Armel Duteil

2012

Quelques idées sorties du partage de la parole de dieu (Isaïe 58, 1-12)

Dieu dit, par le prophète Isaïe (n° 6) : « Le jeûne que je préfère, c’est de défaire les chaines injustes, de relever ceux qui sont écrasés, de renvoyer libres ceux qui sont exploités et opprimés, c’est de casser tout ce qui écrase et fait souffrir l’homme… Le jeûne que j’aime, c’est de partager ton pain avec celui qui a faim. Recevoir chez toi le pauvre qui n’a pas de maison. Si tu vois quelqu’un qui est nu, tu lui donnes des habits et tu ne refuses pas d’aider celui qui est ta propre chair » 

Il ne faut pas séparer la vie religieuse et la vie sociale. Prier ne suffit pas. Dieu nous demande de relever celui qui est écrasé et d’aimer l’autre comme soi-même. Relever les autres, c’est cela qui me guérit moi-même. L’autre est ma propre chair. Quand on fait du mal à l’autre, on se fait du mal à soi-même

Aimer, c’est regarder ensemble dans la même direction : partager la lumière de l’Evangile et chercher ensemble le chemin à suivre.

Aider les autres. Ne pas se contenter de les regarder. Ni de prononcer des simples paroles de pitié.

Construire notre vie sur la Parole de Dieu. C’est elle qui nous montre le chemin. Nous n’avons pas besoin d’aller chez les marabouts ou chez les devins. Que faire pour avoir le bonheur ? Aimer Dieu, et Dieu se chargera de nos problèmes. Comme dit le psaume : « Mets tous tes soucis dans le Seigneur ». Par exemple, pour les jeunes qui préparent leurs examens, ça ne sert à rien d’aller chez les charlatans. Faire confiance à Dieu… à condition de travailler sérieusement bien sûr.

Certains chrétiens veulent jeûner comme les musulmans. Ils ne mangent pas de toute la journée. Ils attendent la nuit pour cela. Pour nous les chrétiens, le plus important du carême, ce n’est pas le jeûne. Il faut bien comprendre ce qu’est le jeûne. D’abord quand je jeûne, je me sens en plus faible. Le jeûne c’est pour connaître ses faiblesses, pour chercher à s’améliorer. C’est pour me faire petit devant Dieu et devant mes frères et mes sœurs.

Isaïe dit (n° 5) « Courbez la tête comme un jonc ». Le jeûne c’est pour développer notre humilité. Sans humilité, il y a des choses que l’on ne fera jamais. L’humilité, c’est une force qui vient du cœur et que le jeûne peut libérer en nous. C’est une faiblesse physique qui nous donne la force du cœur.

Le jeûne, c’est un dépouillement spirituel. Il ne suffit pas de se priver de nourriture. Se priver de nourriture, c’est bon parce que nous avons besoin de signes et de choses concrètes. Mais la privation de nourriture c’est le signe que l’on veut se priver des plaisirs mauvais, des mauvaises habitudes, des mauvaises tendances.

Il ne faut pas jeûner seulement avec notre estomac, mais aussi avec nos yeux, notre langue, nos oreilles etc. A quoi ça sert de jeûner si avec ma langue j’attaque les autres, je dis des mensonges et des mauvaises choses ?

Le jeûne c’est pour se dépouiller, pour être meilleur. Le carême c’est le temps des efforts mais ces efforts ne sont valables que si nous le faisons par amour pour Dieu et pour les autres. Quand je jeûne je me prive de nourriture. C’est pour montrer que pour moi Dieu est plus important que la nourriture, que l’argent, les habits, la fête etc.

Finalement le jeune c’est un appel à la conversion : Comme le dit Dieu, dans le prophète Isaïe, « pourquoi je n’accepte pas votre jeûne ? C’est parce que quand vous jeûnez, vous continuer à traiter vos affaires, vous ne pensez pas à moi mais vous pensez à l’argent. Vous exploitez et vous faites souffrir vos travailleurs. Vous jeûnez mais vous continuez à vous disputer, à vous battre et à frapper les autres méchamment du poing ». C’est cela qui est important dans le carême. Le carême c’est un temps de conversion comme nous le dit Jésus dans l’évangile de ce dimanche : « Convertissez-vous et croyez à l’Evangile ».

Le Carême c’est aussi le temps de la charité. C’est ce que nous rappelle la journée Caritas. Quand je jeûne, je me prive d’un repas, mais ce repas je dois le donner aux pauvres. C’est ce que l’on appelle le jeûne-partage. J’accepte volontairement d’avoir faim, pour sentir dans mon corps ce que les pauvres sentent, pas seulement pendant le carême mais pendant toute l’année, parce qu’ils n’ont pas assez à manger. Quand je sens physiquement leurs souffrances, je trouve le courage de partager avec eux. On a donné l’exemple de quelqu’un qui ne jeûne pas, mais qui donne à manger chaque jour à une famille nécessiteuse de son entourage. Il nous faut un jeûne concret. Prendre des décisions précises et les mettre en pratique. Le jeûne est à vivre tous les jours et la première chose, c’est de faire grandir la justice autour de nous. (voir le verset 6)

Au sujet de l’abstinence, ce qui est important ce n’est pas de se priver obligatoirement de viande, mais c’est l’effort que l’on fait et la privation qu’on accepte volontairement. C’est pourquoi pour certains, il sera plus important de se priver d’alcool, de cigarettes plutôt que de viande. Ou pour les enfants, se priver de gâteaux ou de bonbons. Et là encore, quand ils se privent de bonbons, on leur demande que cet argent avec lequel ils allaient acheter ces bonbons ou ces gâteaux, ils le donnent en offrande pour les pauvres. (action de Carême)

Le jeûne dure 40 jours, comme Jésus qui a jeûné 40 jours au désert, avant de commencer sa vie publique : annoncer l’évangile, guérir les malades et tous ceux qui souffraient, défendre et libérer ceux qui étaient écrasés et rejetés : les lépreux, les prostituées, les publicains, les femmes, les enfants, les étrangers, les samaritains etc. Nous jeûnons 40 jours pour vivre davantage avec Jésus et pour nous préparer nous aussi à faire le travail de Jésus : annoncer l’évangile, aider nos frères et lutter pour la justice.

Les 40 jours du carême nous rappelle aussi les 40 jours que le peuple hébreu a passés dans le désert. Dans le désert, la vie est dure. Il n’y a pas beaucoup à manger, on manque d’eau, on souffre. Mais le plus important des 40 ans du peuple dans le désert, ce ne sont pas ces souffrances, c’est l’Alliance d’amour que Dieu a fait avec son peuple, en lui donnant les dix commandements. L’important du carême c’est donc de garder les commandements et la parole de Dieu, dans l’amour. Comme Dieu l’a dit à Moïse : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de tout ton cœur, de toutes tes forces, de tout ton esprit et de toute ton âme, et tu aimeras ton prochain comme toi-même ».

Le temps du Carême, c’est le temps de la libération du peuple : Dieu a libéré son peuple de l’esclavage d’Egypte et il l’a fait entrer dans la Terre qu’Il leur avait promise. En Egypte, on tuait leurs garçons, on mariait leurs filles de force. Ils étaient soumis aux travaux forcés sans être payés, ils étaient humiliés. Le temps de Carême, c’est le temps où nous cherchons à libérer notre peuple de toutes les formes d’esclavage, et où nous cherchons à construire un pays nouveau, « une terre nouvelle où la justice habitera » (2° Pierre 3,13). Ce temps de carême nous appelle donc à construire notre pays. Le Sénégal en a besoin, spécialement en ce moment des élections, en ce temps de violence et de morts. Isaie nous dit, au nom de Dieu : «  Si tu luttes pour la justice, on reconstruira chez toi les ruines, tu relèveras les fondations des générations passées. On t’appellera celui qui répare les brèches et bouche les trous des murs. Celui qui refait les chemins pour que tout le monde puisse marcher dans la paix et habiter dans un pays de paix ». Pendant ce temps de Carême, Dieu nous appelle à reconstruire notre vie, pas tout seul, mais avec tous les citoyens et citoyennes du Sénégal.

Nous ne devons donc pas seulement changer notre propre vie, ni même changer notre communauté chrétienne. Dieu nous appelle à changer notre pays tout entier. Libérer le peuple du Sénégal, comme Dieu a libéré le peuple hébreu au temps de Moïse.

Le Carême c’est surtout la préparation aux fêtes de Pâques. Nous vivons ces 40 jours avec Jésus, pour nous convertir et pour ressusciter avec Jésus à une vie nouvelle aux fêtes de Pâques. Il faut que nous devenions pendant ce temps de carême, des hommes et des femmes nouveaux. Changer pas seulement notre comportement mais d’abord nos idées (laisser les idées païennes d’autrefois et les idées païennes d’aujourd’hui), et changer notre cœur.

Après avoir médité les conseils d’Isaïe au n° 6, 7 et 10, nous avons rappelé que le Carême est un temps de joie et de bonheur, et non pas un temps de tristesse. Comme le dit Isaïe, verset 9 : « Si tu fais cela, ta lumière éclatera comme la lumière du jour, tes blessures guériront rapidement, ta justice marchera devant toi, la gloire de Dieu te suivra. Quand tu crieras, Dieu te répondra. Quand tu l’appelleras il te dira me voici... Si tu te prives de nourriture pour partager avec celui qui a faim, si tu donnes à manger à celui qui est exploité, alors ta lumière brillera dans la nuit et ta lumière sera pour toi comme le milieu du jour. Dieu te conduira sans cesse, il te donnera à manger en plein désert, il donnera la force à tes os. Tu seras comme un jardin arrosé, comme une source qui jaillit dans le désert et dont les eaux ne s’arrête jamais ». Le carême c’est donc un temps de grâce, de joie et de bonheur, et cette joie nous la partageons avec les autres.