend à les vivre et à les régler, dans son amour. Avec l’aide de son Esprit de sagesse et de force.

Le Concile Vatican II nous a apporté une nouvelle vision de l’Eglise, en demandant le dialogue avec les autres religions et avec les non croyants. Et en reconnaissant l’importance de la liberté religieuse, de la dignité de l’homme et des droits humains, comme la nécessité de construire la paix. Il faut relire le chapitre 5 de la Constitution de l’Eglise dans le monde : La sauvegarde de la paix et la construction de la Communauté des Nations. Et cela est complété par l’Encyclique de Jean XXIII de 1963 : La Paix sur la terre. Et aussi les demandes de pardon à la suite de Jean Paul II pour les injustices commises par l’Eglise envers les juifs, envers les africains dans l’esclavage et le soutien au colonialisme, pour les croisades et l’inquisition, pour les actes de pédophilie contre les enfants. Sans oublierla rencontre d’Assise pour la paix avec les représentants des différentes religions, qui se continue jusqu’à maintenant.

L’engagement dans la société est fortement encouragé et fortifié par le Pape François. Son soutien pour les émigrés à Lampedusa et en Turquie a fortement marqué le monde entier. De même que son appel à l’Europe d’être plus accueillante. Et aussi sa lettre « Loué sois-tu », où il demande d’arrêter les violences contre la terre, notre mère à tous et notre maison commune.

Quelles actions mener ? A chacun de réfléchir et de prendre ses responsabilités, en lien avec les autres. Mais pour nous chrétiens, il est clair que cette Parole de Dieu doit nous éclairer et nous soutenir.

J’ai écrit dans « Enraciner l’Evangile jour après jour ». Commentaire du Mardi de la 11° semaine ordinaire (Mat 5, 38-42) : « Seigneur apprends–nous à lutter contre la violence » : Jésus nous montre des façons d’agir, qui sont très importantes. Essayons de comprendre cet enseignement de Jésus, qui nous étonne sans doute. Que signifie « œil pour œil, dent pour dnt » (38)? C’est la loi de Moïse. Au temps de Moïse, c’était la guerre sans fin et sans limites, entre les hommes et les familles. Si on avait tué quelqu’un d’une famille, celle-ci cherchait à se venger à tout prix. Elle n’avait pas peur de tuer toute la famille de l’ennemi, pour un seul. Moïse a voulu limiter la vengeance, en disant : si on crève un œil dans ta famille, tu crèves seulement un œil chez ceux qui ont fait cela. Mais pas plus. C’est pourquoi on dit : œil pour œil, dent pour dent. C’était déjà un progrès pour limiter la méchanceté. Mais bien sûr, Jésus nous demande d’aller beaucoup plus loin. Il faut arrêter de se venger. Sinon, la méchanceté ne s’arrête pas. Au contraire, elle ne fait que grandir. C’est absolument nécessaire, si nous voulons vivre ensemble en paix. Nous arrêtons la méchanceté, la guerre, les bagarres et toutes les formes de la violence. Nous refusons de nous venger. Cela nous rend trop malheureux, et entraîne une violence sans fin.

Mais si nous sommes nous-mêmes attaqués et frappés, que faire à ce moment-là ? Jésus dit : « quand quelqu’un te frappe sur la joue droite, montre lui aussi ta joue gauche » (39). Ces paroles sont souvent mal comprises. Cela ne veut pas dire se laisser faire, et tout accepter sans rien dire. Au contraire, c’est lutter contre la méchanceté et arrêter les coups : tu réagis en montrant ta joue gauche. Comment comprendre cela ? Chez les juifs, on frappait les gens à revers, avec le dos de la main. Jamais avec l’intérieur (la paume). Donc si quelqu’un est en face de toi, tu peux le frapper sur la joue droite. Mais s’il te présente la joue gauche, tu ne peux pas le frapper du dos de la main, il faudrait pour cela se mettre derrière lui. C’est donc un moyen très efficace d’arrêter celui qui te frappe : sans te battre, sans te venger, sans rendre le mal, mais en l’empêchant de continuer à frapper. Parce qu’il peut te frapper sur la joue droite, mais pas sur la joue gauche. Ainsi, tu l’obliges à arrêter sa méchanceté, mais d’une manière non violente (c’est ce que l’on appelle la non-violence évangélique active).

Jésus lui-même, quand on le frappe au tribunal, au moment de sa mort, Il ne se met pas en colère. Il ne cherche pas à frapper à son tour celui qui l’avait giflé. Mais il résiste. Il dit (Jean 18,22) : » Si j’ai mal parlé, montre-moi ce que j’ai dit de mal. Mais si j’ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu ? ». Et Il dit à ceux qui viennent l’arrêter : »C’est moi ! Mais est-ce que vous étiez obligés de prendre des épées et des bâtons, pour venir m’arrêter ? Comme si j’étais un voleur ! Tous les jours, j’étais dans le Temple à enseigner ». Alors ils reculent et tombent à terre. Et Jésus ajoute : « Si c’est moi que vous voulez arrêter, laissez partir mes apôtres ». C’est toute la différence avec saint Pierre, qui prend son coupe-coupe et tranche l’oreille du serviteur Malchus. Et Jésus lui dit : » Range ton coupe-coupe. Car tous ceux qui prennent l’épée, mourront par l’épée. Tu ne sais pas que je pourrais appeler mon Père à l’aide ? Et aussitôt, Il m’enverrait plus de 12 armées d’anges. Est-ce que je ne vais pas boire le verre de souffrances que le Père m’a donné ? (Jean 18,10 et Mat 26,53. -(40) De même, au temps de Jésus, la Palestine était colonisée par les Romains. Les soldats romains avaient le droit de forcer une personne à porter leurs bagage, mais seulement pendant 1 km. Comme on a forcé Simon de Cyrène, à porter la Croix de Jésus. Jésus n’est pas d’accord que l’on force ainsi les gens. Alors il dit : « si un soldat t’oblige à porter son bagage pendant 1 km, porte-le pendant 2 km ». Mais après, tu vas l’accuser auprès de ses chefs, parce qu’il t’a fait faire plus que ce qui est permis. Et il sera puni. C’est de cette façon très intelligente que Jésus veut faire respecter le droit des gens,  et arrêter de les forcer ou de les faire souffrir. D’une manière très efficace, mais sans se battre, et sans paroles violentes

A l’occasion du congrès intitulé : « Non-violence et paix juste : une contribution à la compréhension de la non-violence, et à l’engagement envers celle-ci de la part des catholiques » (cf. Zenit du 12 avril 2016), le pape François encourage le « renouveau du témoignage actif de non-violence comme une « arme » pour réaliser la paix ».

Il rappelle l’objectif de parvenir au désarmement total « en rejoignant l’âme même des gens, en construisant des ponts, en luttant contre la peur et en poursuivant un dialogue ouvert et sincère ».Il encourage aussi la « pratique du dialogue », dont il explique les exigences, notamment de pardon et de miséricorde.

N.B. Ceci n’est qu’une simple introduction à la non-violence. Il faudra se former plus largement –et mieux – sur cette question si importante.

Les religions sont-elles facteurs de paix ?

Rencontres avec des classes de 1ère et de Terminale dans un lycée. Nous avons commencé par définir la religion. C’est ce qui nous relie à Dieu, mais aussi aux autres, avec des prières, des sacrifices et des rites divers pour cela. Nous avons expliqué aussi ce que veut dire être facteur : artisan-bâtisseur. Et rappelé, selon l’Unesco que c’est dans le cœur de l’homme que naît la paix.

Toutes les religions parlent de paix.

Dans l'Islam,au moment du Ramadan, on se demande "pardon". On affirme que DIEU est le Compatissant et le Miséricordieux. A la messe, les chrétiens se donnent un signe de paix. On reconnait que les religions travaillent pour la PAIX à trois niveaux:

  • l'aide aux pauvres; la pauvreté étant une grande cause de violence,

  • l'éducation aux droits humains,

  • la réconciliation dans les familles et dans la société,

Il est donc important de s'engager dans cette ligne!

Pour cette éducation à la paix, les religions peuvent s'appuyer sur les valeurs traditionnelles, ce qui est très important. La TERANGA (l'hospitalité) mais aussi la patience ou le pardon par exemple, et ce qu’on appelle en ouolof : mun, teggin, kërsa, suttural, jöm, ngor…Ce sont des choses importantes pour construire la PAIX. Et dans chacune de nos langues du Sénégal, on se salue en se souhaitant la paix : Jamm rekk, Jamm sön, jarama, kasumaï….

Dans leur doctrine, les religions se présentent comme des facteurs de pays. D’ailleurs, le mot religion veut dire : relier : à Dieu, mais aussi aux hommes. Mais souvent dans la réalité, c’est tout à fait autre chose. Pourquoi cela ?

Pourquoi les religions ne s’entendent-elles pas ?

D’abord, cela vient du cœur de l’homme. L’homme naturellement veut se montrer, être le premier, imposer ses idées aux autres, et avoir raison. Dans tout homme, il y a l’agressivité qui nous pousse à agir, mais aussi, parfois, à s’opposer aux autres. Pourtant, chacun devrait reconnaître qu’il n’est pas meilleur que les autres. Et voir le bien, au lieu de voir le mal chez les autres. C’est la parabole de la paille et de la poutre dans l’œil (Mat 7,3).

Très souvent, on cherche la paix entre les membres d’une même religion, mais beaucoup moins avec les autres. Parce qu’on cherche les intérêts de sa propre religion, pour qu’elle devienne la plus forte. Lorsqu’il y a des oppositions entre les gens, c’est toujours dangereux. Mais lorsque ces oppositions sont entre des gens de religion différente, la violence devient souvent beaucoup plus grande. Car la religion touche jusqu’au fond du cœur de l’homme.

La question qui se pose est donc celle-ci: que faisons-nous de notre foi? Est-ce que nous l'utilisons pour nous imposer aux autres, ou bien pour nous entendre?

  • On a noté aussi que souvent, quand on parle d’opposition entre les religions, en fait ce ne sont pas des oppositions au niveau religieux, mais pour des problèmes économiques (l’argent et les biens) ou politiques (pour le pouvoir). C’est le cas par exemple de l’Etat Islamique DAECH, de Boko Aram, de la guerre entre palestiniens et israéliens pour la possession des terres, des oppositions au nord du Nigéria entre éleveurs et cultivateurs. Même s’il est vrai que les uns sont musulmans et les autres chrétiens ou animistes, ce n’est pas une guerre de religion, ni même au sujet de la religion. D’ailleurs DAECH ou Boko Aram tuent plus de musulmans que de chrétiens.

  • On a relevé de nombreux efforts de la part des religions, pour apporter la paix. Ainsi dans de nombreux pays d’Afrique, des évêques ont été nommés comme responsables des conférences nationales. Et maintenant, des commissions Justice, Paix et Réconciliation. Il y a de plus en plus de rencontres entre les différentes religions. Les responsables religieux chrétiens, musulmans et animistes agissent ensemble, pour rétablir la paix en Centrafrique. Le Vatican est intervenu, pour améliorer les relations entre Cuba et les Etats Unis. L’association chrétienne San Egidio travaille beaucoup pour la paix au Mozambique, au Mali, au Soudan, et en Guinée Bissau, après avoir agi par exemple en Algérie.

La solution n’est donc pas d’interdire les religions, comme certains le voudraient, pour qu’il n’y ait plus d’opposition entre elles. Mais bien, de vivre sa foi en vérité, d’accepter de changer son cœur, et aussi de respecter les autres religions. Dans le débat qui a suivi, nous avons parlé de nombreux problèmes. Par exemple, celui de Charlie Hebdo, et de l’importance de la liberté d’expression, à condition de respecter les opinions des autres. En particulier leur religion. Déjà la Révolution Française de 1789 affirmait : « Ma liberté s’arrête, là où commence la liberté des autres ». Nous avons relevé l’importance de la laïcité pour vivre en paix ensemble. A condition que ce soit une laïcité ouverte et positive, qui reconnaisse toutes les religions, et qui ne cherche pas à les interdire.

Nous avons noté aussi l’importance des religions traditionnelles, qu’il faudrait respecter davantage. C’est une base commune que nous partageons, par exemple au Sénégal, entre chrétiens et musulmans, qui nous permet de mieux nous comprendre. Et aussi le fait que dans les mêmes familles, il y ait à la fois des chrétiens et des musulmans.

Comment construire la paix?

D’abord il faut attaquer les causes internes, c’est-à-dire changer notre cœur. Comme le dit l’UNESCO : « La paix naît du cœur de l’homme ». La paix dépend de chacun d'entre nous, dans sa vie personnelle. Il faut apprendre à respecter l'autre, et à vivre en amitié avec ceux qui sont différents de nous.

Ne pas oublier l'importance de la prière, car la Paix vient de DIEU.

Se former d’abord soi-même, dans sa propre religion pour développer tous les facteurs de paix. Nous avons pris l’exemple du djihad, dans l’Islam. Le vrai djihad, ce n’est pas faire la guerre contre les autres. Le grand djihad c’est faire la guerre contre le mal et le péché, qui est en nous-même. C’est la conversion. Nous avons dit que les gens de Boko Aram ou de Daesh, ne sont pas des vrais croyants. Ce qui les conduit, ce n’est pas la foi, même s’ils prétendent agir au nom de Dieu.

Il faut une véritable éducation à la paix et aussi à la non-violence. Non pas tout supporter sans rien dire. Mais lutter contre la méchanceté, en utilisant des méthodes non violentes, qui peuvent apporter la paix et le pardon, et en refusant la vengeance. Suivre donc l’exemple des grands témoins de la non-violence : Gandhi, Martin Luther King, Desmond Tutu, etc. Mais aussi des gens qui, autour de nous, sont capables de faire la paix,dans la vie de tous les jours. Et bien sûr, réfléchir à la vie de Jésus et des prophètes.

Il est essentiel de respecter la liberté de l'autre. Le Coran dit : » il ne faut forcer personne en matière de religion ». La seule solution, c’est de s’accepter différents. Non pas la tolérance (se supporter), mais considérer nos différences comme une richesse, et une possibilité de nous compléter.

Nous devons apprendre à regarder l’autre, avec un œil bon. L’autre est bon, et il peut beaucoup m’apporter : voir le positif chez l’autre, et refuser de le critiquer. Et chercher à comprendre pourquoi il se conduit d’une façon différente de la mienne. C’est difficile. Au début, il faut se forcer. Mais peu à peu, on en prend l’habitude, en s’appuyant les uns sur les autres.

Pour dialoguer en vérité, il faut faire l'effort de connaître la religion de l'autre : non pas pour la critiquer, mais en écoutant ceux des autres religions avec un cœur ouvert, et un regard positif. Cela demande du temps mais c'est important. C’est quand on ne connaît pas la religion de l’autre, qu’on en a peur.Il faut savoir prendre le temps nécessaire de se parler pour se connaître.

Accepter qu’aucun d’entre nous n’a toute la vérité. L’autre a quelque chose à m’apprendre, même surla façon de vivre ma propre foi. Nous avons donné l’exemple des échanges qui se font au moment du carême et du ramadan, entre chrétiens et musulmans.

C'est en agissant ensemble que l'on peut apprendre à se connaître et à se respecter. On apprend à se faire confiance, et il peut alors y avoir un véritable dialogue. Chacun explique à l'autre ses motivations : pourquoi il agit ainsi, et quelle aide sa foi lui apporte. C’est donc important de nous engager dans des activités en faveur des droits humains. Une action à ce niveau-là est ouverte aux croyants de toutes les religions, comme aux non croyants. Et c’est cela qui permet de se comprendre et de s’accepter, en agissant ensemble.

C'est possible d'agir ensemble pour les droits humains, la Paix et la Justice. Un certain nombre de groupes agissent dans ce sens-là. Par exemple dans les quartiers. Mais aussi dans les prisons, et également dans des associations et ONG, comme le CAEDHU (centre africain d'éducation aux droits humains) où chrétiens et musulmans agissent ensemble. Et aussi dans des centres de formation des jeunes filles, où l'éducation est donnée ensemble aux filles des différentes religions. Dans les ASC et mouvements de jeunes, et tant d’autres organisations. On trouve la paix quand on agit ensemble pour le bien commun, la construction du pays, la lutte contre la violence, le respect des droits humains, en particulier pour les plus faibles, etc.

La guerre et la violence viennent souvent de la pauvreté. Chrétiens et musulmans, nous sommes appelés à lutter ensemble pour la paix, en attaquant les causes profondes de la pauvreté.

Bâtir notre vie sur notre référence commune,« la règle d’or », que l’on retrouve dans toutes les religions : «Ne fais pas aux autres, ce que tu ne veux pas qu’on te fasse à toi-même». Partir des 10 commandements, qui sont communs à toute l’humanité : ne pas tuer, ne pas mentir, ne pas voler, etc .Et surtout, vivre notre foi en Dieu. Nous sommes tous fils d’Adam, créés par Dieu. Et pour les juifs et les musulmans, nous sommes tous fils d’Abraham, le père des croyants.

Au sujet du dialogue chrétiens-musulmans,

nous avons noté qu’il y a quatre niveaux de dialogue :

  1. Le plus important, et celui qui est possible à tout le monde, c’est le dialogue de la vie : vivre ensemble, dans le respect de l’autre.

  2. Le dialogue d’actions : Agir ensemble, et peu à peu nous partageons nos idées et nos motivations.

  3. Le dialogue dans la prière : pas obligatoirement réciter les mêmes prières, puisque nous n’avons pas la même foi, ni la même façon de prier. Mais dans certaines occasions, donner à chacun la possibilité de prier, et écouter avec respect la prière de l’autre.

  4. Le dialogue de réflexion sur les différentes religions : c’est un dialogue très difficile. Il demande que l’on soit formé dans sa propre religion, et aussi que l’on connaisse bien la religion de l’autre.

Donc, en général, il y a beaucoup plus d’intérêt à travailler ensemble, qu’à discuter de religion. Si on discute de religion, chacun étant convaincu que la sienne est la meilleure, ce sera difficile de s’entendre. Il s’agit plutôt de respecter la religion de l’autre.

Nous jeunes, comment construire la paix dans nos familles, nos quartiers et nos écoles ? (carrefours)

Cela se fait par les petites choses chaque jour : se saluer, se sourire, dire merci, demander pardon. Même si on ne peut pas être ami avec tout le monde, accepter de parler avec tout le monde. Ne pas insulter, et ne pas répondre aux insultes Ne pas garder rancune. Et surtout ne jamais chercher à se venger, même si l’autre t’a fait du mal.

En classe, participer aux groupes de travail, de la façon la plus active possible. Chercher à régler les problèmes avec l’autorité, et les manques d’entente entre élèves

En famille, prendre ta part de responsabilité. Il y a des jeunes qui prennent leur famille comme un hôtel-restaurant. Ils mangent, et repartent tout de suite avec les copains, pour ne rentrer que la nuit. Ce n’est pas normal. Il y a aussi des jeunes qui parlent très bien avec leurs copains, mais qui ne disent rien à la maison avec les parents, ou même les frères et sœurs. Cela rend la vie impossible, et empêche la paix. Cela demande aussi que tu t’intéresses aux problèmes de ta famille, et que tu y prennes ta part de responsabilités. Et que tu fasses aussi la part de travail qui te revient. Enfin, tu es reconnaissant de ce que tes parents font pour toi, au lieu de voir ce qui ne va pas, et de toujours te plaindre.

Dans le quartier, il est important que tu rentres dans une association ou un groupe de ton choix. C’est ce qui te permet de connaître les autres, de vivre la camaraderie, et avec certains ou certaines, une vraie amitié. Et ainsi préparer ton avenir ou ton mariage.

Les jeunes sont beaucoup intéressés par Internet et les medias. Internet est une grande source d’informations, A toi de savoir ce que tu en fais. Est-ce simplement pour envoyer des tas de messages sur Facebook, ou encore pire pour regarder des films porno. Ou bien pour travailler, mais aussi pour t’engager. Internet te permet d’agir partout dans le monde. Par exemple, il y a des sites comme Avaaz, Greenpeace,etc… auxquels tu peux participer pour soutenir la libération des personnes, pour le respect de l’environnement, la lutte contre l’accaparement des terres ou le pillage de la mer, etc. Lorsque les filles au Nigéria ont été enlevées par Boko Haram, un site a été ouvert pour réclamer leur libération. Et aussi lorsque des étudiants ont été tués au Kenya, par les shebabs somaliens. Y as-tu participé ?

Et bien sûr, tu peux aussi participer à des actions plus concrètes, en t’engageant davantage. Bon courage.


Violence : causes et recherche de solutions

 

Le Pape François disait dans son homélie du 2/06/2013 devant des parents de soldats tués en Afghanistan : « La violence est la mort de l’Humanité, parce qu’elle tue le cœur et elle tue l’amour… La guerre vient de la haine et de l’envie du pouvoir… Et parce que l’argent est plus important que la personne, pour les grands de la terre ». Essayons de mieux comprendre ces paroles.

Après avoir décrit un certain nombre de violences, je chercherai à en déterminer les causes. Puis à la lumière de la Parole de Dieu, je proposerai quelques pistes de solutions. Avant d’expliquer ce qu’est exactement la  non-violence, et de répondre à la question : Les religions sont-elles des facteurs de paix ?

La situation : des personnes qui souffrent de la violence.

La violence se trouve partout. Nous en entendons parler chaque jour, dans les journaux, à la radio, à la télévision, et sur tous les réseaux sociaux. Il y a les guerres et les attentats, en Somalie, au Nigéria, en Syrie, en Irak, et dans tant d’autres régions et pays. Elle se trouve aussi dans notre pays. Elle est latente en Casamance, et aussi dans la vie de tous les jours. Il suffit de lire les journaux à la page société, sur les jugements dans les tribunaux : bagarres, insultes, agressions, vols, viols et même meurtres. Ce qu’on n’a pas honte d’appeler « faits divers », comme si cela était devenu une banalité. Quelques exemples concrets, parmi beaucoup d’autres :

Quand il y a un match de lutte, les commerçants ferment leurs boutiques, et les habitants du quartier ferment leurs portes. Des femmes et des jeunes filles sont agressées, jusque devant notre église.

On trouve la violence dans certains films. Mais aussi dans certaines émissions, où des intervenants s’attaquent violemment, et se parlent sans respect. Cela va jusqu’à l’utilisation d’internet pour le recrutement par les terroristes.

Les violences faites aux femmes

Violences  domestiques : elles sont physiques (coups et blessures volontaires, meurtre et assassinat), sexuelles (viol, inceste, pédophilie, mariages précoces et forcés), psychologiques, verbales, économiques…Les violences domestiques  sont reconnues comme un  fléau national et  ont  un impact sur  les membres de la famille, plus particulièrement sur les femmes et les enfants. Au  Sénégal, une femme sur quatre est victime de violences conjugales. Mais la plupart des victimes souffrent en silence, en raison d'une culture d'impunité profondément ancrée dans les mentalités. A la boutique de droits de Pikine en 2015, on a relevé 6006 cas de violences, dont 43 viols certains d’enfants. Et après une agression, il y a la peur de se retrouver en face des mêmes personnes. Les mutilations génitales féminines continuent dans les régions (92 % dans la région de Matam, 87 % à Sedhiou, 85 % à Tambacounda). Et leur nombre augmente aussi à Dakar

 Les  conséquences sont  multiples :dislocation de la famille, enfants perturbés, femmes dépressives, perte d’estime de soi chez les victimes, prostitution  des filles…….                    

Depuis un certain temps, des efforts sont faits. Mais après examen de la situation, il en  ressort que beaucoup de dossiers  n’arrivent  pas au  tribunal  et s’arrêtent  à la police

  • Des dossiers sont classés sans suite,  par désistement  de la partie civile 

  • des victimes ayant reçu des menaces ou des pressions, se rétractent en cours de  procédure

  • les décisions de justice   ne sont pas   souvent  exécutées

  • un nombre important de femmes  n’accède  pas  à la justice

  • des auteurs  sont  restés  impunis

A la célébration de la Journée mondiale de la femme en 2016, la présidente de l’Amicale des femmes de la police nationale, Khadiatou  Sall, disait : "Les femmes jouent un rôle prépondérant dans toutes les sociétés. Cela n’est plus à démontrer. Mais nous constatons avec amertume que certaines d’entre elles continuent d’être battues, violées, humiliées, et le plus souvent dans le silence. En ce 8 mars, je vous invite à avoir une pensée compatissante à toutes ces femmes confrontées aux affres de la douleur, de la guerre, de l’exil, de la famine et du désespoir ». 

La traite des femmes :

elle est organisée en réseau et rapporte beaucoup d’argent. Cela se passe souvent en trois étapes :

  • D’abord on propose à la femme du travail mais elle ne sait pas dans quelles conditions. On lui fait des promesses très vagues : tourisme etc. Ou bien il s’agit d’un recrutement forcé. La victime est approchée par des amis, des voisins ou des personnes étrangères.

  • Le déplacement : Il est légal ou illégal, souvent par tous les moyens.

  • L’exploitation : Il y a une exploitation dans le travail, mais aussi une exploitation sexuelle (prostitution) et même des prélèvements d’organes. La traite s’effectue avec violence, avec passage des frontières mais elle n’est pas obligatoirement forcée. Dans le trafic, ce sont parfois les intéressés qui vont voir les trafiquants.

Les enfants mendiants.

Ils sont plus de 30 000 à Dakar, et 55 000 au Sénégal. Pourtant, il y a une loi votée depuis plusieurs années contre la mendicité. Mais une loi sans éducation ne sert à rien.Le cadre légal existe (protocole) mais il n’y a pas de décret d’application.La traite des enfants existe en Afrique de l’Ouest. Le Sénégal est à la fois une destination et un pays de transit. De nombreux enfants quittent des villages pour s’adonner à la mendicité ou au travail domestique. On a calculé que 23 % des enfants travailleurs sont victimes de la traite (500 000), et que 34 000 jeunes filles, employées de maison (mbindaan), ont entre 7 et 18 ans.

Les migrants :

Même s’ils décident eux-mêmes de quitter leur pays, ils doivent supporter non seulement beaucoup de souffrances, mais aussi de grandes violences, en particulier de la part des passeurs. Et cela va jusqu’à la mort, que ce soit dans le désert ou dans  la mer. Et là aussi, ce sont les enfants qui sont les plus vulnérables, et donc qui subissent le plus de violences : «  La mendicité, le vol, le trafic de drogue, la vente de biens volés ainsi que l’exploitation sexuelle, la prostitution et le prélèvement d’organes tels sont les horreurs que subissant plusieurs mineurs non accompagnés, en entreprenant leur parcours migratoire », affirme Mgr Urbanczyk. Ils sont les premières victimes choisies par les trafiquants à cause de leur vulnérabilité. Et ils deviennent souvent objets d’un traumatisme nécessitant un long temps de récupération, sans toutefois la certitude du succès

la criminalité :

statistiques de l’année 2015 (Rapport d’activités de la police) :

36 375 individus arrêtés, dont 449 étrangers. Donc, quand on accuse les étrangers, on voit qu’ils ne sont pas tellement nombreux. De plus en plus de drogues dures sont utilisées : cocaïne et héroïne et pas seulement le yamba (khat, marijuana)

6333 accidents routiers avec 106 morts et 2136 blessés, en augmentation de 5,63 % par rapport à 2014.

Les violences structurelles

A côté des violences au niveau personnel, il y a les violences structurelles, qui viennent de l’organisation de la société, où les pauvres sont souvent exploités.

  • L’une des violences les plus graves, c’est certainement le fait que certaines personnes sont complètement écrasées et marginalisées, dans l’organisation de la société.

  • Mais aussi les victimes de la déforestation, des feux de brousse et de l’avancée du désert, causes importantes de l’émigration, avec toutes les violences qui les accompagnent.

L’accaparement des terres :

C’est un phénomène, mis en œuvre par des élites locales, nationales et transnationales ainsi que par des investisseurs et spéculateurs, avec la complicité des gouvernements et des autorités locales. Il a pour objectif la mainmise sur les ressources les plus précieuses au monde. Ce mouvement  a provoqué l’expulsion de leurs terres et le déplacement forcé des populations locales - en premier lieu les paysannes et les paysans. Il engendre des violations des droits. Il a provoqué une augmentation de la pauvreté et de la fracture sociale à travers nos pays en contribuant quotidiennement à aggraver le chômage et la bidonvilisation du pays.Les principaux acteurs des accaparements terres recherchent le profit avant tout, au détriment du bien-être des populations : ils planteront des cultures pour la production d’agrocarburants si elles se révèlent plus rentables que les cultures vivrières, et ils exporteront leur production alimentaire si cela est financièrement plus intéressant que de la distribuer sur les marchés locaux. (NdiakhateFallSecrétaire Général de l’UGPM à la Journée internationale des luttes paysannes le 17 avril 2014).

« Les affrontements entre éleveurs et agriculteurs se généralisent partout dans notre région, en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Bénin, au Nigeria, au Niger, au Togo et sont soldés par de nombreuses pertes en vies humaines, des destructions de cultures et des bétails»  (Commission de la CEDEAO Du 12-5-16

Souvent on n’accuse pas les vrais responsables. Par exemple au moment de Noël 2015, des femmes ont été agressées en Allemagne en particulier dans la ville de Cologne. On a tout de suite accusé les réfugiés venus de Syrie. Or après enquête, sur les 55 personnes arrêtées, il n’y avait que deux réfugiés. Dans ce cas-là, comme souvent, ces accusations étaient causées par des motivations cachées, en particulier le refus de l’accueil des réfugiés pour ce cas précis.

Il est donc nécessaire de bien situer les violences :

En 2010 dans une capitale d’Afrique Noire, des jeunes des quartiers populaires se révoltent, car rien n’est fait dans leurs quartiers. Il n’y a ni eau, ni électricité. La plupart des jeunes ne trouvent pas de travail, même ceux qui ont terminé l’Université. Toute la famille vit dans une grande situation de pauvreté. Et pendant ce temps-là, ils voient dans d’autres quartiers de grandes et belles villas en construction. Leurs propres quartiers sont traversés sans cesse par des voitures de luxe. Alors ces jeunes commencent à jeter des cailloux sur ces voitures. Ils font des barricades et brûlent des stations-services. On envoie les policiers et les militaires pour les chasser. Les gens qui apprennent cela disent : « Les jeunes sont violents. Ce sont des casseurs. Ce qu’ils font n’est pas bon. Ce n’est pas une solution ».

C’est vrai que ces jeunes sont violents. Mais il faudrait réfléchir un peu plus et voir les causes de cette violence, pour pouvoir y trouver des solutions appropriées. Et d’abord, ne faudrait-il pas analyser la situation en profondeur pour voir d’où cette violence vient exactement ? C’est vrai que ces jeunes ont cassé des pare-brises et incendié des stations-service. Mais pourquoi ? Parce que ce sont des symboles d’ilots de richesse et de luxe dans un monde de pauvreté. Et ces jeunes savent que souvent cette richesse est mal acquise. Elle est acquise sur leur propre exploitation. Et même très souvent à coups de détournements et de corruption.

Ils ont cassé des pare-brise. Mais la souffrance de ces jeunes et de leurs familles, la pauvreté continuelle, la faim ininterrompue, n’est-ce pas une violence plus grave ? Même si ces profiteurs et exploiteurs sont polis et n’insultent personne, n’est-ce pas eux qui sont les vrais violents ? N’est-ce pas contre cette violence institutionnalisée qu’il faudrait d’abord lutter ? Pour changer les structures de la société qui exploite les plus faibles et les plus pauvres. Tant qu’on n’aura pas agi sur les causes, c’est-à-dire ces grands écarts sociaux causés en plus par le comportement égoïste de ceux qui sont bien placés, les gens deviendront de plus en plus violents.

On a envoyé l’armée rétablir le calme. On dit : « la paix est revenue ». Est-ce vraiment cela la paix ? Que vaut une paix sans justice ? Que penser d’une paix construite sur la peur et la répression ? Est-ce que là aussi il n’y a pas violence ? Et en plus, c’est la violence du plus fort ! Peut-on construire la paix en écrasant les plus petits et les plus pauvres, qui sont déjà écrasés par des conditions de vie inhumaines ? Est-ce normal de faire taire par la force la voix de ceux qui ne demandent qu’à vivre ? Surtout quand ils se trouvent méprisés par des gens égoïstes, orgueilleux ou simplement insouciants. Et que ces jeunes ont l’impression que seules la peur et la violence pourront réveiller ces gens, et leur faire prendre conscience des problèmes des plus pauvres.

Mais il reste une 2ème question : Même si cette violence s’explique facilement, est-elle la meilleure solution pour résoudre les problèmes ? Car la violence entraîne la répression, et une violence encore plus forte. On  dit : « Celui qui agit par l’épée, mourra par l’épée ». Il faut à tout prix faire quelque chose contre les situations d’injustice. Mais quelle est la meilleure méthode, pour agir en profondeur sur les causes de ces injustices et transformer la société ? Et c’est là que nous rencontrons lanon violence. Je vais en parler plus loin

Avant d’aller plus loin, il est important de voir clair au sujet des mots que nous utilisons.Ce qui suit est tiré d’une série de 10 livrets d’un manuel pratique africain de réconciliation que vous pouvez consulter sur mon sitehttp://armel.duteil.free.fr à la rubrique : réconciliation, non violence. Consultez aussi le moteur de recherche en haut à gauche, en écrivant le mot violence.

Quelques définitions :

Le conflit :

Nos relations aux autres font partie de notre personnalité. L’homme est un être social. Mais notre rencontre avec l’autre peut entraîner des conflits, parce que mes désirs s’opposent à ses désirs. Alors, je me sens menacé. Pourtant, c’est à travers le conflit que je me fais reconnaître de l’autre, et qu’il se fait reconnaître de moi. Par conséquent, le conflit a pour but de construire des relations de justice entre nous. Le conflit est mauvais, quand il détruit mes forces, que je n’arrive plus à travailler ni même à dormir, et que je vois l’autre seulement comme un adversaire à abattre. Mais il est bon, quand je le vois comme un moyen d’avancer, pour enrichir ma vie en trouvant ensemble une solution. Il m’oblige aussi à faire la vérité en moi-même. Par exemple, je suis en conflit avec les membres de ma communauté. Je me demande pourquoi cela. Cela m’oblige à être plus vrai, et donc à rendre meilleure ma vie. Le problème, c’est de vivre le conflit d’une manière positive, et sans violence.

La violence :

Dans le mot violence, il y a le mot « viol ». C’est attaquer la personne dans ce qu’elle est profondément. C’est une injustice qui écrase les gens, et les empêche de vivre dignement. Cela va de l’humiliation jusqu’à tuer. Et souvent pour se libérer de ce poids, on réagit de la même façon que l’adversaire, par la contre violence.

Il ne faut pas mélanger la force et la violence. Avec la force, on peut construire ou détruire. Nous avons besoin de force, pour lutter contre les injustices. La violence, c’est quand on utilise sa force pour détruire. La violence empêche le conflit de jouer son rôle, et de mettre la justice entre les gens. La violence n’est jamais obligatoire. C’est elle qui entraîne les guerres, les pillages, les violences sexuelles, etc. Il est donc nécessaire de chercher une autre solution au conflit, que la violence.

La résolution non violente des conflits :

Cette solution c’est la non-violence, et en particulier pour nous, ce qu’on appelle la non-violence active évangélique. Je reconnais qu’il y a conflit, mais je refuse d’utiliser la violence comme moyen de le résoudre. Je vais y revenir plus loin

Le pardon :

ce terme est composé de deux mots : par – don. Le pardon, cela veut dire se donner jusqu’au bout. Le pardon, c’est ce que fait celui qui a supporté une violence. Le vrai pardon n’attend pas que celui qui a fait du mal, vienne demander pardon. Car souvent il a honte. Et il a peur d’être renvoyé, ou même insulté ou frappé. Jésus est clair à ce niveau. Il nous dit : « Tu viens offrir ton offrande à l’autel. Là, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, (toi tu n’as rien contre lui, tu ne lui as rien fait, c’est lui qui t’a fait violence). Laisse ton offrande devant l’autel. Va d’abord te réconcilier avec ton  frère ».

Jésus nous dit aussi : « Aimez même vos ennemis ». Ce n’est pas facultatif, ni un bon sentiment. C’est nécessaire pour être enfants du Père, qui fait lever son soleil sur les justes et sur les injustes.

Le pardon c’est une action complète et gratuite. Ce n’est pas le résultat d’un raisonnement. Et au niveau de la loi civile, il n’y a aucune raison de pardonner. C’est donc un acte personnel, qui va contre ce qui se fait habituellement, et contre ce que demande le code pénal. Ce n’est pas une tactique, ni même un calcul sur l’avenir. C’est un acte gratuit, comme l’amour de Dieu. C’est pourquoi Jésus nous demande de prier, en disant : « Père, pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés ».

Nous nous rappelons l’amour de Dieu pour son peuple, tout au long de l’ancienne Alliance. Et aussi les paroles de l’Evangile. Mais surtout le comportement de Jésus,  jusqu’à sa mort sur la croix. Ce sont ses paroles et son amour, qui peuvent nous donner la volonté et la force de pardonner.

La réconciliation :

Le pardon doit aboutir à la réconciliation. La réconciliation, ce n’est pas un retour au passé, où tout allait bien. C’est une transformation de toutes les personnes concernées. Jésus disait : « Changez vos cœurs ». La réconciliation c’est plus que le pardon. Elle demande d’avoir un contact personnel avec celui qui m’a fait du mal, pour nous entendre.  On peut pardonner, même si l’autre ne demande pas pardon, et ne veut donc pas se réconcilier. Le pardon dépend de moi, la réconciliation demande l’effort des deux. Et elle suppose que l’on laisse toute forme de violence, pour cela.

Violence : chercher les causes

En toutes choses, il faut d’avoir chercher les causes, sinon on ne pourra pas trouver de vraies solutions. Avant de chercher une réconciliation, il faut d’abord comprendre pourquoi il y a conflit ou une opposition. Car la réponse par la  violence apporte une plus grande violence des autres, en réaction.

Les causes sont parfois apparentes : la pauvreté, le chômage, la drogue, le manque d’éducation. Mais d’autres fois, on est très étonnés de constater des réactions très violentes, de la part de personnes bien éduquées, qui ont du travail et des moyens financiers. Alors d’où cela vient-il ? Voici quelques unes de ces causes :

  • Cela peut venir des médias qui montrent des richesses, une vie facile et niveau social élevé qui poussent à l’émigration, avec toutes les souffrances qui s’en suivent. Ou quand celle-ci n’est pas possible, à  la révolte et ensuite à la violence.

  • Le manque de formation et d’éducation. La douleur dans le cœur est augmentée par la pauvreté, qui entraîne la révolte à cause de la frustration. Celle-ci est encore aggravée par la recherche de l’oubli dans la drogue et les autres déviations.

  • Le mauvais exemple de mauvais camarades violents.

Souvent on colle des étiquettes

sur les gens. On les classe, on dit : il est comme ça. Et les autres commencent à juger cette personne, à partir de ce que nous avons dit. Lui n’a pas l’occasion de s’expliquer, ni de se défendre. Quand il va se rendre compte de cela, il va éclater. Et la seule solution qui lui reste alors c’est la violence.

Le dénigrement,

c’est se moquer des autres, les abaisser, les humilier : on refuse de voir leurs qualités. Les grandes violences, non seulement personnelles mais collectivessont toujours précédées par une période de dénigrement : les guerres civiles, les persécutions, les attentats etc,. Les reproches et les insultes nous mettent aussi en colère, et alors nous disons : c’est la faute de l’autre. Nous devenons agressifs et violents.

Les promesses :

Tu promets des choses à quelqu’un, tu ne le fais pas, cela le met aussi en colère. Et pour avoir ce que tu lui as promis, il se tourne vers la violence. C’est ce que l’on voit par exemple avec les étudiants face au gouvernement, et aussi avec les enseignants et autres syndicalistes, quand ils se lancent dans des grèves, qui rapidement dégénèrent et se continuent en violences.

Les comparaisons :

Si je me montre toujours supérieur devant les autres, ou bien cela va les décourager, ou bien cela va les révolter. Et si moi-même je me minimise par rapport aux autres, cela amène au même résultat.

La principale cause c’est la pauvreté, et aussi certaines pratiques sociales et culturelles comme la discrimination sexuelle. Il faudra donc agir à tous les niveaux : individuel, communautaire mais aussi social et général.

En 2O16, le 128ème pèlerinage marial de Popenguine avait pour thème : »Comme la vierge Marie, soyons témoins de la miséricorde divine ». Le journal Sud du 17 Mai écrit : «L'Eglise déplore et condamne les violences verbales et physiques, les injustices et fourberies…en milieu politique». Et le journal Le Populaire ajoute : «l’archevêque de Dakar appelle les autorités étatiques et les enseignants à respecter les droits des élèves et des étudiants ». A la cérémonie officielle, l’archevêque demande aux autorités présentes «une culture de  l‘honnêteté, de la conscience professionnelle et de l’intérêt général. Et un regard de tendresse sur les plusdémunis et les blessés de la vie». Il regrette que « la terre, notre maison commune, semble se transformer toujours davantage en dépotoir ». Il insiste sur  «la nécessité de mieux protéger les enfants, en les retirant de la rue », demandant de « mettre notre jeunesse à l’abri des idéologies avilissantes et déshumanisantes, véhiculées par des mercenaires de la foi qui sèment effroi et désolation au sein de paisibles et innocentes populations ». Et le prédicateur, Monseigneur Jean Noel Diouf, explique que « notre monde a vraiment soif de miséricorde ». Et qu’il faut «éveiller nos consciences souvent endormies, face au fléau de la pauvreté». Ainsi ont été abordées successivement, les différentes causes de violence dans la société.

Des rencontres inter-religieuses ont souvent lieu sur cette question de la violence, surtout depuis l’apparition de l’état islamique DAECH, d’Al Qaïda et Boko Aram. Un exemple :

Le Rabbin, YouniKrief, invite à relever des défis: sensibiliser, instruire, former la future génération à l’amour et au respect de l’autre, combattre le fanatisme qui détruit les religions et qui consiste à «mettre Dieu à son service »,  dialoguer, en acceptant la différence de l’autre, en prenant le temps de l’écouter, de le connaître, de l’apprécier tel qu’il est.  

Mgr Marc Stenger, constate l’actualité de la violence sous couvert d’un manteau de religion. Il invite à reconnaître que « nos religions sont porteuses de paix et la violence ne leur est pas inhérente » et « que les religions n’ont pas la prétention de détenir toute la vérité en toutes choses». La première violence, c’est de quitter la raison. Les trois grandes religions monothéistes doivent évacuer la violence. S’abandonner à Dieu, c’est se libérer de la violence et nous considérer les uns et les autres comme des frères. La rencontre d’Assise, avec Jean-Paul II, a redit la nature de Dieu qui est amour et l’importance de la prière pour l’édification de la paix : Tous s’adressent à Dieu pour changer les cœurs. 

L’Imam, Larbi Kéchat, affirme que personne ne saurait parler au nom de Dieu. Au début de chaque sourate du Coran, on le nomme le «Très miséricordieux ». La barbarie du siècle dernier n’a pas été provoquée par les religions. La Sourate 9, une des dernières révélées au prophète, affirme que le Djihad majeur c’est faire un « effort intérieur » et le djihad mineur, la guerre armée, n’est prévue que dans des circonstances exceptionnelles. Les mots n’ont de sens que repris dans leur contexte.

Le débat animé par le journaliste Antony Torzec a permis d’aborder des questions assez radicales: «Dans la Bible et dans le Coran, des versets ne prêtent-ils pas à confusion sur la violence? » « Les religions ne sont-elles pas des prétextes aux conflits politiques? » « Une hiérarchie dans les religions ne favoriserait-elle pas la paix? », « N’y a-t-il pas aujourd’hui un extrémisme laïque?» Les intervenants ont souligné l’importance de ne pas occulter la dimension religieuse de l’homme, de ne pas se servir des religions pour soutenir ses propres causes, de remettre les religions dans la sphère publique pour éviter une frustration qui entraîne violence et fanatisme, d’envisager une «hiérarchie» qui ne soit pas une parole monolithique (Juifs), qui soit un principe unificateur permettant de « tenir debout ensemble dans le respect des consciences » (chrétiens), qui soit une concertation collective dans un monde compliqué (musulmans). Cette soirée de débat nous donne envie d’avancer dans la connaissance mutuelle et dans un dialogue «porteur de paix». n 

Quelles actions mener ? A chacun de réfléchir et de prendre ses responsabilités, en lien avec les autres. Mais pour nous chrétiens, il est clair que cette Parole de Dieu doit nous éclairer et nous soutenir.


Education à la non violence et à la paix

Comme je vous l’ai écrit lors de mon séjour en France en Juillet, j’ai suivi une session de formation sur les « Méthodes d’action non violentes ». Avant mon départ, j’ai contacté la coordination internationale pour la décennie pour la promotion d’une culture de la non violence et de la paix, au profit des enfants du monde (2001-2010).

Il existe déjà une coordination nationale en Guinée. Nous en avons discuté dans la Commission « Justice et Paix » et nous allons certainement en faire partie. A la fois pour développer une éducation sans violence des enfants, pour défendre les droits des enfants et apprendre aux enfants eux-mêmes à agir contre la violence et pour la paix.

C’est très important, dans la mesure où traditionnellement on utilise encore les coups et la violence dans l’éducation. Il ne s’agit pas évidemment de supprimer l’autorité des parents et autres responsables, mais de chercher et proposer de nouvelles manières d’exercer son autorité aux parents et éducateurs.

Dossier de presse et proposition de déclaration sur le site http://www.nvpdecade.org/ :

Campagne internationale pour le droit des enfants à une éducation sans violence et à une éducation à la non-violence et à la paix


Violences faites aux femmes et place de la femme dans la société moderne

Rencontre organisée par la Commission Justice et Paix à la Paroisse des Martyrs le 8 décembre 2012, à l’occasion de l’anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme

Dans un premier temps, nous avons parlé des violences faites aux femmes. Elles sont bien connues. Ce sont d’abord toutes les femmes et filles qui sont frappées à la maison. C’est aussi le mariage forcé, également le viol, l’inceste, les grossesses indésirées, ce sont toutes les conditions mauvaises faites aux veuves et bien sûr le problème de l’excision. On verra dans la deuxième partie un certain nombre de choses que nous avons dit à ce sujet, au cours du partage qui a suivi les exposés.

La place de la femme dans la société : les évolutions actuelles

  1. Dans la tradition négro africaine, la femme était beaucoup respectée et honorée. Mais elle était respectée surtout en tant que mère, beaucoup moins en tant qu’épouse. D’ailleurs, même si un véritable amour naissait avec le temps entre le mari et son épouse, la femme n’était pas en tant que telle l’amie de son mari, parce que le mariage était surtout l’alliance entre deux familles. Et même lorsque la jeune fille était mariée, elle continuait à dépendre de sa famille : de son père ou de son oncle, de ses grands frères etc. si bien qu’elle n’était jamais une adulte totalement libre et responsable. D’ailleurs, le but principal du mariage n’était pas l’amour conjugal, mais d’avoir des enfants pour faire grandir la famille et continuer la vie reçue des ancêtres. A cela s’ajoutait bien sûr l’existence de la polygamie dans la plupart des pays.
    Il ne faudrait pas croire pour autant que la femme a trouvé toute sa place d’épouse, amie du mari, et encore moins de personne libre, dans la société actuelle. Et qu’il y a toujours un amour vrai et durable dans le couple : il suffit de voir le nombre de divorces, en augmentation. En tout cas, dans la polygamie, la 2ème ou la 3ème femme était une vraie épouse. Elle était vraiment mariée. Le mari avait été voir sa famille pour faire les premières démarches, remettre les cadeaux et payer la dot, signe d’alliance entre les deux familles. La femme de polygame était une vraie femme, elle avait une vraie sécurité. Actuellement on assiste au phénomène des « 2ème bureaux » : des hommes qui, à côté de leurs femmes, prennent une maîtresse. Cette situation est beaucoup plus grave que la polygamie et fait beaucoup plus dépendre les femmes de l’homme, car elles n’ont aucune sécurité. Elles ne sont pas reconnues par la société, elles n’ont donc aucune assurance, elles sont soumises au bon vouloir de l’homme, pour le temps qu’il voudra

  2. Grâce aux différentes méthodes de régulation des naissances, la femme arrive à une maîtrise de sa sexualité, au moins quand son mari le permet. Car ce n’est pas toujours le cas, et beaucoup de femmes sont obligées de limiter leurs grossesses en se cachant. C’est vrai que cette régulation des naissances est un progrès et peut être une libération de la femme. Mais cette séparation entre la sexualité (les relations sexuelles) et la grossesse (la fécondité) n’est pas obligatoirement une libération pour la femme. En effet, un certain nombre d’hommes se permettent d’imposer des relations sexuelles à leurs femmes en leur disant : « puisque tu prends la pilule, tu ne seras pas enceinte, pourquoi refuser ? » Cette évolution de la sexualité risque, dans le monde actuel, de faire de plus en plus de la femme, un objet de désir, et non pas une personne respectée pour elle-même, et dans sa dignité. Il suffit de voir l’image de la femme qui est utilisée dans la publicité, pour vendre et gagner de l’argent. En tout cas, malgré tous les efforts fournis, une vraie régulation des naissances a beaucoup de peine à se mettre en place.

  3. Le travail de la femme : Autrefois, la femme restait à la maison ou allait travailler aux champs avec toute la famille. Elle ne travaillait pas seule, à l’extérieur, dans des bureaux ou dans d’autres activités. Ce travail professionnel de la femme est une bonne chose, car cela lui donne une certaine indépendance, et aussi une liberté au point de vue financier, dans la mesure où elle peut gagner sa vie. Mais là encore tout n’est pas positif. En effet les femmes travaillent à l’extérieur de plus en plus, mais cela veut dire qu’elles se retrouvent avec un double travail : le travail à l’extérieur et le travail à la maison. Et jusqu’à maintenant, beaucoup d’hommes ne soulagent pas leurs femmes dans ce travail de la maison. L’homme, quand il revient du travail se repose, la femme doit s’occuper de la cuisine, de la vaisselle et même parfois des enfants.
    Autrefois au village, la femme travaillait avec son mari. Ils étaient toujours ensemble. Ils allaient ensemble au champ pour cultiver, même s’il y avait une répartition des activités et une différence de leurs rôles. Maintenant lorsque la femme a une activité professionnelle, elle travaille au dehors, loin de son mari. Elle est appelée à avoir des relations continues et souvent très proches, avec d’autres hommes. Cela suppose donc qu’il y ait un véritable amour et une fidélité entre l’homme et la femme, sinon ce sont des mariages qui se cassent. Et avec les enfants, c’est souvent la femme qui en subit les conséquences, plus que le mari. Par ailleurs, lorsque la femme travaille à l’extérieur, elle est parfois soumise aux harcèlements sexuels de certains patrons ou autres camarades de travail, et cela risque aussi de devenir un poids.

  4. La théorie du genre : Cette théorie a ceci de positif qu’elle veut libérer la femme d’un modèle sexuel imposé, pour être elle-même, et vivre à égalité et à l’aise dans la société. Mais ce n’est pas toujours ce qui se passe en réalité, et on assiste actuellement à beaucoup de déviations et d’exagération, à partir de cette théorie du genre. Il est essentiel que la femme soit libre, et qu’elle soit traitée à égalité avec l’homme. Mais il est tout aussi important qu’elle reste elle-même et différente de l’homme. Qu’ils soient égaux mais différents pour être complémentaires. L’égalité pour la femme ne demande pas qu’elle rejette sa sexualité profonde, ni qu’elle devienne semblable aux hommes. Au contraire, la société a besoin des qualités féminines, même si ces qualités et ces valeurs viennent en grande partie de la culture et de l’éducation qui est donnée. Et on ne peut pas nier que si la sexualité ne se limite pas au corps, la dimension physique de la sexualité marque profondément toute la personnalité de l’homme et de la femme.
    Tout cela nous montre qu’il y a de grands changement actuellement, que dans l’évolution moderne il y a beaucoup de positif, que les intentions sont certainement très bonnes, mais que la façon dont cela est vécu n’est pas toujours positif.

La Parole de Dieu

Que nous dit la Parole de Dieu sur toutes ces questions ?

Dès le début de la Bible, dans le Livre de la Genèse, on nous dit : « Dieu créa l’homme, homme et femme il les créa ». La femme, comme l’homme, a été créée directement par Dieu. Ce n’est pas l’homme qui a créé la femme. Au contraire, il dormait quand Dieu a créé la femme à partir de sa côte. Il n’y est donc pour rien. La Genèse dit bien : « Homme et femme il les créa, à son image il les créa ». L’homme tout seul n’est pas image de Dieu, la femme toute seule non plus d’ailleurs. C’est ensemble homme et femme qu’ils sont image de Dieu. Et pour cela l’homme a donc besoin de la femme. Car Dieu est amour. Dieu est Trinité c’est-à-dire que Dieu est famille, Dieu n’est pas tout seul.

  1. Les prophètes : Les prophètes ont amené une véritable libération de la femme en Israël. Ils ont donné toute leur importance à l’amour, et en particulier à l’amour conjugal et donc personnel. Voir par exemple le prophète Osée, qui insiste sur l’importance de la fidélité et du pardon dans le couple. Ce qui suppose que l’on se traite à égalité. Voir aussi le Livre des Cantiques qui donne toute sa place à la femme, non pas comme mère, mais comme épouse et comme amante. C’est toute l’importance de la sexualité vécue dans l’amour, non seulement reconnue par Dieu mais signe de l’amour et de la joie que Dieu veut nous donner.
    Déjà dans le Livre de la Genèse, il y a deux textes de la création de l’homme et de la femme. Dans le premier texte, Genèse 1, 28 Dieu bénit l’homme et la femme et leur dit : « Soyez féconds, multipliez-vous et remplissez la terre ». Cela correspond au rôle traditionnel de la femme comme mère. Mais dans le deuxième récit de la création, au chapitre 2, verset 18, Dieu dit : « Il n’est pas bon que l’homme soit seul. Je vais lui faire une aide qui lui convienne. » Quand on dit une aide, cela ne signifie pas que la femme est inférieure à l’homme, puisque nous disons aussi à Dieu « Seigneur viens à mon aide ». Ce que l’on veut faire comprendre, c’est que la femme est égale et complémentaire de l’homme. D’ailleurs l’homme le reconnaît et il dit (verset 23) : « pour le coup, celle-ci est l’os de mes os, c’est la chair de ma chair. C’est pourquoi l’homme quitte son père et sa mère et s’attache à sa femme et ils deviennent une seule chair ». Ce texte nous montre bien la valeur et la dignité de la femme : sa valeur en tant que telle comme épouse. Et l’importance de la sexualité, même s’il n’y a pas d’enfant.
    Une autre chose qui nous montre toute la dignité de la femme, c’est ce que Dieu dit de lui-même, déjà dans l’ancienne Alliance. Dieu est Père mais Dieu est aussi notre mère. Dans les textes des prophètes,, Dieu dit : « Israël, quand tu es né tu baignais dans ton sang, je t’ai coupé le cordon ombilical et je t’ai lavé, j’ai pris soin de toi». Et aussi « Israël Je t’ai éduqué comme une mère, je t’ai porté dans mes bras ». Et le psaume dit « Mon âme repose en Dieu comme le bébé sur le sein de sa mère ». Dieu dit encore « Israël je t’ai pris, je t’ai appris à marcher, je t’ai éduqué ». Et il ajoute : « même si une mère oubliait son enfant, moi je ne t’oublierai pas. Regarde j’ai gravé ton nom dans le creux de mes mains ». Dieu est donc vraiment notre mère et pas seulement notre Père.
    On n’oubliera pas non plus la place de Marie, dans le Nouveau Testament et actuellement dans la vie de l’Eglise. Même s’il faut revoir l’image de Marie. Marie ce n’est pas seulement une statue, elle n’a pas passé toute sa vie les mains jointes, avec un chapelet à la main. Marie était une jeune fille, libre, courageuse et indépendante. Elle a su prendre ses responsabilités. Dès le début, au moment de l’Annonciation quand elle est devenue enceinte, comme dans toute la vie de son foyer. Lorsque que Jésus reste au Temple, c’est Marie qui lui parle à Jérusalem, et non pas Joseph, en lui disant : « Mon Fils pourquoi nous as-tu fait cela ». Marie c’est une forte femme, elle n’a pas eu peur de se tenir debout au pied de la croix quand son Fils mourrait, devant tous les hommes qui se moquaient de Lui, et donc aussi d’elle-même. Elle n’a pas eu honte d’être montrée du doigt comme la mère du condamné à mort. Et c’est elle qui rassemblera les apôtres, le jour de la Pentecôte. Elle a su prendre ses responsabilités tout au long de sa vie. En particulier à Cana où elle prend les choses en mains, et vient dire à son Fils « Ils n’ont plus de vin ».
    Tout cela nous montre l’importance du mariage face aux tendances actuelles de l’union libre, du libertinage mais aussi du PACS, qui voudrait venir jusqu’à nous. Sans parler du « mariage » pour tous, le mariage des homosexuels, qui vient détruire complètement le sens traditionnel du mariage, mais aussi de la famille, et du rôle de l’homme et de la femme. Dans la Bible, le mariage est une alliance, il est le signe vivant de l’Alliance que Dieu a faite avec son peuple Israël, au temps de Moïse. Dieu dit dans les Prophètes « Comme un fiancé aime sa fiancée, c’est ainsi que je t’aime Israël ».
    Dans le Nouveau Testament, Paul nous dit que le mariage, l’union entre l’homme et la femme, est le signe de l’amour du Christ pour son Eglise, et de l’Alliance que Jésus-Christ a fait avec tous les hommes pour les sauver. Voir la lettre aux Ephésiens 5, 21 à 33 où Paul dit bien « ce mystère est grand ». C’est donc un mystère. Les hommes citent souvent ce passage : « Le mari est le chef de la femme ». Mais ils oublient la suite … » comme le Christ est le chef de l’Eglise : Il a donné sa vie pour elle, par amour ». Ce qui change tout. Et ils oublient aussi que ce passage commence par le verset 21 : « Soyez soumis les uns aux autres, dans l’amour du Christ ». L’homme doit donc lui aussi être soumis à sa femme. Cela ne va pas à sens unique. C’est cela qui donne tout son sens et sa valeur actuelle au mariage traditionnel. Le mariage ancien était aussi une alliance entre deux familles. Il est essentiel dans la vie moderne de garder cette alliance, cette union entre les deux familles, même si elle doit être vivifiée par un amour conjugal personnel et libre, de l’homme et de la femme dans le couple.
    Par rapport au miracle de Cana : un miracle c’est un signe. Lorsque Jésus change l’eau en vin pendant un mariage, c’est le signe qu’il vient aussi transformer l’amour de l’homme et de la femme dans son amour à Lui. Il vient transformer le mariage traditionnel en un mariage chrétien, qui est une partie constituante de l’Alliance qu’Il a faite avec tous les hommes pour les sauver. C’est cela la perspective nouvelle du mariage que Dieu nous propose. Et non pas le libertinage et le mariage pour tous.
    Cette importance de l’alliance, donc de la famille, ne vient pas supprimer l’égalité entre l’homme et la femme, ni faire de la femme une personne inférieure. Paul écrit dans l’épître aux Galates, chapitre 3, 28 « Dans le Christ il n’y a plus ni juif ni grec (pas de racisme), il n’y a plus d’esclave ni homme libre (tous sont égaux), il n’y a plus ni homme ni femme, car vous faites tous un dans le Christ Jésus ». La femme n’est donc pas inférieure à l’homme. Elle a sa valeur et sa dignité en elle-même. La responsabilité de l’homme et de la femme, c’est d’être unis dans le respect et le don mutuel, dans le Christ Jésus.
    Le Livre de l’Apocalypse (21, 1 et 2) nous donne un nouvel aspect de la place et de la dignité de la femme : « Je vois un ciel nouveau et une terre nouvelle… Je vois la cité sainte, la Jérusalem nouvelle qui descend du ciel, de chez Dieu. Elle s’est faite belle comme une jeune mariée, parée pour son époux. Et j’entends une voix qui clame depuis le trône : Voici la demeure de Dieu avec les hommes ». Dieu veut créer un ciel nouveau et une terre nouvelle, un mariage nouveau, une nouvelle place et une nouvelle responsabilité à l’homme et à la femme, dans ce monde nouveau que nous commençons à vivre. Et dans ce monde nouveau, la femme a toute sa place et toute sa dignité. Elle vient de Dieu et elle est belle. Pas seulement dans ses habits, mais dans sa beauté intérieure. Elle est le signe de la présence de Dieu parmi les hommes. Et ce même Livre de l’Apocalypse se termine par cette phrase (22, 17) : « L’Esprit et l’Epouse disent : viens. Que celui qui entende dise aussi : viens ». L’épouse a toute sa place dans le Royaume de Dieu. Elle est animée par l’Esprit Saint

  2. Jésus : il faudrait bien sûr s’attacher longuement au comportement de Jésus avec les femmes. Jésus a travaillé avec les femmes. Tout un groupe de femmes le suivaient au long de son apostolat. Ce sont les femmes elles seules, qui étaient au pied de la croix quand on l’a tué. Tous les hommes étaient partis, sauf le petit Jean.
    Tout au long de sa vie, Jésus a non seulement respecté les femmes, mais il leur a rendu leur dignité. Il leur a confié une mission. Et les femmes l’ont beaucoup aidé à remplir lui-même sa propre mission. Il a défendu la femme adultère en disant : » que celui qui n’a jamais péché, lui jette la première pierre» (Jean 8,1-11).
    Devant Simon le pharisien qui se croyait pur et parfait devant Dieu, Jésus dit en montrant la prostituée : « il lui sera beaucoup pardonné parce qu’elle a beaucoup aimé » (Luc 7,40). Il a aidé cette femme à commencer une vie nouvelle, en lui disant : « Moi non plus, je ne te condamne pas, va en paix, mais ne pèche plus. Ta foi t’a sauvée ».
    Il n’a pas peur de parler en public au puits, à la samaritaine, alors que cela ne se faisait pas chez les juifs qu’un homme parle en public à une femme autre que la sienne. Surtout pas quand c’est une païenne et une étrangère comme la samaritaine (Jean 4). Bien plus, il lui confie une mission : c’est la samaritaine qui va faire connaître le Christ aux autres habitants du village, qui viendront à leur tour à Jésus.
    Jésus pensait qu’il était envoyé seulement au peuple d’Israël. C’est la femme syrienne (la cananéenne) qui lui fait comprendre qu’il a été envoyé à tous les hommes, pour tous les sauver (Marc 7,26).
    C’est aussi à une femme, Marie Madeleine, qu’il va apparaître en premier (Jean 20,11). Et il lui confie la mission de faire connaître sa résurrection aux apôtres, même si ceux-ci ne croient ni Marie Madeleine, ni les autres femmes. Car ils étaient encore enfermés dans leurs préjugés, et pensaient qu’on ne pouvait pas faire confiance aux femmes.

  3. On pourra relever aussi la place de la femme dans l’Eglise, depuis le début. Des femmes ont lancé des communautés chrétiennes et ont soutenu Paul, dans son travail de faire connaître Jésus et d’annoncer l’Evangile. Déjà dans l’Ancien Testament, les femmes ont joué des rôles importants : comme Judith et Esther qui ont donné leurs noms à deux livres de la Bible, ou Myriam la sœur de Moïse et tant d’autres. On pourra se rappeler aussi la place et le rôle important qu’ont joué de nombreuses femmes dans toute la vie de l’Eglise. Pas seulement pour l’action caritative et humanitaire, pas seulement dans leur famille, mais même dans l’enseignement puisque plusieurs femmes, comme Catherine de Sienne ou Sainte Thérèse sont maintenant Docteurs de l’Eglise. Même si bien sûr, il reste beaucoup de choses à faire, pour que la femme ait sa vraie place dans l’Eglise.

Que faire ?

C’est dans le débat qui va suivre que l’on va tirer des conclusions. Déjà nous pouvons noter au moins trois choses importantes :

  1. Vivre nos relations entre hommes et femmes, dans le respect. Et faire en particulier de nos relations sexuelles, de vrais actes d’amour et de don de soi, dans la dignité et l’accueil réciproque

  2. Dans le mariage, se parler pour se comprendre et pour échanger au maximum. C’est l’échange qui permet à chacun de trouver sa place en étant lui-même, et de rejeter toute violence et toute oppression, que ce soit dans le domaine sexuel ou dans le reste de la vie de l’homme et de la femme.

  3. Veiller à une bonne éducation de nos enfants dans la liberté, la responsabilité, et l’égalité dans la différence pour une vraie complémentarité. Ne pas accepter par exemple que le petit garçon se fasse servir par ses sœurs, ou qu’il se permette de commander la bonne (l’employée de maison). Sinon plus tard, il se conduira comme un tyran envers sa femme, comme il le fait envers sa sœur pour le moment. (d’après le père Armel)

Les violences faites aux femmes

Déjà ces violences existaient dans la tradition. Les garçons s’imposaient aux filles. Mais les enfants étaient protégés malgré tout dans la famille. Ils ne sortaient pas n’importe comment, ils ne trainaient pas dans la rue. Maintenant, les enfants ne sont plus en sécurité ni dans la rue, ni à l’école, surtout les filles. Il y a les violences verbales, physiques, psychologiques et même économiques. La violence sexuelle, en particulier, fait beaucoup de dégâts dans les foyers et dans les écoles. Là où les enfants devraient être davantage protégés, ce sont justement des endroits où les enfants sont victimes de la part de proches, ce qui empêche d’agir efficacement. Surtout que les violences sexuelles sont cachées. L’inceste existe effectivement et il est difficile d’agir. Il va falloir à tout prix trouver des solutions, car le phénomène se développe de plus en plus. La victime se tait et comme elle ne peut pas en parler, elle garde tout cela dans son cœur, et même elle en arrive à penser que c’est normal. La promiscuité favorise les relations sexuelles. Il y a une grande inégalité entre garçons et filles. Les garçons se sentent beaucoup plus libres et souvent, on empêche les filles de parler en disant que leurs paroles n’ont pas de valeur. Lorsque les filles sont victimes par exemple d’attouchements sexuels, les mamans n’osent pas parler, parce qu’elles sont trop soumises devant leurs maris et les autres hommes. On prend comme excuse que c’est la vie moderne et qu’il faut donc accepter les changements de comportements. Souvent on ne laisse pas aux filles l’intimité nécessaire pour préserver leur dignité, par exemple pour aller aux toilettes. Et malgré toutes les nouvelles lois que l’on a votées, il n’y a pas beaucoup de solution. On parle d’émancipation de la femme, mais si la petite fille est bloquée psychologiquement, cette émancipation ne sera pas possible. Il faut donc trouver des solutions concrètes. Il y a aussi tous les problèmes des mariages consanguins. La fille est alors mise dans un carcan de violences, avec toutes les pesanteurs qui empêchent les choses d’avancer (d’après Aïssata Fall).

Les violences domestiques

Au cours des deux dernières décennies, les violences à l’égard des femmes sont devenues une préoccupation majeure. Elles sont considérées comme une violation des Droits Humains. Ces violences sont universelles et touchent toutes les femmes du monde, toutes catégories confondues

Le Sénégal, au plan international et régional a ratifie tous les instruments juridiques de protection des droits des femmes (la CEDEF et son Protocole facultatif, le Protocole de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes, le Pacte International sur les Droits Civils et Politiques (PIDCP) et le Pacte International sur les Droits Economiques, Sociaux et Culturels (PIDESC), la CDE et la Charte africaine des Droits et du bien être de l’enfant .

Au plan national, d’importantes mesures ont été prises (loi no 99 – 05 du 29 janvier 1999 et loi no 06- du 10 – mai 2005 etc.) pour la prévention et l’élimination des violences faites aux femmes

Malgré l’existence d’un arsenal juridique particulièrement riche, il a été noté la persistance des violences faites aux femmes et aux filles et la recrudescence des violences domestiques 

Définition

Violences domestiques : situation dans laquelle une personne exerce des violences sur une autre personne, avec qui elle a des relations familiales.

Elles sont physiques (coups et blessures volontaires, meurtre et assassinat ), sexuelles (viol, inceste, pédophilie, mariages précoces et forcés), psychologiques, verbales, économiques…

Les violences domestiques sont reconnues comme un fléau national et ont un impact sur les membres de la famille, plus particulièrement sur les femmes et les enfants

Les conséquences sont multiples : dislocation de la famille, enfants perturbés, femmes dépressives, perte d’estime de soi chez les victimes, prostitution des filles…

Au Sénégal, une femme sur quatre est victime de violences conjugales, pourtant la plupart des victimes souffrent en silence, en raison d'une culture d'impunité profondément ancrée

Après examen de la situation, il en ressort que :

  • Beaucoup de dossiers n’arrivent pas au tribunal et s’arrêtent à la police

  • Des dossiers sont classés sans suite par désistement de la partie civile

  • Des victimes ayant reçu des menaces ou des pressions, se rétractent en cours de procédure

  • Les décisions de justice ne sont pas souvent exécutées

  • Un nombre important de femmes n’accède pas à la justice

  • Des auteurs sont restés impunis

Une analyse approfondie du problème nous a permis de constater que les femmes victimes de violences sont confrontées à des blocages en ce qui  concerne 

  • l’accès à la justice

  • la pauvreté

  • l’analphabétisme

  • la méconnaissance de leurs droits par les femmes

  • les pesanteurs socioculturelles

  • les pressions d’ordre religieux

  • la peur de la police et du tribunal

  • le manque d’information

  • non maitrise des procédures

  • lourdeur des procédures

Ainsi, la constitution de partie civile par des organisations de défense des droits humains est impérative.

Nous sollicitons des autorités concernées, l’autorisation d’ester en justice, afin que les victimes de violences et les femmes affectées directement ou indirectement puissent voir un jour leur problème connaître une issue heureuse et leur préjudice réparé

(Fatou Dème Diouf)

La traite et le trafic des femmes

La traite des femmes est organisée en réseau et rapporte beaucoup d’argent. Cela se passe souvent en trois étapes :

  1. D’abord on propose à la femme du travail mais elle ne sait pas dans quelles conditions. On lui fait des promesses très vagues : tourisme etc. Ou bien il s’agit d’un recrutement forcé. La victime est approchée par des amis, des voisins ou des personnes étrangères.

  2. Le déplacement : Il est légal ou illégal, souvent par tous les moyens.

  3. L’exploitation : Il y a une exploitation dans le travail, mais aussi une exploitation sexuelle et même des prélèvements d’organes. La traite s’effectue avec violence, avec passage des frontières mais elle n’est pas obligatoirement forcée. Dans le trafic, ce sont parfois les intéressés qui vont voir les trafiquants.

Les causes profondes :

La principale cause c’est la pauvreté mais aussi des pratiques sociales et culturelles et la discrimination sexuelle (les conséquences au niveau des individus : danger de maladies ou de mort important, discrimination au retour chez soi, au niveau de la communauté). Les autorités ne font presque rien contre cette traite.

La traite des enfants existe en Afrique de l’Ouest. Le Sénégal est à la fois une destination et un pays de transit. De nombreux enfants quittent des villages pour s’adonner à la mendicité ou au travail domestique. On a calculé que 23 % des enfants travailleurs sont victimes de la traite (500 000) et que 34 000 jeunes filles, employées de maison, ont entre 7 et 18 ans. Pour les femmes, le problème c’est plutôt la prostitution.

Le cadre légal existe (protocole) mais il n’y a pas de décret d’application

(notes prises pendant l’exposé de Sœur Chantal).

Maître Padonou : le cadre législatif :

Le Sénégal est champion dans la ratification des traités internationaux. Tous les textes internationaux sont ratifiés et applicables. Nous avons un Code pénal très perfectionné qui prévoit des sanctions très lourdes. Mais le phénomène continue, malgré les jugements au tribunal, le Code pénal et l’action de la Société Civile, des intellectuels et des chefs religieux. Pourquoi ?

Il y a beaucoup de pesanteurs qui empêchent d’appliquer les textes. A chaque fois qu’il y a des violences faites dans les familles, c’est la loi du silence, parce que ce sont les hommes qui sont chefs de famille. Ou bien il y a des interventions de responsables politiques ou de chefs religieux musulmans (marabouts).

Malgré tous les efforts des associations féminines, les victimes ont beaucoup de peine à parler et à porter plainte. Il faut presque les forcer, parce qu’elles savent que très souvent, elles seront victimes de représailles, et elles n’ont pas toujours la protection dont elles auraient besoin. Il n’y a pas de prise en charge des victimes par l’Etat ni suffisamment d’assistantes sociales pour suivre les cas qui sont très nombreux et très variés. Même quand la femme porte plainte, on demande des preuves qu’elle ne peut pas fournir. Et souvent la famille refuse de parler contre ses propres membres (les parents, le chef de village ou le politicien du lieu).

Un autre problème : il est souvent difficile pour les victimes de parler en public, car les petites filles ne sont pas éduquées dans ce sens, et souvent les femmes sont analphabètes. Elles ne connaissent pas le français et elles sont perdues dans un tribunal. De plus, on demande presque toujours un certificat médical qu’il faut faire sans tarder. Et les victimes n’ont pas l’argent nécessaire pour faire faire ce certificat. La situation est spécialement difficile, quand il s’agit de problème sexuel. En effet le violeur se cache et, par définition, il n’y a pas de témoin. Et les victimes sont sous pression.

Même si le dossier arrive au Parquet, les victimes n’ont pas les moyens de payer un avocat qui coûte très cher, alors que très souvent au contraire, le violeur a de l’argent. Il va trouver des avocats qui chercheront des vices de forme : par exemple que le certificat a été fait par une infirmière et non pas par un gynécologue, ou qu’il a été fait trop tard après plusieurs jours. Pour ceux qui n’ont pas d’argent, il y a bien la possibilité d’assistance judiciaire. Mais les fonds qui sont affectés pour cela sont très réduits ou épuisés déjà à la fin du premier trimestre de l’année, si bien que le bâtonnier ne peut plus rien faire. Les avocats commis d’office sont mal payés, et souvent ils n’ont pas le temps ni même la volonté d’étudier le dossier. Le dossier est transmis à un juge qui n’a pas examiné le dossier à l’avance. Il faudrait écouter les témoins, mais ceux-ci refusent de venir par peur. Alors comme il n’y a rien de sûr, on ne condamne pas le violeur.

Mais surtout, très souvent, les choses sont arrêtées à la Police. On donne 50 000 frs CFA (70 euros) aux parents de la fille violée, et tout est terminé. Alors que tous les problèmes psychologiques restent et ne sont pas pris en compte. Souvent le garçon qui a violé dit « C’est ma copine » ou bien « elle était d’accord ». Si finalement le procès peut avoir lieu, le juge prendra ses responsabilités. Il donne alors le maximum de sanction. Il y a donc une grande responsabilité de la société civile dans ce domaine. La première chose, c’est de savoir comment les choses se passent (voir l’autre rencontre organisée par la commission de l’assistance judiciaire de l’aumônerie des prisons, que vous pouvez nous demander).

La sanction est une bonne chose, mais il faudrait en plus une éducation, un suivi psychologique et une réhabilitation. On dit que l’on punit, pour protéger la société. Mais en fait, très souvent lorsque les détenus sont libérés, ils recommencent la même chose, parce qu’ils n’ont pas été rééduqués. Donc la société n’est pas du tout protégée. Il faudrait intervenir tout de suite et avoir un suivi psychologique, aussi bien pour les victimes que pour les violeurs. Le problème de la violence est multiforme et difficile à comprendre. Il faut donc intervenir à tous les niveaux : de la famille, de l’entreprise, de la communauté, du quartier, de l’école… Il faut motiver les gens pour qu’ils luttent contre toutes les formes de violence, qu’elles soient physiques, morales, psychologiques, ou même simplement du chantage. Les auteurs sont très variés. Cela peut même être le père, le mari, l’oncle ou le grand frère, le maître de l’école ou le maître de l’école coranique.

Il faut voir les causes : la pauvreté, la promiscuité, les garçons et les filles qui dorment dans la même chambre, l’ignorance, l’alphabétisme etc.

Quelques notes prises pendant la discussion :

  • Les séances d’écoute que fait l’aumônerie des prisons sont très importantes, même s’il faudrait aller plus loin.

  • L’éducation et le soutien des familles sont absolument nécessaires.

  • On demande des sanctions très sévères mais ces sanctions ne servent à rien. Il faut l’éducation, mais l’éducation à un coût. Les associations qui veulent le faire ne sont pas soutenues par l’Etat, et l’Etat ne fait pratiquement rien dans ce domaine.

  • Il faudrait aussi surveiller de plus en plus les Internet, qui prennent des proportions très importantes avec la pornographie.

  • Les jugements prennent beaucoup trop de temps. Les gens trainent en prison avant d’être jugés, et surtout pour passer en appel (ceux-ci sont sans arrêt renvoyés ce qui fait que les détenus sont de plus en plus déstabilisés et entraînés par les mauvais conseils ou les mauvais exemples des autres prisonniers).

  • Il faudrait absolument mener une action au niveau de l’école. Ce n’est pas normal que des enseignants enceintent leurs élèves. Il faut moraliser l’enseignement, mais il faudrait déjà que les associations des parents d’élèves jouent leur rôle et interviennent quand c’est nécessaire. Nous qui sommes venus ici, il est très important que nous parlions de ces questions autour de nous, que nous fassions réfléchir les gens, en particulier dans nos communautés de quartier, et que nous commencions à agir d’abord dans nos propres familles.

  • La traite des femmes est en fait très répandue autour de nous mais nous n’y faisons pas attention. Par exemple, chaque matin, il y a tout un groupe de femmes venues des villages qui sont assises au rond-point de la place de Liberté 6, et qui attendent qu’on vienne leur donner du travail : laver le linge ou piler le mil. C’est de la traite. La mendicité c’est aussi une forme de traite. Les employées de maison sont soumises aussi à la traite et même aux violences sexuelles, quand ce n’est pas la prostitution. Les écoles coraniques ont aussi une grande responsabilité dans tout cela. Elles sont utilisées en fait, plus pour rapporter de l’argent au marabout, que pour apprendre le Coran. Cela tout le monde le sait, mais on ne fait rien pour que ça change réellement.

Qu’est-ce que le viol ?

Le viol, c’est tout acte de pénétration à caractère sexuel, obtenu sous la menace, la contrainte ou la violence, même par surprise. Même si cette pénétration se fait par le doigt ou un instrument, et non pas par les organes sexuels. Et que cela se fasse au niveau de la bouche, de l’appareil génital ou de l’anus. Soulever la robe d’une femme contre sa volonté ou montrer ses organes sexuels, c’est un attentat à la pudeur, qui est condamnable. Le viol est aggravé lorsqu’il est commis par une personne qui a une autorité sur la victime : un parent, un enseignant etc. Normalement dans ces conditions, le coupable est puni de 10 ans sans sursis.

Ce phénomène des violences sexuelles est universel. On le retrouve dans tous les pays. La justice ne propose pas de guérison, mais seulement la détention en prison, ce qui ne donne aucune chance de changer de comportement. En prison, on ne forme pas les gens pour qu’ils réfléchissent à ce qu’ils ont fait, ni pour qu’ils repartent dans une autre direction. Souvent les phénomènes de violence apparaissent, mais les gens ne savent pas quoi faire contre cela. Et il y a aussi toutes les croyances à la sorcellerie. Il faut soigner aussi bien les acteurs violents que les victimes, et bien sûr cela coûte cher. La première chose, c’est d’apprendre aux femmes dès l’enfance (aux petites filles) à prendre conscience qu’elles sont des personnes qui ont leur dignité, qu’elles ont droit au respect, mais aussi qu’elles sont des objets de désir. Il faut donc leur apprendre à réagir à toutes les provocations et ne pas rester passives.

Le problème de base c’est un problème d’éducation. Beaucoup de gens ne prennent plus leurs responsabilités. Autrefois tous les habitants du village intervenaient, pour éduquer les enfants du groupe. Mais maintenant on ne peut plus se permettre de faire la moindre remarque à un enfant, si ce n’est pas le sien. On paye alors les conséquences de l’individualisme et de l’égoïsme.

Il y a maintenant des cliniques juridiques, où des femmes juristes accueillent gratuitement les personnes qui ont des problèmes judiciaires à tous les niveaux, et qui n’ont pas les moyens de se payer un avocat. Par exemple à la PMI de la Médina, toute la journée, les lundi et vendredi.


Cours de morale avec les élèves de l’élémentaire sur le miséricorde

Explication du mot miséricorde : Le mot miséricorde est composé de deux mots : misère et corde (cœur en latin). La miséricorde c’est sentir la misère de l’autre dans son cœur, partager sa misère et tout faire pour l’aider, non seulement faire l’aumône. On pourra expliquer également ce que sont les œuvres de miséricorde, les œuvres corporelles et les œuvres spirituelles (à reprendre dans le message du carême). Voici le schéma proposé.

On commencera par expliquer que l’un des 99 noms de Dieu, et même le plus important dans l’islam c’est « Le Miséricordieux » (Rahmane). Et que la plupart des sourates commencent par ces mots : « au nom de Dieu le Compatissant, le Miséricordieux » (Rahmine).

Expliquer ces réflexions tirées de la lettre du pape sur la miséricorde, en termes simples et d’une façon active : Etre miséricordieux

La miséricorde, c’est d’abord le pardon. Si quelqu’un nous a fait du mal, nous ne pouvons pas l’oublier. Mais au moins, nous ne cherchons pas à nous venger, ni à rendre le mal pour le mal. Nous offrons nos souffrances à Dieu. Nous arrêtons de toujours penser au mal qu’on nous a fait. Nous cherchons plutôt, comment nous allons aimer nos frères et nos sœurs. Et nous prions Dieu, de changer notre cœur. C’est comme cela que, peu à peu, nous retrouverons la paix.

Ceux qui ont besoin de notre miséricorde sont très nombreux, et même de plus en plus nombreux : ceux qui ont faim; ceux qui dorment dans la rue; ceux qui n’ont pas de travail; les enfants qui n’ont pas la chance d’aller à l’école, et qui arrivent à vivre en portant les sacs et les bagages au marché, ou comme coxer dans les cars rapides ou dans d’autres petits métiers; ceux qui sont dans les villages éloignés, sans eau ni électricité, ni dispensaires; tous les étrangers qui viennent parmi nous, parfois sans rien avoir, parce qu’ils ont été chassés de leur pays. Ou qu’ils ont dû le quitter, à cause de la pauvreté, de la dictature, de la guerre ou des attentats. Il y a les enfants dans la rue, les handicapés, tous ceux qu’on traite de fous, tous ceux qui sont écrasés et méprisés. Ce sont ceux-là qui ont besoin de notre miséricorde.

Trop souvent nous pensons que la miséricorde c’est seulement faire l’aumône. Et que si nous n’avons pas d’argent, nous ne pouvons rien faire. Etre miséricordieux envers nos frères, ce n’est pas d’abord une question d’argent. Même si nous n’avons pas d’argent, nous pouvons saluer ceux qui nous entourent. Nous pouvons accueillir les étrangers, qui viennent dans notre quartier. Nous pouvons aider les handicapés, parler avec les enfants de la rue, respecter les enfants qui portent nos bagages, ou qui nous font rentrer dans les cars rapides. Même si nous n’avons pas d’argent pour acheter de la nourriture ou des médicaments, nous pouvons nous asseoir auprès de nos frères et de nos sœurs malades, et rester en silence. Pour qu’ils sachent qu’ils ne sont pas oubliés, et qu’il y a des gens qui pensent à eux. Souvent nous parlons trop, avec des paroles toutes faites, et des discours inutiles. Nous pouvons aussi prier avec eux, et avec leur famille. Nous pouvons conseiller leurs familles, pour qu’ils s’occupent bien de leurs malades, et qu’ils les conseillent dans la foi. Et surtout, qu’ils ne cherchent pas qui a envoyé cette maladie, et qu’ils laissent les accusations de sorcellerie et les malédictions. C’est tout cela la miséricorde.

Les actions de miséricorde : les actions corporelles, qui sont dans le corps, avec des choses. Mais aussi les actions spirituelles, dans le cœur (l’amitié), l’esprit (les bonnes idées), le ventre (le courage), et l’âme (la foi) de nos frères et de nos sœurs. Pour tous ceux qui souffrent, qui pleurent, qui sont découragés, qui sont écrasés, qui sont mis à la porte, chassés au loin. Tous ceux dont on dit : ils ne servent à rien, ils ne valent rien. La miséricorde, tout le monde doit la pratiquer. Pas seulement les grands, même les enfants. Souvent à l’école, quand un élève se trompe ou a une mauvaise note, les autres n’ont pas pitié, ils se moquent de lui. Souvent les enfants qui sont à l’école, méprisent ceux qui n’ont pas la chance d’étudier. S’ils sont bien habillés, ils se montrent. Et ils se moquent de leurs camarades qui n’ont pas de beaux habits. Ils rient des gens qui ont des problèmes psychologiques, en les traitant de fous. Ils n’ont pas de miséricorde non plus, envers les animaux. Ils s’amusent parfois à les frapper, et à leur jeter des pierres. La miséricorde c’est dans les petites choses. Tous les enfants.

Nous devons avoir pitié aussi de notre terre. Parce que nous la salissons, nous la cassons, nous la brûlons, nous tuons les plantes et les animaux, sans aucune pitié.

  1. Dégager les 4 idées principales :

    • Accueillir la miséricorde de Dieu dans la prière, en demandant pardon à Dieu.

    • Etre miséricordieux envers nous- mêmes, en acceptant nos faiblesses et nos limites

    • Etre miséricordieux avec les autres : aimer, vivre en paix, pardonner.

    • Apprendre aussi aux autres à être miséricordieux, les conseiller, leur enseigner la miséricorde, partager avec eux nos idées et nos actions

  1. Demander les manques de miséricorde qu’ils voient autour d’eux.

  2. On met ensuite les enfants en petits groupes, chaque groupe répondant à l’une de ces questions que l’on répartit entre les différents groupes :

    • Comment être miséricordieux à la maison, en famille ?

    • Comment être miséricordieux avec les autres dans le quartier ?

    • Comment être miséricordieux avec les camarades à l’école ?

Ensuite chaque groupe donne ses réponses devant tout le monde. On peut les visualiser et les mettre au tableau. On utilisera le plus possible les images.

Activités : (voir la fiche générale)

Ensuite on demande aux enfants de faire, par petits groupes, le dessin de quelqu’un de miséricordieux. Un autre groupe, peut écrire un texte sur la miséricorde (poème), un autre faire un petit théâtre etc. Puis on demandera aux enfants de mettre en pratique ce qu’ils ont dit. A la séance suivante on leur demandera ce qu’ils ont commencé à faire.

Réponses d’un groupe à titre d’exemple :

Comment être miséricordieux en famille ?

  • Il faut partager nos peines

  • Être tolérant entre nous

  • Nous pardonner les uns les autres

  • Savoir comment se comporter en famille avec ses aînés

  • Se respecter mutuellement les uns les autres

  • Être un bon modèle dans la famille

  • Il faut la solidarité et l’entente

  • Pardonner à ses frères et sœurs

  • Prier avec la famille

  • Enseigner à être miséricordieux

  • Respecter ses aînés

  • Être sérieux

  • Faire ses prières chaque jour

  • Se soucier de ses petits frères et sœurs et des autres

  • Savoir s’entraider

  • Savoir partager

  • Aider ceux qui ne comprennent pas leur religion

Comment être miséricordieux dans nos quartiers ?

  • Il faut enseigner les ignorants

  • Visiter les malades

  • Donner à manger à ceux qui ont faim et à boire à ceux qui ont soif.

  • Vêtir ceux qui sont nus.

  • Faire connaissance avec nos voisins

  • Être courtois avec les autres

  • Respecter les voisins pauvres comme les riches

  • Être franc pour gagner leur confiance

  • Avoir pitié, être humble et généreux

  • Avoir un esprit d’ouverture

  • Avoir un savoir vivre et être aimable

  • Avoir le sens de l’écoute

  • Participer au développement du quartier

  • Savoir cohabiter avec les voisins

  • Respecter les notables du quartier

  • Enseigner la religion aux jeunes du quartier

  • Créer des CV / AV

  • Organiser des prières de quartier

  • Faire avec eux la solidarité

  • Organiser des set-setal

  • Les aimer aussi et les respecter

  • Partager avec les autres pendant les moments difficiles

  • Être en paix avec les voisins

  • Être reconnaissant envers les autres

Comment être miséricordieux à l’école ?

  • Éviter de voler

  • Partager le pain avec celui qui n’en a pas

  • Éviter de se bagarrer

  • Prêter aux gens qui n’en ont pas

  • Ne pas se fâcher avec nos camarades



Rejetons la violence: Réflexions sur la violence

Résumé des interventions à la journée de l’engagement, fête du Christ Roi

Il y a de plus en plus de violences autour de nous : agressions, viols, vols et même meurtres, surtout dans notre grande banlieue. Des gens sont battus à mort, parfois pour rien après une bagarre, pour 100 frs ou pour une cigarette. On a compté plus de 1600 viols dans notre ville depuis le début de l’année. Et on tue aussi pour voler, parce que l’argent est devenu ce qui compte le plus pour certain.

Jeunes catholiques, que faire contre cela ? Il y a trois directions dans lesquelles agir. Nous terminons l’Année de la Miséricorde nos actions doivent continuer.

  1. Nous cherchons à être pleins de miséricorde, envers ceux qui sont victimes de la violence.

  2. Nous apprenons à pardonner et à vivre en paix avec les autres. La Miséricorde est plus forte que la violence. Elle détruit la haine et le péché, en particulier la méchanceté.

  3. Nous luttons contre les causes de la violence, en enseignant le pardon et la vie en société, plutôt que la vengeance et la bagarre.

Dieu est le Miséricordieux. Il nous appelle à être miséricordieux comme Lui. C’était le thème de l’année de la miséricorde : Miséricordieux comme le Père. Nous pensons à l’histoire du bon Samaritain. Les Juifs et les Samaritains étaient des ennemis. Pourtant le bon Samaritain a eu pitié du Juif frappé par les voleurs. Il l’a fait soigner, en payant lui-même de sa poche. Jésus nous dit : « Aimez même vos ennemis, priez pour ceux qui vous font du mal ». Ne rendons pas le mal pour le mal. Si tu pardonnes à ton ennemi, tu mets un feu (des

charbons brûlants) sur sa tête (Rom 12,20 et Psaume 25,21) qui va le pousser à changer. L’enfant prodigue a mangé tout l’héritage de son père (Luc 15,13). Son père continue à l’attendre pour lui pardonner, et il l’accueille à nouveau comme son fils. Il ne le frappe pas, il ne lui fait même pas de reproches, il le fait rentrer à nouveau dans sa famille, et dans son amour.

Quand notre frère nous a fait du mal, la solution ce n’est pas de nous battre, mais la paix et la réconciliation. Comme le disait Jésus : « Si ton frère a péché contre toi, va le trouver seul à seul. S’il t’écoute tu as sauvé ton frère. S’il ne t’écoute pas, prends avec toi deux ou trois personnes, pour que vous puissiez vous entendre par les conseils de ces deux ou trois personnes. Et s’il refuse de vous écouter, dis-le à la communauté » (Matthieu 18,15). Jésus disait aussi : « Tu viens présenter ton offrande à l’autel. Là, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi. Laisse là ton offrande. Va d’abord te réconcilier avec ton frère. Ensuite, reviens présenter ton offrande » (Mat 5,23). Et pour nous chrétiens, la prière est essentielle pour lutter contre la violence. De même que les sacrements, en particulier la réconciliation et l’Eucharistie.

Cela, nous pouvons le partager avec les musulmans qui nous entourent. Dans le Coran, presque toutes les sourates commencent par ces mots : « Au nom de Dieu, le compatissant, le Miséricordieux ». Ils disent que l’Islam est aussi une religion de Paix. Et beaucoup de villages s’appellent « Daaru Salam » : le village de la Paix. Ils se saluent en disant : «Assalam Alèikoum : la paix soit avec toi ». Et pour eux aussi, Dieu nous pardonne, et Il nous demande de pardonner à nos frères et à nos sœurs.

Souvent quand il y a un problème, les gens veulent montrer leur force, et ils attaquent l’autre. Etre miséricordieux, ce n’est pas être faible. Cela demande au contraire une très grande force pour pardonner, et beaucoup de courage. Il faut donc apprendre à pardonner, et se former à la non-violence évangélique. Dans le Notre Père nous disons : « Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés ».

Si quelqu’un est violent, c’est souvent parce qu’il souffre. S’il nous attaque, en paroles ou même en gestes agressifs, la solution ce n’est pas de répondre par la bagarre et les coups. Mais au contraire de comprendre que c’est quelqu’un qui souffre. Et qu’il a davantage besoin d’accueil et de compréhension, que de violences et de disputes.

Attaquer les causes de la violence Quelles sont-elles ?

Souvent c’est la pauvreté, surtout face aux inégalités qui existent dans la société, ce qui entraîne la révolte devant les injustices. La solution que l’on prend alors, c’est de frapper les autres, de casser et de se venger. Mais cela ne fit pas avancer les choses. Il est donc important d’enseigner d’autres moyens de lutter contre l’injustice, en particulier la non-violence évangélique (voir mon autre document sur ce thème, et le message du pape François du 1-1-17). Mais aussi d’apprendre à accepter sa situation, tout en cherchant à la rendre meilleure pour mieux vivre. Mais sans attaquer les autres, et sans casser le peu que l’on a.

Une autre cause, c’est le chômage. Quand des gens n’ont rien à faire, ils sont aigris et ils se mettent facilement en colère. Pour oublier leurs problèmes, ils se jettent souvent dans la drogue. Et à ce moment-là ils ne savent plus ce qu’ils font. Ou bien, ils s’occupent en se lançant dans la lutte ou le football. Mais là encore, souvent avec violence. Il suffit de voir ce qui se passe à la sortie des compétitions de lutte, ou aux matchs de football de quartier (les navétanes).

La cause la plus profonde c’est sans doute la perte de nos valeurs, et le manque d’éducation. Il est donc important de redonner aux personnes des valeurs morales et religieuses adaptées, et vivables dans le monde actuel : de revenir aux valeurs sénégalaises traditionnelles de l’hospitalité, du sérieux et de la maîtrise de soi, de la paix et de l’esprit communautaire, du courage dans les difficultés, du sens de l’honneur et de la dignité, de l’éducation et de l’honnêteté. Mais encore faut-il chercher, comment vivre ces valeurs traditionnelles dans le monde actuel, tel qu’il est. Et ne pas se limiter à des incantations sans efficacité, ou des pleurs sur la société traditionnelle qui a disparu. « On n’arrose pas le riz d’aujourd’hui, avec es pluies d’autrefois ». Et « quand le rythme du tam-tam change, le pas de la danse doit changer lui aussi ».

L’éducation à la paix, à la non-violence et à la miséricorde

Cette éducation doit se faire à tous les niveaux. D’abord dans la famille, entre mari et femme. D’où l’importance de la préparation au mariage, et du soutien des couples dans les communautés.

Puis l’éducation des enfants, pour leur apprendre à vivre en paix, d’abord entre frères et sœurs. Et ensuite avec les autres enfants du quartier : ne pas insulter, car les violences verbales se continuent souvent par des agressions physiques ; apprendre à parler avec bonté et douceur ; chercher à comprendre les autres, leurs souffrances et leurs réactions, même si parfois elles sont agressives.

L’école : à condition qu’elle ne se limite pas à un enseignement, mais cherche à assurer une véritable éducation. Cela demande d’abord une formation des enseignants, pour qu’ils soient de vrais éducateurs. Même si ce sont les parents qui sont les premiers responsables de l’éducation de leurs enfants, et qu’ils ne doivent pas se reposer seulement sur les enseignants. Cela demande de revoir aussi le rôle des associations des parents d’élèves, qui ne doivent pas se limiter aux versements des cotisations.

Pour tous : Aider les autres, chacun selon ses moyens et ses possibilités, personnellement et ensemble, pour éviter ce qui entraîne la violence. D’où l’importance des mouvements d’action catholique, mais aussi des autres associations de jeunes et de femmes (malheureusement il n’y a pas d’associations des hommes catholiques), les ONG et les autres organisations.

La lutte contre la drogue et l’alcool au niveau des personnes, mais aussi de l’Etat. A condition, là aussi, de ne pas se limiter à la répression. Mais de chercher la prévention mais surtout l’éducation.

Plus largement, la lutte contre le chômage, en particulier celui des jeunes, et contre la pauvreté. Là aussi, il ne s’agit pas d’en laisser toute la responsabilité à l’Etat. Mais que chaque citoyen se sente concerné, et qu’il agisse là où il vit. D’abord par les élections, pour choisir des responsables capables et qui aient le souci du peuple, et non pas de leur seul intérêt personnel. Nous allons avoir bientôt les élections législatives. Et au niveau local, nous avons la possibilité d’agir à partir de l’Acte 3 de la Décentralisation (voir mon document sur ce thème) avec toutes les possibilités d’action qu’il nous offre. Même si là aussi il y a beaucoup de choses à améliorer. Car on se contente trop souvent de déclarations, sans les mettre en pratique.