Armel Duteil

Nouvelles de 2010

  • Vendredi 31 Décembre 2010 : Nous terminons l’année par une longue veillée de prière où nous faisons le bilan de l’année passée et pensons à l’année qui vient. En 3ème temps, une demande de pardon à Dieu et aux frères et sœurs, un temps d’action de grâces pour dire merci pour toutes les bonnes choses vécues en 2010, et un temps de réflexion sur ce que nous voulons vivre cette année 2011, à partir de la Parole de Dieu, avec des temps de silence et de méditation, et d’interventions libres. J’ai été frappé par la qualité des interventions et la profondeur des prières. Le tout accompagné de gestes et de symboles. A la fin de la messe, à minuit, nous nous sommes souhaités une bonne année dans la joie et en dansant. Après cela, les volontaires sont restés prier toute la nuit.
    Au cours de l’homélie, j’ai expliqué le thème d’action du diocèse pour cette année : « Evangélisation et Promotion Humaine ». (Voir mon site et notre blog).

  • Mercredi 29 Décembre : Mon palud n’est pas terminé, mais il y a beaucoup de choses à régler avant la fin de l’année, aussi je monte en ville de bonne heure. Je passe d’abord déposer des documents dans plusieurs ambassades, puis je monte à l’archevêché. Nous travaillons aux vœux de Nouvel An et au Message à la Nation. Avec l’entrée en fonction du nouveau Président, il faut réfléchir à ce que nous proposons et bien peser nos mots. Nous préparons ensuite la rencontre des différents responsables paroissiaux, des religieux et des Commissions, autour de l’évêque, le dimanche 2 janvier.

  • Mardi 28 Décembre : Malgré ma fièvre et mon palud, je monte à l’archevêché car il y a plusieurs choses à organiser : le retour du Cardinal à Conakry, les fêtes de fin d’année, le Message du 1er Janvier, mais aussi des choses plus importantes et à plus long terme, comme la mise en action du thème d’année : « Evangélisation et Promotion Humaine », et les formations nécessaires à assurer pour cela auprès des femmes, des jeunes, des cadres, et aussi des enfants car ils sont tout à fait capables et nous voulons les rendre actifs auprès des autres enfants.
    Nous allons aussi à la prison pour la « Messe de Noël » avec les prisonniers. Là, nous avons un problème car les gardiens sont en grève : ils n’ont pas été payés depuis 6 mois. Nous les soutenons dans leurs revendications, et nous obtenons en même temps l’autorisation de laisser les prisonniers qui le veulent venir à la messe. Ensuite, les Sœurs de la charité offrent à tous un bon repas.
    Nous nous retrouvons ensuite à l’archevêché avec le personnel. Nous profitons de ces jours creux pour célébrer à la fois Noël et le 1er Janvier, car aux dates de ces fêtes, nous serons bien occupés.
    Avant de partir, je mets en forme le Message de Noël et j’en prépare l’expédition.
    Je suis content d’arriver à la maison, après un parcours dans un bus bondé, pour me coucher et reprendre des forces.

  • Lundi 27 décembre : Je continue à me reposer. Mais le mardi, il faut bien reprendre le boulot.

  • Dimanche 26 décembre : Le lendemain, je reste couché. Heureusement que j’ai un vicaire cette année qui pourra animer la fête de la Ste Famille. C’est l’équipe de préparation au mariage qui assure l’homélie. Les familles ont apporté des objets de leurs maisons à bénir. Et il y a une grande procession d’offertoire avec les offrandes qu’ils ont apportées.

  • Samedi 25 décembre : Ce matin, baptême de huit bébés. Cela donne une dimension supplémentaire à notre fête. Les parents et parrains ont été bien préparés par Noël, le responsable des catéchistes. Le baptême se termine devant la crèche.
    Dans mon homélie, je rappelle en particulier qui est ce bébé que nous fêtons. Un enfant pauvre, qui n’a pas où loger, déplacé et bientôt menacé de mort par Hérode. Un bébé adoré par des pauvres, eux aussi rejetés de la société. Nous ne pouvons pas accueillir Jésus à Noël, si nous n’accueillons pas les enfants qui souffrent et les petits de la société.
    Isaïe dit : « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ». Cette parole est d’actualité pour nous. Les anges nous annoncent « une Bonne Nouvelle pour tout le peuple ». C’est fête de Noël pour nous, c’est à la fois le signe réel que Dieu est avec nous (Emmanuel) et que Jésus vient nous sauver. C’est aussi un engagement à sauver le peuple de Guinée et à reconstruire le pays. Tous ensemble. En donnant sa place à chacun et en lui permettant de prendre ses responsabilités, de prendre la parole et de prendre sa vie en main. Pour terminer, j’aborde rapidement les questions de la paix et de la réconciliation. Mais j’y reviendrai le 1er Janvier. Après avoir repris le thème d’année « Evangélisation et promotion humaine », le 31 décembre.
    A la fin de la messe, le vice-président insiste sur l’importance de prendre en charge la vie de la paroisse à tous les niveaux : aussi bien la vie des communautés que les questions financières.
    Un de nos catéchumènes est artiste peintre. Il a fait gratuitement 8 magnifiques tableaux sur la vie du Christ, dont un bien sûr sur Noël. Ils vont orner notre église. Nous les présentons à toute la communauté à la fin de la messe.
    A la sortie, ce sont les chants et les danses, les salutations et les souhaits. Nous nous retrouvons ensuite pour manger ensemble chez le vice président, avant de partir à la plage pour la grande fête des enfants.
    Noël, fête des enfants.
    Depuis 9 ans, la paroisse organise une grande kermesse pour les enfants, avec des jeux et des cadeaux. Cette fête est ouverte à tous, mais on y invite spécialement les enfants de familles pauvres, les enfants de la cité des mendiants, les enfants travailleurs du marché et de la gare routière et les enfants de la rue. Nous invitons aussi les autorités pour essayer de les sensibiliser aux problèmes de ces enfants. De même que les parents en général. A cette occasion, les groupes paroissiaux continuent les chants et théâtres de la veillée et un certain nombre d’autres groupes viennent nous aider à animer cette fête. Les enfants sont venus nombreux et sont très joyeux. L’ambiance est excellente. La radio et la télévision sont là, pour répercuter le sens de la fête. Le soir, je rentre fatigué et fiévreux. C’est le tribut à payer à Noël !

  • Vendredi 24 décembre : La messe est précédée d’une longue veillée où les différents groupes et mouvements de la paroisse viennent présenter quelque chose sur le thème « Noël, aujourd’hui ». Il y a des chants, des danses, des poèmes, des saynettes sur comment vivre Noël cette année, et que signifie Noël pour nous. La messe qui suit est une grande messe, très joyeuse, pleine de joie mais aussi de prière pour le pays.

  • Jeudi 23 décembre : Avec les fêtes de Noël, je suis obligé de me partager entre la paroisse et mes autres activités. Ce matin, je laisse donc la paroisse pour aller travailler le message de Noël à l’archevêché. Ensuite, je pars au dispensaire St Gabriel. C’est un dispensaire catholique mais, à cause de ses performances, intégré dans la fonction publique (c’est le seul !). C’est le plus grand dispensaire de la ville (voir mon site). Nous avons un temps de rencontre avec tous les agents de santé, chrétiens comme musulmans. Puis, je célèbre l’eucharistie, préparée par eux, où nous reprenons ce qui a été vécu dans le dispensaire, tout au long de ce trimestre, dans la prière, pour l’offrir à Dieu. La prière se prolonge dans un repas plein d’amitié.
    Malheureusement, je ne peux pas rester jusqu’à la fin, car les jeunes m’attendent pour finir de préparer la conférence de demain sur la paix et la réconciliation et la fête des enfants du 25. Je trouve la paroisse en pleine effervescence pour la préparation de la fête. Cela fait plaisir. J’accueille ensuite les gens qui viennent se confesser pour Noël.

  • Mercredi 22 décembre : Dernières mises au point à l’archevêché pour Noël. Mais il faut aussi penser aux autres activités. Je vais récupérer des médicaments pour le dispensaire de Kataco. Et en déchargeant une pièce pour Mongo, je casse mes lunettes !
    Le soir, messe pour le mari, le père, la mère et le frère de notre présidente, tous morts un 21 ou un 22 décembre. Il y a beaucoup de monde. Après la messe, nous nous retrouvons avec la famille pour un repas, ce qui nous permet de rencontrer différentes personnes et de parler ensemble.

  • Mardi 21 décembre : Nous tenons notre réunion d’équipe hebdomadaire. Il y a beaucoup de choses à mettre au point pour Noël.

  • Lundi 20 décembre : Il faut reprendre le travail, car de nombreuses activités sont restées en plan çà cause de toutes ces festivités. D’abord nous faisons le point avec l’archevêque. Puis, séance de travail avec Alexandre, le responsable de l’OCPH de Nzérékoré, qui revient de Dakar, où s’est tenue une rencontre internationale pour préparer la relance de l’OCPH (le Secours catholique, Caritas de Guinée). Nous préparons un programme d’activités, avec une préparation à la base, un travail de chaque diocèse et une rencontre générale. Cela va nous mener jusque fin février.
    Le soir, confessions préparatoires à Noël, à Nongo. Nous nous organisons, les prêtres des trois paroisses voisines, pour passer ensemble, successivement dans les trois paroisses.

  • Dimanche 19 décembre : Grand messe d’actions de grâces du nouveau cardinal. C’est une très grande manifestations, attendue depuis très longtemps. Il y a une foule énorme et aussi de très nombreuses autorités. Vous trouverez bientôt son homélie sur mon site. Il profite de l’occasion pour dire un certain nombre de choses sur la vie du pays, qui est en pleine transition. Il en redit un certain nombre que nous avons souvent exprimé, mais le fait que cela vienne de lui, en une occasion solennelle, leur donne davantage de poids. Et c’est un encouragement pour ceux qui se sont engagés dans la construction du pays.

  • Samedi 18 décembre : Rencontre du Conseil économique avec le Conseil paroissial. Nous examinons tous les projets économiques que nous avons travaillés samedi dernier (voir plus haut). Une fois acceptés, nous voyons comment les mettre en œuvre. Nous allons choisir des jeunes et des femmes volontaires. Après une formation, elles vont faire des enquêtes préliminaires et une étude de marché, pour voir si ces projets sont rentables.
    Après cela, j’ai un certain nombre de rencontres de toutes sortes, avec des gens qui viennent chacun avec son problème.
    A 15 heures, mariage entre un chrétien et une musulmane. Je redonne le sens du mariage chrétien. Puis je les invite, à travers l’alliance entre leurs deux familles, à augmenter la rencontre entre chrétiens et musulmans. Je ne vais pas participer à la fête de mariage, car nous avons une rencontre des catéchistes. C’est las fin du trimestre. Il nous faut donc faire le point et évaluer les actions de ces trois mois. J’insiste sur la participation des catéchumènes à leur propre formation et à la mise en pratique de l’enseignement reçu. Car certains catéchistes considèrent la catéchèse plus comme des cours et des connaissances à transmettre, que comme une initiation à la vie chrétienne. Nous insistons sur le rôle de la communauté et la place des parents, mais aussi des parrains et marraines. Nous voyons aussi comment assurer une meilleure formation des catéchistes. Cela fait encore une bonne journée.

  • Vendredi 17 décembre : Grande rencontre du Cardinal avec les prêtres du pays. Ensuite, il visite le dispensaire St Gabriel (voir mon site) avant de dire la messe dans une paroisse de banlieue.

  • Jeudi 16 décembre : Le responsable du CCFD (Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement) est là depuis une semaine, mais à cause de nos nombreuses activités réciproques, nous n’avons pas pu nous rencontrer. Nous arrivons à nous parler au moins par téléphone.
    Demain, le Cardinal rencontre tous les prêtres du pays. Aussi, beaucoup sont venus. Je prends le temps de saluer ceux qui sont déjà arrivés. C’est une grande joie pour moi de revoir en particulier les prêtres de Kankan, puisque j’ai vécu 10 ans dans ce diocèse, travaillant dans les camps de réfugiés. Mais aussi les prêtres du diocèse de Nzérékoré, puisque je vais régulièrement travailler avec eux pour « Justice et Paix ». Je profite de cette occasion, car nos possibilités de rencontres sont rares, les conditions de déplacement étant très difficiles.
    A la communauté, je retrouve les confrères spiritains de notre diocèse. Nous pouvons ainsi partager notre vie et nos soucis dans la joie de nous retrouver.
    Le soir, avec les confrères, nous parlons de nos différentes activités. Puis je me retrouve avec Lucien pour parler des écoles de brousse qu’il est en train de lancer à KOUNDARA et du Centre de formation agricole de WONKIFON, où nous voulons envoyer des jeunes catéchistes en formation.

  • Mercredi 15 décembre : Aujourd’hui, nous nous soucions du travail avec la jeunesse et pour les actions de développement avec les responsables de la Commission de la Jeunesse.
    Cette nuit, à minuit, le courant est revenu. Mais nous hésitons à acheter du poisson à mettre au frigidaire, car nous ne sommes pas sûrs qu’il y aura encore du courant les jours qui viennent. Quant à la viande, elle est trop chère pour notre bourse.

  • Mardi 14 décembre : Je monte à l’archevêché pour imprimer et multiplier un certain nombre de documents. Nous nous retrouvons ensuite autour de l’archevêque, pour évaluer le travail de l’atelier Savoir-Fer des enfants de la rue. Puis nous descendons à l’atelier afin d’examiner le cas de plusieurs apprentis malades, et l’un d’entre eux, blessé.
    Ensuite, séance de travail avec CRS au sujet des Commissions de « Justice et Paix » et de « Pastorale sociale ».
    Le soir, au retour, nous passons au magasin de l’Association « Guinée Solidarité » qui a bien voulu transporter depuis la France un nombre des livres que j’ai écrits, qui étaient à Paris. Ils vont nous être très utiles ici, pour notre travail d’éducation. Je remercie tous ceux qui ont participé à cet envoi et qui participent ainsi à notre travail sur place.

  • Lundi 13 décembre : Suite du travail sur le livre pour la réconciliation.

  • Dimanche 12 décembre : Aujourd’hui, à la messe, nous accueillons dans notre communauté les nouveaux catéchumènes de cette année. Puis à lieu le lancement des activités des CV-AV (Action catholique de l’Enfance) et des scouts.
    Après la messe, réunion générale des jeunes. Nous faisons le point des actions pour la justice et la paix, menées par les jeunes depuis un mois. Après la réunion, nous restons avec le Bureau des jeunes, pour préparer la journée des enfants, le jour de Noël.
    Au niveau du pays, le président par intérim, le général KONATE, revient du Maroc, où il est allé se faire soigner. Le candidat perdant à l’élection présidentielle, Dallein DIALLO, accepte officiellement sa défaite, malgré ses réticences et les recours qu’il avait adressés à la Cour Suprême. En faisant cela, il a certainement évité au pays une guerre civile inter ethnique. Et tous l’admirent et le remercient.

  • Samedi 11 décembre : Séance de travail, sur la mise en place d’activités pour faire vivre la paroisse. En effet, le pays est pauvre, mais les frais sont élevés. De toutes façons, la paroisse ne peut pas vivre seulement des quêtes. Il faut donc mettre en place des activités qui puissent nous rapporter des fonds, mais aussi être utiles aux populations. Nous pensons, en particulier, à une garderie et un jardin d’enfants, des cours d’alphabétisation, des micros crédits, une école pour les sourds-muets. Nous pensons aussi à une bibliothèque et un cyber-café. Mais il ne suffit pas d’avoir de beaux projets, il faut s’assurer de leur rentabilité et faire ce qu’il faut pour cela.
    Le soir, je rédige et saisis la demande pour l’UNICEF.

  • Vendredi 10 décembre : Nous travaillons avec l’UNICEF sur notre jeu d’éducation sur les droits de l’enfant. Nous voudrions le multiplier mais aussi assurer une formation des éducateurs et leur prise en charge pour l’utilisation du jeu. Il me faut d’abord en expliquer l’utilisation et les objectifs pédagogiques et autres.

  • Jeudi 9 décembre : Ce n’est qu’aujourd’hui que nous trouvons un moment pour tenir notre réunion d’équipe. Et pourtant, il y a énormément de choses à voir, avec la préparation de Noël et le temps de l’Avent d’une part, et tout ce qui se passe au niveau du pays –et donc dans les quartiers- d’autre part. Et il ne faut pas rater tout cela.
    L’après-midi je continue à travailler à notre livre sur la réconciliation. Ca n’avance pas vite !

  • Mercredi 8 décembre : Fête de l’Immaculée Conception de Marie. C’est la fête du diocèse. Et aussi le 31ème anniversaire de la consécration épiscopale du cardinal. Et la fête de la congrégation des Sœurs de Guinée. C’est donc une très grande cérémonie… La première, car elles vont se succéder, presque sans interruption, jusqu’à Noël…. Au détriment de nombreuses activités et formations, malheureusement. C’est une constante. On préfère les fêtes plutôt que les engagements concrets dans la société et la vie de chaque jour. On prie, on chante et on danse, ce qui est bien, mais les actions ne suivent pas toujours. Conséquence : la prière est souvent dans les nuages et pas toujours engagée, ni même proche de la vie des hommes.

  • Mardi 7 décembre : Il ne faut pas que toutes ces fêtes interrompent toutes nos activités. Nous essayons de faire le maximum entre deux rencontres ou cérémonies. En veillant à ne pas nous laisser prendre par les officiels ou les autorités, pour rester disponibles, et surtout attentifs aux problèmes plus douloureux ou délicats.
    Il y a aussi le suivi des différentes activités. Aujourd’hui, je vais à CRS (Caritas américaine) pour préparer la visite du responsable des écoles de brousse, sur le terrain, à OUROUS et KOUNDARA. C’est un secteur, à la frontière du Sénégal, très pauvre et plutôt abandonné. Beaucoup d’enfants n’ont pas la possibilité d’aller à l’école. C’est pourquoi nous avons lancé ces écoles communautaires. Les bâtiments sont de simples hangars, bâtis par les parents ; les installations sont très simples, mais cela n’empêche pas un enseignement de qualité, car les résultats sont meilleurs que dans les écoles officielles. Ces écoles sont prises en charge par la communauté. Nous assurons l’organisation des écoles, la formation des enseignants et le suivi. Les enseignants sont payés par les parents, soit en nature, soit en argent, soit en travail dans leurs champs. Cela demande un gros effort financier et un grand engagement des parents, surtout par rapport aux écoles officielles où l’enseignement est gratuit, mais où il n’y a pas assez d’écoles et où de larges secteurs sont négligés, en particulier dans le secteur rural et auprès d’ethnies minoritaires, comme les CONIAGUIS, et surtout les BASSARIS, dans ce cas précis.
    Depuis 10 jours, nous n’avons pas d’électricité. Au début, il n’y avait aucune explication ; finalement, on nous a dit que le gas oil acheté était de mauvaise qualité et que cela a endommagé les moteurs ! D’habitude, nous n’avons le courant que de 18 à 24 heures, ou de 0 h à 6 heures, en alternance. Ce n’est pas beaucoup, mais nous nous organisons en conséquence. Mais là, toute la viande et le poisson que nous avions en réserve a pourri ; nous ne pouvions plus charger nos batteries de téléphone ou d’ordinateur portable, et, bien sûr, plus d’émission télévisée. Pour les nouvelles, nous avons au moins les postes à transistor. Mais bien sûr cela ne facilite pas le travail.
    Nous avons eu le courant à nouveau pendant deux jours, et hier… plus rien ! Espérons que cela ne durera pas.
    Mais les gens sont toujours aussi sympathiques. Nous parlons dans les « taxis » pendant les déplacements. Avant-hier, et aujourd’hui, deux personnes m’ont payé mon transport, spontanément.

  • Lundi 6 décembre : Il y a une occasion pour la France. Aussi, je reste à la communauté pour préparer mon courrier, car il ne faut pas rater les occasions, elles sont rares !
    Un voyageur polonais arrive chez nous. Il vient du Sénégal, à vélo, en direction de la Sierra Léone. Il a demandé où se trouvait la mission catholique. Et il est heureux d’arriver chez nous, car il ne parle qu’anglais. Nous allons pouvoir l’aider à régler un certain nombre de problèmes.
    Je continue en anglais avec Dominic, notre confrère nigérian, qui vient du Malawi et prend en charge la communauté anglophone. Nous préparons une récollection et une veillée pour vendredi.
    L’arrivée du Cardinal : Robert SARAH, ancien archevêque de Conakry, avait été nommé à ROME comme secrétaire de la Congrégation pour l’Evangélisation. Il vient d’être nommé président du Conseil pontifical COR UNUM, chargé des œuvres de développement dans l’Eglise. En même temps, il a été nommé Cardinal. C’est une grande joie pour l’Eglise et les chrétiens, car c’est le premier cardinal guinéen. C’est aussi un grand honneur pour tout le pays. Aussi bien pour les musulmans que pour les chrétiens. Et c’est vrai que, pour le pays tout entier, c’est une occasion de retrouver sa dignité, après tous les malheurs et toutes les souffrances que nous avons connues depuis l’indépendance. D’autant plus qu’au temps du régime de Lansana CONTE, Mgr SARAH s’était déjà fait connaître pour son impartialité et son courage pour défendre la vérité. Et, jusqu’à maintenant, les gens lui en sont très reconnaissants. Il devait arriver hier soir, mais à cause de l’état d’urgence, les avions ne peuvent plus atterrir la nuit.
    Il est accueilli par les autorités en place, du pays. Et il va aller saluer Alpha CONDE, le président élu, mais aussi Dallein DIALLO, son adversaire. Il remercie spécialement ce dernier d’avoir accepté sa défaite et le verdict de la Cour Constitutionnelle ce qui a certainement évité à la Guinée une guerre civile inter ethnique. Et tous lui en sont reconnaissants. Le Cardinal restera en Guinée jusqu’après Noël. Les différentes organisations et les responsables du pays viennent recevoir de lui, non seulement des conseils, mais aussi ses bénédictions et accueillir ses prières. En effet, la Guinée est un pays de croyants. La prière et le Nom de Dieu sont présents dans toute la vie économique et politique du pays. Le problème serait que l’on dise un peu trop facilement « si Dieu le veut », et que l’on ne prenne pas suffisamment ses responsabilités. Le cardinal sera à Conakry jusqu’au 21 décembre, date de l’investiture du nouveau président de la République, Alpha CONDE. Puis il ira célébrer Noël dans sa région d’origine, à la frontière du Sénégal, à OUROUS.

  • Dimanche 5 décembre : Aujourd’hui, nous avons une célébration pénitentielle avec toute la paroisse. Nous avons une réflexion sur les différents aspects de notre vie avec Marie, à partir du texte de la visite de l’ange (l’Annonciation). Nous introduisons dans la cérémonie un certain nombre de rites inspirés de la tradition, comme le lavement des mains. Les personnes qui savent écrire ont écrit à l’avance leurs demandes de pardon, et nous brûlons les papiers devant l’autel, pour montrer que Dieu purifie nos cœurs. Les gens apprécient.
    Après la messe, nous nous retrouvons avec les enfants des différents mouvements et groupes. C’est un moyen de faire l’unité entre eux et de les mettre à l’action tous ensemble. L’année dernière, nous avions réfléchi et agi successivement dans la famille, à l’école et dans le quartier. Cette année, les enfants eux aussi sont sensibles à ce qui se passe dans le pays. Suite aux tensions entre ethnies aggravées par les élections, les enfants décident de travailler à la réconciliation à leur niveau, entre enfants.
    1ère résolution : apprendre les salutations dans les différentes langues, pour se saluer et se parler. Et, chaque 2ème dimanche, nous jouerons avec le jeu sur « les droits de l’enfant ».
    Pendant tout ce temps, les futurs mariés de samedi prochain ont attendu. Nous prenons le temps de bien préparer la cérémonie. Lui est chrétien ; sa fiancée est musulmane. Nous voyons comment intégrer dans la cérémonie un certain nombre de rites traditionnels du mariage. Et nous réfléchissons à la manière de faire intervenir les responsables de la communauté. Et faire participer les parents, y compris les musulmans.

  • Suite de Samedi 4 décembre : Après le Conseil paroissial, les questions sont nombreuses. Il faut aussi voir les différents responsables pour les questions pratiques. La Commission des Vocations, spécialement, ne fonctionne pas. Et avant que ce soit terminé, les catéchumènes arrivent, et ceux qui se préparent au mariage. A 18 heures, je n’ai pas fini. Les derniers devront attendre après la messe !

  • Samedi 4 décembre : Aujourd’hui, nous pouvons enfin tenir notre Conseil Paroissial. Il a été retardé à cause de tout ce qui se passait dans le pays. Heureusement, les activités ont démarré et nous avons suivi les choses. Mais il est important de se retrouver tous ensemble et de faire le point régulièrement. Nous évaluons donc le travail depuis Octobre et, à partir de là, tirons des conclusions sur notre façon de travailler dans chacun des groupes, puis donnons des orientations pour la suite. Pour le temps de l’Avent nous proposons la prière en famille chaque soir à partir de la Parole de Dieu. En communauté, un temps de réconciliation qui sera lancé par une célébration pénitentielle dimanche prochain. Enfin, un effort financier : une cotisation de 1.000 fr par personne. Nous avons une dette de 35 millions pour la construction du presbytère !
    Nous préparons aussi les fêtes de Noël avec, en particulier, une participation de tous les groupes à la veillée par une pièce de théâtre, un chant, une danse, un poème, etc. Le jour de Noël, nous baptiserons les bébés. Après la messe, une grande rencontre à la plage avec les enfants, en invitant les enfants de la rue, les enfants travailleurs du marché et de la gare routière, les enfants mendiants, etc… Le problème, c’est le suivi : ne pas se limiter à un repas et des cadeaux le jour de Noël, mais accompagner ces enfants tout au long de la vie. Et aussi faire réfléchir les autorités et soutenir les parents.
    Nous préparons également les fêtes de fin d’année, pour les passer dans l’amitié et la prière. Et aussi inviter les voisins musulmans pour partager notre joie.
    Le grand problème dans tout cela, ce n’est pas tellement de motiver les gens, ils le sont déjà. Mais c’est de les organiser et de prévoir les choses suffisamment à l’avance ; et surtout de passer à l’action. On a trop tendance à faire de grandes déclarations ou des conférences qui ne sont pas suivies d’effet. C’est pourquoi nous demandons à chaque groupe de nous faire un plan d’action concret et précis.
    Enfin, le dernier point est la question financière. Nous ne pouvons pas faire vivre la paroisse uniquement avec des quêtes et des cotisations. Nous voulons ouvrir une garderie d’enfants et une école maternelle, puisque nous avons des bâtiments libres pendant la semaine ; et aussi aider les femmes chefs de famille en lançant des micro-crédits. Mais là encore, il nous faut trouver des fonds !

  • Vendredi 3 décembre : Ce matin, les gens on encore peur. Ils craignent que des bagarres éclatent. Beaucoup restent chez eux, ayant peur pour eux-mêmes et pour leur voiture. Mais la situation reste calme. A parti de midi, la population commence à sortir. Et le soir, on met de la musique et on commence à danser dans les cours. Mais les frontières restent fermées, le couvre-feu et l’état d’urgence son maintenus, pendant au moins une semaine encore. Je reste moi aussi à la maison. J’en profite pour avancer un peu dans les corrections de notre livre sur la réconciliation. Cela fait longtemps que le travail est en plan !
    Pendant la journée, plusieurs Journaux et Radios m’appellent pour avoir des nouvelles du pays et mon point de vue sur la situation. Je reçois aussi plusieurs appels de gens de l’intérieur. Je suis heureux de pouvoir les rassurer.
    A partir de ce moment, à la radio et la télévision, les artistes rivalisent dans leurs chants pour la paix et la réconciliation. Tout le monde veut avoir un rendez-vous avec le nouveau Président. Son opposant, Dallein DIALLO, reconnaît immédiatement sa défaite. Il appelle à la réconciliation et au travail en commun pour reconstruire le pays.
    Le nouveau Président, Alpha CONDE, est un opposant de longue date. Il a même fait de la prison au temps de Lansana CONTE. Il est exigeant. Il annonce immédiatement qu’il va lutter contre la corruption et l’impunité. Ce qui est une très bonne chose. Il annonce qu’il va reprendre l’Armée en main et la mettre au service du développement du pays. Il annonce la mise en place d’une Commission « Vérité et réconciliation », un peu comme en Afrique du Sud.
    Il reste à voir comment cela va se faire concrètement. Et si, au-delà des déclarations et des belles intentions on arrivera à des réalisations concrètes. En tout cas, l’espoir est là.

  • Jeudi 2 décembre : Après la prière et la messe, c’est le départ de nos confrères de l’extérieur. De mon côté, je pars à la paroisse où nous tenons notre réunion d’équipe avec trois jours de retard à cause de tout ce qui s’est passé.
    J’apprends l’arrivée à la communauté de Raymond. Il est étudiant à KANKAN et veut être missionnaire spiritain. Je le suis depuis 10 ans, quand j’étais à MONGO. Il devait arriver la semaine dernière, mais le car a eu un accident et Raymond s’est retrouvé à l’hôpital. Il a eu de la chance, ce n’est pas trop grave. Il va suivre nos activités, à John et moi, dans nos deux paroisses. Et il pourra aussi parler avec Hervé, le stagiaire.
    L’après-midi, séance de travail avec Moïse, notre économe régional. Nous avons de nombreux soucis. D’abord, comment trouver les moyens de vivre ? Ensuite, pour nos jeunes comment assurer leur formation qui coûte très cher ? Mais notre souci immédiat, c’est notre maison. C’est une vieille maison que nous avons achetée, n’ayant pas les moyens d’en construire une neuve, et nous sommes sans arrêt en travaux. A mon retour de congés, j’ai trouvé le plafond qui coulait, suite à la dernière saison des pluies. Il va falloir trouver des fonds pour refaire la toiture. Nous avions des panneaux solaires pour l’électricité. Bien sûr, ils étaient à l’extérieur sur le toit pour capter le soleil, et ils ont été volés. Nous nous débrouillons maintenant avec deux batteries de voiture et un chargeur que nous laissons branché en permanence pour l’éclairage. Mais c’est très insuffisant, d’autant plus que la lumière de la ville est très rare (4 heures la nuit, rien la journée). Et depuis 8 jours, le transformateur du quartier est en panne, donc nous sommes dans le noir complet. Je recharge mon ordinateur quand je monte à l’archevêché (à 17 km).
    Après cela, j’étudie le plan d’action et le budget de SOS mineurs, notre association pour les enfants dans la rue et en prison.
    Toute la journée, tout le monde est très tendu. En effet, c’est ce soir que la Cour Suprême doit annoncer les résultats définitifs de l’élection présidentielle. C’était prévu à 15 heures, puis à 18 heures. A 20 heures, aux informations à la télévision : toujours rien. Finalement, c’est à minuit (dernière limite) que l’on annonce la nomination de Alpha CONDE, comme Président de la République. La décision est accueillie avec un grand silence dans toute la ville. Il faut dire que les deux candidats ont appelé au calme et à la retenue, acceptant à l’avance la proclamation des résultats.

  • Mercredi 1er décembre : Journée mondiale contre le SIDA. C’est une chose importante mais ici pratiquement personne n’en parle. Nous sommes complètement pris par nos problèmes de pauvreté et d’insécurité.
    Ce matin, il y avait des bouchons autour des gares routières. De nombreux chefs de famille font partir femmes et enfants au village, par peur des représailles et des émeutes dans les grandes villes. En effet, c’est demain qu’on doit proclamer les résultats définitifs de l’élection présidentielle.
    A l’arrivée à la maison, je trouve Moïse, notre économe régional, venu assurer une semaine de formation au Noviciat, avec Zacharie, le Maître des novices. Depuis ce matin, Hermann, le curé de BOFFA, est déjà là et Dominic, le nouvel aumônier de la communauté anglophone, est maintenant installé chez nous. Avec John et moi, nous formons une communauté très internationale (Sénégalais, Nigérian, Malawi, etc.). Nous avons bien des choses à nous dire car nos occupations sont très variées ; nous passons une excellente soirée.

  • Mardi 30 novembre : Rédaction de la lettre de lancement de l’année pastorale sur le thème : « Evangélisation et Promotion Humaine ». Nous sommes interrompus par trois enfants de l’atelier qui sont malades. Et pendant que nous réglons la question, un autre arrive qui vient de se blesser.

  • Lundi 29 novembre : Préparation du discours d’ouverture de la première rencontre à DAKAR, du Forum pour relancer l’OCPH (Organisation Catholique pour la Promotion Humaine) de Guinée. C’est un texte important. Nous faisons trois rédactions successives. Cela nous permet de faire le point des différentes activités. Nous travaillons ensemble avec les délégués des deux autres diocèses : KANKAN et NZEREKORE.
    A midi, nous fêtons la St André avec notre archiviste. Puis c’est la reprise des activités. Aujourd’hui, au menu, en particulier le Centre d’agriculture de WONKIFON. Il nous faut faire un plan d’activités et de formation pour l’année, établir les coûts… et chercher où trouver l’argent !

  • Dimanche 28 novembre : Aujourd’hui, je suis à SONFONIA, à l’entrée de la ville. Le vicaire de cette paroisse a été mon stagiaire à KATACO ; nous nous connaissons bien. Après la mise en place des deux Commissions « Justice et Paix » et « Pastorale sociale », nous prenons le temps d’analyser la situation de la paroisse et les activités qui sont menées. Après cela, nous mangeons chez le vice-président du Conseil Paroissial avec un certain nombre de responsables.

  • Samedi 27 novembre : Ce matin, réunion importante d’évaluation des Centres aérés. C’est une activité, très importante pour nous, d’éducation et de responsabilisation d’enfants et de familles en difficulté. Chaque Centre a d’abord fait son propre rapport. Puis nous avons fait une synthèse de tous les rapports que chacun a travaillée personnellement. Aujourd’hui, nous allons tirer les conclusions pour améliorer notre travail, voir les besoins en formation et préparer déjà l’année prochaine. Il faut s’y prendre à temps ! (Voir mon site, rubrique « Centres aérés » et l’album photos).
    L’après-midi, travail normal à la paroisse : catéchèse, préparation au mariage, mouvements et enfin messe.

  • Vendredi 26 novembre : L’Evêque est de retour. En 10 jours, beaucoup d’affaires étaient restées en suspens. Nous avons donc beaucoup de choses à nous dire. Mais d’abord, il y a une grande complicité entre nous. C’était déjà mon évêque en 1996, quand il était à KANKAN et moi à MONGO (voir mon site).
    Aujourd’hui, l’Annuaire du diocèse est publié. C’était un gros travail qui valait la peine, car il va rendre de nombreux services.
    Puis nous avons un long temps de réflexion sur le rôle et la place d’une communauté anglophone à Conakry .Jusqu’à maintenant, c’était une paroisse anglophone, très centrée sur la prière et la liturgie. Nous voudrions qu’elle prenne davantage en charge les problèmes économiques et sociaux des nombreux étrangers vivant à Conakry. De plus, elle était surtout centrée sur les anglophones d’Afrique de l’Ouest. Nous souhaiterions qu’elle s’ouvre également aux travailleurs asiatiques présents en Guinée et aussi aux nombreux pêcheurs et marins, anglophones, travaillant sans aucune sécurité et souvent exploités par les armateurs. Là aussi, il y a beaucoup de choses à faire.

  • Jeudi 25 novembre : Je consacre toute la journée à la rédaction de ma lettre-circulaire. C’est un gros travail que vous recevrez par mail, mais pour moi c’est essentiel de garder le contact avec vous tous. Et cela me permet de m’arrêter un peu, de faire le point sur ce que nous vivons en ce moment.

  • Mercredi 24 novembre : Rencontres diverses à l’Archevêché. Il y a toujours autant de misères et de souffrances que nous ne pouvons pas toutes soulager, malheureusement. Ensuite, une longue réflexion avec les responsables du Mouvement de l’Enfance missionnaire et les orientations à donner à ce Mouvement. Puis, il me faut trouver de l’argent pour la paroisse… ce qui n’est pas simple. (Voir mon site, rubrique « TAOUYAH »).

  • Mardi 23 novembre : Malgré les tensions dans le quartier et les problèmes dans la ville, nous tenons notre réunion d’équipe. Pour nous, c’est très important. Nous parlons de notre vie et échangeons sur la situation du pays. Notre stagiaire me demande : « Pourquoi tu n’achètes pas une voiture ? ». Je lui réponds qu’une voiture coûte très cher et qu’il est plus économique de se déplacer en taxi (bien sûr, il s’agit du taxi collectif de la ville). Mais surtout que, pour moi, un prêtre doit partager les conditions de vie de son peuple… surtout si elles sont difficiles ; et que voyager dans les transports publics permet non seulement de comprendre mais de partager les conditions de vie des gens. Il me regarde avec des grands yeux…. Je crois qu’il n’a pas compris ce que je voulais dire.
    Après notre réunion, je rencontre un certain nombre de personnes. Elles savaient que je serais là et elles sont venues me rencontrer. Ensuite, nous mangeons tous ensemble. Pour nous, le partage et l’accueil de l’étranger sont essentiels !
    Aussitôt après, je pars dans une Radio libre. Normalement, je parle la nuit, en direct. Mais avec l’insécurité actuelle, ce n’est pas possible. Il nous faut donc enregistrer l’émission à l’avance. Pour l’essentiel, je reprends mon homélie de dimanche dernier, comme appel à la paix et à la réconciliation.
    Comme j’ai chargé ma batterie ce matin, ce soir je peux enfin commencer à saisir le compte-rendu de notre rencontre Justice et Paix de la semaine dernière ; je l’enverrai ensuite par mail.

  • Lundi 22 novembre : Nous parlons assez longuement avec Yves-Marie de sa tournée en Guinée. Puis nous recevons ensemble le jeune frère d’une Guinéenne dont Yves Marie a fait la connaissance en France et dont nous soutenons la famille. Ils ont perdu un fils l’année dernière, au cours de la tuerie du 28 Septembre. De plus, cette femme avait organisé les femmes de son quartier pour résister aux exactions et viols des militaires. Très menacée et risquant la mort, elle a réussi à s’échapper et à remonter, à travers le désert, jusqu’en Afrique du Nord. Après deux essais infructueux et dangereux qui l’avaient complètement découragée, elle a enfin réussi à traverser le détroit de Gibraltar. Arrivée en France, elle a été accueillie par des Guinéens et soutenue par une association. Ce qui lui a permis, après beaucoup de difficultés, d’obtenir l’asile politique en France. Ses enfants ont réussi à se réfugier au Sénégal. Bien sûr, elle voudrait les faire venir auprès d’elle, mais sera-ce possible ? Yves-Marie montre des photos de cette femme à son jeune frère qui est à la fois heureux et rassuré. Nous aurions voulu aller saluer ses parents, mais ceux-ci ont dû fuir leur quartier à cause de l’insécurité actuelle et aller se cacher à l’intérieur du pays. Des cas comme celui-ci ne sont pas rares, malheureusement.

  • Dimanche 21 novembre : Fête du Christ-Roi. C’est l’occasion de nous demander : Comment faire grandir le Royaume de Dieu en Guinée, dans la situation actuelle. Je reprends la réflexion d’hier pour lancer un appel au nom de la Commission « Justice et Paix » de TAOUYAH, appel que je saisis à l’ordinateur l’après-midi et que j’envoie tout de suite par mail dans tout le pays… ou, plutôt, dans les villes où il y a au moins un cyber-café. Au niveau de la paroisse, les réactions sont très positives.
    Au cours de la messe, aujourd’hui, nous avons prévu l’engagement des responsables de communauté, des catéchistes et des responsables des différents groupes et mouvements. Nous lisons d’abord les conseils de Paul, dans sa lettre à Tite. Toute la communauté prie pour les responsables et s’engage à les soutenir.
    Après la messe, réunion générale des femmes. Elles sont nombreuses mais ont de la peine à s’engager et à prendre en mains leurs problèmes. Comme dans la société, elles restent en retrait et sous la dépendance des hommes. Elles ont plus tendance à s’occuper de l’église et des fêtes que de prendre en charge leur vie de famille ou de femmes dans le quartier. Il faudra du temps pour que ça change. La première chose, c’est de les mobiliser. Albert, le vicaire, va passer, avec une équipe de cinq femmes responsables, dans toutes les communautés de quartier, pour cela.
    La journée n’est pas encore terminée. Nous travaillons avec le comptable pour finaliser les comptes de l’année dernière et faire le point de la situation financière actuelle, pour le prochain Conseil Paroissial.
    De retour à la Communauté, j’accueille Yves-Marie, notre responsable pour l’Afrique de l’Ouest, qui vient de visiter nos deux Communautés de BOFFA et KATACO. Nous entourons aussi Kennedy, du Noviciat, qui part au GHANA pour l’enterrement de sa mère.

  • Samedi 20 novembre : Avec le Conseil Chrétien, qui regroupe les Eglises catholique, protestante et anglicane, nous rencontrons, à sa demande, Dallein DIALLO, un des deux candidats retenus aux élections présidentielles. Il estime que les forces de sécurité ne sont pas neutres et ne protègent pas les Peuhls, et même les briment. Il a très peur des réactions après la proclamation définitive des résultats de l’élection présidentielle.
    Ensuite, je me dépêche de repartir dans ma paroisse où les deux Commissions de « Justice et Paix » et de « Pastorale sociale » se retrouvent pour élaborer leur premier plan d’action. Ce n’est pas facile, car ce sont deux Commissions difficiles et délicates, donc qui demandent un grand engagement. Pour Justice et Paix, nous nous préparons à la proclamation des résultats définitifs, et aux violences qui risquent de suivre. Avec la Pastorale sociale, nous allons agir par rapport aux veuves. Il y a encore de nombreux interdits et coutumes qui les briment. Et de nombreux problèmes au moment de la mort : expulsions, héritage, remariage plus ou moins imposé, retraite du mari défunt. Il ne s’agit donc pas seulement de les aider au niveau matériel, mais à tous les niveaux : culturel, psychologique, social, etc… D’abord les accueillir et les écouter, ensuite les soutenir et les aider à passer à l’action.

  • Vendredi 19 novembre : J’arrive à aller à l’archevêché. J’apprends que de nombreuses personnes se sont réfugiées à la… gendarmerie. Il faut faire quelque chose. D’autant plus que la semaine dernière, lorsque les Peuhls ont été attaqués à Siguiri, les forces de l’ordre n’ont rien fait pour les protéger. Je prends donc contact avec plusieurs radios libres pour faire connaître la situation. Je rencontre aussi un Commissaire de police, puis un membre de la Cour Suprême. J’ai été averti de tout cela par une responsable justice et paix de l’intérieur qui m’a donné plusieurs n° de téléphone de personnes sur place à PITA. Il faut faire jouer tous les moyens et toutes les relations pour protéger les gens.
    Aujourd’hui, pas de courant, même au Centre Ville. Impossible de travailler à l’ordinateur (j’ai déjà vidé mon ordinateur cette nuit), ni sur Internet. Et j’apprends que le Gouvernement fait bloquer tous les services SMS, car certains les utilisaient pour des provocations ou pour organiser des manifestations. Je prends donc le temps de passer moi-même dans les ateliers et les différents services.
    La rencontre de communauté prévue dans un quartier est supprimée, à cause du couvre-feu.
    On nous annonce que la reprise des cours qui devait se faire dans les écoles et universités lundi prochain est reportée jusqu’à une date ultérieure. Il n’y a pratiquement pas eu de cours depuis la rentrée. Cela ne va pas améliorer le niveau des élèves.

  • Jeudi 18 novembre : Les activités sont très ralenties. Nous ne pouvons pas retirer d’argent à la banque pour la paroisse. Lucius, notre confrère venu de KOUNDARA, au nord, pour notre rencontre, n’arrive pas à faire réparer la voiture. Nous nous débrouillons pour la cuisine, car notre cuisinière n’est pas venue. Très peu de « taxis » circulent. Je préfère rester à la maison : ce n’est pas le travail qui manque !

  • Mercredi 17 novembre : Suite aux attaques des Peuhls à GUECKEDOU et KISSIDOUGOU dans le sud (la Forêt), les populations peuhles attaquent les forestiers à LABBE et PITA. A Labbé, l’Imam intervient fortement pour apaiser la situation. Finalement, le président déclare l’état d’urgence accompagné d’un couvre-feu de 18 heures à 6 heures du matin. Du coup, après quelques interventions musclées des militaires, les gens se calment.
    Un avion était prévu pour emmener une centaine de Guinéens et une délégation officielle à ROME pour la cérémonie de nomination de Cardinal de Mgr Robert SARAH, ancien archevêque de Conakry. Mais dès l’annonce de l’état d’urgence, l’Ambassade de France est fermée et les passeports y sont bloqués. De plus, l’avion d’Air France fait demi-tour. Les voyageurs passent la nuit à l’aéroport. Le lendemain, il faut trouver des places dans les avions d’Air-Maroc. Certains arriveront à la fin des cérémonies !

  • Mardi 16 novembre : Aujourd’hui, c’est la fête de la TABASKI (l’AID EL KEBIR), commémoration du sacrifice d’Abraham. C’est une grande fête pour les musulmans. Malheureusement, beaucoup ne pourront pas la fêter dignement. D’abord, la plupart des familles n’ont pas les moyens d’acheter un mouton cette année, à cause de l’appauvrissement général ; de plus, beaucoup de gens ont peur d’aller même à la Mosquée à cause de l’insécurité régnante ; enfin, de nombreuses mères de famille sont refoulées par les militaires et ne peuvent même pas arriver au marché.
    De notre côté, avec le vicaire et le stagiaire, nous tenons notre réunion d’équipe hebdomadaire. Et le soir à la messe, nous prions spécialement en union avec les musulmans. En réunion d’équipe, nous voyons tour à tour notre vie de prière et communautaire, nos activités, puis les questions matérielles et financières. Le gros point, c’est aujourd’hui, c’est l’animation des jeunes, les plans d’action des différents mouvements, la coordination entre eux et la mise en place du Bureau de la jeunesse.
    Les bagarres continuent dans les quartiers. On compte déjà un mort (il y en aura une dizaine au total) ; à la radio, on lance de nombreux appels au calme, mais qui ne suffisent pas à ramener la paix.

  • Lundi 15 novembre : Notre responsable pour l’Afrique de l’Ouest, Yves-Marie, part visiter notre Mission de MONGO, dans la Forêt, en plein sud. Finalement, tous se passe bien. Après un voyage de plus de 12 heures (850 km) il arrive sans problème, en pleine nuit.
    Nous sommes plusieurs restés à Conakry et nous poursuivons nos échanges sur notre travail en ville, à Kataco, à Boffa et à Koundara.
    Puis je pars à l’Archevêché, comme d’habitude. Aujourd’hui, la grande préoccupation c’est le voyage à Rome pour assister à la nomination de Monseigneur Robert SARAH, ancien archevêque de Conakry, comme Cardinal, nomination considérée comme un grand honneur, pas seulement pour l’Eglise catholique, mais pour toute la Guinée. De nombreux musulmans viennent nous féliciter. Le Gouvernement a affrété un avion entier, avec une délégation officielle importante. Ainsi, chaque paroisse et organisation pourront être représentées. En fait, les choses ne se passent pas aussi bien que prévu. C’est très difficile d’obtenir des visas pour l’Italie, même pour 5 jours seulement. Ainsi, John, notre confrère nigérian qui était le délégué des spiritains, n’a pas pu avoir de visa, malgré tous les documents fournis. Ensuite, l’avion d’Air France a fait demi-tour à cause de l’état d’urgence. Il a fallu s’arranger avec Air Maroc, et beaucoup sont arrivés à Rome en retard, après le début des cérémonies.
    Je prends le temps de parler avec les pèlerins en attente, surtout que beaucoup viennent des deux autres diocèses, à l’intérieur du pays. Et ce n’est pas toujours facile de nous rencontrer ! Cela permet de faire le point sur un certain nombre d’activités.
    Après cela, nous réfléchissons à la mise en place de la communauté anglophone, suite à l’arrivée de Dominic, un spiritain nigérian, qui en prendra la responsabilité.
    Et il y a toujours des documents à préparer. Aujourd’hui, c’est, en particulier, le compte rendu du Conseil Episcopal. Et un appel de la Commission Justice et Paix.
    Pendant ce temps, la tension monte dans la ville, dans l’attente annoncée des résultats provisoires de l’élection présidentielle. Chacun des deux candidats se déclare vainqueur et les bagarres éclatent entre les deux camps. Les routes sont barrées par des jeunes, avec des gros cailloux et des pneus brûlés. Je ne peux pas rentrer directement chez moi. Heureusement, un chrétien me propose de me faire quitter le Centre et passe par l’autoroute qui est gardé par les gendarmes. A l’aéroport, je trouve enfin un taxi, mais il fait demi-tour à mi-chemin. Il nous faut continuer à pied ; je suis accompagné par un jeune qui habite dans le même quartier. Arrivés au rond-point Bambeto les soldats tirent en l’air pour disperser les manifestants. Nous passons successivement devant des groupes de jeunes, de policiers, de gendarmes et de militaires qui nous laissent avancer. Nous traversons plusieurs barrages. Un peu plus loin, tout un groupe de jeunes a été arrêté. L’un d’entre eux cherche à s’enfuir. Il est rattrapé et fortement battu et déshabillé. C’est impossible d’intervenir malheureusement, sinon nous allons nous faire tabasser nous aussi et sans aucun résultat. Nous poursuivons notre route la mort dans l’âme. Nous faisons signe à des voitures qui font demi-tour de l’autre côté de la Place, mais les gens ont peur de s’arrêter. Alors nous continuons à pied. Heureusement, à deux on s’encourage. Mais à l’arrivée, nous devons dialoguer pour traverser un autre barrage.
    Le soir, les résultats provisoires du 2ème tour de l’élection présidentielle sont proclamés. Pour les partisans d’Alpha CONDE c’est la joie. Ils en profitent pour provoquer le camp adverse, ce qui n’arrange évidemment pas les choses.

  • Dimanche 14 novembre : Nous sommes toujours en état de tension. Il y a des bagarres entre des groupes de jeunes, partisans des deux candidats à la présidentielle. Et aussi des casses. Ce soir, je ne pourrai pas assurer mon émission à la radio, car les studios ont été saccagés.
    Nous tenons notre rencontre mensuelle de la Commission de Pastorale sociale dans une nouvelle paroisse, avec un délégué de chaque quartier. C’est encore le début de l’année. Il y a beaucoup de choses à mettre au point. Nous repartons de notre réunion d’évaluation de Juin, point par point (Lettre 75). Nous retravaillons spécialement : « Comment mettre en place un plan d’action concret et efficace, avec une ouverture à tous et la participation du maximum de personnes » (Voir la lettre 78).
    Rappel des événements :
    Pour aider à comprendre ce qui se passe, je rappelle que le 2ème tour de l’élection présidentielle –après plusieurs reports- a eu lieu le 7 novembre. Au dernier meeting tenu par l’un des deux candidats, Alpha CONDE, des gens ont été intoxiqués par de l’eau polluée. Aussitôt, on a accusé les Peuhls, qui pour la plupart soutiennent l’autre candidat, Dallein DIALLO, d’être responsables. Ils ont été attaqués dans le Sud (à Nzérékoré, Gueckedou et Kissidougou) et l’Est (Siguiri). Beaucoup sont alors rentrés dans leur région d’origine dans le Fouta Djallon. A leur arrivée, leurs parents ont à leur tour attaqué les gens originaires du Sud et de l’Est, vivant parmi eux. Cela a entraîné un grand climat d’insécurité, et les résultats provisoires du 2ème tour étaient attendus pour le 15 novembre au soir avec beaucoup d’inquiétudes. Le 15 au matin, chacun des deux candidats s’est déclaré vainqueur, ce qui a entraîné des bagarres entre jeunes, partisans des deux camps. Ces bagarres se sont intensifiées le mardi 16, bien que ce soit la grande Fête musulmane de la Tabaski (Aïd el Kebir), commémoration du Sacrifice d’Abraham. Les gens n’ont pas pu prier normalement, ni même aller au marché pour préparer la fête. Les forces de l’ordre ont brimé, avec beaucoup de violence comme à leur habitude, les partisans du candidat déclaré perdant, ce qui a augmenté encore les exactions et les oppositions ethniques, avec de nombreuses casses, des vols, des viols et des morts. Les personnes arrêtées ont été frappées, dépouillées et ont dû payer pour être relâchées. A cela, se sont ajoutées de fausses rumeurs, et la tension et les oppositions ethniques se sont répandues dans tout le pays, les deux alliances politiques et les différents partis étant à forte tendance ethnique.
    Le 17, l’état d’urgence est proclamé, avec couvre-feu de 18 heures à 6 heures du matin dans tout le pays. Cela a amené un peu de calme, mais ne résout bien sûr aucun problème. Il nous faut continuer à vivre et à faire vivre dans ces conditions difficiles. La vie économique est bloquée, les prix augmentent, les gens deviennent de plus en plus pauvres et découragés. C’est dans ces conditions que nous devons travailler. (Voir l’Appel de la Commission « Justice et Paix »).

  • Samedi 13 novembre : Notre rencontre se poursuit toute la matinée, après la messe : nous centrons notre réflexion sur la Guinée. L’après-midi, il me faut retourner m’occuper de ma paroisse. Ce soir, nous célébrons le 10ème anniversaire d’une Fraternité de jeunes femmes « Emmanuel ». Avec un engagement de tout un groupe pour assurer un nouveau départ et un travail auprès des jeunes filles (préparation au mariage et soutien dans la vie) et des jeunes couples, spécialement les couples mixtes, chrétiens et musulmans. C’est une chose très importante pour nous. Dans cette fraternité, la plupart de ces jeunes femmes ont fait des études et ont un travail salarié, ce qui est rare. Il s’agit maintenant de les former et de les soutenir pour qu’elles puissent jouer leur rôle le mieux possible.
    Après la messe, repas. Il y a beaucoup de monde et une ambiance agréable : danses, etc… Cela me permet de rencontrer de nombreux amis, certains que je n’ai pas vus depuis longtemps, ce qui me fait plaisir.
    A mon retour, certains confrères sont encore debout. Malgré l’heure, nous prenons le temps de parler un peu ensemble.

  • Vendredi 12 novembre : Dès 8 heures, rencontre des formateurs pour les Centres aérés. Nous préparons la rencontre d’évaluation que nous espérons tenir le 27 novembre, si la situation est calme. Aujourd’hui, nous mettons au point le rapport final pour le transmettre aux 11 équipes d’animateurs, afin qu’ils aient le temps de le travailler avant le 27. Nous mettons aussi au point le travail à la base et préparons en particulier des cours d’alphabétisation et une formation des alphabétiseurs.
    Depuis hier soir, j’accueille avec joie, mais aussi avec beaucoup de travail supplémentaire, les confrères de toute la Guinée venus à Conakry pour rencontrer notre responsable pour l’Afrique de l’Ouest. C’est très agréable de nous retrouver et nous pouvons échanger des nouvelles dans l’amitié.
    A 10 heures, je pars accueillir Yves-Marie à l’aéroport. Il arrive de Dakar. Et sans même passer par la maison, nous allons directement à l’archevêché rencontrer l’Evêque. Avec toutes nos activités en Guinée, il y a beaucoup de problèmes à aborder.
    Le midi, nous nous retrouvons à nouveau avec les Frères de St Gabriel et les représentants de plusieurs congrégations. Cela intensifie nos relations amicales, qui sont très importantes pour nous.
    Pendant qu’Yves-Marie continue sa rencontre avec l’Evêque, je continue avec Bernard le travail pour Savoir-Fer.
    A notre retour, il fait déjà nuit. Les confrères nous attendent. Nous commençons par un temps de prière, suivi du repas. Nous n’avons pas abusé sur l’apéritif, si bien que nous sommes en état de travailler assez longuement le soir ! D’abord pour recevoir les nouvelles des quatre pays de la région où nous travaillons : Mauritanie, Guinée Bissao, Sénégal et Guinée. Puis, pour réagir à tout cela.

  • Jeudi 11 novembre : Ici personne ne pense à la fin de la Première Guerre mondiale. Nous sommes dans un autre monde. On célèbre plutôt l’anniversaire de l’indépendance de l’Angola. Et en Guinée, on attend les résultats progressifs, préfecture par préfecture, du 2ème tour de l’élection présidentielle, avec anxiété. En se demandant quelles seront les réactions du pardon.
    Je suis toujours à la recherche d’une batterie pour mon ordinateur. J’apprends que quelqu’un a un ordinateur qui a grillé ; je vais voir si la batterie est récupérable.
    Bernard, qui suit l’atelier Savoir-Fer rentre en France jusqu’en Janvier. Il y a donc beaucoup de choses à mettre au point : contrats, salaires, organisation du travail, etc.. Nous n’avons pas le temps de finir car le Supérieur général et le Régional (Afrique de l’Ouest) des Frères de St Gabriel arrivent rencontrer l’Evêque qui me demande de venir, car je connais bien Kataco et Ourous où les Frères travaillent. Et, en plus, nous devons réfléchir à leurs actions dans l’enseignement et les projets de développement dont j’ai la responsabilité. Je suis heureux de revoir les Frères ; nous nous connaissons depuis ma jeunesse au Sénégal et nous avons ensuite beaucoup collaboré. Dans les années 90, j’intervenais régulièrement pour la formation de leurs jeunes frères, les novices en particulier. De plus, à KATACO, j’étais très lié avec le Frère Joseph qui a été assassiné en Avril 2008. Et nous continuons à travailler avec les Frères. C’est dire que je suis très heureux de les revoir et notre rencontre se passe dans une très bonne ambiance.

  • Mercredi 10 novembre : Deux gros morceaux ce matin : 1°) Rencontre du bureau et des formateurs de Savoir-Fer, notre atelier de soudure pour les enfants de la rue. C’est une action importante, à laquelle nous tenons beaucoup, mais qui est très difficile et souvent délicate.
    2°) Rencontre du Conseil épiscopal du diocèse, autour de l’évêque. Nous adoptons le thème de cette année pastorale : « Evangélisation et Promotion Humaine ». Nous en analysons les différents aspects et préparons un plan de travail pour la première année et un document pour lancer la réflexion à la base et les actions à mener aux différents niveaux. Les moments de l’Avent et du Carême seront des temps forts et le pèlerinage et la marche diocésaine de BOFFA seront le sommet de cette première année. A la fin de l’année, nous ferons une première évaluation. Ce qui nous permettra de relancer les choses pour une deuxième année, lors de la session pastorale de lancement de l’année.
    Ensuite, nous abordons un certain nombre de points spéciaux qui ont été soulevés au cours de la session de lancement d’Octobre dernier : 1. La vie et les problèmes des jeunes et des femmes ; 2. Le mariage et la vie de famille ; 3. L’aumônerie des Universités.
    Enfin, un échange sur le nombre et les attributions des commissions diocésaines.
    3°) A 18 heures, messe pour le 10ème anniversaire d’une fraternité de jeunes femmes de la paroisse, « Emmanuel ». C’est l’occasion de faire le point de leurs activités. Nous leur demandons de porter spécialement le souci et d’assurer le soutien des jeunes femmes de nos quartiers dans toute leur vie (pas seulement les prières) et des femmes musulmanes aussi bien que des chrétiennes. D’ailleurs, l’une des charges que nous leur confions c’est l’accompagnement des couples mixtes (chrétiens – musulmans)
    4°) A 20 heures, nous profitons de notre présence pour tenir une réunion du Conseil Economique avec le Bureau de la paroisse. Il nous faut non seulement faire un programme financier clair et précis pour l’année selon nos moyens, mais chercher aussi comment trouver des moyens pour les activités que nous voulons mener.

  • Mardi 9 novembre : Il faut bien reprendre les activités habituelles. Après un temps de réflexion avec l’Archevêque sur la situation du pays et les différentes activités, je fais donc le tour des services ; et je reçois les personnes qui se présentent. Je vous ai souvent parlé de tout cela.
    Le soir, la CENI proclame des premiers résultats partiels de l’élection présidentielle. Il n’y a que 10 % des résultats, mais chacun en tire déjà ses propres conclusions, selon ses orientations et ses désirs.

  • Lundi 8 novembre : Le 2ème tour de l’élection s’est bien passé, sans aucun heurt. Les gens étaient fiers de voter « les premières élections démocratiques du pays », et ils ont tenu à ce que cela se passe bien. Maintenant, c’est l’attente, avec un peu d’anxiété. Les gens se retrouvent entre amis pour faire leurs pronostics, mais les partis, comme les média, acceptent de ne pas publier des résultats fantaisistes ou partisans, mais d’attendre les résultats officiels de la CENI ; c’est un grand progrès qui évite beaucoup de problèmes. Aujourd’hui, les activités sont réduites. Beaucoup de commerçants hésitent à ouvrir leurs magasins. Nous en profitons pour faire une réunion d’équipe. En effet, nous sommes encore en début d’année et nous sommes nouveaux ; il y a donc beaucoup de choses à régler et il faut nous rôder !
    L’après-midi, j’écris ma lettre-circulaire. Cela me prend beaucoup de temps, mais me permet de faire le point des mois passés. Vous la recevrez bientôt, grâce à Jocelyne, Jean-Jacques et Jean-Michel. Je me lève la nuit pour commencer à l’enregistrer sur cassette, mais je n’arrive pas jusqu’au bout ; je suis trop fatigué et je retourne me coucher.

  • Samedi 6 novembre : Comme chaque samedi, je me consacre à ma grosse paroisse : accueil, contacts, préparation au mariage, catéchèse, réflexions avec les différents responsables.
    Aujourd’hui, l’assistance à la messe est beaucoup plus nombreuse. En effet, demain ce sont les élections. Il n’y aura pas de messe, car la circulation des taxis et particuliers est interdite, par raison de sécurité. Nous réfléchissons à partir de l’Evangile d’aujourd’hui : « Dieu est le Dieu des vivants, par des morts », et des conseils de Paul à Timothée. Nous prions longuement pour le pays. Et les secrétaires des communautés de quartier viennent partager leurs réflexions sur la lettre de l’évêque.
    Aujourd’hui, nous n’aurons l’électricité que de minuit à 6 heures du matin. J’ai des textes à enregistrer sur cassette audio au magnétophone. Et la batterie de mon ordinateur est morte. Je ne peux donc travailler qu’en direct sur le courant. Si bien qu’un jour sur deux, je me lève à 2 heures du matin. Je pense alors à tous les travailleurs de nuit et je prie pour eux. Mais au moins demain je pourrai me recoucher, car les activités sont arrêtées. Je vais en profiter pour faire les comptes de la maison qui traînent depuis longtemps, en fait depuis mon départ en congés. Et il y a encore plusieurs autres choses qui traînent.

  • Samedi 6 novembre : Je prends la voiture de la communauté pour aller faire les courses avec notre cuisinière. Cela demande du temps, mais c’est nécessaire ! Les gens sont très gentils. Comme elle sait que je parle plusieurs langues, elle vient me saluer dans sa langue que je ne connais pas ; et elle m’apprend les premières salutations. Hier le comptable : « Toi, on ne sait pas si tu es français ou sénégalais (je parle souvent en ouolof avec les Sénégalais assez nombreux en Guinée). Non, maintenant tu es des nôtres, tu es devenu guinéen ! ». Et un autre m’a payé le transport dans le taxi. Ca encourage !

  • Vendredi 5 novembre : Nous nous retrouvons avec l’archevêque et les responsables « Justice et Paix » pour rédiger un appel à la population, en nous situant au niveau de la foi, en repartant du Message commun du début des élections des responsables religieux, chrétiens et musulmans, basé sur les trois mots : paix, unité et responsabilité. Nous faisons trois rédactions successives, car nous ne voulons pas être trop long mais fournir un texte percutant autant que possible.
    Ensuite, nous reprenons la réunion de hier avec CRS pour assurer un suivi et lancer des actions de développement (voir mon site « Travail social humanitaire).
    A midi, je vais représenter l’archevêque à l’inauguration de la salle d’allemand au Collège catholique Ste Marie de DIXINN. Cette réception est simple, amicale et décontractée, sans trop de protocole.
    Ce soir, je rejoins une communauté de quartier pour lire et réfléchir à la dernière déclaration de l’archevêque : « Il est temps de nous ressaisir » pour le 2ème tour de l’élection présidentielle de dimanche. Les gens ne sont pas très nombreux, mais il y a un bon groupe de jeunes décidés et quelques adultes ; la réflexion est très intéressante. C’est à travers de tels groupes qu’une formation en profondeur pourra se faire, beaucoup plus que par des grandes manifestations bruyantes mais finalement inefficaces.
    Après cela, je rejoins mon vicaire et mon stagiaire pour passer un moment ensemble. Je profite de toutes les occasions où je suis à la paroisse pour le faire, car j’habite en communauté dans un autre quartier, à cause de mes autres responsabilités. Nous mangeons ensemble, puis je rentre, toujours avec les mêmes problèmes pour trouver une place dans un taxi collectif.

  • Jeudi 4 novembre : Départ à 6 heures du matin et journée « ordinaire » à l’archevêché. Travail avec l’évêque, à la procure, aux ateliers, au bureau, accueil, contacts, soutiens divers. Sans oublier les problèmes techniques : batterie de l’ordinateur fichue, photocopieuse en panne. Je trouve un moment pour travailler à notre manuel sur la réconciliation, mais ça n’avance pas vite !
    L’après-midi, travail à CRS où nous reprenons nos différentes actions et projets. Les choses avancent peu à peu mais doivent être reprises sans cesse pour les améliorer et les réorienter si nécessaire. Les deux forums nationaux pour les Commissions de justice et paix et pastorale sociale, l’OCPH (Organisation catholique pour la promotion humaine), la recherche d’un nouveau comptable (le 1er test ne nous a pas permis de trouver quelqu’un qui corresponde à nos objectifs), la définition des responsabilités, les écoles de brousse, etc….
    Ce soir, il n’y a pas de courant dans notre quartier. Nous regardons la télévision à partir d’une batterie pour voir les dernières dispositions avant les élections. Après cela, je commence à préparer des notes. En effet, plusieurs radios veulent nous interviewer sur les élections de dimanche. C’est assez délicat. Il nous faut bien réfléchir et peser nos mots car tout ce que nous allons dire pourra être interprété dans un sens ou dans l’autre, selon les auditeurs.

  • Mercredi 3 novembre : Ce matin, réunion d’équipe. Comme le vicaire et le stagiaire viennent d’arriver, il y a beaucoup de choses à préciser et d’abord il faut souder notre équipe. Deux jeunes camerounaises arrivent coup sur coup. La première devait partir travailler en France, mais celui que devait organiser son voyage l’a trompée et a dépensé son argent. Elle se retrouve seule et sans moyens dans une ville où elle ne connaît personne. La deuxième est une élève qui est venue « tenter sa chance » en Guinée ; mais elle rencontre des tas de problèmes pour ses études. Je les mets en contact entre elles. Après avoir parlé, mangé et prié longtemps avec elles, je prépare une rencontre pour samedi avec les Camerounais de notre paroisse et je leur donne les coordonnées d’un prêtre camerounais qui travaille dans une paroisse voisine, à 30 km.
    Le soir, j’ai la joie de trouver Blaise à la Communauté. Il avait fait son stage avec moi à MONGO, il y a quelques années. Il a été ordonné prêtre en Juillet et part comme missionnaire au Brésil. Nous nous donnons des nouvelles de la préfecture d’où il vient. Demain, nous verrons pour son billet d’avion.

  • Mardi 2 novembre : Nous avons besoin d’un comptable compétent et formé pour nos différents projets. Ce matin, nous organisons un test avec 8 candidats, avec le soutien de CRS (Secours catholique américain), dans le Centre professionnel des Frères de St Jean Baptiste de la Salle. Pour éviter toutes pressions religieuses ou autres, nous gardons le secret sur l’identité des candidats. Le test se passe dans de bonnes conditions.
    Ensuite, il me faut chercher une puce pour mon téléphone portable et encaisser un chèque. J’y passe tout le reste de ma journée. Cela arrive souvent. La moindre formalité ou activité dure un temps fou, par manque de moyens et de compétences, et aussi par laisser aller.
    J’arrive juste à temps pour dire la messe du 2 novembre pour les défunts. Il n’y a pas beau coup de monde. Il est vrai que certains étaient au cimetière, pour prier sur les tombes, mais pour beaucoup, il n’ont pas compris le sens et l’importance de l’eucharistie, sacrifice de la mort et de la résurrection du Christ. Il a fallu que je réponde aussi largement aux questions « classiques » : pourquoi et comment prier pour les morts ? Quelle différence entre la Toussaint et le 2 novembre, les saints et les morts, etc… Des choses toujours à reprendre et qui risquent de rester au niveau des discussions stériles qui ne débouchent pas sur la vie, ni sur un engagement réel.

  • Lundi 1er novembre : En Guinée, la fête n’est pas fériée. Nous travaillons donc comme d’habitude. L’après-midi, nous allons visiter un Centre de formation agricole que nous sommes en train de lancer. Fabien, un volontaire envoyé par la Délégation Catholique pour la Coopération (DCC) vient d’y rejoindre deux Guinéens. D’abord, il nous faut deux heures et demi pour sortir de la ville : bouchons, routes défoncées. Nous pensons y accueillir des catéchistes et leurs femmes et les former à un certain nombre de techniques d’élevage et d’agriculture améliorées. Ceci à la fois pour leur permettre de vivre et d’être des agents de développement dans leurs villages. En même temps, ce Centre cherchera à former les jeunes des villages environnants. Nous venons voir les installations et apprécier les possibilités d’accueil. Nous voyons par quelles activités nous allons commencer et quel plan de formation mettre en place. Quand nous rentrons, il fait nuit depuis longtemps.
    Aujourd’hui, c’est la fête de l’armée guinéenne : 52ème anniversaire de sa création. A la radio nationale et dans les discours officiels, on loue l’armée guinéenne qui a soutenu l’Angola et la Guinée Bissao, ce qui est exact. Ils ont aussi participé à certaines interventions de l’ONU. Mais quand ils disent qu’ils défendent et protègent le pays, tout le monde sait que c’est faux. Ce qui est grave, c’est que les media officiels perdent toute crédibilité, en disant des choses que eux-mêmes savent fausses. Par contre, sur les radios libres le ton est tout différent et il y a beaucoup de critiques, fondées. Par exemple, celles des enfants des victimes du Camp Boiro au temps de Sékou Touré.

  • Dimanche 31 Octobre : Rencontre diocésaine « Justice et Paix ».
    Chaque paroisse envoie un délégué. Nous participons à l’Eucharistie avec les paroissiens. L’Evangile d’aujourd’hui c’est la rencontre de Jésus avec Zachée : un voleur, collaborateur des Romains, qui détourne l’argent de ses frères mais qui, non seulement partage avec les pauvres, mais paient ses torts. Nous réfléchissons ensemble à notre façon de vivre dans la situation actuelle du pays, en cette période d’élections. Que faire, pas seulement pour partager avec les pauvres, mais pour les aider à gagner leur vie et à se prendre en mains. Pas seulement payer ses dettes et réparer ses torts, mais lutter contre les injustices et construire un pays où chacun pourra vivre dans la paix et la liberté.
    Après la messe, nous tenons une première rencontre avec les paroissiens, pour relancer la Commission paroissiale. Cela fait deux ans que nous nous y sommes attelés, sans succès. Nous espérons qu’avec un nouveau curé et de nouveaux éléments, cela va pouvoir marcher.
    Après la deuxième messe, nous nous retrouvons avec les délégués des différentes paroisses de la ville, pour relancer les activités. Nous abordons les différents aspects : actions à mener, comment faire un plan d’action, les formations, comment travailler avec tous, etc… Vous recevrez bientôt le compte-rendu.
    Dimanche soir : émission à la radio. Comme toujours, en direct, avec des questions des auditeurs. Ce soir nous parlons de la Toussaint : (Tous saints, tous appelés à la sainteté) : qu’est-ce que cela veut dire pour nous aujourd’hui ? Puis du 2 novembre : jour de prière pour les morts. La mort est très présente ici dans notre pays. Et, d’autre part, selon la tradition africaine « les morts ne sont pas morts», ils vivent au milieu de nous. Nous terminons par une réflexion et une prière pour le pays.

  • Samedi 30 Octobre : Aujourd’hui, je suis dans ma paroisse. Surtout en ce début d’année, avec l’arrivée d’un vicaire et d’un stagiaire, il y a beaucoup de choses à préciser. Mais l’essentiel de la matinée se passe à la relance de la Commission paroissiale de Justice et Paix. Il y a eu des déménagements et des démissions. Nous voyons les activités possibles pour cette année.

  • Jeudi 28 Octobre : Je reste travailler à la maison pour mettre les choses en place. Les deux candidats à l’élection présidentielle doivent partir ensemble à l’intérieur du pays pour essayer d’apaiser les gens. Mais les partisans d’Alpha CONDE l’empêchent de partir. Ils ont peur pour sa sécurité, et reprochent aux partisans de Dallein DIALLO de ne pas avoir de pitié pour les personnes intoxiquées au dernier meeting.
    Le soir, nous apprenons que l’élection est reportée au 7 novembre.

  • Mercredi 27 Octobre : Séance de travail à CRS. Il y a beaucoup de choses à voir. Nous préparons un test pour choisir un comptable pour nos différentes activités. Nous avons besoin de comptes clairs et bien faits. Puis nous posons les bases de deux forums, pour revoir nos orientations et nos façons de travailler dans la situation actuelle, et pour remotiver et relancer nos actions pour nos deux Commissions de pastorale sociale et de justice et paix. (Voir mon site, à ces deux rubriques). Ensuite, ce sont les questions pratiques des projets terminés : rapports financiers et rapports d’activités. Une bonne chose de faite !
    Puis travail avec l’archevêque : réflexion sur la vie du travail et les activités à mener pendant ces 10 jours qui restent jusqu’au 2ème tour de l’élection présidentielle.
    Ensuite, préparation des activités de la jeunesse pour cette année avec le responsable diocésain. Pendant ce temps, nous apprenons que les magasins des peuhls, supporters de Dallein DIALLO, ont été pillés par les partisans d’Alpha CONDE. Ils rentrent en camion du FOUTA, dans leur région d’origine. Ce qui a entraîné des brimades en retour. La situation s’aggrave et nous inquiète beaucoup. (Voir ma note : Situation du pays).

  • Mardi 26 octobre : La journée commence par la prière et la réunion ordinaire de la communauté spiritaine : notre vie communautaire, nos engagements, la marche de la maison. Puis je rejoins ma paroisse pour une première réunion avec nos nouveaux vicaire et stagiaire. La semaine dernière, je leur avais présenté la paroisse et ses différentes activités. Pendant la semaine, ils ont visité les groupes, rencontré les personnes et contacté les responsables. Aujourd’hui, ils me font part de leurs questions et de leurs réflexions. Cela se passe dans une très bonne ambiance et ils sont très heureux de ce temps de partage et de la confiance qu’il y a entre nous. Ils sont jeunes et sont heureux d’être avec un « ancien » pour se former progressivement. Notre équipe va se souder peu à peu.
    Le reste de la journée est consacré à la rédaction du thème d’action diocésain de cette année : « Evangélisation et Promotion de la Famille » dans le cadre du 2ème Synode pour l’Afrique. J’ai des problèmes pour saisir le document, car le courant coupe 4 fois. Heureusement que j’ai enregistré mon texte au fur et à mesure.
    Le soir, à la télévision, le nouveau président de la CENI propose une nouvelle date pour les élections. Mais tout le monde n’est pas d’accord !

  • Lundi 25 octobre : Au cyber de l’archevêché, je m’installe à l’ordinateur pour ouvrir mes mails et travailler sur Internet. Bernard vient me rejoindre pour travailler sur notre blog justice et paix. Cela nous prend plusieurs heures. Ensuite, je passe à la préparation de l’annuaire diocésain et du calendrier 2011 : nous ne sommes pas en avance ! Avec l’OCPH, nous réfléchissons à la situation du pays et aux actions à mener, à la rédaction des statuts de Savoir-Fer (enfants de la rue, apprentissage de la soudure), au travail des deux Commissions de Justice et Paix et de Pastorale sociale. Enfin, rencontre avec Dominic qui, ne parlant pas français et venant d’arriver, est complètement perdu. Il est venu du Nigeria apprendre le français et prendre en charge la communauté anglophone. Les choses vont se faire, mais, comme pour tout, il faut du temps.

  • Dimanche 24 octobre : Comme les élections n’ont pas lieu, les gens sont venus nombreux à la messe. A partir de l’Evangile du pharisien et du publicain, je trace des pistes pour l’engagement des chrétiens en ce moment des élections, dans le service de nos frères et l’engagement. A la fin de la messe, je présente le nouveau vicaire à la communauté.
    Bien sûr, nous prions pour le pays, car cette nuit les tensions se sont continuées dans nos quartiers.
    Après la messe, réunion des parents, des parrains et des marraines des catéchumènes. C’est vraiment très important pour nous. En effet, les parents sont souvent dépassés par leurs enfants, la plupart étant analphabètes et ne parlant pas français. Ils démissionnent devant leurs enfants. Et les catéchumènes considèrent la catéchèse plus comme un simple moyen de « gagner les sacrements » que comme une initiation à la vie avec le Christ et un apprentissage à la vie communautaire. Dans ce cas-là, bien sûr, il n’y a pas besoin de parrain. Alors que nous en demandons un dès le début de la catéchèse, comme soutien et témoin. Malheureusement, il n’y a pas encore de réponse. Très peu de parents et parrains restent à la rencontre. Nous réfléchissons avec ceux qui sont là, mais il y a encore beaucoup à faire !
    Le soir, émission religieuse sur une radio libre. Je reprends nos réflexions de ce matin sur notre engagement dans la vie du pays. . Et comme nous sommes dans le mois du Rosaire, je reprends les différentes étapes de la vie de Marie, pour chercher ce à quoi cela nous appelle dans notre situation actuelle.

  • Samedi 23 octobre : Aujourd’hui, je suis en paroisse. Ce matin est consacré à la pastorale sociale de la paroisse. Nous rappelons les actions menées l’année dernière et voyons l’évolution de la situation. La Commission va devoir préparer un plan d’action (Voir dans mon site la rubrique : « Travail social et humanitaire »). Nous prenons un temps pour parler et manger ensemble, avec le vicaire et le stagiaire.
    L’après-midi, rencontre avec l’équipe Sant Egidio qui travaille surtout pour l’éducation à la paix et le soutien des enfants en difficulté. Puis nous faisons le tour des groupes de catéchèse ; les activités se mettent en place peu à peu, mais il faut encore réorganiser les choses. Et comme nous avons voulu que la catéchèse se fasse dans les quartiers, les groupes sont dispersés ; il faut du temps pour les visiter.

  • Vendredi 22 octobre : Ce matin, je passe beaucoup de temps sur Internet, d’abord pour ouvrir ma boîte mail, puis pour obtenir des renseignements sur la Guinée et le reste du monde. C’est très long car Internet ne fonctionne pas vite, il n’y a pas souvent de réseau et par contre les coupures de courant sont nombreuses.
    Ensuite, travail à la Procure pour les questions financières et matérielles.
    Aujourd’hui, a lieu un grand meeting de l’un des candidats à l’élection présidentielle, Alpha CONDE. Il y a énormément de jeunes. Un accident grave se produit : des jeunes sont intoxiqués en buvant de l’eau polluée et des yaourts de mauvaise qualité. Une centaine de personnes sont atteintes. Aussitôt des accusations fusent. Ce sont les peuhls qui veulent nous empoisonner : les peuhls forment la majorité du parti de l’autre candidat à la présidence, Dallein DIALLO. La tension monte rapidement. Le meeting se disperse. Les participants retournent en banlieue, en traversant des quartiers à majorité peuhle. Ce sont les insultes, quelques bagarres et les jets de pierre. Heureusement, un certain nombre de personnes, en particulier des anciens, tentent de calmer tout cela. Pour nous, nous faisons la route au milieu des manifestants, au rythme de la marche. On nous demande pour quel parti nous sommes ; Je réponds : « pour la Guinée et tous les Guinéens », avec un large sourire ; cela suffit à calmer le jeu. Et nous parlons ainsi sur la route.
    En effet, il nous faut à tout prix aller à l’aéroport pour retrouver un confrère nigérian. Il vient d’arriver pour assurer l’aumônerie des anglophones à CONAKRY. A sa descente d’avion, on lui a pris son passeport, bien qu’il soit en règle et qu’en tant que nigérian il n’ait pas besoin de visa. Après discussion avec les policiers, nous arrivons à le libérer. Igbé, notre confrère nigérian avec qui j’ai travaillé à Mongo et à Kataco, le prend en charge. Pour moi, je regarde comment sont l’ambiance et la circulation. Les taxis circulent ; j’en profite pour rentrer à la maison sans problème. Par contre, la nuit, la tension s’étend dans les quartiers. On parle de 5 morts, suite aux intoxications, ce qui va s’avérer complètement faux. Mais la rumeur s’est répandue dans tout le pays, avivant les agressivités. Et on ne peut pas récupérer les choses, ni revenir en arrière. D’autant plus que les problèmes continuent. Des bulletins de vote ont disparu, des fausses listes électorales circulent, 17 ordinateurs programmés devant servir au comptage des voix ont été volés. Du coup, on décide de revenir au comptage manuel. Et le soir, le nouveau président de la CENI annonce que les élections ne pourront pas avoir lieu après-demain dimanche, car les choses ne sont pas prêtes… Ce qui est vrai, mais les gens en ont marre et voudraient que les élections aient lieu le plus vite possible. On a l’impression de ne pas pouvoir s’en sortir.

  • Jeudi 21 octobre : En écoutant la radio, comme plusieurs fois par jour, j’entends le ministre français des affaires étrangères qui parle en disant que c’est grâce à la France qu’on a trouvé une solution au manque de sérieux et d’efficacité de la Commission électorale (CENI) et qu’il est d’accord pour que les élections soient retardées d’une semaine. Je suis toujours très mal à l’aise avec ces grandes déclarations, relent de colonialisme. Il y a des tas de pays et d’Organisations qui se sont penchés sur la Guinée, et ce n’est certainement pas grâce à la France seule que la solution a été trouvée, ni par elle en premier. Et les Guinéens acceptent très mal –avec raison d’ailleurs- qu’un ministre français leur dise ce qu’ils ont à faire. Que diraient les Français si un ministre guinéen venait leur dire à quelle date ils doivent fixer leurs élections ?
    Ce matin, je reste travailler dans ma communauté car si je monte à l’archevêché je n’ai pas un moment de libre. Et j’ai un tas de documents en retard à régler.
    L’après-midi, nous nous retrouvons avec les responsables des Centres aérés pour préparer ensemble le compte-rendu final, à partir des rapports des onze centres aérés de cet été. Il y a des choses à revoir et la synthèse n’est pas facile, car tous les centres n’ont pas fonctionné de la même façon et les points sont différents. Nous nous répartissons le travail pour la rédaction finale.

  • Mercredi 20 octobre : Un nouveau président de la CENI (Commission électorale) a été élu. Il s’agit d’un général malien, représentant de la francophonie depuis 2 ans auprès de la CENI. En tant que malien, il est neutre. Il a l’autorité d’un militaire et il connaît bien les problèmes. Il a été bien accueilli par les différents responsables du pays et par les deux candidats. Mais la population regrette que l’on n’ait pas choisi un Guinéen. Il est vrai que les membres de la CENI ne s’entendaient pas et que rien n’avançait.
    En tout cas, cette nomination apaise les gens… au moins pour un temps, car les problèmes de fond ne sont pas réglés.
    Nos problèmes ne sont pas réglés non plus. Nous nous retrouvons avec le bureau pour régler les problèmes des formateurs de l’atelier de soudure « Savoir-Fer » pour la formation des enfants de la rue (Voir le site). Pendant ce temps-là, ce sont les jeunes qui en subissent les conséquences.
    Ensuite, travail à la Procure et différents contacts. Avec tout cela, la journée passe vite. Au retour, je ramène les bagages de mon vicaire. Il va pouvoir s’installer dans un beau presbytère tout neuf ! Il faut dire que les paroissiens ont fait un effort énorme. Il reste encore des aménagements intérieurs à faire et beaucoup de matériel à acheter : cela se réalisera peu à peu. Jusqu’à maintenant, la construction a coûté 12.000 euros, ce qui fait quand même plus de 100 millions de francs guinéens. Les paroissiens eux-mêmes ont fourni la moitié de la somme par des cotisations, travaux et autres activités, ce qui représente un effort énorme. Cela est très important pour nous. Nous avons besoin de l’aide extérieure, mais nous voulons que les Guinéens fassent tout ce qu’ils peuvent de leur côté. Il ne faut surtout pas qu’ils deviennent des assistés.
    C’est mercredi. Plusieurs groupes et Mouvements tiennent leur réunion à la paroisse : les CV-AV (enfants), scouts, choristes, Sant Egidio. Je vais leur présenter les nouveau vicaire et stagiaire et, sans plus attendre, nous donnons aux différents groupes les orientations de base en fonction des objectifs du Mouvement, leur thème de campagne d’année et les réalités de la paroisse, et nous leur demandons de préparer leur programme d’activités le plus vite possible.
    Le soir, nous disons la messe pour le 2ème anniversaire de la mort d’un paroissien qui était un des piliers de la paroisse. Il y a beaucoup de monde. Sa femme est musulmane. Elle est présente à la prière et nous donne un très beau témoignage sur leur vie de couple et sur l’importance de la foi et de l’entente entre chrétiens et musulmans.
    Après la messe, je prends le temps de saluer les différents participants. Puis, sans tarder, nous nous retrouvons avec le Conseil économique pour régler les questions financières et matérielles de la paroisse. En ce début d’année, il y en a beaucoup !
    Ce soir, nous apprenons la nomination de l’ancien archevêque de Conakry, Robert SARAH, comme cardinal. Il travaillait depuis quelques années à Rome, comme secrétaire de la Congrégation pour l’Evangélisation. Il a été nommé récemment responsable de Cor Unum, l’organisation du Vatican qui organise l’aide de l’Eglise aux pauvres, les actions humanitaires et de développement. Cette nomination est une grande joie et une fierté pour tous les Guinéens, musulmans comme chrétiens, et un encouragement au milieu de nos problèmes, de même qu’une reconnaissance de nos efforts. Et par rapport aux actions de charité et de développement de l’Eglise, nous sommes heureux que ce soit un africain qui connaît bien nos problèmes.

  • Mardi 19 octobre : Malgré la tension, je monte à l’archevêché. Le procureur du diocèse est arrivé et nous avons beaucoup de choses à traiter ensemble. A commencer par la mise en place d’un Centre de développement agricole, préparé depuis plusieurs années. Un jeune français, coopérant volontaire, envoyé par la DCC (Délégation à la Coopération Catholique) est déjà arrivé. (Voir mon site : projets et travail social).
    Pendant ce temps-là, la tension est encore montée en ville. Les jeunes des quartiers populaires ont continué à manifester contre le président nommé de la CENI. Ils ont attaqué les forces de l’ordre à coups de pierre et les militaires ont tiré à balles réelles. On parle de 30 blessés. Du coup la tension renaît et la crainte que les événements passés ne se renouvellent ! C’est vrai que certains jeunes provoquent les militaires. Pourtant, ils savent que ceux-ci sont très violents. Ils poursuivent les gens jusque dans leurs maisons, ils les frappent et volent tout ce qu’ils possèdent. On parle aussi de plusieurs cas de viols.
    Ce qui fait que je suis appelé par plusieurs journaux et radios d’Europe qui me demandent ce qui se passe réellement et veulent avoir mon avis sur la situation. Pendant ce temps, la population continue ses occupations avec beaucoup de calme et de courage. Mais tout cela entraîne beaucoup de problèmes et bloque le développement du pays. Rien ne fonctionne normalement et tout le monde a de plus en plus de mal à vivre.
    Le soir, les taxis ne circulent pratiquement pas. Je trouve une occasion pour aller jusqu’à l’aéroport. De là, je dois continuer à pied pour traverser la grande place de BAMBETO ; elle est complètement vide de passants, mais la police veille. Et de l’autre côté, j’ai la chance de trouver un taxi qui passe par là et me conduit jusque près de notre communauté. Je suis heureux d’être arrivé ainsi, dans de bonnes conditions. Mais je me pose des questions sur l’impact de toutes ces formations et séminaires que nous avons organisés sur les droits humains, la démocratie, la réconciliation et la paix. Il faut du temps et beaucoup d’efforts pour que les choses évoluent.

  • Lundi 18 octobre : Aujourd’hui j’accueille mon vicaire. En effet, la situation de l’année dernière était intenable. Je ne pouvais pas à la fois tenir cette grande paroisse de Taouyah et assurer en plus le travail de « Justice et Paix » et la « Pastorale sociale » (action humanitaire et projets de développement dans tous les domaines), à moi tout seul. Avec un vicaire et un grand séminariste en stage, ce sera plus facile. En même temps, je pourrai les former et préparer la relève.
    C’est son curé, accompagné du président du conseil économique de sa paroisse, qui nous amène notre vicaire. Les anciens de notre paroisse sont là pour les accueillir, selon la politesse et la coutume guinéennes. Nous pouvons bien l’accueillir car les dernières années les chrétiens ont fourni de gros efforts pour construire le presbytère et pour l’aménager.
    Le soir, le groupe charismatique continue la Neuvaine de prières pour le pays, pendant que l’on récite le chapelet dans les communautés de quartier. Nous ne pouvons pas rester à l’écart de ce qui se passe dans le pays. Ce soir, des partisans de Dallein DIALLO ont jeté des pierres sur les forces de l’ordre qui ont répliqué à coups de grenades lacrymogènes. Ce n’est pas de bon augure !

  • Dimanche 17 octobre : Je me lève tôt car je vais aller dire la messe à 7 heures pour la communauté anglophone qui est sur notre paroisse (nigérians, libériens, sierra léonais, etc…). Après la messe, nous nous retrouvons tous ensemble pour voir comment relancer les activités de la communauté : l’accueil des nouveaux, le soutien aux nécessiteux, la défense des réfugiés ; car, comme partout, les étrangers sont souvent exploités et persécutés. Et aussi bien sûr, la prière, la catéchèse et les autres activités.
    Après la grand messe paroissiale, nous tenons la réunion générale des jeunes. D’abord, nous faisons le point des activités de vacances. Puis nous lançons l’année pastorale en donnant des orientations générales et en demandant à chaque groupe et mouvement de faire leur plan d’action. Pour cela, nous insistons sur la nécessité de se rappeler le but et les méthodes d’action de chaque mouvement, et d’assurer un suivi dans leurs activités. Car souvent, ils se contentent d’actions ponctuelles, et surtout de fêtes, soirées dansantes, célébrations, anniversaires et matchs de foot-ball, au lieu de réfléchir à leur vie de jeunes et d’analyser leurs problèmes afin d’en dégager des actions précises en attaquant les causes profondes de leurs difficultés. Puis nous leur demandons de préparer le renouvellement du bureau pour cette année. Le tout se passe dans une très bonne ambiance, comme d’habitude. Un paroissien vient nous apporter de l’eau à boire que nous acceptons avec bonheur, car c’est la fin de la saison des pluies et il fait très chaud, très lourd ; et même en ville, ce n’est pas facile de trouver de l’eau potable.
    Emission radio et premières manifestations. Le soir, je dois animer une émission en direct, avec des questions des auditeurs, sur la déclaration de l’évêque. Je prends le taxi collectif. Mais arrivé au grand rond-point de BAMBETO, je dois continuer à pied. Les partisans de Dallein DIALLO, l’un des deux candidats à l’élection présidentielle, attendent leur leader. Ils ont envahi toute la chaussée et il est impossible de circuler. On sent même une certaine agressivité, car ils reprochent au président par intérim de ne pas changer le président de la CENI (la Commission électorale nationale). Je continue donc à pied en me faufilant entre les différents groupes et j’arrive juste à temps pour mon émission. Heureusement que j’avais prévu large !
    L’émission radio se passe bien, bien que j’aie quelques difficultés à m’entendre avec la journaliste. De même, les questions en direct cherchent à me faire glisser dans le domaine politique et à me récupérer, en me faisant prendre parti. Bien sûr, je ne me laisse pas faire. Nous passons des extraits de la déclaration de l’archevêque que je commente avec des exemples et en français plus simple. A la fin, je propose un certain nombre d’actions pour la campagne électorale, les élections et surtout l’acceptation des résultats et la reconstruction du pays, qui que soit le vainqueur.

  • Samedi 16 octobre : Après la rencontre des catéchistes, je dis la messe du samedi soir, à la suite de laquelle le groupe charismatique se retrouve pour une longue prière pour le pays.

  • Samedi 16 octobre : Réunion du Conseil paroissial.
    C’est l’organe de réflexion et d’orientation de la paroisse. Chaque groupe, mouvement et communauté de base y envoient deux délégués (un homme, une femme). Ils ont préparé, par écrit, les réponses aux deux questions suivantes : Que pensez-vous des activités de l’année dernière ? Que proposez-vous pour cette année ?
    Les réponses de chacun permettent de faire le tour des différentes activités et ainsi, après avoir examiné tous les secteurs de la vie de la paroisse, de tracer des pistes pour cette année. Nous commençons par un partage sur l’Evangile de demain, dimanche : l’histoire de la veuve et du juge corrompu. Nous nous interrogeons à partir de là, sur notre vie de prière, notre lutte pour la justice et la pratique de notre foi. Le compte-rendu sera lu demain aux annonces, à toute l’assemblée, avec les commentaires et explications nécessaires. Cela va prendre du temps, mais il faut savoir ce que l’on veut. Et pour nous, c’est essentiel que tous soient au courant, non seulement des décisions prises, mais aussi de la réflexion qui a été menée. Le tout se termine par une prière où chacun participe.
    Rencontre des catéchistes. Comme pour toutes les autres activités, il y a un certain nombre de problèmes à régler : la mise en place des groupes, la mobilisation des communautés, l’élaboration des programmes, la recherche des documents, la sensibilisation des parents, le choix des parrains et marraines (chaque catéchumène doit avoir un parrain ou une marraine, dès le début de la catéchèse), la recherche de nouveaux catéchistes, leur formation, la catéchèse dans les différentes langues (français, soussou, baga, kissi, loma, gbele), les inscriptions, les problèmes financiers, etc… Heureusement, dans l’équipe chacun connaît son rôle et les choses avancent vite.

  • Vendredi 15 octobre : Nous organisons la distribution de la déclaration sur les élections dans les ambassades, les ONG, les radios et journaux pour qu’elle puisse avoir l’impact maximum. Le midi, tous les Spiritains partagent le repas avec l’Evêque à l’occasion du départ de notre grand frère Gérard. Après avoir animé la session pastorale, il a assuré trois jours de formation au Noviciat. Ce repas nous permet d’échanger sur un certain nombre de choses qui se passent dans le pays et d’intensifier nos relations d’amitié. Le soir, réunion et messe dans la dernière communauté de quartier de la paroisse. Cette fois-ci, la communauté a préparé un certain nombre de questions et fait plusieurs propositions. Nous laissons donc de côté le programme habituel de réunion pour parler de tout cela.

  • Jeudi 14 octobre : Je peux enfin trouver une journée, ou plutôt une matinée, pour classer mes différents documents et commencer à travailler personnellement. Mais ça n’avance pas vite et il faudra que j’arrive à dégager d’autres moments.
    Le soir, je me retrouve dans une autre communauté de quartier. C’est la plus nombreuse, mais c’est celle qui marche le moins bien. Nous essayons de motiver les gens ; ce n’est pas simple !
    La nuit, je voulais voir l’interview de l’évêque à la télévision ; hélas, pas de courant ! Je n’étais pas le seul dans mon cas, et cela arrive souvent.

  • Mercredi 13 octobre : Aujourd’hui, ce qui m’occupe c’est l’organisation de l’école primaire de BOKE où il y a de gros problèmes financiers. Nous y nommons une nouvelle directrice pour régler toutes ces questions, et nous traçons une ligne directrice.
    Puis, c’est la réunion avec les formateurs des deux Commissions « Justice et Paix » et « Pastorale sociale ». Nous faisons l’évaluation des trois mois passés, en particulier celle des centres aérés. C’est important pour en tirer les conclusions et préparer l’année prochaine. Et nous nous apercevons qu’il y a une grande différence entres les rapports qu’on nous a fournis et ce qui s’est passé réellement. (Voir mon site).
    Nous choisissons les dates des premières rencontres diocésaines, malgré l’approche des élections. Ce sera plus compliqué, mais ce n’est surtout pas le moment de relâcher nos efforts. Et nous fixons les premières orientations pour cette année.
    Suit un long interview pour la radio missionnaire « MISNA » au Vatican, où j’explique non seulement la situation actuelle du pays, mais aussi tous les efforts de l’Eglise : l’intervention de l’archevêque à la télévision, la déclaration sur le 2ème tour de l’élection présidentielle, la formation d’observateurs indépendants pour ces élections, la formation des populations, etc…(Voir mon site : situation du pays et Justice et paix » : déclarations).

  • Mardi 12 octobre : Le matin, longue matinée avec C.R.S. (la Caritas américaine) qui nous soutient dans plusieurs de nos activités. Nous faisons le tour des problèmes les plus urgents. D’abord, le 2ème tour de l’élection présidentielle, le gros problème actuel. Nous voyons en particulier la possibilité d’une intervention à la télévision de l’archevêque de CONAKRY et de l’imam de la Grande Mosquée, pour un appel à la paix, à l’entente et à l’acceptation des résultats de l’élection.
    Mais il nous faut aussi penser au travail et aux questions pratiques. Nous sommes au début de l’année scolaire. Nous voyons donc comment relancer les écoles de brousse dans le nord du pays, dans les paroisses de OUROUS et KOUNDARA. C’est une action lancée depuis quelque temps et que nous voulons élargir. En effet, dans ce secteur, il y a très peu d’écoles publiques. Nous avons donc demandé aux parents de s’organiser pour construire un hangar et de cotiser pour prendre en charge un enseignant. Comme les cotisations ne suffisent pas, les parents vont aussi travailler gratuitement dans le champ de l’enseignant. De notre côté, nous organisons ces écoles et nous donnons aux enseignants la formation nécessaire.
    Nous voulons aussi intensifier le travail des deux Commissions : Justice et Paix et Pastorale sociale, en reprenant le travail à la base. Pour cela, nous allons assurer deux forums différents, un pour chaque Commission, avec l’aide des Caritas des pays voisins, pour expliquer à nouveau le sens de ces Commissions, en revoir les orientations pratiques et décider d’actions concrètes. C’est un très gros travail.
    Il y a aussi toutes les questions pratiques des comptes rendus financiers et autres.
    A la fin, nous retrouvons Sébastien, responsable des relations entre chrétiens et musulmans pour voir comment améliorer notre travail à ce niveau, en particulier avec les jeunes. Et quelles formations organiser. Et aussi la formation des séminaristes, puisqu’il est directeur du Petit Séminaire.
    Le soir, je me rends dans un quartier pour dire la messe anniversaire du 8ème jour du décès d’Eugénie qui a été longtemps malade. Toute la communauté est présente. Nous avons décidé de célébrer ces eucharisties dans la maison même (la cour) des défunts, plutôt qu’à l’église.

  • Lundi 11 octobre : Après cette grand messe et ces retrouvailles de dimanche, je commence à prendre contact avec les différents groupes et communautés dans ma paroisse, tout en continuant mon travail à l’archevêché. La priorité pour nous est la mise en place des communautés de base dans chaque quartier. C’est pourquoi cette semaine, chaque soir, je vais passer dans un quartier.
    Par ailleurs, le mois d’octobre est consacré à la prière du chapelet. C’est une prière simple, qui plaît beaucoup aux gens, et est tout à fait accessible aux analphabètes qui sont la majorité. Même ceux qui ne savent pas lire peuvent se rappeler les différents épisodes de la vie du Christ. Et chacun peut présenter ses intentions de prière à toute la communauté. En ce moment, nous prions beaucoup pour le pays. Tout ce mois, nous nous retrouvons chaque jour pour la prière, dans chaque quartier. Pour nous qui vivons en plein secteur musulman, ce témoignage de la prière est très important. Mais bien sûr, nous ne nous contentons pas de prier le chapelet. A partir des intentions de prières, nous voyons ce que nous pouvons faire pour les mettre en pratique. Après le chapelet, nous tenons donc notre réunion habituelle de communauté, selon le programme prévu : lutte pour la justice, actions pour la paix, travail avec les pauvres, réconciliation, etc.. à partir de la Parole de Dieu (Voir mon site : « activités paroissiales » - réunions de CCB). Puis nous terminons par la célébration de l’eucharistie, en choisissant les textes de la Parole de Dieu à méditer en fonction des choses dont nous avons parlé.
    Le problème, c’est pour rentrer la nuit. Car nous prenons le temps pour toutes ces activités et pour resserrer nos liens d’amitié. Les « taxis » sont rares et remplis depuis la ville. Mais c’est la même chose pour tous les habitants de Conakry qui n’ont pas de voiture. Et pour moi, c’est important de partager les conditions de vie des gens pour comprendre leurs difficultés.

  • Lundi 11 Octobre : Je me lève de bonne heure pour monter à l’archevêché, mais cela ne suffit pas pour éviter les bouchons et j’ai beaucoup de peine à trouver un taxi.
    C’est la reprise de contact avec les différents services de l’archevêché et les ateliers. Il y aura beaucoup de choses à régler. Mais aujourd’hui, ce qui compte c’est la joie des retrouvailles.
    Entre temps, aujourd’hui commence la Campagne électorale pour le 2ème tour de l’élection présidentielle, prévue le 24 Octobre. Nous sommes inquiets car la situation est très tendue et nous avons peur qu’il y ait de nouveaux affrontements entre les supporters des deux candidats. Nous allons relancer nos appels à la paix et à la réconciliation. Aujourd’hui, nous nous retrouvons avec plusieurs organisations qui ont fourni des membres à former comme observateurs indépendants pour les élections. Notre association a reçu la supervision du centre du pays, la région des peuhls dans le Fouta Djallon. Nous tirons les conclusions du 1er tour, pour éviter de tomber dans les mêmes erreurs.

  • Dimanche 10 Octobre : Zacharie, responsable du noviciat, m’accompagne à la paroisse, où il a fait son stage il y a 10 ans ; et aujourd’hui, nous allons présenter Hervé, qui sera en stage chez nous cette année. Je suis très heureux de retrouver ma paroisse. Et les paroissiens sont heureux aussi de me revoir. Nous animons la messe comme d’habitude : chants et danses, mais aussi participation animée et réflexion commune à l’homélie. Lectures en français (langue officielle) et en soussou (langue populaire). A la fin de la messe, je leur fais le compte-rendu de mes congés : mes différentes rencontres, ce que j’ai partagé et ce que j’ai reçu, à tous les niveaux (Voir mes « Nouvelles » de Juin à Septembre). Ensuite, c’est au tour de Zacharie de les saluer et de leur parler de la vie religieuse. Puis Hervé, le stagiaire, se présente. Notre prière est aussi marquée aujourd’hui par le retour des pèlerins partis à Jérusalem, Rome et Lourdes. Nous les accueillons et ils partagent avec nous ce qu’ils ont vécu. Cela fait beaucoup pour un seul jour.
    A 13 h, nous nous retrouvons tous autour de l’évêque avec Gérard qui a animé la session pastorale la semaine dernière. Repas très sympathique qui nous unit encore un plus les uns aux autres.
    L’après-midi, je continue à classer mes affaires, mais je n’arrive pas encore au bout.

  • Samedi 9 Octobre : Tout de suite après le repas, nous nous retrouvons avec notre évêque pour préciser mon travail à la paroisse de TAOUYAH et avec les Commissions nationales de « Justice et Paix » et de « Pastorale sociale ». Nous préparons un grand forum, avec l’aide des Caritas des pays voisins, pour remettre les choses en place et avancer.
    Je pars ensuite à ma paroisse. Là, j’ai une bonne surprise : tous les groupes de catéchèse sont en place. L’année dernière, lors de mon arrivée, la catéchèse n’avait commencé qu’en novembre, mais cette année ils se sont organisés et ont commencé la formation sans attendre mon retour.
    A la Messe, nous terminons la grande Neuvaine de jeûne et de prières pour le pays. Il y a du monde. C’est vrai que nous sommes très inquiets pour l’avenir du pays. Chacun cherche son intérêt et les tensions sont très vives. Nous ne savons pas comment se passera le 2ème tour de l’élection présidentielle. Il faut donc mobiliser toutes nos énergies, matérielles, humaines et spirituelles.
    Le soir, nous nous retrouvons entre spiritains. Comme ils sont encore tous là, nous pouvons échanger nos réactions, nos espoirs et parler de choses et d’autres.

  • 4 au 9 Octobre : Session pastorale.
    Nous nous retrouvons, comme chaque année, tous les prêtres autour de notre évêque, pour évaluer l’an passé et préparer l’année qui vient. C’est un gros travail de réflexion et aussi de partage. C’est une occasion de nous retrouver tous ensemble pendant une semaine, et c’est toujours une grande joie.
    Dans la partie du travail pastoral, nous faisons l’évaluation de la vie des différentes paroisses. Puis nous abordons un certain nombre de problèmes, après avoir réfléchi au thème de notre travail de cette année. Nous réfléchissons à notre façon de travailler entre prêtres, avec les religieux et religieuses, et les laïcs. Nous nous arrêtons à certains problèmes plus spécifiques : la famille et le mariage –en particulier les mariages entre chrétiens et musulmans-, l’animation des jeunes avec leurs problèmes d’études ou de travail (ou plutôt de chômage…). Et puis, plus largement, toutes les questions du développement humain et de la société. Cela nous fait bien du travail et il faudra préciser et évaluer les choses au fur et à mesure. Comme, par exemple, au sujet de l’engagement des femmes

  • Mardi 5 Octobre : Arrivée en Guinée. (3 heures 40, heure française)
    L’avion est en avance ! J’appelle le confrère qui devait m’attendre. Le téléphone ne passe pas. Il n’y avait pas de courant pour rechercher sa batterie. Nous finissons par nous retrouver. Aucun problème pour passer les formalités à la police, la santé ou la douane. Il suffit de dire que je travaille à la Mission catholique. Ils savent le travail que nous faisons et ils nous font confiance. Et j’ai la joie de voir que l’aéroport a été bien aménagé et que nous sommes moins harcelés par les porteurs, les marchands, les changeurs de billets et autres personnes qui exercent des activités autour de l’aéroport. Par contre, à l’extérieur, c’est autre chose. Il fait nuit, nous sommes arrêtés à de nombreux barrages et à chaque fois il faut nous expliquer pour pouvoir passer.
    Session pastorale de lancement d’année. Elle est commencée depuis hier déjà. Il faut donc me lever de bonne heure, ce qui ne me fait pas beaucoup de sommeil ! Mais la joie de revoir les confrères prêtres de tout le diocèse compense facilement le manque de sommeil.
    Pour la semaine, nous avons deux jours de réflexion et de prières, à partir de la 1ère Lettre de Pierre. Ce qui est un temps fort pour commencer l’année. Puis deux jours sur la façon de garder et protéger nos archives. Les quatre journées sont animées par un confrère spiritain, responsable des archives de notre Congrégation. Il connaît bien la Guinée car il y a travaillé de longues années, jusqu’à son expulsion avec tous les autres missionnaires, par Sékou Touré. Il est revenu de nombreuses fois ensuite, quand il était responsable de l’Afrique de l’Ouest pour la catéchèse d’abord, pour les spiritains ensuite. Nous sommes tous très heureux de le revoir, ou de le connaître pour les plus jeunes.
    Reprise des contacts. Avant de commencer la session le matin, et à la pause du midi, je passe à l’Archevêché à une demi-heure de marche, pour reprendre contact avec les différents services et saluer les responsables ou employés : le secrétariat, la maison d’accueil, la procure et la comptabilité, l’OCPH (Organisation catholique pour la promotion humaine = Caritas = Secours catholique), les Commissions Justice et Paix et de Pastorale Sociale. (Voir mon site). C’est une grande joie de revoir toutes ces personnes avec qui j’ai travaillé les années passées.
    Il y a aussi des personnes nouvelles : Fabien, un volontaire français, qui vient travailler à la mise en place d’un Centre de formation d’agriculture et d’élevage ; deux couples, qui viennent au Dispensaire St Gabriel (Voir la page « Santé » dans mon site).
    Pendant tout ce temps, jusque dans la nuit, je reçois des tas de coups de téléphone, pleins d’amitié ; mais ça ne facilite pas le repos. J’essaie d’ouvrir ma boîte mail, mais il faut un temps énorme. La boîte ne s’ouvre pas –ou je ne peux pas ouvrir les pièces jointes ou les photos. Et je sais que de nombreux messages ont été perdus ou renvoyés. Les serveurs sont de plus en plus engorgés et les réseaux sautent sans cesse. La situation ne s’est pas améliorée en quelques mois !

  • A Paris, du 29/9 au 4/10 : En plus de ces partages et de ces accueils, j’ai aussi un certain nombre de rencontres à faire. Dès mon arrivée le mercredi 29 septembre à PARIS, je vais au CCFD (Comité catholique contre la faim et pour le développement). Pour le moment, ils vont continuer à soutenir l’action auprès des enfants de la rue, mais ils ne peuvent pas sourtenir de nouveaux projets en Guinée, étant donné la situation actuelle du pays. Malgré tout, je suis heureux de mieux connaître leurs orientations et leur façon de travailler. Cela nous aidera à réfléchir et à améliorer nos manières de faire. De même que nous serons prêts à accueillir en Guinée les personnes qu’ils enverront. (Voir mon site, page « SOS mineurs).
    Le jeudi 30, en soirée, je vais retrouver la famille de la mariée du 7 Août (voir les « Nouvelles » à cette date). Ce sont des amis avec qui nous avons beaucoup travaillé à St Louis du Sénégal dans un groupe de réflexion et d’action mixte, c’est-à-dire composé de Sénégalais et d’étrangers. Après la grande fête du mariage, nous avons senti le besoin de nous retrouver en famille, entre nous.
    Le vendredi 1er Octobre, à midi, je suis au Secours Catholique, la Caritas française. Je retrouve la responsable pour l’Afrique de l’Ouest. Nous nous connaissons biens car elle était venue nous voir à Mongo, juste après les attaques rebelles. Nous sommes heureux de nous revoir après plusieurs années, et d’échanger nos idées sur la Guinée et le travail de la Caritas… même si, là encore, ils n’envisagent pas d’actions pour nous soutenir dans la situation actuelle. Car nous ne faisons pas partie de leurs priorités. Et il est vrai que les besoins sont énormes et ils ne peuvent pas tout faire. (Voir les circulaires de 1996 à 2006 dans mon site, et le moteur de recherche à : MONGO). Le soir, nous dînons chez Sandrine, une amie que j’ai connue au cours d’une session sur les méthodes d’actions non violentes évangéliques, organisée par le M.I.R. (Mouvement international pour la réconciliation. Toute son équipe de l’ACAT (Action des Chrétiens contre la Torture), et aussis sa sœur, journaliste au Journal « La Croix », son beau-frère, éducateur, s’intéressent à ce que nous cherchons à faire en Guinée. Et je ne manque pas de m’intéresser aussi à leurs actions, et à leur problème de renouvellement du groupe, la plupart étant assez âgés.

  • Samedi 2 Octobre, c’est le jour anniversaire de la mort de notre fondateur, Claude Poullart des Places. Je suis heureux de fêter cet anniversaire dans notre communauté centrale de la Maison Mère : d’abord l’Eucharistie, puis un bon repas, avec tout ce que cela signifie comme joie et partage fraternel.
    Aussitôt après, je pars retrouver un groupe « Tiers Monde » qui réfléchit aux questions du développement et de l’organisation du monde et de la société française. Il y a beaucoup à faire à ce niveau ! Ils collaborent avec le CCFD, ce qui ne les empêche pas de nous soutenir directement. Nous avions travaillé déjà dans le même sens avec Alain et Liliane, de 1976 à 1979, quand j’étais venu travailler pendant 3 ans dans la banlieue parisienne en animation missionnaire et formation au développement, et aussi avec les jeunes français, les étudiants africains et les travailleurs immigrés. L’année dernière, ils nous ont soutenus pour les jardins d’enfants de Mongo.(Voir l’album photos et cette page dans mon site). Pour l’année prochaine, je leur propose de soutenir les centres aérés que, depuis 2 ans, nous avons lancés dans les quartiers populaires de CONAKRY, pour le soutien scolaire des enfants de familles pauvres et l’alphabétisation des enfants travailleurs, l’éducation et les actions dans le quartier en faveur des droits des enfants. Et aussi des jeux, chants, danses et théâtres et des activités manuelles, le tout avec une visée éducative. Voir la nouvelle rubrique : Centres aérés). Ils vont réfléchir entre eux et me feront part de leur décision.
    Les déplacements en banlieue parisienne étant longs et compliqués, Alain me conduit en voiture de l’Hay-les-Roses à Ste Geneviève des Bois, chez ma nièce. Ce soir je me retrouve en famille, avec mon frère et ma belle-sœur que je n’ai pas encore rencontrés, deux de mes nièces et leur famille. Mon frère et sa femme arrivent de notre île de HOUAT : ils nous amènent des moules, des crabes et autres crustacés qu’ils ont péchés eux-mêmes. Tout le monde apprécie. Et ils nous donnent des nouvelles de toute la famille. Ca fait plaisir !
    Pendant tous ces jours, je reçois des tas de coups de téléphone de nombreux amis qui me souhaitent un bon retour en Guinée… et me promettent des nouvelles par mail. Ca encourage !

  • Dimanche 3 Octobre, avec mon neveu Jean-Michel nous travaillons longuement sur notre site. Nous profitons d’être ensemble pour régler un certain nombre de questions. C’est plus facile et il y a beaucoup de choses à voir. A midi, nous recevons certaines des personnes qui nous aident depuis deux ans. L’année dernière, ils avaient soutenu la rénovation de l’internat de BOFFA et la construction d’un château d’eau pour l’école. Cela nous avait rendu un grand service, en nous permettant de relancer notre travail d’éducation. (Voir les rubriques  Boffa et projets – éducation + l’album photos). Cette année, ils ont soutenu les centres aérés du mois d’août dans les quartiers de Conakry. Je peux ainsi leur expliquer ce que nous avons fait grâce à eux et répondre à leurs nombreuses questions.
    Un voyage/chantier en Afrique. L’après-midi, des scouts-routiers viennent nous rejoindre. Ils envisagent de faire un chantier avec des jeunes en Guinée. Nous parlons ensemble des conditions pour une telle action. Chercher à connaître le pays avant de partir : pas seulement la théorie, mais par des rencontres des gens du pays vivant en France. Et surtout que ce ne soit pas une parenthèse dans leur vie, comme un beau souvenir, mais que cette action se prolonge à leur retour par une coopération avec étrangers et gens des autres religions et les pauvres de notre société. J’insiste sur l’état d’esprit qui me semble nécessaire : ne pas aller seulement pour aider, mais aussi pour recevoir. Chercher non seulement à voir ce qui se passe, mais essayer de comprendre les choses et découvrir les causes des problèmes. Pas seulement découvrir un pays, mais rencontrer les gens en profondeur. Un chantier avec des jeunes me semble une bonne possibilité pour cela. Je vais voir s’il est possible d’organiser quelque chose en Guinée. Mais vu la situation actuelle du pays, j’hésite à les accueillir chez nous. Je vais sans doute les orienter vers un autre pays.

  • Lundi 4 Octobre, de retour à notre Maison-Mère, je fais le dernier tour de nos différents services. Je pars pour 3 ans, il est donc important de bien préciser les choses : adresses, façons de travailler. Je remets à notre secrétariat tout un lot de timbres-poste que l’on m’a donnés. Ces timbres seront vendus et la somme recueillie servira à participer aux frais de santé des missionnaires spiritains qui rentrent en France se faire soigner et opérer. Ces frais sont toujours très élevés.
    Et puis, passage obligé par la Procure des Missions pour régler toutes les questions financières, qui ne sont pas simples, étant donné les distances et les difficultés de communication avec la Guinée ainsi que la dévaluation de la monnaie guinéenne. Et aussi les relations et remerciements aux différentes personnes qui nous aident. Enfin, la dernière rencontre avec les confrères qui ont travaillé en Guinée, des Guinéens vivant en France, des personnes en relation avec le pays pour y apporter les salutations et nouvelles mais aussi les lettres et paquets, les questions et demandes de renseignements. Car je serai attendu pour tout cela à Conakry par beaucoup.
    Bagages.
    Tout cela m’amène à l’heure du repas. Il me reste peu de temps pour faire mes bagages, que j’ai accumulés à chacun de mes passages à Paris pendant ces congés. En effet, le départ de l’avion a été avancé. Heureusement que j’avais téléphoné la semaine dernière à la Compagnie ! Ils avaient avancé l’heure du départ depuis Casablanca et je n’avais pas été prévenu. Ca n’a pas été facile d’obtenir des nouveaux billets. J’ai droit à deux valises de 23 kg ; quand je les pèse, elles font chacune plus de 40 kg alors que j’ai déjà essayé d’éliminer le maximum de choses. C’est vrai que j’ai beaucoup de livres et d’appareils qui pèsent lourd. Il me faut à nouveau faire un tri sérieux et laisser des livres et matériel… que j’avais déjà laissés il y a deux ans !
    Un confrère me conduit à Orly-Sud, ce qui me permet d’éviter de monter mes valises une par une dans les escaliers du métro. Mais je n’échappe pas à la fouille au corps à l’aéroport, pieds nus et sans ceinture, le passage au portillon, les sacs à vider et à refaire sur place. Mais enfin, nous arrivons à décoller pour un voyage de nuit, avec changement d’avion à Casablanca et arrivée à 3 h 40 à Conakry (heure française).

  • 29 Septembre au 4 Octobre : Séjour dans notre Maison Mère.
    C’est toujours pour moi une grande joie d’y séjourner. D’abord nous y sommes très bien accueillis. C’est l’occasion de parler avec un certain nombre de confrères. D’abord notre équipe des trois responsables pour la France, mais aussi ceux des différents services, les responsables du secrétariat, de l’économat, de la procure, de la librairie et des expéditions, les responsables de la Commission « Justice et Paix » et de la revue « Pentecôte sur le monde », Monseigneur GAILLOT, etc…Je suis heureux de parler avec le personnel de la maison : africains, portugais et autres étrangers que je connais bien après tant d’années. Et puis, il y a tous les confrères de passage, venus du monde entier, certains que je n’ai pas revus depuis de très nombreuses années. C’est toujours une grande joie de les revoir et d’échanger nos expériences, très variées mais toutes intéressantes. Il y a aussi les autres personnes de passage, en particulier beaucoup d’africains : des personnes ayant travaillé en Guinée, des prêtres guinéen s en formation ou en poste en France, les Guinéens qui reviennent de leur pèlerinage à Jérusalem, Rome et Lourdes et qui retournent en Guinée ; et tant d’autres. Je suis particulièrement heureux de rencontrer Monseigneur Louis PORTELLA, évêque de KINKALA, au Congo, un de mes anciens élèves au séminaire de Brazzaville, et que je n’avais pas revu depuis 1975. Il y a beaucoup de tensions au Congo et il est très intéressé par notre travail de Justice et Paix et par le manuel que nous sommes en train de composer. Nous allons d’ailleurs lui demander d’en rédiger la préface.
    Retrouvailles. A la rue Lhomond, je retrouve spécialement Albert qui a fait son stage avec moi à Mongo avant d’être ordonné prêtre au GHANA et d’aller travailler au nord du BENIN. Il y a aussi Richard, lui aussi ancien stagiaire à Mongo, nigérian, revenu travailler en Guinée à Koundara. Il se forme actuellement pour mieux comprendre et faire comprendre la vie, la spiritualité et les orientations de nos fondateurs. Enfin, Winfried, ghanéen lui aussi, qui m’a succédé à Mongo. Il fait des études en anthropologie à l’Institut catholique de Paris. Nous nous retrouvons ensemble, pas seulement pour revivre les bons moments de Mongo, mais pour partager notre vie future et actuelle. Tous les trois, après leur formation, retourneront dans leur pays d’origine, pour former nos jeunes. Il faut bien préparer l’avenir, mais cela fait un gros trou en Guinée.
    Heureusement, Jean, français, qui avait travaillé autrefois à Koundara avec Winfried, revient en Guinée, à Mongo où nous avons tous travaillé. Ces trois dernières années, il tenait une paroisse dans le sud de Paris à Fontenay aux Roses. En effet, nous avons maintenant quelques paroisses en France où il y a de nombreux étrangers sans papiers, et des français (de souche ou non !) en difficulté. Notre Province de France a accepté un grand sacrifice en libérant Jean. Nous nous retrouvons pour plusieurs séances de travail à trois, avec Winfried, pour préparer le départ de Jean vers la Guinée en Janvier 2011.
    Accueil. En même temps, comme je suis à Paris, un certain nombre de personnes viennent me voir. D’abord René, dominicain, ancien chercheur au CNRS, qui a beaucoup travaillé sur l’Afrique. C’est un grand ami depuis très longtemps et c’est toujours une joie pour moi de parler avec lui.
    Puis Michel, responsable de l’ONG Appel Détresse vient nous voir. Ils soutiennent en particulier Mongo. Jean, Winfried et moi tenons une réunion avec lui pour la suite de nos activités.
    Ensuite, Maria, avec qui nous avons travaillé en Août en Côte d’Ivoire. Nous faisons le point de notre travail sur notre manuel sur la Réconciliation, l’Education à la paix et la non violence. Le plus difficile, c’est de le réécrire en français courant

  • Mardi 21 Septembre : Nous nous retrouvons avec tous les membres de la section à l’entrepôt où ils se réunissent chaque mardi pour travailler. C’est l’occasion d’être tous ensemble et de parler. Des journalistes des deux journaux « Ouest France » et « Le Télégramme » viennent m’interviewer, et un autre de la radio « Rivages » (voir mon site). Toutes ces activités me semblent importantes, non seulement pour expliquer ce que nous faisons en Guinée et soutenir ce qui nous aident, mais surtout pour réfléchir ensemble aux problèmes du développement et à la façon dont nous construisons le monde et ainsi pousser jeunes comme adultes à s’engager en France, là où ils vivent. Nous sommes tous solidaires. Et c’est notre civilisation occidentale que nous exportons dans le Tiers Monde. Il est donc important de la transformer et de la faire évoluer. Nous terminons cette matinée très agréable et pleine d’amitié par un repas partagé où chacun a apporté quelque chose et où tous mangent dans la joie.
    Décès et maladies. Mais il y a aussi la tristesse. Par deux fois, à Paris, j’avais voulu voir Jean, un ami d’enfance du Sénégal, lui aussi gravement malade d’un cancer. Cela n’a pas été possible, vu son état, mais nous avons pu au moins chaque fois nous parler au téléphone. J’ai été frappé par son courage et la façon dont il vivait sa maladie dans la foi. Et aussi par son amitié profonde et l’intérêt qu’il continuait à porter à mon travail, malgré ses souffrances. J’ai appris son décès la semaine dernière. Bien sûr, j’ai prié et célébré la messe pour lui. Mais malheureusement, je n’ai pas pu assister à son enterrement, car je devais intervenir à Rosporden et il n’était pas possible de changer le programme au dernier moment. Je continue à penser à lui, avec beaucoup de tristesse mais aussi dans la paix et la reconnaissance pour tout ce qu’il a vécu. Dans le même temps, un de mes frères se fait opérer à Nantes. Et j’apprends le décès, coup sur coup, de deux cousins à l’Ile d’Houat. Je les avais visités et avais parlé longuement avec eux au mois d’août.
    Au cours de ces congés, j’ai ainsi appris le départ de plusieurs amis et parents. Ce qui n’est pas étonnant vu mon âge. J’ai rencontré de nombreuses personnes âgées. Elles sont de plus en plus nombreuses. Certaines vieillissent bien. Mais beaucoup, surtout si elles sont malades, perdent la mémoire ou souffrent, vivent assez mal leur vieillesse. Plusieurs, se sentant diminuées, ont même refusé de me voir. Prolonger la vie, c’est sans doute une bonne chose, mais à condition d’arriver à vivre sa vieillesse, sinon en bonne santé, au moins dans la paix. Les façons de vivre la vieillesse et la mort sont bien différentes en Guinée, et dans toute l’Afrique Noire d’ailleurs.
    Aumônerie de l’Hôpital. A Brest, j’ai aussi l’occasion de rencontrer les visiteurs des malades ainsi que ceux et celles qui vont leur donner la Communion le dimanche. Nous parlons longuement de la Guinée, mais ils m’expliquent aussi ce qu’ils font à l’hôpital, les difficultés qu’ils rencontrent, et aussi leurs joies dans cet apostolat. J’avais déjà entendu parler de tout cela par l’un d’entre eux ; je suis content de connaître toute l’équipe.
    Travaux divers. Les jours suivants, je suis très occupé à répondre aux nombreux mails que je reçois, à préparer des documents pour l’année prochaine, et à travailler sur Internet. Et surtout je profite d’avoir un peu de temps libre pour travailler au Manuel sur l’éducation à la paix et la réconciliation que nous avons travaillé à ABIDJAN (voir les « Nouvelles » de fin Août). Nous avons proposé un certain nombre de corrections qu’il faut maintenant rédiger. Et surtout, il faut le mettre en français simple pour qu’il puisse être utilisé par des responsables de groupes, de mouvements ou de communautés qui n’ont pas fait beaucoup d’études en français. C’est un très gros travail et très délicat, bien que j’aie l’habitude de le faire. Heureusement que Jocelyne, qui saisit également ces « Nouvelles » et d’autres documents de mon site, est là pour saisir le texte de ce manuel que j’enregistre pour elle sur des cassettes que je lui envoie par la poste. Merci à elle.
    Je m’intéresse aux Fraternités spiritaines qui viennent de tenir leur Assemblée générale dans notre Maison de CHEVILLY LARUE, près de Paris. Là même où j’ai terminé mes études de théologie et ai été ordonné prêtre. Ces fraternités sont composées de laïcs qui veulent partager notre action missionnaire là où ils sont et vivre la spiritualité de nos fondateurs, Claude Poullart des Places et le Père LIBERMANN.
    Je trouve un moment pour aller voir le film « Des hommes et des dieux » que j’apprécie beaucoup et où je retrouve un certain nombre de situations que j’ai vécues moi-même : la révolution en 1963 au Congo, les massacres en Mauritanie et au Sénégal dans les années 90 et les attaques rebelles en Guinée en 2000-2001. Et bien sûr la rencontre avec l’Islam et le travail commun, ainsi que l’amitié avec les musulmans.

  • 16 au 20 Septembre : ROSPORDEN et CONCARNEAU.
    Il y a quelques mois, à l’Archevêché de Conakry, j’avais rencontré Mona, membre d’une association qui soutient des actions de développement dans un village du Fouta Djallon, au centre de la Guinée. Nous ne nous étions parlé que cinq minutes, mais le courant était passé. Aussi, quand Mona apprend que je suis en congés, elle m’invite chez elle à Rosporden. Le jeudi soir, nous regardons les photos du village et des actions menées : construction d’un dispensaire et soutien de l’infirmier et des sages-femmes, aménagement des bas-fonds pour la culture du riz, en vue d’arriver à la suffisance alimentaire, soutien des femmes et des jeunes. Je lis les différents comptes rendus et nous en parlons ensemble.
    Intervention dans un Lycée. Le vendredi 17, je passe la journée dans un lycée technique de Concarneau, où je travaille spécialement avec cinq classes de 5ème. J’ai apporté des DVD sur le dispensaire St Gabriel de Conakry et les fêtes du Centenaire de la paroisse de MONGO (voir mon site aux rubriques de ces noms), et toute une série de diapos présentant les différents aspects de la vie, de la géographie et de l’histoire de la Guinée, et nos différentes activités aussi bien auprès des réfugiés que des Guinéens (voir dans mon site l’Album photos). Les professeurs sont intéressés ; nous continuons notre réflexion avec eux et voyons comment ils vont prolonger cette intervention avec les élèves. Je regrette simplement de ne pas pouvoir parler également avec les autres professeurs.
    Samedi 18, nous continuons à parler avec Mona. J’en profite aussi pour passer de nombreux coups de téléphone. En effet, le temps passe vite, je vais bientôt retourner en Guinée et il y a beaucoup de parents et d’amis que je n’ai pas pu rencontrer. Je veux au moins leur parler au téléphone, grâce à Mona qui met son appareil à ma disposition. Cela me fait très plaisir d’avoir ainsi quelques nouvelles et d’échanger avec les uns et les autres.
    Le soir, je vais dire la messe à l’église de Rosporden, puis nous nous rencontrons avec des amis de Mona et la directrice du collège où je vais aller lundi. Une soirée très agréable.
    Dimanche 19, je dis à nouveau la messe à l’église de Rosporden. Je leur parle de la Guinée. A la fin de l’homélie les gens applaudissent, comme ils l’avaient déjà fait la veille au soir. Cela ne m’étonne pas, car en Guinée nous avons l’habitude des messes animées où les gens participent. Mais il paraît qu’en Bretagne, ce n’est pas tellement l’habitude.
    Lundi 20, je passe la journée dans un autre collège de la région. Les élèves se forment à l’hôtellerie. Cette fois-ci, je travaille avec les classes de 4ème. Et surtout, je parle longuement non seulement avec les professeurs mais aussi avec la directrice et l’aumônière du collège pour voir comment continuer la réflexion. Puis le repas de midi avec les professeurs est très sympathique. Comme vendredi, Mona est venue avec moi. Elle explique le travail de son association, en Bretagne comme en Guinée. Cela est important pour proposer aux élèves des actions possibles, et ne pas se contenter d’un simple témoignage. Mais là encore, il me faut repartir, car on m’attend à Brest.
    Le soir, nous nous retrouvons en famille avec deux amies d’enfance du Sénégal où j’ai grandi : nous étions scouts et guides ensemble et nos familles étaient amies. Depuis 2004, nous nous sommes retrouvés. Jacqueline est l’une des responsables de la section de BREST de l’ONG « Appel Détresse ». (J’ai rencontré les responsables nationaux à AURAY à la mi-août – voir les « Nouvelles » précédentes). Cette section de Brest a beaucoup contribué à remplir le containeur que nous avons reçu à Conakry cette année, avec beaucoup de matériel mais aussi du lait et de la panure (faite avec du pain qu’ils récupèrent, font sécher et réduisent en poudre). Cela fournit une bonne nourriture pour les bébés, spécialement pour les enfants dénutris dans différents dispensaires du pays.
    Mais la section de Brest a aidé encore davantage la mission de Mongo, qui avait beaucoup souffert des attaques rebelles, venues de Sierra Léone, pendant la guerre du Libéria en 2000-2001. (Voir dans mon site les circulaires de 1996 à 2006, et « MONGO » sur le moteur de recherche du site). Ils nous ont spécialement aidés pour les jardins d’enfants, l’aménagement des bas-fonds pour la culture du riz et l’aménagement des sources pour avoir de l’eau potable dans les villages. Nous passons une soirée très agréable ensemble.

  • Les 11-12 Septembre, visite aux amis du Père BIENVENU. Gustave Bienvenu, spiritain, avait été expulsé de Guinée par Sékou Touré, en 1967, comme tous les missionnaires. Il avait travaillé alors au Sénégal avec les Mandjaques, puis était revenu en Guinée, dès que cela avait été possible. (Voir mon site, rubrique « Père Bienvenu et Kataco). C’est lui qui m’avait amené en Guinée en 1996. Malade, il était rentré en France. Je lui ai succédé à Kataco en 2006 où il y avait beaucoup de problèmes et où le Frère Joseph DOUET a été assassiné en avril 2008. (Voir dans mon site la rubrique qui porte son nom).
    Les amis du village d’origine du père BIENVENU, St Georges de Roeillet, en Normandie, s’étaient organisés pour le soutenir, en particulier pour l’école et l’internat. Ils ont continué à le faire après son départ de Guinée. Ils sont maintenant devenus mes amis. Et bien qu’ayant quitté Kataco pour Conakry, vu mes responsabilités je continue à suivre ce qui s’y passe. C’est donc avec joie que nous allons les visiter, à deux ; comme à chaque fois, nous sommes très bien accueillis. Le dimanche, je concélèbre l’Eucharistie avec le curé de St Georges. A l’homélie, je leur parle de notre travail en Guinée, aussi bien dans les quartiers et villages que dans les communautés chrétiennes, pour le développement, la justice et la paix, et l’évangélisation. Avant la Communion, je leur souhaite la paix au nom des chrétiens de Guinée.
    Après la messe et un temps de partage amical, nous nous retrouvons à la mairie avec les membres de l’association. Nous faisons le point des actions menées ; je leur donne les nouvelles de Kataco ; nous voyons comment continuer notre collaboration et ils me remettent l’argent du parrainage de l’école primaire et du jardin d’enfants, pour permettre à des enfants de familles pauvres de faire des études eux aussi. Il y a deux mois, ils nous avaient déjà envoyé une forte somme d’argent pour refaire le toit de l’école primaire. Cet argent, ils l’ont gagné spécialement en vendant de la ferraille et en organisant une fête et un repas (« la poule au blanc »). Comme les choses sont claires, la rencontre ne dure pas longtemps et nous nous retrouvons ensuite pour un repas très joyeux et amical. Sans tarder, le maire nous conduit à Avranches prendre le train, ce qui nous permet de continuer à parler pendant le trajet.
    Les jours suivants, je passe beaucoup de temps à travailler sur ordinateur.

  • Septembre.- A mon retour de Côte d’Ivoire, je continue mes visites aux amis et aux personnes qui nous soutiennent dans nos différentes actions en Guinée. Je ne peux pas tout raconter. Je note simplement quelques rencontres, parmi beaucoup d’autres !

  • Samedi 4 septembre : Rédaction d’un manuel sur la Réconciliation.
    Retour de Côte d’Ivoire. L’année dernière, nous nous étions rencontrés à 9 personnes engagées d’une façon ou l’autre dans les actions non violentes, la médiation et la réconciliation et la lutte pour la justice et la paix, dans différents pays d’Afrique. Nous avions composé un manuel pour des responsables de groupes, de mouvements et de communautés de base pour les aider dans leurs démarches de réconciliations (Voir « Nouvelles » du 9 au 15 Août 2009). Chacun a relu et corrigé ce projet et essayé de l’utiliser tout au long de l’année. Nous nous réunissons cette année pour faire une mise au point finale, avant son impression.
    Nous travaillons dur pendant une semaine, malgré la maladie de Maria (crise de palud) et la fatigue de tous. Mais comme nous nous connaissons bien maintenant et que nous formons une équipe très unie, nous travaillons dans la joie et l’amitié et sans crainte de dire chacun ce que nous pensons, sûrs d’être compris et accepté. Ce qui arrange tout. Nous prenons quand même le temps de partager ensemble ce que chacun a vécu tout au long de l’année, et de voir comment continuer notre propre formation. Tout ce travail s’appuie sur des temps de prière très intense et des eucharisties très animées, ou nous partageons la Parole de Dieu, avec de nombreux gestes et symboles où nous exprimons notre foi.
    La Commission : Vérité, Justice et Réconciliation.
    Nous regrettons beaucoup l’absence de Sam, Pasteur protestant et membre de notre équipe. Il est retenu au Togo par le travail de la commission « Vérité, Justice et Réconciliation ». Cette commission a été mise en place pour faire la vérité suer tous les assassinats, tortures et disparitions qui ont eu lieu dans le pays depuis l’indépendance en 1960, et en particulier au moment des élections présidentielles de 2005. Un peu comme cela s’est fait en Afrique du Sud, après les crimes de l’apartheid, avec l’évêque anglican Desmond TUTU. Mais ici, à la recherche de la Vérité, on a ajouté la notion de Justice et de réparation sans lesquelles il ne peut pas y avoir de vraie réconciliation. C’est un travail très délicat et difficile. Surtout que certaines des personnes qui ont commandé et organisé ces assassinats au Togo sont encore au pouvoir aujourd’hui ! De loin, par mail et téléphone, nous soutenons Sam de notre amitié et de notre prière. (Voir mon site, rubrique « Justice et Paix »).
    Les voyages en avion.
    Je vous ai souvent parlé de nos problèmes, lors de nos voyages en avion. Cette fois-ci, encore, ça n’a pas manqué, en commençant par la France, à Orly ! D’abord, il a fallu enlever sa ceinture à cause de la boucle métallique, et aussi les chaussures et donc se promener pieds nus en tenant son pantalon d’une main et ses bagages de l’autre… pour ensuite se reculotter devant tout le monde. J’avais amené un pot de confiture pour améliorer les petits déjeuners de notre session (Si on « bosse comme des dingues », il faut bien prendre des forces et maintenir le moral !), bien sûr on me l’a kidnappé. Si encore la policière l’avait gardé pour elle, ou, mieux, donné à l’un des roms ou autre nécessiteux gravitant autour de l’aéroport, français de souche ou non… Même pas ! On l’a mis à la poubelle ! Et j’ai vraiment eu mal quand j’ai vu qu’on jetait aussi à la poubelle les produits de beauté de la vieille dame qui venait après moi. Notre recherche de la sécurité à tout prix va nous tuer. Pas seulement nous, mais notre société tout entière. Que peut valoir une vie où tout est prévu, organisé, assuré (avec compensation financière et procès sans fin, bien sûr), aseptisé, et garanti à l’avance ? Que vaut une vie sans aucun risque ? Il paraît que le premier des trois mots de la devise de la République française c’est : « Liberté » ! (Je préfère ne pas parler de l’égalité et encore moins de la fraternité. Je serais trop virulent).
    Au retour, l’aéroport où nous faisons escale est en restauration. Et deux avions partent à quelques minutes d’intervalle. Tout le monde se télescope. Nous qui sommes en transit, nous sommes conduits en plein milieu de ceux qui enregistrent les bagages, mais en sens inverse. Tout le monde se bouscule. Il faut donc refaire toutes formalités qui ont déjà été faites à Abidjan. Nos passeports sont vérifiés quatre fois. Certains voyageurs doivent repasser 5 à 6 fois de suite sous le portique de contrôle ; d’autres sont bloqués parce que la photo de leur passeport n’est pas assez ressemblante. Et il n’y a pas de toilettes en service. Il fait très chaud. Les bébés et les enfants pleurent. Des passagers se trompent de bus pour aller à leur avion. Nous sommes serrés comme des sardines et l’on doit faire l’appel, un par un, comme à l’école primaire. Ce cirque a duré trois heures et l’avion décolle avec plus d’une heure de retard, à 2 heures du matin. Mais j’ai admiré le calme et la patience des passagers !
    J’étais quand même étonné par tout cela et je me demandais d’où ça venait. C’est en arrivant à Orly que j’ai compris. Tous les Africains qui étaient devant moi ont été arrêtés, des policiers leur ont posé des tas de questions, ont regardé leur visage et les photos de leur passeport sous toutes les coutures, et on les a mis de côté pour les faire attendre. Quant à moi, on m’a salué avec un grand sourire « bonjour monsieur », et on m’a fait passer immédiatement (parce que je suis blanc et Français de souche ; comme si cela voulait dire quelque chose).Alors ce n’est pas étonnant qu’on nous en fasse autant en Afrique ! C’est la même chose pour le prix de visa. A Orly, j’ai même vu une maman être retenue, parce que son bébé de 3 ans ne voulait pas tourner la tête vers la policière pour qu’elle vérifie la correspondance avec la photo. Pas étonnant : il avait peur de cette policière toute blanche et il s’est mis à pleurer !
    C’est vrai qu’il y a des Africains délinquants qui veulent entrer en France. Mais les touristes français, jeunes mais aussi adultes, qui vont en Afrique, profitant de leur argent et de la pauvreté locale, pour la drogue ou le tourisme sexuel, sont-ils des anges ? On est en train de se lancer dans une escalade qui risque de se terminer très mal.
    Le travail continue !
    Au cours de notre rencontre, nous avons prévu beaucoup de corrections à notre manuel. De plus, nous voulons le mettre en français simple, pour qu’il soit compris et utilisé par le maximum de personnes. Cela fait beaucoup de travail. Dès mon arrivée dans l’avion, je me mets au boulot. Je commence par le chapitre 11 qu’il faut réécrire. En même temps dans mes déplacements, je lis un livre de proverbes africains, car c’est un moyen d’enseignement et de sagesse très important en Afrique. Pour chaque chapitre, nous avons prévu des pistes de réflexion chrétienne à partir de la Parole de Dieu ; et aussi des citations du Coran et des réflexions musulmanes. Cela se fera peu à peu.
    Visites aux amis malades ou âgés.
    A chacun de mes passages à Paris, je cherche à en visiter l’un ou l’autre. C’est toujours une grande joie de nous retrouver, mais aussi une grande tristesse de les voir ainsi, diminués dans leurs forces. En même temps, je suis dans l’admiration en voyant comment certains portent leur vieillesse et leurs souffrances dans la foi et avec beaucoup de courage.
    Un décès.
    Ce matin, 4 Septembre, en arrivant à Orly je reçois un coup de téléphone de mon Ile (HOUAT) m’annonçant le décès d’une tante, la doyenne de l’île. A chaque fois que je quitte mon île, je me fis que lorsque je reviendrai dans 2 ou 3 ans, un certain nombre de parents nous auront ainsi quittés.
    J’avais l’intention d’aller voir un ancien camarade de classe de Dakar, ami de longue date, gravement malade. Mais je suis très triste car il est trop malade pour me recevoir. Il m’envoie cependant un message plein d’amitié, de courage et de foi, qui m’impressionne beaucoup et me réconforte.
    Eucharistie et repas.
    Je vais donc à la messe de notre maison-mère. Nous prions en particulier pour six jeunes qui ont fait hier leur entrée au noviciat, pour se préparer pendant une année à s’engager dans la vie religieuse.. Et ce matin, trois autres reçoivent le diaconat (deviennent diacres) dernière étape avant d’être prêtre et missionnaire. A la sortie de la messe, nous prenons l’apéritif avec ceux et celles qui sont venus à la messe chez nous. Je parle avec quatre religieuses ivoiriennes qui viennent d’arriver en France et vont travailler dans une de nos maisons des Apprentis d’Auteuil, près de Bordeaux. Comme j’arrive de Côte d’Ivoire, nous échangeons des nouvelles.
    Au repas, comme toujours c’est la joie de se rencontrer avec des confrères et de parler ensemble des pays où nous avons chacun travaillé, parfois ensemble, mais aussi du présent et même du futur.
    Dans le métro.
    Sans terminer le repas, je pars rapidement à la gare Montparnasse pour ne pas rater mon train. Dans le métro, je rencontre une Camerounaise avec sa fille, submergée de bagages ; le gros sac en particulier qu’elle a mis sur un petit chariot est beaucoup trop lourd pour le chariot. Comme elle va elle aussi à Montparnasse, je lui donne un coup de main, bien que je sois moi-même chargé. Je lui dois bien ça, car moi-même j’ai été très souvent aidé par des Africains dans le métro.

  • Samedi 21 août :En route vers Vierzon, j’ai deux heures d’attente à la gare à LYON. J’en profite pour rencontrer la responsable d’une association de Villefranche qui soutient des projets en Guinée, près de Kissidougou, un secteur que je connais bien pour y avoir travaillé dix ans. Ils soutiennent en particulier une plantation de palmiers à huile. Mais les choses ne sont pas faciles, ni du côté de la France, ni du côté de la Guinée. Nous cherchons ensemble des pistes pour régler au mieux les problèmes.
    A Vierzon, ce sont Marie-Josiane et Jean-Jacques qui m’accueillent. Nous nous connaissons aussi depuis longtemps : la mère de Marie-Josiane et mon père étaient frère et sœur de lait. C’est Jean-Jacques qui se charge de l’expédition par mails des différents messages que vous recevez par Internet. Ces amis, comme beaucoup d’autres d’ailleurs, me rendent de très grands services. Sans eux, je ne pourrais pas mener mes activités comme je le fais et je les en remercie beaucoup.
    Le soir, je vais célébrer l’Eucharistie du samedi soir. Je suis très bien accueilli à la paroisse et à l’homélie j’essaie de partager ce que nous vivons en Guinée ; j’explique en quoi nous sommes solidaires, vivant dans le même monde, et par conséquent appelés à agir chacun là où nous vivons, en particulier pour et avec les étrangers présents parmi nous. Le soir, nous dînons avec le curé de la paroisse et pouvons continuer notre partage. Le lendemain, avec Jean-Jacques nous revoyons la liste de mes correspondants et prenons le temps, tous les trois, de parler de notre vie et de nos amis. Et après le repas, je continue mon voyage.

  • Vendredi 20 août : A l’arrivée à Chalon-sur-Saône, Jocelyne m’attend. C’est une ancienne responsable de la JOC ; Nous avons fait une session ensemble au CFEI de Nogent-sur-Marne, en 1965, quand elle se préparait à partir pour le Sénégal et moi pour le Congo. Depuis, nous sommes restés en contact. C’est elle qui saisit les « Nouvelles » que vous lisez maintenant et quelques autres documents que vous trouvez sur mon site. Nous sommes très heureux de nous retrouver à nouveau. Nous parlons du Sénégal bien sûr, de ses engagements actuels dans l’Eglise (préparation et célébration des obsèques au Crématorium) et dans le quartier (soutien scolaire aux enfants très majoritairement issus de l’immigration) ; etc... Et nous mettons au point la saisie des prochains documents.

  • Vendredi 20 août : Avant de voyager, je passe saluer Robert, responsable des éditions Kasthala. C’est un ami de longue date que je revois toujours avec joie. J’apprécie beaucoup son travail, pour donner la parole aux gens du Tiers Monde et faire connaître leurs actions. Nous parlons de l’Afrique… et de l’Europe, la France en particulier. Il me remet un livre sur l’intégration de la Guinée dans l’Afrique de l’Ouest. C’est important et ça m’intéresse.
    A la gare, le TGV a plus d’ 1 heure 30 de retard. Je vais donc rater ma correspondance. Il n’y a pas qu’en Afrique qu’il y a des problèmes de transport ! J’en ai profité pour écrire ces nouvelles que vous lisez maintenant. Et je m’aperçois qu’il y a un autre TGV en partance pour Dijon. Je saute dedans et je m’explique avec le contrôleur… mais je raterai quand même ma correspondance !

  • Mardi 17 août : Formation de jeunes religieuses à Justice et Paix.
    Les responsables des sœurs de St Joseph de Cluny m’ont demandé de venir assurer une formation à Justice et Paix pour les jeunes sœurs africaines avant leur engagement définitif (profession perpétuelle). Bien sûr, j’ai accepté ! D’abord parce que c’est ma branche et que c’est très important, en soi et pour la mise en pratique du dernier synode pour l’Afrique. Ensuite, parce que je suis très uni à ces sœurs, ayant toujours travaillé avec elles, depuis le début de mon travail missionnaire. En arrivant, j’ai la surprise de voir que toutes ces sœurs viennent du Sénégal, du Congo et de Guinée, trois pays où j’ai travaillé environ 15 ans. Je parle avec chacune d’elles, dans sa langue, et nous en sommes très heureux.
    La session se passe très bien. Nous travaillons beaucoup mais dans la joie, car les sœurs sont très ouvertes et coopératives. Je suis frappé par leur sérieux, leur engagement et leur volonté de passer à l’action. Nous nous ménageons de longs temps de prière, où chacun participe. Nous avons choisi des lectures, des chants et des symboles en lien avec le thème de Justice et Paix pour cela. Pour moi-même, cette session me rajeunit et m’encourage dans mon travail, en même temps qu’elle me permet d’en découvrir de nouvelles dimensions.

  • Lundi 16 août : Mais dès le lendemain, après avoir salué les parents et les amis venus dans l’île en ce temps de vacances, il me faut repartir, avec beaucoup de regrets. A Quiberon, je vais voir un parent gravement malade, puis, avec parents et amis, je célèbre l’Eucharistie pour Annick, une cousine religieuse, décédée l’année dernière. Bien sûr, étant en Guinée, je n’ai pas pu assister à son enterrement.
    De nombreux pêcheurs de HOUAT sont venus s’installer à Quiberon, sur le continent, où il leur est plus facile de vendre leur pêche ou de trouver du travail. Comme chaque fois que je viens en congés, nous nous retrouvons donc avec la grande famille pour une soirée très animée et joyeuse.
    Mon grand-père Ferdinand. Les 28-29 août aura lieu à HOUAT les « cousinades », c’est-à-dire la rencontre de tous les cousins descendants de notre arrière-arrière grand’mère que tout le monde appelait « la parisienne ». En effet, Marianne, sa mère, avait abrité en 1813, des chouans, bretons opposés à l’Empereur Napoléon. Elle avait été emmenée en prison à Paris où elle avait accouché de Marie-Françoise, « la parisienne ». Les cousinades de cette année seront centrées sur la vie de mon grand-père qui était aussi mon parrain. Il a pêché et travaillé sur toutes les mers du monde, a eu une vie très mouvementée : torpillé pendant la 1ère guerre mondiale et échappé de l’éruption du Mont Pelé à la Martinique. Excellent pêcheur dans les conditions très dures de cette époque, après avoir pêché à Terre Neuve et été patron de pêche à Cherbourg et au Havre, il a terminé capitaine de port à Lorient. Non content d’améliorer les techniques de pêche, il a toujours eu le souci de l’évolution de son île, par exemple en y lançant l’élevage du mouton et des chèvres. (Voir le site : www.histoiresdehouat.eu).
    Bien sûr, j’aurais beaucoup aimé participer à cette fête, mais je serai en route pour la Côte d’Ivoire !

  • La fête du 15 août : Bénédiction de la mer et prière pour les morts, péris en mer. Depuis très longtemps, le jour de l’Assomption de Marie donne lieu à une grande prière pour bénir la mer et prier pour tous ceux qui y travaillent : les pêcheurs, les marins du Commerce et les marins militaires, les plaisanciers qui prennent des vacances sur la mer. Nous élargissons notre prière aux pêcheurs et marins de tous les pays, en pensant spécialement à ceux qui travaillent sous des pavillons de complaisance, qui travaillent très dur, sont souvent exploités et parfois abandonnés par leurs armateurs et capitaines dans des ports, sans aucune ressource. Cela me fait regretter encore plus qu’il n’y ait pas d’aumônier de la mer en Guinée. Il va falloir faire quelque chose !
    Après la grand messe, nous descendons jusqu’au port en procession, en chantant des cantiques bretons. Nous montons à bord de la vedette qui fait le voyage entre Quiberon et les îles, et que la Compagnie de navigation a mis à notre disposition. Nous sommes accompagnés par les bateaux de pêche, les bateaux de plaisance et des canots de sauvetage, tous décorés de nombreux pavillons et du drapeau breton. Les bateaux de HOUAT et HOEDIC se retrouvent en mer entre les deux îles, pour prier pour les morts, péris en mer. Nous n’oublions pas tous les « BOAT PEOPLE » et tous ceux qui quittent les côtes d’Afrique en pirogue pour rejoindre l’Europe et qui se noient. Avec le doyen de l’île, pêcheur retraité et ancien maire, nous jetons une gerbe en leur honneur.
    A cette occasion, Bernard, qui travaille avec nous à Conakry au Projet hydraulique et à l’Atelier de soudure « Savoir-Fer » pour les enfants de la rue, est venu me rejoindre. (Voir mon site, rubriques « Puits » et « Projets »). Je suis heureux de l’accueillir dans ma famille.

  • Mardi 10 août : Marie-Claire, une cousine, m’attend à Auray pour m’accompagner à l’Ile de HOUAT dont je suis originaire du côté maternel (famille SCOUARNEC), comme elle. Nous passons la matinée à St Pierre de Quiberon avec mon frère, pêcheur sur les chalutiers, actuellement en convalescence, et retraité. Sa fille qui travaille à Nantes vient nous rejoindre avec son mari congolais, que je ne connaissais pas encore. Je suis heureux de lui parler dans sa langue, le lari, que je n’avais plus parlée depuis que j’ai quitté le Congo, en 1975, mais que je retrouve vite. Du coup, son jeune frère m’appelle de Houat pour parler aussi avec moi. Le monde est petit ! A midi, repas avec Mamie, une amie de la famille depuis longtemps et qui parraine un enfant de l’internat de Boffa (voir mon site, « Boffa et internat »). L’après-midi, nous prenons le bateau pour Houat. Je passe d’abord saluer Jean-Noël, le curé de l’Ile, avec qui je suis très ami et qui va me loger. Puis je pars rejoindre ma famille (sœur, neveux et nièces). C’est l’anniversaire de mon neveu, nous sommes tous réunis avec conjoints, enfants et cousins. Nous passons une soirée très agréable.
    Dès le lendemain, avec la famille, les parents et les amis, je célèbre la messe pour ma mère, décédée il y a 3 ans et dont nous avons ramené les Cendres dans notre Ile.
    A Houat, je suis chez moi. C’est l’origine de ma famille et depuis ma jeunesse j’y ai pratiqué plusieurs saisons de pêche à la sardine, aux crabes, homards (casiers), au filet, à la ligne et au chalut. Nous nous connaissons tous et sommes tous parents, au moins par alliance. Je vais d’abord prier au cimetière, spécialement sur les tombes de ceux et celles qui sont morts depuis mes derniers congés ; je vais saluer les personnes âgées et visiter les malades. Je suis ainsi bien occupé, car je n’ai pu me réserver que 5 jours dans mon île, et je ne peux pas répondre aux nombreuses invitations qui me sont faites. Mais je prends le temps de suivre les championnats d’Europe de natation et surtout d’aller nager dans la mer… même si l’eau est beaucoup plus froide qu’en Guinée !

  • Je passe la soirée du 9 août avec Michel, président, et Danièle, responsable des projets de l’Association Appel Détresse, qui nous soutient beaucoup depuis Mongo (pour les jardins d’enfants et les petits projets de développement, aménagement des sources et des bas-fonds), pour Kataco et Boffa (école primaire, internat et parrainage) et maintenant pour toute la Guinée (matériel, dispensaires, nourriture pour bébés et enfants dénutris). (Voir « Appel Détresse » sur le moteur de recherche du site). Nous nous connaissons bien maintenant et en plus d’un repas très amical en (grande) famille avec des amis grecs, nous prenons le temps de régler rapidement un certain nombre de problèmes : la succession de Winfried à Mongo (Ghanéen, il vient suivre une formation en sociologie à l’Institut catholique de Paris, remplacé par Jean, un Français, ancien de Koundara), les projets futurs, la façon de les présenter, les priorités, la coordination des besoins et des projets pour la Guinée, etc… C’est beaucoup plus facile quand on peut se rencontrer et parler directement !

  • Dimanche 8 août : Visites.
    Tôt le matin, je suis parti, par train, à NIORT, chez Jean-Louis et Jacqueline qui viennent régulièrement à Conakry et nous aident beaucoup dans la marche du diocèse. Comme ils ont une imprimerie, ils m’ont multiplié les livrets qui vont servir pour la session que je faire en Côte d ’Ivoire le mois prochain pour la mise au point d’un manuel sur la non violence active, dans la ligne de Gandhi et Martin Luther King, et la réconciliation. Bien sûr, j’étais très heureux de les revoir et nous avons pu parler de nombreuses choses que nous avons en commun. (Voir mon site, rubrique « Pastorale sociale »).
    Dès le lendemain matin, en route pour rencontrer la famille du Frère Joseph avec qui je travaillais à Kataco et qui a été assassiné il y a 2 ans. Ils sont venus l’an dernier en Guinée, à Kataco, prier sur sa tombe et rencontrer le village. Ce qui a permis une meilleure compréhension des choses et une demande de pardon, suivie d’une réconciliation. Les assassins du Frère ont été arrêtés et sont en prison depuis 2 ans, mais à cause des perturbations de la vie politique et de la justice, ils n’ont pas encore été jugés. Nous parlons de tout cela. Et de leur dernière visite au Sénégal sur les pas du Frère Joseph. Cela renforce nos liens d’amitié et je les remercie de leur accueil. (Voir mon site, rubrique « Frère Joseph Douet »). A midi, ils me conduisent à Nantes pour prendre le train d’Auray

  • Samedi 7 août : Mariage.
    Lorsque je travaillais au Sénégal, nous avions mis en place un groupe de réflexion sur nos engagements et la vie du pays, composé à la fois de volontaires et coopérants étrangers, et de Sénégalais engagés. Cela nous avait beaucoup soutenus et permis de voir plus clair dans ce que nous avions à faire, grâce à une réflexion en commun permettant un enrichissement mutuel. Il régnait dans le groupe une véritable amitié qui s’est continuée jusqu’à maintenant. Je m’occupais aussi des enfants des membres du groupe. Si bien que Marie Elise, l’une d’entre eux, devant se marier, m’a demandé de bénir leur mariage, à l’occasion de mes congés. Ce que j’ai accepté avec joie. Cela m’a permis de retrouver une famille que j’aime beaucoup et de rencontrer de nombreuses personnes. Les connaissant bien, j’étais très à l’aise et j’ai pu « personnaliser » la cérémonie qui s’est passée dans une très bonne ambiance, très « contractée » : à l’accueil, après avoir rappelé nos liens mutuels, j’ai proposé aux participants de vivre cette célébration non seulement dans l’amitié, mais comme un engagement de tous et de chacun pour aimer plus et mieux, unis aux jeunes mariés.
    Après m’être présenté, je leur ai proposé d’élargir leur prière non seulement au Sénégal et à la Guinée, mais aussi à tous les pays qu’ils avaient eux-mêmes visités et à tous les étrangers avec qui ils étaient en contact.
    Comme j’aime bien le faire, j’ai utilisé plusieurs symboles pour visualiser les choses : un habit tissé par un réfugié de Sierra Leone avec qui je vivais pendant la guerre du Liberia ; et une bougie (allumée au cierge pascal de l’église, signe de l’amour du Christ et d’une vie nouvelle), symbole du travail des artisans avec qui je vis actuellement.
    Les mariés avaient choisi comme Evangile la parabole de la maison bâtie sur le roc, signifiant ainsi qu’ils voulaient non seulement bâtir sérieusement leur foyer (ils ont suivi une préparation au mariage avec d’autres couples, qu’ils ont beaucoup appréciée), mais le construire sur le Christ, notre rocher. Après l’homélie, j’ai donc posé devant l’autel une pierre appartenant à la mariée et chargée de souvenirs, symbole du Christ, la pierre angulaire, sur laquelle Dieu veut bâtir son Eglise (1 Pierre 2, 4-10). Et j’ai proposé aux participants qui le voulaient de venir déposer sur cette pierre un petit caillou, signe de leur engagement à bâtir eux aussi leur vie sur le roc. Beaucoup ont accepté cette démarche. D’ailleurs j’ai été très frappé à la fois du sérieux et de la « décontraction » de la cérémonie.
    Bien sûr, j’ai cherché à faire participer le maximum de personnes. D’abord, comme d’habitude, par les lectures, la prière universelle et les chants (accompagnés par plusieurs amis musiciens). Les mariés ont expliqué pourquoi ils avaient choisi les lectures de ce jour (1ère lecture : 1ère Cor 13, sur l’amour) et ont donné leur témoignage. Ils ont lu comme prière un poème qu’ils aiment beaucoup. La grand mère a parlé longuement, avec beaucoup d’émotion.
    Lors de l’homélie, à partir de la 1ère lecture, j’ai rappelé combien l’amour de ces jeunes mariés était important pour nous, et aussi pour l’Eglise et pour Dieu Lui-même. C’est un grand encouragement pour tous et un appel à mieux aimer. Mais aussi combien ils avaient besoin, eux aussi, de notre amour et de notre soutien à tous, pas seulement ceux de leurs parents ou témoins. J’ai ensuite cherché à donner le sens chrétien et la profondeur de leur amour et de leur mariage. D’abord, comme moyen de rendre l’amour du Christ présent dans le monde ; Dieu est Amour et Jésus disait : « Quand 2 ou 3 sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux ». Quand nous nous aimons, l’amour du Christ est présent parmi les hommes. Un chant dit : « Où sont amour et charité, Dieu est présent ». Mais notre amour est aussi un signe de l’amour de Dieu. Dieu lui-même a choisi l’amour de l’homme et de la femme, et l’amour des parents pour leurs enfants, comme le meilleur moyen de faire connaître son amour aux hommes. Dieu disait à son peuple : « Comme un fiancé aime sa fiancée, c’est ainsi que je t’aime Israël…. Israël je t’ai éduquée comme mon enfant…. Je te tiens comme un bébé sur le sein de sa mère ».
    Ces témoignages de Dieu-Amour, de leur part comme mariés, de mon côté en tant que religieux missionnaire, sont complémentaires et ont besoin de s’appuyer l’un sur l’autre. Comme j’avais longuement parlé le matin avec Marie-Elise, j’ai pu concrétiser tout cela et l’appliquer à notre vie de tous les jours. Je n’ai pas manqué non plus de lire le beau texte que chacun des deux mariés avait composé sur leur amour. Et nous leur avons remis deux icônes comme souvenirs de leur mariage : l’une sur la Sainte Famille, l’autre sur la Résurrection, cette dernière ayant beaucoup voyagé avec moi et avec laquelle j’ai beaucoup prié. J’étais heureux de la leur offrir.
    J’ai eu la joie de célébrer ce mariage avec Aniceto, spiritain comme moi, angolais, ayant d’abord travaillé au Mexique et maintenant missionnaire en France. Nous nous sommes ensuite retrouvés avec tous les parents et les invités pour un repas et une soirée très agréable où j’ai pu parler avec beaucoup de gens sympathiques qui étaient intéressés par nos activités.

  • E 2010 – Congés en France
    N.B. IMPORTANT : Mon site (armel.duteil.free.fr) comporte désormais un moteur de recherche (page d’accueil, en haut à gauche) qui vous permet de trouver les choses qui vous intéressent à partir des mots importants.
    Me voici donc rentré en congés, jusqu’au 4 Octobre. Vous pouvez me joindre sur mon portable.
    Dès mon arrivée et au cours de mes différentes tournées, je passe chaque fois à la Maison mère des Spiritains à Paris, où je suis toujours bien accueilli. C’est une grande joie de rencontrer les confrères qui travaillent en France et un peu partout dans le monde, parfois après de nombreuses années sans nous voir.
    Après un temps de repos dont j’avais bien besoin, j’ai commencé mes visites aux amis et aux différentes personnes qui nous aident dans notre travail, et les sessions qu’on me demande d’animer. Malheureusement, à cause de ces différentes activités je n’aurai pas le temps de rencontrer tous les amis que je désirerais voir. Je le regrette beaucoup et je leur demande de m’excuser. Il reste les contacts par mail ou par téléphone.
    Les élections en Guinée.
    Pendant tout ce temps, par lettre, téléphone et sur les sites Internet, je reste en contact avec la Guinée en cette période importante de la saison des pluies et des cultures, mais surtout des élections présidentielles si importantes pour la vie du pays, les premières élections libres depuis 52 ans d’indépendance. Bien sûr, tout n’a pas été parfait dans leur organisation. Ce n’était pas possible dans la situation actuelle du pays, et malgré un long temps de préparation auquel nous avons très activement participé (voir dans mon site les rubriques : « Nouvelles », « Situation du pays » et « Justice et Paix) : suivi des différentes étapes, réflexion sur les programmes des partis, formation des électeurs, observation des élections, etc… Malgré les imperfections, les résultats du premier tour ont été finalement acceptés par tous, en particulier les 22 candidats éliminés au premier tour. C’est vrai que l’essentiel était de garder la paix dans le pays et d’éviter tout recours à la violence.
    Pour le moment, le deuxième tour des élections est prévu pour le 19 Septembre, après le ramadam, la plupart des Guinéens étant musulmans. Ce 2ème tour avait été d’abord prévu pour le 15 août, mais reporté par respect de la fête chrétienne. Déjà une réflexion sérieuse a été menée pour réparer les erreurs et les manques du 1er tour (Voir dans mon site la rubrique « Situation du pays »).
    Les Centres aérés.
    Même si tous attendent les prochaines élections, les activités continuent. A la paroisse de TAOUYAH, les différents groupes ont terminé l’évaluation de leurs activités de cette année. (Voir dans mon site la rubrique « Taouyah »). Ils sont maintenant lancés dans les activités de vacances et les sessions de formation prévues. Pour nous, l’une des activités principales est, pour la 2ème année, les centres aérés dans dix quartiers populaires de CONAKRY où des éducateurs bénévoles –que nous avons formés tout au long de l’année- encadrent des enfants en difficultés et issus de familles pauvres, pour leur apporter un soutien scolaire ou une alphabétisation de base, et une éducation aux droits de l’homme et de l’enfant, suivies d’activités concrètes à leur niveau pour les aider à se prendre en mains et à s’engager. Le tout dans le cadre d’une vie communautaire entre enfants et jeunes de plusieurs ethnies, cultures et religions, avec des chants, des danses, des activités manuelles, du sport et des jeux. Tout a bien démarré et va pouvoir se poursuive dans de bonnes conditions. (Voir dans mon site, rubrique « Centres aérés »).
    Je reste également en contact avec notre évêque, les différents services, les Commissions de « Pastorale sociale » et de « Justice et paix », les responsables de la paroisse de Taouyah et tous les amis.
    Je profite aussi de la facilité d’accès à Internet pour travailler un certain nombre de documents, et pour envoyer plusieurs comptes rendus et réflexions.

  • Jeudi 5 août, je rencontre mon neveu, Jean-Michel, pour travailler sur mon site et préparer les nouvelles et autres informations à y mettre.

  • Impressions sur la société française
    Chaque retour en congés est l’occasion pour moi de voir l’évolution de la société. Bien sûr, cette année je remarque la persistance du chômage, la crise financière et tous les problèmes économiques. Je vois les conséquences des inondations, de la sécheresse et de la fonte des glaciers dans les Alpes, signes que nous sommes en train non seulement de polluer notre terre, mais même de la casser, au risque de la détériorer complètement. A mon dernier voyage, j’avais déjà réagi contre l’ « émigration choisie » qui augmente la fuite des cerveaux et le sous-développement des pays pauvres, en faisant venir chez nous des enseignants, médecins, ingénieurs et autres personnes dont la formation ne nous a rien coûté (et que nous pouvons de plus payer moins cher et même exploiter), au lieu de leur donner les moyens de travailler dans leur pays, qui les a formés à grands frais et qui en a tellement besoin. Plutôt que de faire venir des gens qui ont besoin de formation, et en les aidant à s’installer ensuite dans leur propre pays. Mais, ce qui m’inquiète beaucoup plus et qui me semble plus grave encore, c’est l’évolution de la société actuelle, surtout qu’elle se fait sous la direction du gouvernement et des responsables du pays.
    1) On continue à mettre des gens au chômage, même dans des entreprises qui font des bénéfices et dont les actionnaires reçoivent des dividendes de plus en plus importants. Et que les PDG des entreprises en difficulté reçoivent des ponts d’or à leur départ, alors même qu’ils sont parfois responsables de ces difficultés.
    2) Il y a eu la crise financière. Ce sont souvent les états et la population qui ont payé les frais des imprudences des banques. Et je ne suis pas sûr que les mêmes manques de réflexion, de responsabilité et de prévision ne vont pas continuer. Mais, en plus, il y a tous les cas de corruption. Et malheureusement l’exemple vient d’en haut, alors que ces personnes devraient être au service du pays.
    3) Après l’émigration choisie, on cherche maintenant à renvoyer les étrangers dont on n’a pas besoin. On fixe même à l’avance le nombre des expulsions à atteindre, comme si on pouvait compter les immigrés comme un troupeau de vaches ou les recenser comme des moutons. Sans hésiter parfois à casser des familles. Et sans se soucier des dangers et souffrances qui attendent ces expulsés à leur retour dans leur pays en guerre ou en dictature.
    4) On se plaint des exactions des gens du voyage, qui sont parfois réelles, mais on supprime la moitié de leurs zones de stationnement. Où vont-ils aller ? Cela ne peut qu’augmenter les occupations sauvages, ce qui va entraîner de nouvelles expulsions par la force et dans des conditions déplorables, et augmenter encore la violence et la délinquance. De plus, on met dans le même sac les Roms (dont la plupart ne viennent pas de Roumanie), les Tsiganes, les Gitans et tous les gens du voyage dont un certain nombre sont Français, comme nous. Tous les gens du voyage sont-ils des voleurs et des paresseux ? On en fait des boucs émissaires, victimes de nos problèmes de société.
    5) On parle de déchoir de la nationalité française des délinquants d’origine étrangère, sous prétexte qu’ils ne respectent pas les valeurs de la République. Mais, en agissant ainsi, est-ce qu’on ne casse pas profondément la République en tuant notre tradition d’accueil de l’étranger, et notre devise : liberté, égalité, fraternité ? Qu’est devenue la France, soi-disant « patrie des droits de l’homme » ? Nos responsables, à commencer par notre président, ont-ils oublié que pour beaucoup ils sont, eux aussi, d’origine étrangère ? Est-ce que tous les Français ne sont pas égaux devant la loi ? Bien sûr, il faut lutter contre la délinquance. Mais est-ce que les lois actuelles ne suffisent pas (condamnation à perpétuité pour le meurtre d’un policier), sans avoir besoin de faire des exclus et des apatrides ? S’ils ne sont plus Français, qui vont-ils être ? Et que vont devenir leurs femmes et leurs enfants ? Et on expulse même des pères de famille sans papier, n’ayant commis aucune délinquance, en cassant complètement les familles. Après avoir déjà durci les conditions du regroupement familial des étrangers venus travailler chez nous et pour nous. S’ils sont venus en France, ce n’est pas par plaisir, mais souvent à cause de la pauvreté et pour faire vivre leur famille, ou à cause de persécutions chez eux. Et ils ont dû venir souvent en étant déjà exploités par des passeurs, et au péril de leur vie. Mais au lieu de les aider et de les réconforter à leur arrivée chez nous, on en fait des « sans papiers » et des illégaux, en attendant de les renvoyer le plus vite possible. Il paraît que la France est à l’origine des droits de l’homme qui affirment le droit de toute personne à se déplacer et à être accueillie dans un autre pays. Et la France a signé les déclarations nombreuses de l’ONU affirmant les droits des personnes déplacées, des réfugiés, des immigrés et des étrangers en général. D’ailleurs, la commission des droits de l’homme de l’ONU vient de condamner la France pour sa politique actuelle.
    6) En France même, on veut punir les parents des enfants qui se livrent à la délinquance. Depuis quand punit-on les parents à cause de leurs enfants ? Est-ce en les mettant en prison qu’on va les aider à mieux éduquer leurs enfants ? Ils ont déjà suffisamment de problèmes comme ça. Ils n’ont pas besoin de condamnation mais de soutien. Bien sûr, c’est plus simple de réprimer que d’éduquer et soutenir. Mais la répression ne peut qu’entraîner des réactions négatives d’agressivité et de désespoir. La répression entraîne obligatoirement la violence en réponse. « Qui sème le vent récolte la tempête ». Nous allons tomber dans un cycle infernal de violences-répressions-nouvelles violences. Même si ton enfant se conduit mal, tu ne le rejettes pas ; comment la « mère patrie » peut-elle rejeter ainsi certains de ses enfants ? Et oublier que les parents et grands parents des étrangers qui viennent chez nous ont justement donné leur vie pour cette même « mère patrie », en particulier pendant les deux guerres mondiales ? (Et ce n’est que maintenant qu’ils sont presque tous morts que l’on attribue aux anciens combattants venus des Colonies la même retraite qu’aux anciens combattants de la métropole).
    Et pourquoi alors ne pas enlever la nationalité française également aux Français « de souche » (quelle souche ?) qui commettent des délits graves ?
    Les conséquences
    1° - Dans tout cela, ce qui me semble très grave, c’est qu’on casse la société française et qu’on lui fait perdre ses valeurs fondamentales. Et cela va retomber sur tous les français. Si, sous prétexte de sécurité, on expulse les étrangers, pour la même raison on empêchera les syndicats de fonctionner, aux gens de s’exprimer librement ou de manifester. En tout cas, ce n’est certainement pas par l’expulsion et la répression que nous réglerons nos nombreux problèmes, économiques et autres. Si quelqu’un commet des actions mauvaises, on doit le punir, c’est normal. Mais alors il faut punir aussi bien les français, qu’ils soient de souche et d’origine étrangère, que les étrangers vivant avec nous, sans distinction. Et cela en respectant leur dignité et les droits de l’homme. Il est temps que ce système s’arrête, sinon bientôt ce seront les « français de souche » qui vont souffrir, même s’ils ne commettent aucune délinquance. Ce dont nous avons besoin en temps de crise, c’est de solidarité et non pas de rejet d’une partie des citoyens. C’est vrai qu’il y a de la violence, de l’insécurité et de la délinquance. Il faut à tout prix lutter contre cela. Mais pas n’importe comment, ni dans n’importe quelles conditions. Il faut nous interroger sur la valeur et les conséquences des moyens utilisés, au risque qu’il y a de perdre notre âme et de nous entraîner dans la peur et le désespoir, tous ensemble. J’ai bien peur que la France ne soit en train de perdre l’espérance, la confiance en elle-même et dans l’avenir.
    2° - Quand va-t-on s’arrêter de faire une nouvelle loi à chaque fois qu’un nouveau problème apparaît ? Alors que les lois précédentes existent, qu’elles sont suffisantes, et que souvent elles ne sont même pas appliquées.
    3° - Quand va-t-on arrêter de généraliser et de mettre tout le monde dans le même sac ? Comme si tous les étrangers étaient des délinquants (et tous les délinquants des étrangers), comme si tous les musulmans étaient des terroristes, et tous les hommes musulmans des « machos » sous prétexte que certains imposent le voile intégral à leurs femmes. D’ailleurs, ce sont parfois les femmes, et pas toujours d’origine étrangère, qui décident de le faire. Là aussi, ne faudrait-il pas chercher pourquoi ? Et se demander si interdire le voile va libérer ces femmes ou au contraire les enfermer davantage à la maison, sous la dépendance totale de leur mari. Là aussi, il y a un vrai problème. Il faut à tout prix faire quelque chose. Mais aussi réfléchir à la valeur et aux conséquences des moyens utilisés. Ces femmes ont-elles besoin d’être condamnées et punies, ou plutôt d’être défendues et libérées.
    4° - Nous mettons en place une société qui écrase au lieu de libérer et de faire grandir. Une société qui punit au lieu d’éduquer. Encore une fois, on ne peut pas construire un avenir sur la peur et la recherche de la sécurité à tout prix. En tout cas, après tout ce que nous avons subi des militaires en Guinée, je n’apprécie vraiment pas de voir des militaires français armés dans les gares et autres lieux publics.
    5° - On motive tout cela par la peur, en se basant sur la nécessité de la sécurité. Mais j’ai l’impression que cette recherche de la sécurité n’est qu’un faux argument, qui cache en réalité la recherche de voix pour les futures élections et la soif de pouvoir de la part de certains, à tout prix et sans se poser de questions sur les moyens utilisés. La recherche de la sécurité va nous tuer.
    6° - Derrière tout cela, se cache la soif de l’argent. Les différences et inégalités sociales ne font qu’augmenter, comme je le disais au début. L’argent est nécessaire mais ne doit pas être le but dernier d’une société.
    7° - Tout cela risque non seulement de faire exploser notre société, mais aussi de casser notre foi chrétienne. Déjà les prophètes disaient que « Dieu ne fait pas retomber les fautes des parents sur les enfants », … ni les fautes des enfants sur les parents ! Moïse disait (et cela s’adresse donc à tous les croyants juifs et musulmans et pas seulement chrétiens) : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Tu soutiendras la veuve et l’orphelin. Tu accueilleras l’étranger, car tu as été toi-même étranger en terre d’Egypte ». Jésus disait : « Heureux les pauvres de cœur ». Et aussi, au jeune homme riche : « Donne ce que tu as aux pauvres ; puis viens, et suis-moi ». Il disait aussi : « Que le plus grand se mette au service de ses frères ». Et il a lavé les pieds de ses disciples, avant de donner sa vie pour tous, sans exclusion. A la fin du monde, il nous demandera : « J’avais faim, est-ce que tu m’as donné à manger ? J’étais étranger, est-ce que tu m’as accueilli ? … Tout ce que tu fais au plus petit de tes frères, c’est à moi que tu le fais ». Tous les hommes sont enfants de Dieu. C’est même la base de leur dignité et de leurs droits !
    En tout cas, pour moi les choses sont claires. On ne peut pas être chrétien tout seul, encore moins en excluant les autres. Même si nous ne pouvons pas porter toute la misère du monde, qu’au moins nous fassions le maximum de ce que nous pouvons. Catholique veut dire universel, et donc ouvert à tous.
    On ne peut pas être chrétien en ne vivant que pour l’argent et le pouvoir. Et en fermant son cœur aux autres. Sous aucun prétexte.
    On ne peut pas être chrétien en utilisant la peur et la répression, mais seulement en faisant grandir la paix et l’espérance. Même si les moyens pour y arriver ne sont pas évidents. Il nous faut donc chercher. Et lutter pour cela. Tous ensemble. Car nous avons besoin de tous. Et qui d’entre nous n’est pas d’origine étrangère ?
    Sans doute que beaucoup ne seront pas d’accord avec moi. Ce ne sont d’ailleurs que mes premières impressions à mon arrivée en France. Je serais donc heureux de recevoir les réactions des uns et des autres.

  • Dimanche 13 juin : Rencontre diocésaine des deux Commissions.
    Je retourne dans ma paroisse de TAOUYAH car après la messe, toujours bien animée par la chorale, nous nous retrouvons avec les délégués de toutes les paroisses de la ville (25) aux deux Commissions de « Justice et Paix » et de « Pastorale sociale ».
    Une reprise en main. A la fin de la messe, je les présente à la Communauté. Puis nous prenons le temps de lire devant tout le monde le compte rendu du Conseil paroissial de samedi dernier, pour que tout le monde soit au courant. J’y ajoute quelques réflexions et orientations pour motiver les gens. En effet, c’est la fin de l’année et après le temps fort du pèlerinage de Boffa, les gens ont tendance à s’endormir. D’autant plus que les vacances arrivent et la saison des pluies a commencé, ce qui bloque certaines activités. En plus, c’est la période des examens et la Campagne électorale occupe beaucoup les esprits. Mais il n’est pas question d’abandonner toute action. Au contraire, il faut organiser les activités de vacances.
    Evaluation du travail des deux Commissions.
    Nous faisons le tour et chacune des paroisses nous dresse le bilan de ses activités, les problèmes qu’ils ont rencontrés et les solutions qu’ils ont trouvées. A partir de là, nous voyons les questions qui se posent et traçons des orientations pour l’année prochaine. Nous sommes bien décidés à continuer à travailler, mais en précisant les actions à mener et les moyens que nous avons pour cela. Et pour mieux et plus l’approfondir, nous garderons le même thème d’action pendant tout un trimestre, au lieu d’en changer chaque mois comme nous l’avons fait cette année. Nous allons aussi intensifier la formation. Pour cela, après la rencontre générale, nous restons un certain temps pour préparer ces formations à donner.
    Bernard vient ensuite me rejoindre, pour travailler au dossier « Savoir-Fer ».
    Je devais avoir une émission en direct sur l’engagement du chrétien dans la Société, mais la journaliste qui devait m’interviewer est partie en voyage… en omettant de me prévenir. Cela, hélas, arrive souvent !

  • Vendredi 11 juin : Nous nous retrouvons avec le Bureau de «Savoir-Fer » pour tirer les conclusions de la rencontre d’hier et tracer les grandes lignes du document que nous allons leur envoyer. Puis nous allons à l’atelier pour préciser les choses sur le terrain.
    Entre temps, je reçois de nombreux appels au Skype, mais je n’ai pas le temps d’y répondre malheureusement. Mes correspondants vont être déçus, mais que faire ?
    Chaque midi,
    je me contente d’un sandwich préparé le matin à la maison avant de partir. Je suis souvent invité à manger, mais à cause de tout le travail à faire et de toutes les personnes à recevoir, je ne peux pas répondre à ces invitations. Aujourd’hui, je fais une exception.
    En effet, Dominique, un volontaire français que je connais depuis longtemps, arrive de KISSIDOUGOU pour rentrer se reposer en France. Quand je suis venu travailler dans les camps de réfugiés, il dirigeait la menuiserie et le garage de la Mission, où il formait un certain nombre de jeunes apprentis. Puis il a dirigé le Projet Hydraulique, et ensuite assuré un intérim à Savoir-Fer. Depuis plusieurs années, il vit dans un village où il travaille avec des paysans pour améliorer les cultures et les façons de travailler. Bernard nous invite à manger dans un restaurant chinois. Ainsi, nous prendrons le temps de nous retrouver et de parler ensemble.
    La coupe du monde. Aujourd’hui, la coupe du monde a commencé. Tout le monde a déserté les bureaux. Aussi, je préfère rentrer à la Communauté ; cela me permettra de travailler tranquillement et de façon suivie à certains documents. Je vais d’ailleurs continuer toute la journée de demain. Interrompu, malgré tout, par un certain nombre de visites et de problèmes à régler.
    C’est la 1ère fois que la coupe du monde a lieu en Afrique. Les radios et télévisions en ont fait un grand événement africain ; ici, chacun se sent concerné et il règne une véritable ambiance de fête. De plus, c’est l’occasion de fêter Nelson MANDELA et tout ce qu’il a fait pour sortir le pays de l’apartheid. Ca vaut la peine de soutenir tout cela. Mais il ne faudrait pas que l’événement occulte les problèmes, nombreux et graves, de l’Afrique du Sud ! De plus, bien qu’étant tout à fait pour le sport, je préfère soutenir les équipes de jeunes dans la banlieue de Conakry, plutôt que de soutenir ces grandes manifestations. D’autant plus que c’est devenu une affaire d’argent. Dans ces conditions, ce n’est pas étonnant que les équipes européennes soient aux premières places, car elles ont beaucoup plus de moyens que les autres pays. Et jusqu’au fond des village de Guinée, le rêve des jeunes c’est « de devenir footballeur pour aller en Europe et gagner beaucoup d’argent ». A tel point que beaucoup de ces jeunes passent tout leur temps à jouer au ballon pour s’entraîner et refusent d’aller travailler aux champs. Ce n’est pas cela qui va faire avancer le pays !

  • Jeudi 10 juin : Audit de l’atelier de soudure « Savoir-Fer ». Réunion du Bureau de l’atelier Savoir-Fer. L’ambassade de France nous a accordé un soutien. Ils ont envoyé un technicien faire un audit de nos activités et de notre comptabilité. Aujourd’hui a lieu la restitution avec les responsables de l’ambassade. En fait, il n’y a pas de problème et cela se passe donc très bien. Simplement, nous expliquons l’évolution de l’atelier : prise en charge de l’OCPH, nouveaux investissements et achat de matériel, élargissement du Bureau, recrutement d’un éducateur pour suivre les jeunes dans les quartiers, et leurs familles, voir leurs problèmes de santé et d’emploi, leurs conditions de travail et leurs salaires, etc… A partir de là, nous allons refaire nos prévisions pour l’utilisation de l’argent de la 2ème tranche. Ainsi l’audit nous a proposé de prendre un comptable. Cela va bien nous aider pour l’atelier et les autres projets et activités. (Voir mon site, rubrique « Savoir-Fer »).
    Travail avec C.R.S. (Caritas. Secours catholique des Etats-Unis), longue séance de travail. Au programme, l’évaluation des deux Commissions « Justice et Paix » et « Pastorale sociale », étude des comptes rendus d’activités et financiers pour la 2ème tranche, pour le travail des vacances. Puis nous poursuivons la réflexion pour relancer l’OCPH (Organisation catholique pour la promotion humaine). Enfin, nous continuons la mise au point de nos interventions pendant cette période de transition du pays et de la Campagne électorale. Elaboration de messages pour la radio et la télévision, journée de prière et de jeûne, affiches à composer, célébration pour la paix, etc… (Voir mon site, rubrique « Situation du pays »).
    Puis, retour à l’archevêché pour parler de tout cela avec l’évêque afin d’avoir ses réactions, recevoir ses directives et travailler avec lui les différentes interventions qu’il va devoir faire lui-même ou organiser.
    Avec tout cela, le travail ordinaire n’est pas fait. Je m’y mets donc au plus vite et travaille jusqu’à 20 heures, puisque la circulation est bloquée par de nombreux bouchons, causés par les meetings et autres manifestations de la Campagne électorale.
    Et Internet est toujours aussi lent, et même souvent bloqué !

  • Mercredi 9 juin : Le Chapitre général. La journée commence par la prière, suivie d’une réunion de Communauté. Après avoir fait le point de notre vie communautaire et réglé un certain nombre de questions pratiques, nous répondons au questionnaire reçu de nos responsables pour préparer notre Chapitre Général, c’est-à-dire la rencontre générale de tous les pays où nous travaillons, pour évaluer notre travail et tracer des pistes d’actions pour les années à venir. C’est une rencontre très importante et nous y mettons tout notre cœur pour bien la préparer. Comme on nous l’a demandé, nous proposons cinq pistes de réflexion qui nous semblent importantes, à partir de » ce que nous vivons en Guinée. (Voir mon site, rubrique « Spiritains »).
    Hermann s’est remis un peu de ses contusions. Il décide donc de rentrer demain à BOFFA, où le travail l’attend.

  • Mardi 8 juin : Les centres aérés. Séance de travail avec Xec, mon confrère salésien espagnol de la paroisse voisine, et Richard, formateur de la pastorale sociale, pour analyser les demandes des paroisses pour les Centres aérés de cet été, et mettre au point les dernières formations. Notre grand problème est celui des finances. Nous comptions sur le CCFD qui, après nous avoir fait espérer très longtemps, nous dit au dernier moment qu’il ne pourra pas nous aider. Heureusement que des amis se sont généreusement mobilisés. Nous pourrons au moins assurer l’essentiel : la prise en charge des éducateurs, le minimum de matériel pour les activités et au moins un repas pour le dernier jour. Nous aurions voulu assurer un repas chaque jour aux enfants, car nous nous adressons à des enfants de familles très pauvres qui ne mangent pas chaque jour à leur faim. Dommage ! (Voir mon site, rubriques « Jeunes » et « Album photos »).
    Ensuite, je passe un bon moment avec Hermann, notre confrère blessé. Il faut aussi voir toutes les questions de soins, d’assurances et autres.
    Il me reste le temps de saisir sur mon ordinateur différents comptes rendus, en particulier celui de la dernière réunion diocésaine de « Justice et Paix ».

  • Lundi 7 juin : Nouvelle semaine. Nous continuons la reprise en main de l’atelier Savoir-Fer, en exigeant de vraies factures et des pièces justificatives. Ce n’est pas facile, mais nous semble absolument nécessaires. Ensuite rencontre ordinaire avec l’évêque.

  • Dimanche 6 juin : Baptêmes et Première Communion. C’est un peu la fin de l’année pastorale et la conclusion de l’année. Nous avons un e très belle célébration avec beaucoup de monde. C’est dimanche, aussi les gens sont venus nombreux. Avec une excellente participation de tous, des chants, danses, théâtre, etc.. Je veille aussi à bien marquer l’engagement et à responsabiliser les différentes personnes qui ont participé à la formation des baptisés : parents, parrains et marraines, catéchistes, responsables de communauté et de Mouvements, etc..
    Emission radio. J’ai juste le temps de prendre une douche avant de rejoindre une radio libre pour une émission religieuse en direct. Heureusement, j’ai pris mes précautions car le grand carrefour de BAMBETO est complètement bloqué par une manifestation de soutien à l’un des candidats à la présidentielle. Impossible d’avoir un taxi. Je vais donc à pied, sous la pluie : ça rafraîchit les idées ! Aujourd’hui, le thème de l’émission, c’est le mariage. Je reçois plusieurs coups de téléphone en direct, en particulier de musulmans, sur le mariage entre personnes de religions différentes. C’est un sujet sensible.

  • Samedi 5 juin : Réunion du Conseil paroissial. Il n’y a pas beaucoup de monde ; c’est la fin de l’année, la période des examens, le début de la saison des pluies et des travaux des champs. Et, en plus, beaucoup de nos responsables sont engagés dans la Campagne électorale. Malgré tout, les différentes communautés sont représentées. Nous faisons le bilan de l’année et en tirons les premières conclusions pour l’année prochaine. Puis nous évaluons le dernier pèlerinage de Boffa. Nous nous apercevons que nous nous sommes trop laissés prendre par la préparation matérielle, en négligeant la préparation spirituelle, malgré les moyens qui nous avaient été donnés : questions à partir des lectures de chaque dimanche, livret de préparation du pèlerinage, etc… Nous voyons don c comment prolonger les enseignements du pèlerinage pour ne pas en perdre les acquis. Enfin, nous réfléchissons aux activités que l’on va pour voir mener pendant les vacances. Là nous sentons la nécessité de coordonner les activités
    Célébration des étapes du baptême. Là, je suis très déçu. D’abord j’avais demandé que ces catéchumènes fassent la retraite en même temps que ceux qui se préparaient au baptême et à la Première Communion. Mais on m’a dit que cela ne se faisait pas à CONAKRY (contrairement à ce que j’ai toujours fait). J’ai accepté à contre-cœur. Les catéchumènes n’ont donc pas été préparés, ni même évalués. Et plusieurs sont même arrivés en retard ! Plus grave, la chorale n’est pas venue, bien que demandée. Ni les parents, ni les parrains ne sont venus. Pas même les catéchistes, ni même les responsable de communauté. Je me suis retrouvé avec les catéchumènes et deux catéchistes. Cela m’a complètement découragé. Et montre qu’il y a beaucoup à faire pour que la paroisse devienne une vraie famille, où chacun se sente responsables des autres. Nous allons prendre les dispositions nécessaires pour un premier progrès dans ce sens. Et trouver des nouvelles façons de vivre en communauté en ville. Vaste chantier !
    Nous célébrons malgré tout ces étapes, avec des gestes significatifs et des symboles, tirés à la fois de l’Evangile (l’arbre, la vigne, les pierres, l’eau vive) et des cultures guinéennes (les bénédictions traditionnelles, la noix de kola). La célébration a eu lieu en trois langues : français, kissi, guerzé.
    Accident. Au retour, une mauvaise nouvelle nous attend. Notre Supérieur a bien essayé de nous prévenir par téléphone depuis le Sénégal, mais ça ne passait pas. Notre responsable spiritain pour la Guinée revenait de Dakar, d’une rencontre des différents responsables de l’Afrique de l’Ouest (Conseil). En arrivant à la ville de BOKE, il a été ébloui par une voiture venant d’en face, pleins phares, et a percuté un jeune cycliste sortant d’une soirée dansante et roulant complètement à gauche. Le jeune a été gravement blessé au bassin. Aussitôt, le curé de Boké, un prêtre guinéen, et Igbé, notre confrère de Kataco, ont prévenu l’hôpital et la gendarmerie. On les a transportés en ambulance à Boke pour les premiers soins. Et aujourd’hui, on les a amenés à Conakry, où le jeune a été hospitalisé à l’hôpital militaire. Notre confrère, après de nouveaux soins, a pu venir dans notre communauté. Mais il faudra qu’il se fasse soigner l’œil droit qui a reçu des éclats de verre du pare-brise. Nous avons été bien aidés et soutenus par beaucoup de gens qui nous ont montré leur amitié. Cela nous a beaucoup encouragés.

  • Mercredi 2 juin : Retraite préparatoire au baptême et à la Première Communion. C’est la première que je l’anime dans ma nouvelle paroisse. Ce n’est pas nouveau pour moi, mais ça l’est pour eux. En effet, nous ne considérons pas la retraite comme une révision du catéchisme, mais comme une véritable initiation. Nous insistons donc beaucoup sur la vie communautaire et la mise en pratique de l’Evangile. Nous demandons aux catéchumènes d’enseigner et de diriger eux-mêmes les prières. Différents chrétiens engagés viennent donner leurs témoignages et animer les réflexions. A travers cela, nous espérons former des chrétiens conscients et engagés. En tout cas, les catéchumènes ont été très heureux, ont très bien participé et nous ont beaucoup remerciés. Cela fait plaisir. Nous avons spécialement travaillé les Béatitudes, la charité et la lutte pour la justice.
    Messe du 30ème jour. Le jeudi soir, je laisse les catéchumènes avec les catéchistes, pour célébrer la messe du 30ème jour du décès de la mère du Ministre de l’enseignement supérieur. Il y a beaucoup de monde. J’insiste sur l’importance de terminer le deuil et de recommencer à vivre dans l’Espérance. Et à lutter contre les forces de mort, d’essuyer les larmes de ceux qui pleurent et de construire une terre nouvelle, surtout en cette période de transition. (à partir du Livre de l’Apocalypse, 21, 1-4).
    Le vendredi après-midi, je laisse à nouveau la retraite. Nous nous retrouvons avec CRS et la Communauté Sant Egidio pour voir comment faire passer un certain nombre de messages pour la paix, le respect et la justice pour tous dans le pays, spécialement en ce temps des élections. Ces messages seront basés à la fois sur la Bible, le Coran, la Déclaration universelle des Droits de l’homme, et la Convention des Droits de l’enfant. Nous prévoyons aussi des posters à mettre dans la ville et des interventions des chefs religieux, chrétiens et musulmans, si possible ensemble, à la radio et à la télévision. Nous travaillons intensément et rapidement, car je dois rentrer dire la messe et clôturer la retraite. Heureusement que Bernard vient me prendre avec sa voiture, car je n’arrivais pas à avoir de taxi.

  • Mardi 1er juin : L’Université catholique.
    Depuis une dizaine d’années, on a mis en place en Afrique de l’Ouest francophone une Université catholique. Comme chacun des pays ne pouvait pas avoir une Université complète, on a décidé de répartir les facultés dans les différents pays. En Guinée, nous avons commencé il y a deux ans, et nous avons trois facultés : Economie, Sciences juridiques, Sciences politiques. Les choses démarrent doucement et les problèmes sont énormes. Mais face à la corruption et au laisser aller, il nous semble absolument nécessaire de former des étudiants dans un autre sens, pour transformer peu à peu le pays.
    Après la conférence, nous prenons le temps de parler avec l’intervenant. Pour réagir contre les dérives de la grande finance internationale, ils proposent un contrat social. C’est une bonne idée, mais comment arriver à changer l’organisation économique actuelle !... Et pourtant, c’est certainement nécessaire.
    La journée se termine dans la joie : d’abord, nous nous retrouvons avec Jean-Louis et Jaqueline, autour d’un apéritif offert par l’évêque. Ils m’ont apporté fromage, saucisson et chocolat, qui nous manquent beaucoup ici. Ca tombe d’autant mieux que c’est l’anniversaire de notre stagiaire. Nous pouvons donc continuer la fête dans la joie.
    Réunion du Bureau de « Savoir-Fer », suivie de la rencontre avec les formateurs. Malgré toutes les personnes qui les poussaient à la révolte, ils acceptent enfin de faire partie de l’Association et de travailler en collaboration. Nous espérons que le mauvais cap est passé, et que nous allons enfin pouvoir travailler en paix.
    Ensuite, rencontre avec l’archevêque. Beaucoup de choses à voir, car il y a quelque temps que nous ne nous étions pas vus. Mais le point essentiel, ce sont bien sûr la Campagne électorale et les élections. Nous cherchons les meilleures façons de servir le pays et de former les gens, pour que les choses se passent le mieux possible.
    Avec la Procure, nous étudions la question des foyers St Joseph : ce sont à la fois des foyers pour les enfants de la rue, les malades du Sida, les personnes âgées abandonnées, les veuves et les orphelins rejetés, les incurables. Ces personnes étant très nombreuses, le nombre des foyers n’ont fait qu’augmenter, mais nous sommes arrivés à un point de saturation et nous n’arrivons plus à prendre en charge toutes ces personnes, ce qui nous pose d’énormes problèmes. Nous ne savons plus comment faire. (Voir mon site, rubrique « Pastorale sociale »).
    Avec l’OCPH, nous réfléchissons aux demandes de soutien à faire l’année prochaine, pour les projets de développement.
    Puis je pars à C.R.S. : Deux points importants : 1) La remise sur pied de l’OCPH (Caritas Guinée), en lien avec Caritas Internationale et Caritas Afrique, le soutien de Caritas sœurs (Sénégal et Côte d’Ivoire), et la participation de Caritas européennes sœurs (Italie, France, Allemagne et aussi Canada). 2) C’est de préciser les points pratiques et de chercher les moyens pour que l’Eglise puisse jouer un rôle positif en cette période de transition. Il va falloir continuer la réflexion.
    Je rentre à la maison, car il me faut préparer la retraite qui commence demain. J’ai déjà mis de côté un certain nombre de documents au fur et à mesure, mais il va falloir classer et organiser tout ça.

  • Lundi 31 mai : Retour aux activités habituelles. Il y a bien sûr des tas de choses à voir. Je travaille en particulier avec Jean-Louis, venu une semaine nous aider : la question des enfants de la rue, des foyers, de l’Atelier, les conclusions et les comptes rendus du Congrès de Maputo, etc… Avec les éternels problèmes de coupures de courant, Internet bloqué, les messages mails qui n’arrivent pas. Et j’ai à peine commencé mon travail qu’on me demande d’aller participer à une conférence sur l’économie, avec des experts venus du Canada à l’Université. Je trouve quand même un moment pour aller au dispensaire faire soigner ma cheville et me faire enlever les points de suture à la tête. Plus d’une heure d’attente, c’est le prix à payer ! Mais ça valait la peine.

  • Dimanche 30 mai : Lever à 6 heures, car je pars dans une paroisse à 30 km de Conakry, COYAH. On a retardé la messe jusqu’à 11 heures ; de 9 h à 11 heures, nous avons une réflexion sur l’engagement politique du chrétien en cette période de transition, et pour les élections. Je vous enverrai le compte rendu bientôt. Le sujet intéresse beaucoup et nous retrouvons pendant deux heures à nouveau, après la messe, pour répondre aux questions et écouter les contributions des participants. (Voir mon site, rubrique « Situation du pays »).
    Après un repas rapide, nous abordons le deuxième travail de la journée : Formation sur « Justice et Paix » et fonctionnement de la Commission. Des délégués de deux paroisses, situées à 30 et 50 km, sont venus nous rejoindre. Nous espérons que cette fois-ci, les Commissions vont vraiment démarrer. (Voir mon site, rubrique « Justice et Paix »).
    Au retour, nous sommes pris dans un groupe d’une centaine de motards, à l’effigie de l’un des candidats. Ils reviennent d’un meeting à 250 km (MAMOU). La campagne est vraiment commencée, avec tous les désordres qu’elle provoque. Les partisans envahissent la route, les voitures essayent de passer de tous les côtés et nous nous trouvons coincés dans un immense bouchon pendant de longues minutes. La circulation est toujours chaotique en temps normal, mais avec l’indiscipline des conducteurs et des militants, elle devient vraiment impossible.
    Emission radio : la Trinité.
    On me demande de faire une émission en directe sur la Sainte Trinité. Ce n’est pas évident, surtout dans un pays à grande majorité musulmane où Dieu est l’Unique, dans tous les sens. Je repars de mon homélie de ce matin, en réaffirmant l’unicité de Dieu, mais aussi sa richesse. Et aussi la chance que nous avons de connaître Dieu personnellement et de l’intérieur, grâce à Jésus-Christ. A partir de l’Evangile du jour, j’explique que Dieu est Amour, qu’il est famille, et qu’il est accueil et don total dans le respect complet de l’autre et la reconnaissance de sa différence. A partir de là, je tire les conclusions pour la vie de famille et la vie sociale. Et aussi, bien sûr, pour la période électorale que nous vivons actuellement, pour qu’elle se passe dans l’entente et le respect des différences de chacun.

  • Dimanche 23 mai : Pentecôte, fête des Spiritains. Je vais la passer en grande partie dans le ciel ! Je pars seulement pour un Congrès, aussi j’ai pris le minimum de bagage : juste un sac de cabine, pas de bagage de soute. Du coup, impossible d’apporter du liquide ou quelque chose de pointu, etc… A Conakry, on m’avait seulement demandé d’enlever les piles de ma lampe-torche et de mon poste radio. A l’aéroport de Dakar, on me les prend. Il paraît que c’est dangereux ! Je serai quitte pour en acheter d’autres à Maputo, et de les laisser avant de prendre le vol du retour !
    8 heures de vol jusqu’à JOHANNESBURG, ça fait long. Là, je pensais être pris en charge par la Compagnie, puisque je continue avec eux demain matin, jusqu’à MAPUTO (il n’y a pas d’avion dans cette direction aujourd’hui), mais on me dit que non. Je vais donc passer l’après-midi et la nuit sur un banc de l’aéroport. Heureusement que j’ai amené de quoi manger et récupéré des petites bouteilles d’eau dans l’avion. J’avais prévu le coup, ce n’est pas la première fois ! J’ai aussi de la lecture et du travail. Et je ne suis pas le seul à « dormir » sur les bancs à l’aéroport. Mais avec la lumière vive, les appels des hauts parleurs et les voyageurs qui passent sans cesse en parlant fort, c’est pratiquement impossible de dormir. Tout cela, pour dire que les voyages en Afrique ne sont pas rapides, même par avion : 3 jours pour aller de Conakry à Maputo, et 3 jours pour revenir, avec des départs ou des arrivées à 2 ou 3 heures du matin et deux nuits dans les aéroports. Déjà, pour avoir une correspondance depuis Conakry, il faut aller à Dakar ou Abidjan. Et pour aller dormir dans un hôtel, il faut d’abord payer 25 dollars de visa pour sortir de l’aéroport. En plus, les voyages en avion en Afrique sont les plus chers du monde… sauf pour les touristes, parce que, eux, ils partent d’Europe et en plus ils ont des vols directs.
    Heureusement, mon palud s’atténue, la fièvre diminue, mais il va rester la fatigue. Et la soif. En effet, il me restait deux bouteilles d’eau, mais on me les a prises, sans un mot, au moment de l’enregistrement pour Maputo. Je suis aussi frappé par l’aspect tendu, le manque de sourires et de dialogue de la part de tous les travailleurs ici.
    A l’arrivée à MAPUTO, nouveau problème. Comme il n’y a pas d’ambassade du Mozambique en Guinée, je n’ai pas pu prendre mon visa à Conakry. Je le demande à l’arrivée. Ils acceptent (moyennant encore 25 dollars !... et si tu as oublié ton carnet de vaccinations, c’est 100 dollars ; mais alors on te laisse entrer malgré tout). Les responsables du Congrès sont bien venus me prendre à l’aéroport, mais il faut du temps pour établir le visa. Ne me voyant pas sortir de l’aéroport, ils pensent que je ne suis pas venu et s’en vont. Je me retrouve seul, sans argent mozambicain, ni puce du pays pour appeler au téléphone. Quand un autre « oublié » me repère, grâce à mon tee shirt de CRS. Lui, il a le téléphone. Je ne parle pas portugais, mais avec l’espagnol je me fais comprendre et on revient nous chercher. Je vais attraper « le train en marche » car, avec tous ces problèmes, je suis arrivé en retard.
    Le CONGRES DE MUMEMO (Maputo).
    C’est dans la banlieue de Maputo, dans un grand Centre d’Accueil tenu par les Sœurs franciscaines. Nous sommes plus nombreux que prévu, aussi elles ont beaucoup de mal à nous loger et à nous nourrir. Nous les remercions beaucoup pour tous les efforts qu’elles déploient avec toutes les jeunes filles du Centre. Elles sont vraiment très sympathiques et accueillantes, malgré la barrière de la langue. Le sourire remplace beaucoup de paroles.
    Le Congrès s’adresse aux évêques d’Afrique (responsables des deux commissions de Justice et Paix, et Caritas), même si tous ne sont pas venus. Pour moi, je représente les évêques de Guinée. Ce Congrès se passe en trois langues : français, anglais et portugais (heureusement que j’ai pu me passer de la traduction simultanée, car elle ne fonctionnait pas très bien). Il y a eu d’ailleurs un certain nombre de problèmes techniques : sonorisation, ordinateurs « bloqués », etc… Mais comme il régnait une très bonne ambiance, on a fait avec. Le Mozambique est un pays pauvre, mais les gens se débrouillent très bien.
    Le but du Congrès était double : voir comment mettre en pratique et assurer le suivi du 2ème Synode pour l’Afrique qui a eu lieu en Octobre dernier (Voir mon site, rubrique « Synode ») dont le thème était : « L’Eglise au service de la réconciliation, la justice et la paix en Afrique ». « Vous êtes le sel de la terre. Vous êtes la lumière du monde ». Comme on ne peut pas agir sur tout en même temps, nous avons vu quelles étaient les actions les plus importantes à mener à partir de nos réalités locales. Au niveau du Continent, nous avons choisi trois points principaux : 1) La bonne gouvernance dans nos pays, avec tout ce qu’elle demande aux niveaux politique (élections, corruption…), économique (partage des richesses et développement humain), social (attention aux plus pauvres, etc…). 2) La promotion de la femme. 3) La construction de la paix.
    Pour l’Afrique de l’Ouest, nous avions souligné la lutte contre la pauvreté et les problèmes des jeunes (chômage qui entraîne drogue et violence, migration « sauvage » pour quitter le pays, etc…). Nous n’oublierons pas ces deux points. Je vous enverrai bientôt le compte rendu de la rencontre.
    Le deuxième but était de voir comment mieux travailler ensemble : Evêques, Commissions de Justice et Paix, Caritas (Secours Catholique), et OCPH (Organisation Catholique pour la Promotion Humaine, en Guinée). Nous avons été rejoints par des représentants des Caritas européennes et américaines et nous avons travaillé tous ensemble.
    J’ai apprécié la simplicité de nos évêques, ce qui fait que l’ambiance était très amicale. Par contre, on aurait pu améliorer nos méthodes de travail pour que la réflexion aille plus loin. Et aussi mieux s’organiser pour perdre moins de temps. Mais c’est toujours difficile de travailler avec un groupe international de plus de 100 personnes. On l’a bien vu, quand il s’est agi d’approuver la déclaration finale, que je vous enverrai également.
    Ce qui est sans doute le plus intéressant dans ce genre de Congrès, ce sont les rencontres et les échanges entre nous. Beaucoup se connaissaient déjà et nous avons été heureux d’échanger nos idées, de partager nos problèmes et de chercher ensemble des solutions. Pour la Guinée, j’ai posé les bases de la visite d’autres Caritas voisines et de responsables panafricains et internationaux, en Octobre, pour nous aider à améliorer nos méthodes de travail.
    Les ennuis continuent.
    Pour la petite histoire, le Centre venait juste d’être terminé. Le dallage du couloir était très glissant et il y avait deux marches non signalées, juste à la sortie de ma chambre. Je ne les ai pas vues et je suis tombé sur la tête (au sens propre… pas au sens figuré, j’espère ! Ce sera à vous de juger dans quelle mesure je suis fêlé !). Heureusement, il y a un hôpital dans le Centre et on m’y a conduit aussitôt. Je savais que les Bretons ont la tête dure…. mais aussi le cuir : l’infirmière a eu du mal à me recoudre et je l’ai senti passer, après le choc sur la tête en tombant sur le carrelage. C’est une expérience que je n’avais pas encore faite, et je ne suis pas pressé de la renouveler. Mais au moins, cela m’a permis de faire soigner ma cheville qui avait commencé à s’infecter, en même temps. Et d’avoir des anti-biotiques pour cela. J’ai donc terminé le Congrès avec pansement sur la tête et j’ai été « chouchouté » par tout le monde, y compris les évêques ! Ce n’est pas désagréable.
    Un vrai « cadeau » dans le transport, avant le retour aux réalités habituelles !
    Comme il y avait une cinquantaine d’évêques et cardinaux, le gouvernement mozambicain a tenu à bien faire les choses. Et même nous, le « tiers état » et le bas peuple, nous avons été escortés par les motards, avec feux et sirènes, pour aller à l’aéroport. Nous avons d’abord été très étonnés et ensuite nous avons bien rigolé de voir toutes les voitures jusqu’aux gros camions se ranger pour laisser le passage. Alors, pour « être à la hauteur », nous nous sommes donnés des noms de présidents. Cela aussi c’est une expérience à faire, car je ne suis pas près de la renouveler en roulant en taxi collectif dans les bouchons de Conakry. A l’aéroport, après les formalités d’embarquement, il nous a fallu attendre, car les policiers n’étaient pas arrivés. Ensuite, il y avait bien un car devant la sortie, mais le chauffeur n’en a pas ouvert les portes. Alors nous sommes allés à pied jusqu’à l’avion… et le chauffeur est venu nous rejoindre à vide ! Une fois installés dans l’avion, il nous a fallu attendre plus d’une demi-heure que le camion arrive avec le carburant pour faire le plein des réservoirs. Nous avons finalement décollé. Heureusement que j’avais suffisamment de temps pour la correspondance à Johannesburg. A mon arrivée à DAKAR, celui qui devait venir me chercher s’est trompé de jour. Mais, là, je suis chez moi ; je vais donc à pied, à 3 heures du matin, à la paroisse voisine, tenue par des spiritains. Je réveille Moïse qui m’accueille avec joie, bien que je l’aie réveillé en pleine nuit. Et le lendemain matin, je continue en « car rapide » jusqu’en ville, à notre maison.
    Rencontre fraternelle.
    En ce moment se tient le Conseil de la circonscription. J’ai donc la joie de revoir les délégués des différents pays d’Afrique de l’Ouest où nous travaillons. Et de parler avec eux de nos différents engagements, de nos questions, et de nous donner des nouvelles des uns et des autres. Je rencontre aussi nos étudiants en théologie, dont quatre Guinéens que je connais bien. Je leur donne des nouvelles du pays et nous partageons nos soucis et nos espoirs sur l’évolution actuelle du pays. La journée passe vite et le lendemain il faut penser à partir, après que nous nous soyons rencontrés avec Yves Marie, notre responsable. C’est Yvon, avec qui nous avons travaillé à Conakry et que je connais depuis son premier stage au Sénégal dans les années 90, qui m’amène à l’aéroport.
    Je suis heureux de revenir à Conakry et de me retrouver dans ma Communauté. J’ai beaucoup de choses à raconter. Emmanuel me fait le compte rendu de la fête de la Pentecôte et des activités de la paroisse. Puis je monte rapidement ranger mes affaires et préparer le travail de demain.

  • Samedi 22 mai : Je me lève tard et avec difficulté. Mais il y a la réunion du Conseil paroissial. C’est important et nous avons déjà pris beaucoup de retard. Mais c’est la fin de l’année, la période des compositions et examens, et beaucoup de gens sont pris –et même certains, perturbés- par tout ce que nous vivons actuellement dans la pays. Aussi, peu de personnes sont venues. Après réflexion, nous repoussons la rencontre dans 15 jours, mais tenons une réunion du Bureau pour régler les questions urgentes des baptêmes, mariages, préparation de la retraite des catéchumènes pour le baptême. Nous faisons aussi le point sur la vie de nos Communautés pour préciser ce que nous dirons à la prochaine réunion, car il y a des choses à dire, en particulier sur le refus d’engagement de certains. Aussitôt après, je retourne me coucher !
    Les joies du voyage.
    Bernard est venu me prendre pour m’amener à l’aéroport. Comme depuis deux jours je n’ai pas eu accès à Internet, il amène sa clé. Impossible d’avoir la connexion, malgré tous nos efforts. Il y a vraiment des jours où rien ne marche !
    Pas grand-chose à dire sur le voyage, sauf que l’on nous fait venir de plus en plus tôt à l’aéroport, sans qu’il y ait plus de sécurité pour autant ! J’ai passé trois fois plus de temps à l’aéroport pour les formalités de l’embarquement que dans l’avion, pour aller de Conakry à Dakar. Je suis heureux de me retrouver dans cette ville que je connais bien. Et je vais tranquillement à pied à la paroisse voisine pour passer une partie de la nuit (demain matin, départ à 4 heures). J’y retrouve plusieurs confrères ; nous sommes heureux de nous rencontrer et de nous donner des nouvelles. Nous parlons longuement du prochain Conseil des Spiritains d’Afrique de l’Ouest. Ensuite, Moïse me prête son ordinateur pour consulter mon courrier que je n’ai pas lu depuis plusieurs jours. Cela ne me laisse pas beaucoup de sommeil, mais c’est bon de se retrouver entre confrères.

  • Vendredi 21 mai : Malgré la fièvre, je me lève. En effet, ce matin je dis la messe pour trois familles… sans oublier toutes les autres intentions de prière : un anniversaire, un anniversaire de mariage et une fête. Après la messe, j’avais promis de visiter une femme âgée et malade, et de voir, à sa demande, la question de son mariage. Mais quand nous arrivons, elle n’est pas prête, et son mari, qui est musulman, est sorti. Je retourne donc me coucher pour toute la journée, mais j’aurais préféré rester au lit. J’annule tous mes rendez-vous et autres activités, malgré mon départ prochain pour le MOZAMBIQUE, et tout ce qu’il y a à faire avant cela. L’après-midi, un paroissien m’amène un médicament traditionnel, à base de plante. La nouvelle de ma crise de palud s’est répandue ! Je suis très touché de son geste et je le remercie beaucoup.

  • Jeudi 20 mai : Le matin, nous célébrons tous ensemble. Puis je pars en banlieue à la recherche d’un jeune qui ne connaît pas la ville et n’a pas de téléphone portable. Pas facile. Il vient de MONGO avec une somme d’argent pour l’Imprimerie : c’est pour payer l’impression du livret sur le Centenaire de Mongo. A l’intérieur du pays, il n’y a pas de banque. Il faut tout transporter en liquide ! Comme je parle sa langue, je trouve facilement des compatriotes qui le repèrent finalement et me conduisent jusqu’à lui.
    Tout cela a pris du temps. Quand j’arrive à l’archevêché, beaucoup de monde… et de problèmes m’attendent. Je veille à rester, malgré tout, calme et accueillant.
    Nous avons, en particulier, un problème de terrain. Quand Sékou Touré a expulsé les missionnaires, il avait en même temps réquisitionné tous les biens de l’Eglise, en particulier les dispensaires et les écoles. Beaucoup de personnes nous demandent de reprendre l’enseignement ; nous voulons récupérer nos terrains, mais des gens se sont installés dessus. C’est un problème très délicat.
    La Commission diocésaine de la Jeunesse.
    Nous nous retrouvons autour de l’évêque pour faire le point du dernier pèlerinage de BOFFA et plus largement évaluer le travail de toute l’année. Suite aux deux grands rassemblements des jeunes de KATACODI et CONAKRY l’an dernier, les jeunes avaient décidé d’un plan d’action en cinq points : engagement dans l’Eglise, dans la Société, Evangélisation, Justice et paix, Problèmes des jeunes (chômage, drogue, violence). (Voir mon site, rubrique « Jeunes »). Mais, à part certains groupes, la plupart des jeunes ne sont pas passés à l’action. Et la Commission diocésaine n’a pas joué son rôle. D’abord, ils ne sont plus jeunes : ils sont maintenant adultes et mariés. Ils se retrouvent entre eux chaque semaine, mais ne descendent pas sur le terrain. Et ils se contentent de proposer des activités religieuses (sans aborder les problèmes des jeunes) : marche pénitentielle, session biblique, pèlerinage. Il ne faudrait pas se limiter à cela, mais donner à ces activités un contenu plus large. Nous nous retrouvons donc pour réfléchir à tout cela et nous décidons que l’archevêque descendra à la base lui-même, pour travailler avec les responsables paroissiaux de la jeunesse directement. Nous reverrons ensemble le plan d’action. Avant cela, nous nous étions d’abord retrouvés pendant deux heures de prière, suivie de la messe, comme nous le faisons chaque jeudi pendant cette année du sacerdoce.
    Emission à la radio.
    A la sortie, le responsable des groupes de prière de Conakry, qui anime une émission radio chaque jeudi et dimanche sur une radio libre de la vie, m’attend. Il me demande d’animer une émission sur l’engagement des chrétiens dans ce temps de transition du pays et de préparation aux élections. Ils m’ont prévenu un peu tard, mais de toutes façons je sais quoi dire, car je baigne chaque jour dans la question.
    Crise de Palud.
    Je rentre le soir bien fatigué et une crise de palud se déclenche. Je ne peux pas me plaindre, car cela fait pas mal de temps que je n’en avais pas eue ! Mais le temps change et la saison des pluies est arrivée… avec la virulence des moustiques. Comme je me connais et que j’ai toujours de médicaments avec moi, je prends aussitôt trois comprimés de Fansidar, et je me couche.

  • Mercredi 19 mai : Le matin, réunion de notre communauté spiritaine. Nous examinons notre vie commune et nos différents engagements. Ensuite, nous reprenons le questionnaire sur notre style de vie et notre solidarité avec les plus pauvres. Cela fait partie d’une réflexion en profondeur sur notre vie religieuse.
    A 10 h, je devais enregistrer une émission radio sur le mariage. Mais la technicienne ne vient pas… sans même me prévenir. Cela arrive souvent, mais j’ai de la peine à m’y habituer !
    Messe au dispensaire : A 14 h, retour au dispensaire St Gabriel. Cette fois-ci, c’est pour célébrer l’eucharistie avec le personnel chrétien. Ils ont très bien préparé la célébration. Comme 1ère lecture, nous prenons un texte de Jacques, 5, et nous nous demandons comment prendre en charge les malades, en lien avec les communautés chrétiennes de quartier. Et aussi au niveau de la foi, dans la prière communautaire. Après l’Evangile, (Jean, 9) nous méditons sur l’attitude du Christ devant les malades et son accueil (à partir de la guérison de l’aveugle né). Et quel comportement avoir devant la médecine traditionnelle (la boue et la salive), les accusations de sorcellerie et les pratiques « fétichistes » en cas de maladie. A l’offertoire, nous venons offrir nos instruments de travail en procession dansée. Au début de la messe, nous avions déjà posé sur l’autel la feuille d’engagement des employés, au début du travail. Nous terminons dans la joie et prenons ensemble le pot de l’amitié.
    Le soir, choix des catéchumènes dans une troisième communauté de quartier.
    A mon retour, je trouve Igbé, notre confrère nigérian, qui est resté à Kataco. Nous parlons longuement de la vie à Kataco, des communautés, des projets de développement, des femmes, de l’animation des jeunes et de la vie de tous les jours. Nous préparons la prochaine réunion de doyenné lors de la bénédiction d’une nouvelle église à TAIGBE. J’ai aussi la joie de lui remettre de la nourriture pour bébés et du matériel pour le dispensaire.
    Pendant notre conversation, je reçois un appel de Winfried qui quitte la Mission de MONGO pour aller se former. Pour le moment, nous n’avons trouvé qu’un prêtre intérimaire. Nous avons de gros problèmes de personnel ; certes, il y a de nombreux jeunes qui se présentent, mais il faut le temps pour qu’ils se forment !

  • Mardi 18 mai : Problèmes à l’atelier. Nous passons presque toute la matinée à parler du problème des formateurs de l’atelier « Savoir-Fer ». Nous sommes fatigués de tout ce temps perdu et cette énergie dépensée pour de faux problèmes.
    Ensuite, nous nous retrouvons avec l’archevêque pour une longue séance de travail. Cela faisait très longtemps que nous n’avions pu le faire. Depuis Pâques, chaque fois qu’il rentrait de voyage c’est moi qui étais en tournée. Pour aujourd’hui, nous nous limitons aux questions essentielles et urgentes.
    L’archevêque revient d’une visite d’un grand collège de LILLE (St Jude) où enseigne depuis longtemps un professeur guinéen qui a lancé un jumelage avec nous. Nous faisons le tour des différentes actions de développement. Nous préparons l’accueil de Caritas d’autres pays africains qui doivent venir nous aider à améliorer nos façons de travailler. Nous revoyons ce que je vais faire à Maputo pendant le Congrès Panafricain de mise en œuvre du 2ème Synode pour l’Afrique. Et, bien sûr, la place de l’Eglise et l’engagement des chrétiens dans cette période de transition pour le pays.
    L’après-midi, rencontre au dispensaire St Gabriel, avec l’équipe des responsables et le responsable de la FIDESCO (Communauté de l’Emmanuel) venu de France. En effet, le dispensaire est animé par une équipe de volontaires envoyés par Fidesco. (Voir mon site, rubrique « Développement, santé). Ce dispensaire est très réputé sur toute la ville du fait du sérieux de ses agents de santé, à la fois au niveau de la conscience professionnelle et du refus de la corruption. Grâce à cela les gens peuvent être soignés beaucoup moins cher qu’ailleurs. Pour moins d’1,50 euro (12.000 francs guinéens), ils sont reçus, auscultés et soignés ; et pour la même somme minime, chacun reçoit les médicaments dont il a besoin, quelle que soit sa maladie. Ce qui fait que St Gabriel est le dispensaire qui reçoit le plus de malades sur toute la ville (18.000 par mois). Et si cela peut se faire, c’est parce qu’il y a une qualité de relation et une grande collaboration entre les agents de santé. Et cette entente et vie d’équipe s’appuient sur une vie de prière et un partage au niveau de la foi, entre chrétiens et musulmans.
    Nous prenons un temps important pour examiner les comptes de l’année du dispensaire. En gros, il arrive à fonctionner même avec cette somme modique de 12.000 francs guinéens, grâce à de grandes mesures d’économie et une bonne gestion. Mais bien sûr, cela ne couvre pas les frais de construction de nouvelles structures (il nous faut des aides extérieures pour ce secteur), ni la prise en charge des volontaires (assurée par Fidesco). L’achat des seuls médicaments se monte à 22 % du budget total et les charges du personnel 20 %. Deux tiers (2/3) du budget est fourni par les tickets de 12.000 francs et 1/3 par les partenaires.
    Ensuite, il nous faut réfléchir à nos orientations. La demande première des malades c’est bien sûr d’être soignés. Et nous risquons de nous laisser entièrement prendre par ces soins. Nous décidons donc d’intensifier les causeries d’éducation à la santé, dans les différentes langues locales, soit enregistrées sur cassette, soit animées en direct par un(e) infirmier(e). De continuer à enseigner aux mamans des enfants dénutris à mieux nourrir leurs bébés, de parler avec les femmes enceintes au moment des visites prénatales, et avec les mamans au moment des vaccinations, etc…
    Nous avons réfléchi spécialement à notre travail de prévention du SIDA et les soins aux personnes séro-positives. Les tests et la nourriture sont fournis par le PAM (Projet Alimentaire Mondial des Nations Unies) et les vaccins par l’UNICEF. Mais malheureusement, il y a très souvent des ruptures de stocks –et sans préavis- qui posent beaucoup de problèmes.
    Ce qui nous semble important, c’est qu’il y a un travail de coopération avec les autres organisations catholiques (comme le Centre DREAM de Sant Egidio, pour les sidéens, ou non).
    Nous voyons comment mettre en place une information et une permanence pour la régulation des naissances.
    Vient ensuite la question des salaires et de l’inscription des travailleurs à la Sécurité sociale. Malgré tous les problèmes de fonctionnement de cette Caisse, c’est une priorité pour nous. L’année dernière, pendant le Ramadan, nous avons eu une journée de prière (récollection) commune entre chrétiens et musulmans, à partir des textes de la Bible et du Coran, mais aussi la pratique de notre foi, sur le thème : Comment travailler pour la santé en tant que croyants ?
    Dès la fin de la réunion, je pars dans une autre Communauté de quartier, pour l’admission des catéchumènes aux sacrements.

  • Lundi 17 mai : Reprise des activités, comme chaque semaine, avec tous les dossiers à lire, les gens à rencontrer, Internet… et les coupures de courant.
    Pastorale sociale : L’après-midi, réunion avec CRS (Caritas des Etats-Unis). Nous sommes tous pris par des tas d’affaires et c’est difficile nous rencontrer. Pourtant, beaucoup de choses se passent dans le pays et au niveau de l’Eglise. Nous abordons les différents points, successivement. Nous nous arrêtons spécialement à la relance de l’OCPH (Caritas de Guinée), et au soutien à apporter au nouveau responsable, de même qu’aux équipes de base. (Voir mon site, rubrique « Pastorale sociale »).
    La deuxième chose importante, c’est de voir notre rôle dans l’évolution actuelle du pays : Que faire pour que la campagne électorale se passe dans la paix et déjà penser à l’après-élections ? Quels messages adresser à la population et comment les faire passer ? Avec quels moyens ? (Voir mon site : « La situation du pays »).
    Interrogation des catéchumènes. Je me dépêche de rejoindre une de nos communautés où je vais choisir les catéchumènes qui se préparent au baptême. Toute cette semaine, je passerai successivement dans les différentes communautés. Autrefois, c’était le catéchiste qui choisissait les catéchumènes à partir de leurs notes de présences et de leurs connaissances. Ce qui était très limité et entraînait beaucoup de problèmes. Nous avons décidé de changer de façon de faire. D’abord, nous demandons au catéchumène de nous raconter un passage de l’Evangile et de nous faire prier. Puis nous lui demandons ce qu’il fait pour rendre service et aider les autres, pour les conseiller et leur faire connaître la Parole de Dieu. Avec les responsables, nous évaluons son engagement dans la communauté ; puis, avec ses parents et ses parrain et marraine, nous voyons comment il vit en famille, dans le quartier et à l’école. Pour les adultes, nous parlons surtout du mariage et du travail ; cela demande beaucoup plus de temps, mais nous semble plus vrai comme démarche, et permet aussi de mieux faire connaître ce qu’est la vie chrétienne et ses engagements. De plus, les différentes personnes concernées peuvent mieux jouer leur rôle et mieux connaître leurs responsabilités. Tous sont satisfaits de cette façon de faire. (Voir mon site, rubrique « Activités paroissiales »).

  • Dimanche 16 mai : Commission « Justice et Paix ». Rencontre diocésaine dans la paroisse de Nongo. Nous célébrons l’Ascension : « Les anges demandent aux disciples : pourquoi restez-vous à regarder le ciel ? ». Excellente occasion pour rappeler les exigences de nos engagements, avec le Christ qui « est avec nous jusqu’à la fin du monde » et la force du Saint Esprit. Joseph, un des formateurs, adresse la parole à toute l’assemblée et il a été très écouté. Ce qui fait qu’un certain nombre de personnes participent à la rencontre après la messe. Mais c’est la fin de l’année, la lassitude se fait sentir. Après le grand pèlerinage de Boffa, il y a toujours un temps d’arrêt. Et puis, la campagne électorale est commencée qui, à la fois, mobilise et inquiète les gens. C’est aussi la période des examens. Et comme l’action pour la justice et la paix est à la fois difficile et dangereuse, les volontaires ne se disputent pas. Nous passons une bonne partie de la réunion à re-motiver les participants.
    Le deuxième problème, c’est le passage de la théorie à l’action. C’est pourquoi nous travaillons à l’élaboration de plans d’actions, et concrets, pour chaque paroisse, en précisant les méthodes à utiliser, les moyens à prendre, les personnes sur qui s’appuyer, les groupes à aider successivement (un par mois), etc… Après cela, nous abordons la question de la transition, de la campagne électorale, des élections et comment y tenir notre place. (Voir « Justice et Paix » et « Situation du pays »).
    Ensuite, séance de travail pour la préparation des centres aérés, avec les responsables.

  • Samedi 15 mai : Formation des éducateurs. Aussitôt après la prière, je pars pour le collège de DIXINN où a lieu la formation des éducateurs pour nos centres aérés du mois d’Août. Nous avons une formation par mois avec, à chaque fois, un thème différent : la psychologie de l’enfant, les techniques d’animation, l’éducation des enfants, la place de la famille et de la communauté, le soutien scolaire. Aujourd’hui, ce sera : les droits de l’enfant, à partir d’un jeu que nous avons composé pour une formation et une mise à l’action des enfants. La formation les intéresse, surtout dans sa méthode à partir d’un droit.
    Mariage à la paroisse d’une chrétienne avec un musulman. Le mariage a été longuement et sérieusement préparé par les fiancés et aussi par les deux familles. C’est l’occasion de renforcer les liens entre les deux religions. Nous veillons à la participation de tous, et à intégrer les rites traditionnels du mariage. Mais il y a cependant une chose qui nous inquiète beaucoup : ces mariages deviennent de plus en plus, spécialement en ville, des occasions de se montrer et d’étaler sa richesse. Les familles s’endettent considérablement et le mariage perd son sens. Ensuite, les mariés ont de la peine à vivre. A cause de tout cela, ceux qui ont des moyens limités ne veulent pas se marier, par peur de la moquerie des gens. Cela devient un vrai problème.
    Réunion des catéchistes. Pendant que les gens partent au vin d’honneur, nous nous retrouvons avec les catéchistes pour préparer la retraite des catéchumènes. Je les remercie pour leur engagement.
    Il y a, là aussi, beaucoup de choses à voir et un certain nombre de blocages, spécialement par rapport à la formation religieuse. Les gens veulent baptiser leurs bébés, mais refusent la préparation au baptême. Ils veulent la première communion de leurs enfants, mais pas la retraite préparatoire. Alors que la formation est pour nous une priorité. Aussi bien au point de vue humain, dans un pays qui a vécu deux dictatures –avec tout ce que cela comporte de corruption , de violence, d’idéologie, de perte du sens civique et du sens moral- qu’au point de vue chrétien. Il faut tout reprendre à la base et il faudra beaucoup de temps pour que les choses changent. (Voir « Activités paroissiales »).

  • Vendredi 14 mai : Voyage.
    Je dois aller à une session « Justice et Paix » au Mozambique, mais depuis trois semaines il n’y a pas moyen de trouver un itinéraire valable depuis Conakry. Cependant, il faut bien se décider. A l’aller, je passerai une nuit à l’aéroport de Johannesburg, deux nuits en route au retour, et arrivée à Conakry à 2 heures du matin !
    Le soir, une rencontre et une messe dans une communauté de quartier sont prévues. Mais je suis trop fatigué. Je leur demande de faire la réunion entre eux et je rentre me coucher. Surtout que j’ai une journée très chargée demain.

  • Jeudi 13 mai : Réunion. Fête de l’Ascension. Elle n’est pas chômée en Guinée. Le matin, nous avons notre réunion de communauté habituelle, suivie d’une séance de travail avec Emmanuel pour préparer les activités de la paroisse. Ensuite, je travaille les documents que j’ai en retard. Je suis content car j’ai bien avancé.
    Nous avons décidé, malgré nos problèmes financiers, d’augmenter nos travailleurs, car la vie devient de plus en plus chère. Et nous nous débrouillons comme nous pouvons. Nous nous sommes arrangés avec un dispensaire catholique pour faire soigner nos travailleurs car même les médecins des dispensaires publics font payer les visites médicales et les médicaments sont hors de prix. J’ai pu trouver des lunettes convenables pour notre cuisinière (dans un stock que j’ai reçu et confié aux Sœurs de mère Térésa), car elle n’avait pas les moyens d’acheter des lunettes neuves.
    Messe de l’Ascension. Je pars de bonne heure pour préparer la messe du soir à la paroisse. Mais aujourd’hui encore, toute la circulation est bloquée. Cette fois-ci, c’est à cause d’un meeting politique. La campagne électorale commence ! Je suis bon pour faire 5 km à pied pour arriver à l’église. Comme tout le monde est en retard, ce n’est pas grave ! Cela ne nous empêche pas de prier. La chorale prend des chants connus de tous, au lieu de nous faire un concert, et la foule chante. Peu à peu, les choses avancent.
    Il y a longtemps que je n’étais pas venu dans ma paroisse, car j’étais sans cesse sur les routes. Après la messe, beaucoup de gens viennent me voir, aussi bien pour des problèmes personnels, matériels (depuis un mois, il n’y a pas de courant au presbytère, et pas moyen d’avoir un réparateur) que paroissiaux (baptêmes, mariages…), et surtout beaucoup de cas sociaux et de misères, auxquels il est toujours aussi difficile de réponde et aussi triste de ne pas pouvoir répondre.
    Au retour, nous partons à quatre, à pied à nouveau ; mais quelqu’un d’une autre paroisse qui me connaît nous prend en voiture. C’est très gentil, mais comme le bouchon n’est pas résorbé nous nous faisons dépasser par les piétons, et prenons deux heures pour rentrer.

  • Mercredi 12 mai : Education aux droits humains. Ce matin, je rencontre les éducateurs des différents foyers des enfants de la rue de la ville pour une matinée de formation sur les droits humains. Nous voyons d’abord comment ils ont utilisé le jeu que leur avais remis et expliqué il y a trois mois. A partir de là, nous tirons des conclusions pour mieux vivre avec les enfants et les jeunes dont nous avons la responsabilité. (Voir « Justice et Paix », et notre blog).
    J’aurais voulu retourner à la Communauté, mais je n’ai pas pu travailler hier sur Internet, je remonte donc en ville pour tenter ma chance. Entre les coupures, j’arrive à faire passer quelques mails. Et je peux prendre quelques contacts avec un responsable d’ONG de Nzérékoré, le vicaire général de Kankan, et le bureau du Projet hydraulique au sujet du creusage de puits et de forages. Puis une visite à l’atelier pour contacter les jeunes et essayer de ne pas couper les liens avec les formateurs.
    Et, pendant les coupures, j’ai avancé plusieurs dossiers.
    Le soir, avec Kennedy, nous parlons de MONGO où il part demain. Mais il est déjà tard, car pour finir la journée, nous sommes tombés sur un embouteillage monstre qui a duré plus de deux heures : des chauffeurs en voulant forcer le passage ont tout bloqué !

  • Mardi 11 mai : La technique n’est pas au point ! Tôt le matin, je pars à l’archevêché. Malheureusement dès mon arrivée le courant s’arrête et le serveur Internet est saturé. C’est beau la technique, quand ça marche ! Et comme elle ne marche pas souvent, nous sommes souvent bloqués. Ca nous laisse au moins la possibilité de nous rencontrer pour d’autres problèmes.
    Problèmes à « Savoir-Fer ».
    D’abord, nous nous retrouvons, les différents responsables de l’archevêché, pour la question des formateurs de l’atelier Savoir-Fer des enfants de la rue. Ils continuent à faire de l’opposition et à refuser les nouvelles orientations pour une plus grande responsabilisation et éducation des jeunes, pour des questions matérielles et de préséance. Il faut dire que, malheureusement, ils sont soutenus par des gens de l’extérieur qui veulent saboter le projet. Cela nous fait perdre inutilement beaucoup de temps et d’énergie et, hélas, ce sont les jeunes qui en subissent les conséquences. (Voir rubrique « Savoir-Fer »).
    Avec Bernard, nous continuons la mise au point de la vidéo sur le Centenaire de MONGO.
    Education aux droits de l’Enfant : UNICEF.
    Quand j’étais au Sénégal, nous avions composé des jeux sur les droits de l’homme et les droits de l’enfant. A Mongo, nous les avions adaptés et traduits en quatre langues (anglais, kissi, kono et mende) pour les utiliser aussi bien dans les camps de réfugiés que dans les villages guinéens. Je m’étais adressé à plusieurs organisations pour faire multiplier les jeux, sans succès. Arrivé à Conakry, nous nous sommes adressés à l’UNICEF, sans réponse. Le mois dernier, à Dakar, j’ai retrouvé les responsables de l’Unicef avec qui nous avions travaillé depuis les années 1990. Ils m’ont encouragé à relancer les choses. Aussi, ce midi je reprends contact avec eux. On verra ! (Voir rubrique « Jeunes »).
    Formation à la pastorale sociale.
    Nous avons mis en place des commissions paroissiales. Les gens sont motivés et ils ont besoin de formation. Ils sont d’ailleurs les premiers à la demander. Ce soir, après le travail, nous commençons donc un cycle de formation, en réfléchissant à la mise en place de petits projets de développement : comment faire pour qu’ils ne soient pas parachutés, mais naissent vraiment de la communauté et de la base ? Comment s’assurer qu’ils correspondent à un vrai besoin ? Comment ne pas se limiter à la seule dimension économique mais qu’ils visent à aboutir à un développement intégral de tout l’homme ? Comment arriver à une véritable participation des bénéficiaires ? Comment compter d’abord sur nos propres forces pour ne pas faire des gens des assistés et même des mendiants ? Comment organiser nos actions en fonction de nos possibilités ?
    Ce ne sont pas des questions nouvelles, mais il nous faut nous les reposer sans cesse. (Voir rubrique « Pastorale sociale »).

  • Lundi 10 mai : Conclusions de la session
    Le matin, je travaille avec le responsable diocésain et quelques membres de « Justice et Paix ». Je leur laisse un certain nombre de documents à partir de ma clé USB. J’insiste sur la nécessité de travailler avec tous, en collaboration avec les autorités, les responsables des autres religions et les ONG et associations de la ville. Ensuite, une séance de travail avec le vicaire général, adjoint de l’évêque (absent), puis avec le responsable de l’OCPH (Organisation Catholique pour la Promotion Humaine) pour une collaboration avec la Commission « Justice et Paix ».
    A midi, repas avec une dame venue de France qui, avec son association, soutient une paroisse du diocèse, NGOUEKE.  Elle est venue voir ce qui se passe sur le terrain.
    A l’aéroport, l’avion a 2 heures de retard. Puis il faut faire le plein de carburant, à partir de deux fûts en réserve. J’ai le temps d’acheter des fruits, qui sont meilleurs et moins cher qu’à Conakry. J’ai été très heureux de me retrouver dans cette région de la Forêt, au sud du pays, où j’ai passé dix années difficiles mais exaltantes, de 1996 à 2006 ; (Voir rubrique « MONGO »).
    A NZEREKORE, pour une fois j’ai eu le temps de regarder la télévision guinéenne et je suis complètement effaré. D’abord un film brésilien dans la haute société, puis le PMU (course de chevaux à Enghein) et tout de suite après les informations, le loto et un film indien avec bijoux, belles maisons, belles voitures… et après on demande aux jeunes Guinéens de rester chez eux et de ne pas partir à l’étranger ! Je suis pour la mondialisation, mais pas comme ça

  • Jeudi 6 mai : Problèmes de personnel. Nous célébrons la messe tous ensemble le matin. Puis je règle rapidement la question du chargeur de batterie de mon téléphone portable. L’ancien ne marche plus : il m’a lâché hier et la batterie est vide. Bernard m’avait déjà donné un téléphone en remplacement du mien, défectueux qui ne pouvait être réparé, malgré toute la débrouillardise des réparateurs. Aujourd’hui il m’apporte son chargeur. Heureusement, car je pars à NZEREKORE, au sud-est du pays, près de la Côte d’Ivoire, où j’aurais été complètement isolé. La batterie à peine rechargée, je reçois un appel de Winfried, mon successeur à MONGO, qui est venu dans la ville de GUECKEDOU où il y a du réseau, et il en profite pour m’appeler. Je lui passe alors Kennedy qui va aller assurer l’intérim à MONGO jusqu’en Septembre. En effet, Winfried va suivre une formation en sciences humaines à Strasbourg, pour ensuite travailler à la formation de nos grands séminaristes anglophones et francophones d’Afrique de l’Ouest. Mais nous avons de graves problèmes de personnel et pour le moment nous n’avons trouvé personne pour remplacer Winfried à Mongo. Ce n’est pas simple et ça me rend triste pour Mongo, cette paroisse où j’ai vécu dix années difficiles mais exaltantes et qui est un secteur très important que nous ne pouvons pas abandonner. (Voir rubrique « Spiritains »).
    Un retraité volontaire.
    Comme Bernard est venu, nous en profitons pour voir comment faire un DVD sur le Centenaire de Mongo, que je voudrais mettre sur mon site.
    Nous préparons le travail des jours suivants et parlons du projet hydraulique, qui est très important pour apporter de l’eau potable dans les villages. Mais le matériel est très ancien et complètement usé. Depuis quelques années, nous essayons de le bricoler, mais après de nouvelles réparations la foreuse et le compresseur viennent de nous lâcher. Et nous n’avons trouvé aucun financement pour acheter du nouveau matériel qui coûte évidemment très cher. Nous allons donc nous orienter vers le soufflage et l’entretien des anciens forages, ce qui est également très utile.
    Je rappelle que Bernard est un volontaire, formé et soutenu par le SCD (Service pour la Coopération et le Développement) venu travailler en Guinée à « Savoir-Fer », l’atelier de formation à la soudure pour jeunes de la rue et de familles nécessiteuses. Ancien enseignant de Collège technique catholique en France, il a maintenant atteint l’âge de la retraite et a décidé de rester travailler bénévolement avec nous. Nous le remercions car il nous aide beaucoup, en particulier au niveau information.
    Voyage à NZEREKORE.
    Ensuite, je me dépêche d’aller à l’aéroport où (moyennant finances bien sûr) j’ai pu avoir, au titre de l’OCPH, une place dans l’avion du PAM (Projet Alimentaire Mondial des Nations Unies) : 2 heures d’avion, à l’aise, c’est quand même mieux que 24 heures, serrés à quatre sur une banquette dans un taxi, dans la chaleur et la poussière, sur des mauvaises routes en pleine saison des pluies qui a maintenant commencé (Nous avons supporté un orage de plusieurs heures pendant la marche pèlerinage, en pleine nuit, qui nous avait complètement transpercés. Heureusement qu’il ne faisait pas froid et que nous marchions !)
    Dans les nuages, nous avons été fortement secoués car c’est un petit avion. Personnellement, je me sentais très à l’aise, car cela me rappelait mes nombreux voyages en bateau sur une mer agitée, mais ma voisine était beaucoup moins calme et j’ai essayé de la tranquilliser.
    Les prêtres ont envoyé quelqu’un me chercher, notre lieu de formation se trouvant à une quinzaine de kilomètres de l’aéroport. Et j’ai été heureux de revoir des confrères que j’avais déjà connus les deux années précédentes. La chambre était prête et j’ai commencé par me doucher et me reposer, avant de passer une soirée tranquille.
    Session « Justice et Paix ».
    Le lendemain, préparation de la session avec le responsable diocésain de Justice et Paix. Je rencontre aussi le vicaire général. Puis nous accueillons les participants à la session, la plupart venant de loin, sur des routes mauvaises. Nous faisons le tour de leurs activités, ce qui me permet de savoir où ils en sont. Puis, je leur demande quelles sont leurs attentes. A partir de là, nous élaborons ensemble le programme de la session.
    Le soir nous regardons ensemble et commentons les informations de la télévision (le diocèse possède un groupe électrogène : nous avons donc du courant).
    C’est la troisième fois que je viens à NZEREKORE pour une formation « Justice et Paix ». La première fois, surtout une information ; l’année dernière, c’était plutôt : comment mettre en place une Commission ; cette année, nous évaluons le travail de ces commissions, étudions les méthodes à suivre, les moyens à utiliser et repérons les personnes avec qui travailler. Nous apprenons à faire une analyse sociale pour agir sur les causes profondes des problèmes et faisons une première initiation aux méthodes d’action non violentes. Les participants sont moins nombreux que l’année dernière mais très engagés et nous travaillons intensément jusqu’au dimanche midi. Ensuite, les participants doivent retourner chez eux. A la messe, je redis l’essentiel de ce que nous avons travaillé, pour que toute la communauté soit au courant et puisse participer plus facilement aux actions qui vont être proposées.
    Comme l’avion ne retourne que demain à Conakry, j’en profite pour faire quelques visites amicales. Le soir, Jean-Pierre, actuellement directeur du séminaire, (nous avons beaucoup sympathisé lors de mes derniers voyages) m’emmène dans un restaurant manger de l’atiéké, un plat ivoirien que nous apprécions tous les deux.

  • Mercredi 5 mai : Une journée passée à ne rien faire. D’abord deux heures à la banque pour sortir l’argent de la paroisse. Ensuite, je voulais me mettre à Internet, mais impossible de travailler, le courant saute sans arrêt. Puis aller-retour à l’agence (depuis 5 jours) pour obtenir un billet pour Mapuko (Mozambique) où je vais participer à une rencontre panafricaine sur Justice et Paix et la mise en place du synode. Ce n’est pas encore aujourd’hui que j’aurai mon billet. Et au retour, il faudra que je passe au moins deux nuits à Dakar avant d’avoir un avion pour Conakry. Ce qui, finalement, n’est pas pour me déplaire.
    Une réunion de Communauté de quartier.
    Après tout ce temps perdu, coupé heureusement par des rencontres, je pars dans un quartier pour une rencontre de Communauté, suivie de l’Eucharistie. Cela me console, car la communauté marche bien. La responsable me fait un compte rendu clair de la vie de la Communauté et de ses différentes activités : réunions, visites dans le quartier, prières –en particulier pour les bébés, les malades et les morts- dans les différentes maisons, pour les chrétiens, mais aussi participation aux mêmes prières, par amitié, chez les musulmans.
    La grosse question actuellement, en cette période de « transition » avec révision de la Constitution et reprise en main de l’armée en vue des élections présidentielles, puis législatives, est la participation des chrétiens à tout cela (voir l’homélie de l’archevêque à BOFFA, et la rubrique « Situation du pays ») : la participation à la campagne électorale, la réflexion sur les programmes des différents partis, la supervision des élections, l’acceptation des résultats, etc…
    La Commission de pastorale sociale continue son travail d’assainissement du quartier. Cela demande du temps, car il faut travailler avec la voirie, les autorités locales et aussi mobiliser les musulmans, en passant par leurs imams.
    La Commission « Justice et Paix » a plus de mal à passer à l’action. Mais c’est général. Il faudra encore du temps pour que les choses se mettent en place.
    Quant à la catéchèse, elle se passe bien ; toutefois beaucoup de catéchumènes ne participent pas aux réunions de communauté, ce qui est très inquiétant. Et certains parrains et marraines ne suivent pas leurs catéchumènes. Nous préparons ensemble la retraite des enfants et les différentes étapes du baptême (la première semaine de juin).
    Toute la réunion se passe dans une ambiance très amicale. C’est réconfortant. Nous terminons par une messe fraternelle où chacun participe, en particulier pour partager la Parole de Dieu. Et un membre de la Communauté me ramène en voiture : pas besoin d’attendre un taxi de longues minutes, dans la nuit. C’est agréable ! (Voir Réunion de Communauté).
    Retrouvailles.
    De retour à la maison, je trouve Hermann, le curé de Boffa, et Kennedy, chargé du Noviciat, descendus à Conakry. Nous prenons le temps de parler ensemble et de partager nos joies et nos soucis. Bien sûr, nous échangeons nos idées sur le pèlerinage qui vient de se terminer et apprécions les améliorations qui ont été faites.
    Emmanuel nous rejoint plus tard. Il est allé régler le problème du paiement du logement d’un Nigerian, gravement malade, qui n’a pas pu travailler depuis longtemps et qui a donc beaucoup de dettes. Nous préparons son retour au Nigeria mais, là encore, ce n’est pas facile.

  • Mardi 4 mai : Reprise du travail. Après la retraite au Sénégal, la formation dans le Fouta et la marche pèlerinage, il est temps de se remettre au boulot. Il y a beaucoup de choses à préparer et à régler. D’abord, nous prenons un temps avec Emmanuel, le stagiaire, pour préparer les deux derniers mois de l’année scolaire où il va y avoir beaucoup de travail à faire pour conclure les activités des différents mouvements et groupes avant les vacances.
    Ensuite, j’enregistre mon homélie du pèlerinage sur cassette pour que Jocelyne puisse la saisir, et je vous l’enverrai dès que possible.
    Conseil économique.
    Le soir, après le travail, jusque tard la nuit, réunion du Conseil économique et du Bureau du Conseil paroissial. Là aussi, il y a beaucoup de choses à voir et nous nous séparons sans avoir épuisé l’ordre du jour… mais l’ordre du jour nous a épuisés ! En effet, il s’agissait d’abord de revoir tous les comptes rendus de l’année 2009, puis ceux de janvier à avril 2010, et enfin d’étudier le budget prévisionnel pour la fin de l’année. Avec toutes les activités qu’il y a sur la paroisse, cela fait beaucoup de choses à voir… et à prévoir.
    Et il restait toutes les questions pastorales : l’évaluation du Carême et du pèlerinage de BOFFA, des activités des jeunes, la question du baptême des bébés, la marche des communautés, des mouvements et autres groupes, le programme de travail pour mai et juin, etc… d’autant plus que je vais être souvent absent. (Voir la rubrique « Activités paroissiales »).

  • 1er mai : Il a été célébré dans le calme et la tristesse, suite au décès par accident sur la route de l’un des responsables les plus importants du pays. Avec beaucoup de courage, il avait mobilisé les travailleurs contre la dictature du président Lansana Conté. Les travailleurs se sont d’abord rassemblés au palais du peuple, avant de marcher jusqu’au cimetière pour un temps de prière et une visite de condoléances aux familles.
    Aux dernières nouvelles, certaines banques ont repris le travail.
    Incendie.
    Pendant que nous étions au pèlerinage, le feu s’est déclaré de nuit dans la menuiserie de la cour de l’Archevêché, et s’est répandu dans plusieurs menuiseries et autres entreprises plus importantes du quartier. Il faut dire que les installations électriques sont très anciennes et très déficientes, avec souvent des fils à nu. Les pompiers ont mis longtemps à venir et il n’y avait pas d’eau. Heureusement que les habitants du quartier ont faire la chaîne avec des seaux d’eau ! Et quand les pompiers sont arrivés, ils ont au moins évité que le feu ne se propage davantage. Ce qui nous fait de la peine, c’est que nous avions ouvert la cour de l’Archevêché à des petits artisans pour qu’ils forment des apprentis. Ils ont tout perdu et ce ne sera pas facile de les aider à redémarrer.
    Radios et journaux.
    Nous préparons les documents, articles et enregistrements du pèlerinage, pour les mails, sites, journaux et radios. C’est du travail, mais il ne faut pas traîner. Cela me laisse juste le temps de lire mes mails et les nouvelles du pays sur Internet, ce que je n’avais pas pu faire depuis une semaine. Le tout interrompu, mais c’est normal, par les appels téléphoniques, les visites et les réunions, prévues ou improvisées, rapides ou plus longues, parfois sans vraies raisons. Mais il est essentiel de rester calme et de ne pas s’énerver, pour être disponible envers ceux qui en ont le plus besoin et qu’il n’est pas toujours facile de repérer au premier abord.

  • Vendredi 20 avril – aamedi 1er mai : La célébration à BOFFA.
    Chaque matin, conférence suivie de questions ; travail en carrefours par paroisses/doyennés ; mise en commun et débat.
    Les jeunes.
    Egalement, rencontre des jeunes sur la mise en œuvre du message aux jeunes de l’évêque avec ses cinq points : 1) engagement dans l’Eglise ; 2) engagement dans la société, spécialement en cette période de transition ; 3) justice et paix (mise en œuvre du 2ème synode pour l’Afrique) ; 4) l’évangélisation : vivre tous ensemble et construire le pays selon les valeurs de l’Evangile ; 5) les problèmes et difficultés des jeunes : drogue, violence, chômage, etc…
    Cela nous permet de faire le point des actions menées, de les relancer et de les réorienter. Et aussi de mieux les organiser. En effet, il y a beaucoup de jeunes qui s’engagent, mais souvent à titre personnel. Il est important de les organiser pour un travail d’ensemble et plus d’efficacité. En plus des rencontres générales, les jeunes ont donc travaillé entre eux, avec beaucoup de courage et de dynamisme. C’est une grande espérance pour nous.
    Mais il reste qu’il nous faut revoir les secteurs où les jeunes s’investissent avec beaucoup de générosité. Car ils s’orientent surtout vers des cérémonies, des fêtes, des kermesses ou des compétitions de football. Et pour trouver des soutiens et du travail, lancer des projets de développement, ils ont trop tendance à travailler seuls et en ordre dispersé. Nous avons cherché comment assurer une coordination entre les organisations de jeunesse et les commissions diocésaines. Ce sera à suivre et à organiser. (Voir mon site, rubrique « Jeunesse »).
    Les après-midi sont consacrés à la prière : chemin de croix, célébration pénitentielles, etc…
    Et le soir, ce sont des soirées culturelles avec chants, danses, théâtres, pour présenter la réflexion et le message du pèlerinage d’une manière animée. (Voir les photos des pèlerinages passés dans l’album photos de mon site).
    Mais malgré toutes les préparations et l’organisation, il y a toujours des imprévus. Ainsi, le vendredi, le doyen des prêtres guinéens qui devait faire l’homélie est tombé malade. On m’a demandé de le remplacer au pied levé. Ce n’était pas évident, d’autant plus que le thème de la journée était plutôt ardu : La Croix Glorieuse. Je ne voulais pas faire une « belle homélie » théologique avec des envolées mystiques, mais rejoindre la vie des gens et donner un éclairage réaliste, mais positif et encourageant sur la situation actuelle du pays. Vu les réactions des gens, je crois que j’y suis arrivé.
    Le dimanche 2 Mai, grande célébration, en présence de nombreuses autorités, où la joie a éclaté avec chants, danses et procession d’offrandes. Et aussi une quête spéciale pour le grand séminaire. En effet, jusqu’en 2008, les futurs prêtres allaient se former au Mali. Mais bien sûr ici il nous faut faire fonctionner ce séminaire, et cela entraîne beaucoup de frais.
    Le retour à CONAKRY se fait sans problème. Nous avons demandé aux gens de rouler doucement et d’être prudents. D’ailleurs, pendant la marche et le pèlerinage, il n’y avait que de l’eau à boire. C’est une décision générale. Ce qui n’empêche pas quelques « irréductibles » d’aller boire au moins une bière en ville !
    Sur la route, nous nous arrêtons pour acheter des mangues dans les villages. C’est la saison, il faut en profiter.

  • Mercredi 28 – Jeudi 29 avril : La marche pèlerinage.
    Le soir, le vice-président vient me prendre pour rejoindre les marcheurs, jeunes et adultes, qui sont partis de CONAKRY depuis dimanche soir. A cause de la chaleur, nous marchons la nuit. Je suis frappé par la qualité du silence pendant la première heure de marche, pour permettre la méditation et la prière personnelle. Ensuite, pendant plus d’une heure, ce sont des prières spontanées et libres partagées par groupes (paroisses) grâce à un haut parleur portatif à piles, de la part des participants tout en marchant.
    J’ai remarqué aussi la grande discipline des marcheurs, trois par trois, chacun gardant sa place tout au long de la marche. Nous marchions sur la route nationale, et ainsi il n’y a eu aucun accident ni problème de circulation.
    Après les prières, avant les pauses, la marche se continuait par des partages en petits groupes, sur le thème du pèlerinage.
    Il a fallu bien sûr tout une organisation, et des bénévoles, pour assurer l’eau à boire et les repas à ces marcheurs (près de 2.000 personnes).
    L’entrée dans la ville de BOFFA a été très impressionnante. Déjà tout le long de la route, les populations musulmanes nous ont remerciés et encouragés ; nous ont offert des cadeaux, de l’eau et de la nourriture, et nous ont demandé de prier pour eux. A BOFFA, toute la population était sur la route ; les autorités (Préfet, sous-préfets, maires) nous attendaient à l’entrée de la ville. Chaque paroisse animait la marche jusqu’au sanctuaire, avec ses chants, ses instruments et ses danses, en rivalisant d’ambiance (les trois marches du sud, de l’est et du nord s’étant regroupées à l’entrée de la ville). C’était très émouvant. La marche s’est terminée par une prière autour de la grotte. Il était 10 heures, et après une nuit de marche on avait envie de manger… et de dormir. Car à 16 heures, le deuxième temps devait commencer, ensemble marcheurs et autres personnes nous ayant rejoints en voiture, par une messe présidée par le nonce.

  • Mercredi 28 avril : Problèmes économiques.
    Nous préparons des documents : comment lancer un projet de développement ? Et ensuite, les statuts et le règlement intérieur de l’atelier Savoir-Fer (voir mon site, rubrique « Pastorale sociale). Puis il y a les visites et les rencontres, le courrier mail et le travail sur Internet. Il nous faut trouver aussi le temps d’aller à la banque pour retirer l’argent nécessaire au pèlerinage. Ce n’est pas une mince affaire car les banques sont en grève depuis 15 jours, ce qui a posé des problèmes énormes aux gens et complètement désorganisé la vie économique. En effet, il y a deux mois, le nouveau gouvernement d’union nationale a décidé d’augmenter les salaires des fonctionnaires de 50 %. Il est vrai que les fonctionnaires étaient très mal payés : 400.000 francs guinéens par mois, soit 50 euros : ce qui ne permet d’acheter que deux sacs de riz. Où trouver tout le reste ? Mais comme je l’ai expliqué dans les « Nouvelles » à ce moment-là, ce sont les seuls fonctionnaires qui ont été augmentés, ni les autres salariés, ni surtout les gens du secteur informel qui sont la majorité, les chômeurs et les jeunes diplômés sans emploi qui sont beaucoup plus nombreux encore qu’en Europe, et plus encore les paysans (la Guinée est essentiellement un pays rural), sans parler des handicapés, des marginaux, des réfugiés et autres étrangers.
    Dans le même temps, le prix du carburant a presque doublé d’un seul coup. De ce fait, tous les produits importés ont augmenté en premier lieu, ensuite les produits locaux. Ce sont encore les pauvres qui payent la facture et se retrouvent encore plus pauvres… comme d’habitude.
    Cela a eu deux conséquences :
    1 – augmenter l’inflation et dévaluer encore davantage la monnaie guinéenne. Alors que les caisses sont vides. Vidées à la fois par les militaires qui avaient pris le pouvoir et ceux qui l’entouraient et à cause du blocage de toute l’aide économique par l’Union Européenne, les Etats-Unis, la Banque Mondiale et le FMI (Fonds Monétaire International) car ils travaillent ensemble !
    2 – les autres salariés, non fonctionnaires, ont demandé à leur tour des augmentations de salaire allant jusqu’à 100 %. L’usine d’alumine de Fria, l’une des principales sources des revenus du pays, est arrêtée. Et les employés de banque sont en grève, alors qu’ils sont déjà les mieux payés du pays. (Voir sur mon site la rubrique : « Situation du pays).
    A cela s’ajoute l’action des ONG étrangères. Les Guinéens qui ont la chance d’y entrer sont payés au prix international, ce qui se comprend. Mais alors, en deux ou trois jours de séminaire, ils reçoivent en « per diem » ou en frais d’hôtel, plus qu’un grand fonctionnaire pour un mois de travail. Résultat, c’est la course aux séminaires et les fonctionnaires du pays font tout pour quitter la fonction publique et entrer dans les ONG étrangères. Le monde n’est vraiment pas en équilibre, et les inégalités se retrouvent à tous les niveaux.

  • Mardi 27 avril : Rencontre avec C.R.S. : Cela fait longtemps que nous ne nous étions pas rencontrés pour une séance de travail. Nous réfléchissons à la formation d’observateurs indépendants qui s’avère de plus en plus difficile, au moins pour les présidentielles. Il est vrai que ce que nous avions prévu c’est l’observation des élections législatives, dont la date n’est pas fixée pour le moment.
    Pour les élections présidentielles, nous allons surtout travailler avec les différents chefs religieux, pas seulement les musulmans, mais aussi les sages des religions traditionnelles. Pour que, en restant évidemment impartiaux, et au-dessus de la mêlée, ils puissent délivrer un certain nombre de messages pour que la Campagne se passe dans la paix, que les élections se déroulent dans le calme et la clarté et que les gens acceptent les résultats. En effet, la Guinée est un pays de croyants et les responsables religieux sont écoutés, surtout quand ils parlent ensemble.
    Nous abordons ensuite le fonctionnement de l’OCPH (Caritas Guinée) et nous préparons l’évaluation que nous devons reporter au 11 Mai à cause de la surcharge d’activités que nous avons en ce moment.
    Nous cherchons aussi que faire pour soutenir les actions auprès des enfants de la rue.
    Nous aurions besoin d’une caisse de soutien, pour répondre aux cas les plus dramatiques qui se présentent à nous. Malheureusement, nous ne trouvons aucune solution pour avoir les fonds nécessaires.
    Nous examinons ensuite la situation des écoles de brousse du nord du pays, enclavé et abandonné (OUROUS et KOUNDARA) et préparons l’ouverture de nouvelles classes pour Octobre 2010.

  • Lundi 26 avril : Travail à la maison : classement et rédaction de documents.
    Réunion avec notre stagiaire pour faire le point de nos sessions au Sénégal.
    Rencontre avec le vice-président du Conseil paroissial, sur le déroulement de la marche pèlerinage vers Boffa.

  • Dimanche 25 avril : A la messe, je reprends la réflexion sur Justice et Paix, à partir des trois lectures. Comme il y a un certain nombre de chrétiens kissiens (originaires de la Forêt, où j’ai travaillé 10 ans dans les camps de réfugiés), le curé me demande de leur dire quelques mots dans leur langue, ce que je fais avec plaisir. Et j’ajoute aussi quelque chose en baga (la langue de Kataco) et en soussou (la langue de Boffa) où j’ai également travaillé. Pas de jaloux !
    A la fin de la messe, une ONG du quartier vient présenter son action de développement et elle reçoit le soutien de la communauté.
    La veille au soir, je suis allé dormir au Centre des Handicapés, ce qui m’a permis de parler avec Arnaud et Marie-Anne de notre vie en Guinée et de nos différentes activités : une soirée très agréable.
    Retour à Conakry sans problème, mais toujours autant de barrages militaires ! A mon arrivée, je suis heureux de trouver Emmanuel notre stagiaire, revenu du Sénégal par la route : trois jours de voyage.

  • Vendredi 23 au Dimanche 25 avril : Session « Justice et Paix ». Nous commençons par faire le tour des commissions (cinq paroisses du doyenné) pour connaître et évaluer leurs activités. Je leur demande les sujets qu’ils voudraient voir aborder. C’est un temps important pour moi, pour nous accueillir, nous connaître et partir de ce qui se fait déjà. Et aussi pour répondre aux préoccupations et problèmes des participants.
    Le lendemain, le travail est très approfondi et donc aussi plus long. En effet, le FOUTA DJALLON est une région essentiellement musulmane. Les chrétiens sont très minoritaires, mais avec des postes de responsabilité et un niveau de formation supérieure à la moyenne, ce qui permet d’aller plus loin dans la réflexion, même si certains ont souvent tendance à être longs. Il me faut canaliser les débats… ce que chacun accepte sans difficulté.
    A côté des Guinéens, il y a un couple de jeunes volontaires français, envoyés par l’ONG Guinée Solidarité, et qui travaillent à la formation de jeunes handicapés en couture, réparations de machines à coudre, etc.. Il y a aussi un enseignant camerounais. Et un Guinéen musulman qui enrichit notre réflexion religieuse du point de vue de l’Islam, que je vous enverrai d’ailleurs sans tarder.
    J’assure donc la formation de base. Qu’est-ce que Justice et Paix ? Quels sont les problèmes et les situations d’injustice, de manques de paix autour de nous (enquête) ? Que nous disent la Parole de Dieu (chrétiens et musulmans) et la vie des prophètes et de Jésus ? A partir de là, quelles actions mener.
    Dans un deuxième temps : Comment mettre en place une commission « Justice et paix », et comment travailleur : plan d’actions, moyens, méthodes, calendrier ; avec qui agir ? Comment ? Programmation et Evaluation, etc…
    A partir de là, nous pouvons approfondir un certain nombre de questions : 1) Le message final du 2ème Synode pour l’Afrique ; 2) Comment faire un analyse spéciale (voir le document : « Agir sur les causes »). Initiation aux méthodes non violentes (Non-violence active dans la ligne des Gandhi, Martin Luther King, Desmond Tutu, etc…) à la suite de ce qui se fait au Rwanda, au Congo ou au Togo, par exemple. Le travail dans les prisons. Différence et coordination entre Justice et Paix et Pastorale sociale, etc….
    Mais ce qui retient spécialement notre attention, c’est la période de transition que nous vivons actuellement dans le pays. Comment revoir les listes électorales, comment avoir une campagne électorale pacifiée et respectueuse des autres, comment avoir des élections libres et transparentes et que les gens acceptent les résultats sans révolte ni violence, etc… Et aussi, que doivent faire les chrétiens dans tout cela ? Comment nous situer face aux partis, aux religions et aux ethnies. Nous préparons quelques notes que je vous enverrai et que nous essaierons de partager la semaine prochaine au pèlerinage diocésain de Boffa.

  • Vendredi 23 avril : Tôt le matin, je pars à la gare routière, pour être sûr d’avoir une place. Ensuite, il faut attendre que le taxi soit plein pour partir (10 personnes). Un vieux me salue très gentiment, en me disant : puisque nous allons voyager ensemble, il faut que nous fassions connaissance. Je me présente, mais il a de la peine à croire que j’ai passé presque toute ma vie en Afrique. Il me dit : « Puisque tu es blanc, tu viens de France ». C’est logique !
    Le voyage se passe bien, malgré les barrages des militaires où il faut à chaque fois descendre et aller présenter ses papiers… et même le carnet de vaccinations (mais ça, c’est seulement pour les étrangers !). Tout le monde se plie à ces formalités avec résignation, en sachant qu’elles n’ont comme seul but que d’extorquer de l’argent aux passagers qui ne sont pas en règle !
    A l’arrivée, je suis bien accueilli par Alphonse, le curé que je connais, puisque je l’avais eu en formation au Sénégal dans les années 90.
    A la prison de MAMOU. Avec la Légion de Marie, la Communauté Sant Egidio et la Commission de « Pastorale sociale », nous allons apporter aux prisonniers un repas et des habits récoltés pendant le Carême. Pour le repas, nous avions apporté 14 plats, mais arrivés devant les prisonniers il n’y en a plus que 13. Les gardiens se sont servis au passage… ce qui, malheureusement, arrive régulièrement, malgré nos remarques et nos réactions. On me donne la parole devant tous les prisonniers rassemblés dans la cour. Après les salutations et les encouragements, je leur demande d’organiser leur vie en commun et de laisser toute lutte de pouvoir et exploitation des plus faibles, pour pouvoir vivre en paix ce moment très difficile. Je leur demande de réfléchir à leur situation et d’en tirer les conséquences pour préparer leur vie future. Alphonse dit sa tristesse de voir des gens dans cette prison depuis plusieurs années sans être jugés. Mais aussi de voir des récidivistes revenir en prison pour la 3ème et 4ème fois. Ce qui nous pose question sur le suivi des prisonniers, en prison et à leur sortie.

  • Jeudi 22 avril : A l’archevêché, après ces dix jours, du travail m’attend, avec des tas de problèmes à régler et de documents en attente. Ca se réglera au fur et à mesure. Mais je suis très heureux de l’accueil qui m’est fait et des nombreuses salutations après cette absence pourtant courte.
    Rencontre avec « Paix et Développement ». Il me faut rester disponible en même temps aux personnes qui se présentent. D’abord, une responsable de l’ONG canadienne « Paix et Développement », venue visiter les associations qu’ils soutiennent en Guinée. Bien sûr, elle cherche à mieux comprendre les réalités du pays, ce qui n’est pas toujours facile. Nous parlons aussi de nos projets, en particulier les Centres aérés des enfants pendant les vacances, et la formation d’observateurs indépendants pour les prochaines élections.
    Entre les coupures de courant, j’essaie de lire mon courrier sur Internet. C’est très lent et en plus je ne peux plus enregistrer mon courrier. Le serveur Yahoo ne fonctionne plus depuis un mois.
    Départ impossible. Deuxième problème à régler : un couple libérien était venu en Guinée, dans l’espoir de partir pour les Etats-Unis. Ils se sont adressés à un passeur qui, bien sûr, a disparu avec toutes leurs économies. Ils se retrouvent en prison. La Communauté Sant Egidio les a soutenus et a réussi à les faire sortir. La femme, infirmière, a voulu travailler dans un clinique, mais ce qu’on lui proposait ne suffisait même pas à payer son transport. Découragés, ils veulent rentrer au Liberia. Mais là aussi, il faut de l’argent ! C’est chaque jour que nous rencontrons des gens qui quittent leur pays à cause de tous les problèmes qu’ils rencontrent et vont tenter leur chance ailleurs. Et là, ils se retrouvent dans des situations impossibles.
    Réception du Nonce. Le soir, réception organisée par le Nonce pour le 5ème anniversaire de l’élection du Pape Benoît 16. Cela permet au moins quelques rencontres intéressantes pour notre travail : l’ambassadeur des Etats-Unis, la représentante de la Croix Rouge, etc… Les discours du Nonce et du Ministre des Affaires étrangères de Guinée me semblent intéressants. Je demande pourquoi la radio et la télévision ne sont pas là pour répercuter le message. On me répond que ce n’est pas la tradition, mais que pour la messe de samedi la télévision sera là. Je me demande où sont nos priorités. Il me semble qu’il aurait mieux valu diffuser la réflexion sur la situation du pays et les appels pour plus de justice sociale et pour des élections claires, dont les résultats seront acceptés dans la paix, après une Campagne électorale sans violence, si possible, plutôt que de diffuser une messe à des auditeurs dont plus de 90 % sont musulmans. Ce qui me choque aussi, c’est que cette réception ait lieu dans un grand hôtel de la place, avec une profusion de nourriture beaucoup trop sophistiquée et trop abondante. Bien sûr, les serveurs, les policiers et même un certain nombre d’invités repartiront avec des sacs plastiques bien remplis, mais on aurait pu utiliser tout cet argent pour des choses plus urgentes et plus importantes, malgré tout le respect que je porte à Benoît 16 !
    Rencontre des curés… en voiture. A l’aller comme au retour, les trois curés de notre secteur, nous étions dans la même voiture. Nous en profitons pour parler de notre travail, car il n’est pas aisé de nous retrouver ensemble, avec nos multiples occupations. Nous parlons en particulier de plusieurs nigérians qui veulent, eux aussi, rentrer chez eux, ou qui sont sérieusement malades et n’ont pas les moyens de se soigner. Ce n’est pas facile de trouver de l’aide et nous regrettons beaucoup que leurs différentes ambassades ne fassent rien pour eux. Elles ne veulent pas les écouter, même pas les rencontrer.
    Après la réception, il me faut encore préparer tous mes bagages et documents pour la session « Justice et Paix » que je commence demain à MAMOU pour tout le secteur du FOUTA. Heureusement, pendant la journée j’ai réussi, entre les nombreuses coupures de courant, à photocopier ce dont j’avais besoin.

  • Mercredi 21 avril : Dès 5 heures, je me rends à l’aéroport pour être sûr d’être pris. Les bureaux ne s’ouvrent qu’à 6 h 30. Après plusieurs vérifications, mon billet est accepté. Mais, au moment du départ, nouvelle alerte : le billet est refusé. Finalement, on m’en donne un autre et je peux partir.

  • Samedi 17 avril : Education aux droits humains. Nous nous séparons après une dernière Eucharistie et un adieu à toute l’équipe du Foyer de Charité qui nous a très bien pris en charge, comme d’habitude. J’ai le temps, avant de prendre l’avion, de rencontrer les amis du CAEDHU (Centre Africain pour l’Education aux Droits Humains). Nous avons beaucoup travaillé ensemble, de 1990 à 1996, quand j’étais à St Louis du Sénégal. Ils viennent de rééditer en l’adaptant le jeu sur les droits des enfants. Nous parlons ensemble de nos divers engagements et de nos actions en Sénégal et en Guinée (Voir mon site, rubrique « Justice et Paix »).
    Pas d’avion. Je me hâte de partir à l’aéroport… pour rien, puisqu’il n’y a pas d’avion ! Je n’ai vraiment pas de chance quand je viens au Sénégal ! L’année dernière, c’est la Compagnie Air Sénégal qui avait fait faillite ; cette année, c’est le nuage de cendres venu d’Islande.
    Bien sûr, j’avais de nombreuses activités et déjà la rencontre diocésaine de « Pastorale sociale », le dimanche matin à Conakry. Mais ça ne sert à rien de s’énerver. Je me dis que ça va me faire des jours de repos supplémentaires. Ce n’est pas du luxe. Et le frère Yvon, ainsi que Jeanne, la secrétaire, vont s’occuper de mon billet. En effet, comme la situation ne s’améliore pas en Europe et que le vol suivant annoncé pour le mercredi me semble très hypothétique, je préfère prendre un autre billet sur la compagnie Air Mali. Circulant en Afrique, elle n’a pas de problème de nuage ! Mais là, il faut se débrouiller pour avoir une place dans le troisième avion, les deux premiers (dimanche et lundi) s’étant remplis déjà pendant que nous étions en retraite.
    Rencontres à Dakar. Comme la plupart des confrères sont encore là, nous prenons le temps de parler de nos différentes activités et de partager nos soucis et nos espoirs.
    Je passe aussi dans nos deux maisons de formation, où je partage le repas, pour rencontrer les jeunes que j’ai connus en Guinée, à Mongo, à Boffa ou au noviciat. Au philosophat, nous travaillons avec Martin sur son mémoire sur la non-violence. C’est une question très importante pour nous et je lui avais envoyé un certain nombre de documents. Au théologat, avec Daniel, nous parlons de la paroisse d’OUROUS dont il est originaire, et des écoles de brousse que nous voulons lancer dans le secteur bassari, ses parents. (Voir mon site, « Nouvelles » du 12 au 14 Mars). Avec Blaise, guinéen qui a fait son stage à Mongo, qui va être ordonné prêtre en Juillet et partir travailler au Brésil, nous parlons surtout du travail missionnaire, des communautés de base, de justice et paix, et des relations à intensifier en direct, sans passer par l’Europe, entre Amérique du Sud et Afrique. (Voir mon site, rubrique « Activités paroissiales ».

  • Mardi 20 avril : A midi, je retourne chez Gisèle, du CAEDHU, avec le directeur du grand séminaire. Cette fois-ci, nous parlons surtout de la formation des séminaristes. Education aux Droits de l’Homme, mais aussi formation en français que Gisèle apporte en particulier aux séminaristes étrangers.
    Une entreprise familiale. Nous en profitons pour visiter la petite entreprise de fabrique de jus de fruits et sirops que les enfants de Gisèle ont lancé depuis 6 ans. Ce n’est pas facile de démarrer une telle activité, mais ils le font avec beaucoup de courage et de sérieux, en particulier au point de vue hygiène, pour fournir des produits de qualité, qui sont d’ailleurs contrôlés régulièrement. Sylvie, médecin nutritionniste, est bien placée pour cela. Ils ont maintenant plus de 20 employés.
    Droits de l’enfant dans les écoles. Au cours du repas, Minouche vient nous rejoindre. Elle est responsable de l’UNICEF pour le Sénégal. Nous avons beaucoup travaillé ensemble pour les droits de l’enfant quand j’étais à St Louis du Sénégal. Nous sommes heureux de nous revoir et de parler un peu ensemble. Minouche continue à soutenir le CAEDHU et ils ont obtenu du Ministère que le jeu sur les droits de l’enfant soit remis dans toutes les écoles. Cela suppose un énorme travail de formation des enseignants, après avoir mis au point une pédagogie adaptée.

  • Lundi 12 avril : Fin de la visite. La journée se passe en rencontres. Et le soir, rencontre générale avec nos trois responsables venus de Rome qui, pendant quinze jours, ont visité toutes les communautés de Mauritanie, Sénégal, Guinée Bissao et Guinée Conakry. C’était une grande joie pour nous de les rencontrer personnellement. Mais nous apprécions beaucoup également d’avoir leurs réactions et leurs propositions d’action. Nous aurons l’occasion d’y réfléchir en profondeur.
    La retraite. Aussitôt après, nous entrons en retraite : une semaine de prière et de silence. Le prédicateur, Christian de Mane, est un ami de longue date. Il m’a connu, avec toute ma famille, lorsque j’étais élève à Dakar, dans les années 50 Et nous nous sommes retrouvés ensuite au Congo Brazzaville.
    Cette année est le 300ème anniversaire de la mort de notre fondateur, Claude POULLART DES PLACES. Christian nous fait prier à partir de la vie et des écrits de notre père Claude. Ce qui permet de revoir nos engagements avec les pauvres et notre engagement missionnaire, sans oublier notre vie de prière et notre vie communautaire. Et je peux aussi décompresser un peu, même si une semaine de repos est insuffisante. Heureusement que les congés sont pour bientôt.
    Le vendredi soir nous terminons ce temps de prière par une fête fraternelle. En effet, cette retraite nous donne aussi l’occasion de nous retrouver tous ensemble chaque année et de partager soucis et joies, et ça nous renouvelle en courage avant de retourner à nos engagements.

  • Lundi 12 avril : Le matin, travail à Internet et envois de différents mails.
    L’après-midi, nous partons au « Cap des Biches », à 20 km environ de Dakar, dans un Foyer de Charité pour une semaine de silence, de réflexion et de prière (retraite). Cela nous fera du bien. Mais nous nous retrouvons d’abord pour une dernière rencontre avec nos trois responsables internationaux venus de Rome, qui ont visité toutes nos communautés et rencontré personnellement chacun des confrères. Ils nous donnent les conclusions de leur visite.
    Puis, nous entrons dans le silence et la prière.

  • Dimanche 11 avril : Je décompresse, je n’ai même pas le courage de sortir et je reste couché toute la journée. J’en avais besoin !
    Le soir, nous nous retrouvons avec plusieurs personnes qui nous aident pour les questions économiques. Cela me permet de parler longuement avec le responsable du Conseil Economique du Sénégal, ancien responsable national puis membre de l’équipe internationale de la JEC (Jeunesse Etudiante Chrétienne). Nous échangeons longuement sur l’engagement des laïcs dans la société, en particulier les cadres. J’ai aussi la joie de revoir Marie-Angélique SAVANE, une sociologue sénégalaise réputée ; nous avions travaillé ensemble quand j’étais à St Louis, de 1980 à 1996.

  • Samedi 10 avril : Dernière journée avec nos responsables. Nous avons encore des choses à nous dire et ils doivent également rencontrer l’archevêque. Pendant ce temps, je travaille avec des sœurs qui tiennent une école primaire et un jardin d’enfants. Je leur présente trois jeux qu nous avons composés sur les droits de l’enfants et les droits humains. Elles vont pouvoir les utiliser avec leurs élèves.
    Ensuite, nous mangeons tous ensemble, avec l’archevêque, dans une ambiance très décontractée. Nous profitons de ces moments pour nous détendre, blaguer et même nous amuser. Cela améliore nos relations et nous permet de travailler ensemble dans de meilleures conditions.
    Nous partons ensemble à l’aéroport pour le Sénégal. A l’arrivée, grâce à un confrère, nous sommes reçus au salon d’honneur. J’avoue que je n’y suis pas à l’aise et que je préfère l’ambiance plus populaire de l’aéroport, où on peut sentir vivre le pays et les gens. Le seul avantage, c’est que nous attendons encore plus longtemps nos bagages… mais assis dans un bon fauteuil, c’est vrai. Nous sommes heureux d’arriver à la maison.

  • Vendredi 9 avril : Nouveaux « problèmes » financiers. Cette fois-ci, ce sont les comptes pour la construction du presbytère. Nous dépendons des gens qui nous aident et nous leur sommes reconnaissants. C’est normal qu’ils contrôlent l’utilisation de leur argent, mais il y a vraiment trop de formalités. Du moment que les bâtiments sont là et les activités visibles !
    Je voulais rentrer me reposer un peu, mais je me fais accaparer par un certain nombre de vrais (et faux) problèmes. J’ai juste le temps de passer par la communauté pour saluer nos Supérieurs Jean-Paul et Yves-Marie qui rentrent d’une longue tournée dans toute la Guinée pour visiter les confrères. Je les installe et je repars aussitôt pour une rencontre dans une de nos communautés de quartier, où nous parlons longuement de la vie du quartier, de la préparation des élections, des personnes à aider et aussi de la façon dont nous avons vécu le Carême et les fêtes de Pâques. Et d’autres choses encore.

  • Jeudi 8 avril : Toute la journée se passe à préparer le compte-rendu financier et d’activités de nos deux Commissions pour C.R.S. (Secours catholique américain). C’est normal et il faut bien le faire. Mais cela ne me plaît pas beaucoup, ça prend beaucoup de temps et c’est compliqué. Il y a toujours une pièce qui manque !

  • Mercredi 7 avril : Retour à l’archevêché : Réunion du Bureau de l’atelier des enfants de la rue. Nos problèmes ne sont pas terminés. Ceux qui ont lancé le projet et nous ont demandé de le reprendre n’acceptent pas les orientations que nous lui avons données, et à coups de mails ils montent la tête aux formateurs contre le coopérant actuel et le bureau. Nous avons fait preuve de patience pendant trois mois, mais si cela continue il va falloir prendre des décisions, ne serait-ce que pour le bien des jeunes.

  • Lundi 4 avril : Fête de l’indépendance du Sénégal.
    Je vis en communion avec ce pays où j’ai passé mon enfance et ma jeunesse. Et j’ai travaillé de 1979 à 1996 à Dakar mais aussi dans toute la région orientale (Tambacounda) et surtout le nord de Saint Louis jusqu’à Matam.
    J’ai décidé de rester tranquille à la maison, mais comme c’est férié de nombreux amis, chrétiens et musulmans, viennent nous souhaiter de bonnes fêtes de Pâques.
    Bernard m’a prêté sa clé Internet. Je travaille le soir (messages et documents) mais la connexion est tellement lente, comme toujours, que je suis à l’ordinateur jusqu’à 2 heures du matin. C’est dur de me lever ; cependant de nombreuses activités m’attendent à l’Archevêché et il me faut partir dès 6 h 30 si je veux avoir un taxi collectif et éviter les bouchons. Je trouve de nombreux dossiers, laissés en attente pendant toute la Semaine Sainte et surtout il y a les personnes à accueillir et les problèmes à résoudre. A midi, nous mangeons avec l’archevêque et un prêtre italien professeur au grand séminaire. La formation des futurs prêtres nous inquiète beaucoup.
    Puis, c’est une rencontre avec le délégué pour la Guinée de la Communauté Sant Egidio, venu de Rome, sur toutes les questions de la paix en Guinée. Ensuite, il y a tous les documents à tirer, puis les différentes rencontres à organiser avant mon départ pour le Sénégal. Enfin, je pars prendre livraison d’une voiture offerte par un ami coopérant, membre d’une communauté internationale. Cela nous rend un énorme service, car même si nous circulons la plupart du temps avec les transports publics, toutes nos activités font que une voiture pour trois ce n’est pas du luxe ! Ce n’est pas une voiture neuve mais elle est en très bon état ; quant à nos deux anciennes voitures,… elles sont complètement pourries et nous n’essaierons même pas de les revendre car il faudrait d’abord les réparer et cela nous coûterait bien plus cher que le prix que nous pourrions en tirer !

  • Samedi-Saint 3 avril : Le matin, je décide de rester à la maison, pour recevoir tranquillement un certain nombre de personnes : la nouvelle responsable du groupe charismatique, des futurs mariés, des personnes gravement malades et perturbées psychologiquement. Cela me prend toute la journée. Heureusement que j’avais préparé les cérémonies à l’avance.
    Le soir, nous allumons le feu sur le terrain de football (c’est de la terre, on ne risque pas de brûler l’herbe). La cérémonie commence par un échange sur la signification du feu, à laquelle les enfants participent activement, et le sens du Christ, Feu et Lumière venu apporter le Feu de Dieu sur la terre et Lumière du monde. Les lectures de la Veillée ne sont pas lues mais racontées (proclamées par cœur), ce qui leur donne une tout autre valeur. Il n’y a pas de baptême d’adultes, mais seulement de bébés. En effet, la catéchèse a commencé avec retard et les catéchumènes ne sont pas prêts. On verra cela au mois de juin. Ce qui ne nous empêche pas de fêter la résurrection dans la joie ! Et après la célébration, nous restons plus d’une heure à chanter et danser en l’honneur du Christ Ressuscité.
    Le dimanche de Pâques, comme le samedi, ce sont les danses au moment du  « Gloire à Dieu », de l’Evangile, au « Sanctus ». Et une grande procession des offrandes que nous partagerons ensuite avec les pauvres et les malades. Nous baptisons quatre bébés, avec l’engagement de toute la communauté. A la fin de la messe, nous bénissons les noix de cola. La cola est très importante en Afrique de l’Ouest ; elle est signe d’accueil et d’engagement, et présente à toutes les cérémonies officielles, mariages, etc… Aujourd’hui, les enfants iront offrir la cola aux personnes âgées des autres ethnies et religions pour leur souhaiter une bonne fête de Pâques de la part des chrétiens.
    Bien sûr, nous vivons cette fête dans la joie, mais aussi dans une certaine incertitude quant à l’avenir du pays, mais elle nous permet au moins de raviver notre espérance et chercher à prendre un nouveau départ, en cette période de transition où il nous faut reprendre les choses en mains, reconstruire le pays spécialement au niveau économique, réorganiser l’armée et assurer une campagne électorale dans la paix. C’est tout un programme. Voir les homélies de Pâques que je vous ai déjà fait parvenir.
    Après la messe, nous inaugurons le 1er étage de notre presbytère que l’on vient de terminer, en présence des autorités et des nombreux donateurs guinéens, de la paroisse ou d’ailleurs. Nous commençons par une prière, à partir de l’histoire de Zachée, et la bénédiction de la maison, suivies de l’apéritif. L’entrepreneur a très bien travaillé alors que jusqu’à maintenant il nous reste encore le tiers des dépenses à rembourser. Nous allons recueillir l’argent peu à peu. L’entrepreneur a offert tout le mobilier, ce dont nous lui sommes très reconnaissants. Mais je continue à penser que la maison est trop grande et trop luxueuse pour un presbytère. Et je regrette que l’argent de la paroisse soit utilisé surtout pour des constructions mais très peu pour les actions de développement, les Commissions, et l’aide aux pauvres, qui reposent essentiellement sur des dons personnels.
    Ce Jour de Pâques, nous sommes invités un peu partout. Nous prenons le repas de midi chez le vice-président de la paroisse qui a invité ses parents et voisins, mais aussi les jeunes et l’imam du quartier. C’est très sympathique et j’ai de la peine à le quitter pour aller saluer les autres familles.

  • Vendredi 2 avril : Questions autour du presbytère.
    Je suis en train de préparer les cérémonies de Pâques, quand le responsable du Conseil Economique m’appelle pour qu’on aille retirer de l’argent à la banque afin de continuer le travail au presbytère. Cela me pose beaucoup de problèmes. Il est vrai que l’entrepreneur, un chrétien de la paroisse, s’est beaucoup investi dans ce travail qu’il a fait vite et bien. Il a lui-même fait l’aménagement : chambres, salon et même une télévision… en espérant qu’il y ait du courant ! C’est un bâtiment à deux étages, à mon avis beaucoup trop grand et on n’avait pas besoin de tout cela. Je ne peux pas dire grand-chose, puisque les chrétiens eux-mêmes ont cotisé. Et je comprends leur réaction : ils sont une minorité, ils ont besoin de se sentir reconnus et de gagner le respect des gens. Mais je préférerais quand même qu’ils engagent l’argent de la paroisse plutôt dans la formation des catéchumènes mais aussi des cadres, dans l’aide aux pauvres et les actions de développement, sans parler de justice et paix !
    A mon retour, je me dépêche de faire les comptes de la communauté spiritaine, car c’est la fin du trimestre. (Pour la paroisse, c’est un conseil économique de laïcs qui s’en occupe… bien d’ailleurs).
    Chemin de Croix dans la ville.
    Impossible d’ouvrir Internet ; je vais me coucher jusqu’à 14 h. et je pars à la paroisse. A 14 h 30, nous commençons le Chemin de Croix dans le quartier. Il y a beaucoup de monde. Les musulmans nous regardent passer avec respect et nous remercient. Certains nous demandent de prier pour eux. L’église est située en plein milieu du marché ; pendant notre passage, les activités s’arrêtent sans que nous n’ayons rien à demander, et sans policier. Ce respect, les uns pour les autres, est habituel mais il me touche toujours beaucoup.
    Nous continuons la célébration. Pour la Vénération de la Croix (une grande Croix posée par terre, sur une natte), les gens viennent poser les mains avec respect, en chantant des chants de deuil. Et après la célébration liturgique, nous restons pour une veillée mortuaire en l’honneur de notre grand frère Jésus qui est mort, comme cela se fait ici.
    C’est la première fois que cette cérémonie se déroule ainsi dans cette paroisse, mais tout le monde reste… et apprécie.

  • Jeudi 1er avril : Le matin, travail à la maison pour avancer dans tout ce que j’ai en attente. Je termine de revoir en particulier la conférence sur l’Evangélisation que j’ai faite à Mongo et que je vais mettre sur mon site. Le soir, à la paroisse, messe du Jeudi-Saint, comme dans toutes les paroisses du monde, suivie de l’adoration jusqu’à minuit.

  • Mercredi 31 mars : Travail à l’Archevêché.
    De spécial aujourd’hui, je note une longue conversation téléphonique avec des journalistes du Vatican auxquels j’explique comment nous allons célébrer Pâques en Guinée cette année, et dans quel contexte. Vous en aurez un compte-rendu dans ces « Nouvelles ».
    Aujourd’hui, j’ai 70 ans.
    A noter aussi une rencontre des formateurs de nos deux commissions (voir mon site, rubrique « Justice et Paix » et « Pastorale sociale »). En effet, nous avons beaucoup travaillé et évolué tout au long de cette année. Il est nécessaire de faire le point et d’évaluer notre travail et aussi de commencer à penser comment nous allons travailler l’année prochaine.

  • Mardi 30 mars : Rencontre des prêtres.
    Comme chaque année, nous nous retrouvons tous les prêtres autour de notre archevêque pour la journée. Toute la matinée, nous travaillons ensemble. En premier lieu, nous réfléchissons à la période de transition que nous vivons actuellement (Voir le document L 69 sur la situation du pays). Nous relevons surtout l’importance pour l’action catholique d’intervenir en tant que telle, à cause de son indépendance, de son souci du bien commun et de la confiance qu’on lui fait, au souvenir de toutes les actions déjà menées. Ensuite, nous réfléchissons à notre responsabilité en tant que prêtres et aux actions que nous avons à mener. Nous signalons en particulier l’importance pour nous d’intensifier nos relations avec les imams, pour établir entre nous des liens d’amitié. Ainsi, si des problèmes ou des tensions apparaissent, nous nous connaîtrons suffisamment pour être unis et agir ensemble, devant les difficultés. Nous voyons ensuite quelle formation donner aux chrétiens pour qu’ils puissent jouer leur rôle dans la situation actuelle tellement délicate et tenir leur place dans le pays. (Voir le document : «élections, transition », envoyé mi-mars).
    A 16 heures, nous nous retrouvons à la Cathédrale avec une nombreuse assistance, venue prier et participer à la messe chrismale où l’évêque va bénir les huiles saintes qui serviront toute l’année pour les sacrements de baptême, de confirmation, des malades et de l’ordination des prêtres.
    Après l’Eucharistie, un repas offert par l’une des paroisses de la ville nous réunit tous ensemble, dans la joie.

  • Lundi 29 mars : Retour à l’Archevêché. J’essaie de travailler sur Internet, mais c’est d’une lenteur extrême et le courant coupe sans cesse, ce qui n’arrange rien. Je perds vraiment mon temps !
    Un journaliste de la Revue « Jeune Afrique » que j’ai connu quand il travaillait avec les réfugiés et que j’étais moi-même à MONGO, vient me voir à propos de la situation actuelle du pays. Nous parlons un certain temps. J’essaie de lui donner un autre point de vue que celui des discours officiels, et de lui faire comprendre ce que vit la population à la base. Ce que d’ailleurs il apprécie.
    Je voulais faire un certain nombre de photocopies, mais là encore, pas moyen. La situation économique se détériore de plus en plus, même si les relations diplomatiques avec l’étranger s’améliorent. Mais ça reste au niveau diplomatique ! Nous travaillons dans des conditions de plus en plus difficiles, car il n’y a plus d’argent dans le pays, et les gens souffrent.
    Nous prenons le temps de voir notre malade du SIDA, qui a des réactions toujours aussi agressives. Cela se comprend et nous l’acceptons de bon cœur, mais ce n’est quand même pas facile ! Et il en a découragé beaucoup.

  • Dimanche 28 mars : Dimanche des Rameaux.
    Nous faisons une procession depuis le terrain de football du quartier. La file est longue et les gens ont de la peine à chanter, car nous avons des problèmes avec la chorale. Au lieu de faire chanter la foule et de prendre des chants populaires, elle se met en valeur et nous fait un concert de chants inconnus. Je me retrouve avec la communauté anglophone ; nous prenons un chant populaire en anglais auquel tous répondent. Du coup, les chrétiens guinéens se réveillent. Ils prennent des chants connus de tous et commencent à danser, en agitant leurs branches de palmier. Et, arrivés dans l’église, la joie éclate. Mais j’aurais préféré que ce soit également dans la rue ! Les chrétiens, très minoritaires, ont de la peine à s’exprimer en public, même si c’est dans le respect et la simplicité.
    C’est Yves-Marie qui préside la célébration. Les gens sont heureux de voir une nouvelle tête.
    L’après-midi, nous nous retrouvons entre spiritains pour continuer notre réflexion. Puis Jean-Paul et Yves-Marie partent à KATACO, l’une de mes anciennes paroisses, à 250 km. Ils reviendront vendredi soir, pour partir à Mongo. Une longue journée de voyage.

  • Samedi 27 mars : A la paroisse.
    Jean-Paul y passe toute la journée. Le matin, rencontre avec le Conseil paroissial. Chaque groupe présente ses activités et nous réagissons tous ensemble. L’après-midi, travail de réflexion avec les formateurs et les membres des deux Commissions paroissiales de « Pastorale sociale » et « Justice et Paix ». Jean-Paul nous encourage, nous donne quelques idées et nous fait part de ses réflexions.
    Après la réunion, nous partons dans le quartier célébrer l’Eucharistie pour le 30ème jour de la mort de Gérard, qui était marié avec une musulmane. C’est l’occasion de prier ensemble, chrétiens et musulmans et de renforcer les liens entre les deux familles.
    Après la messe, la communauté se réunit pour renouveler son bureau. Il est important que ce ne soit pas les mêmes personnes qui durent trop longtemps, avec le risque de s’imposer ou de bloquer toute avancée.
    Pendant ce temps, Yves-Marie, notre responsable pour l’Afrique de l’Ouest, est arrivé par avion. Nous sommes heureux de nous retrouver et parlons un bon moment ensemble.

  • Vendredi 26 mars : Reconnaissance des foyers.
    Je reste à la maison pour étudier les dossiers des foyers St Joseph. Nous voulons faire les choses en règle : veiller à ce que les éducateurs soient bien sûr inscrits à la sécurité sociale, avoir les titres de propriété des maisons, rédiger des statuts et, à partir de là, avoir une reconnaissance officielle. Cela fait beaucoup de travail et nous semble important. Nous réfléchissons aussi à une meilleure collaboration avec l’OCPH pour une meilleure formation dans les ateliers du projet.
    La marche pénitentielle.
    A partir de 14 heures, toutes les paroisses de la ville (27) se retrouvent, en particulier les jeunes, pour une marche pénitentielle de 4 km à travers la ville. C’est un grand événement chaque année, préparée avec soin. Petite minorité au milieu de 95 % de musulmans, la Communauté chrétienne a besoin de se retrouver et de s’affirmer de temps en temps. C’est normal. La marche se termine par une grand’messe solennelle dans les jardins de l’Archevêché, où l’évêque lance un appel pour plus de justice dans le pays. Et ensuite, il rappelle son message aux jeunes avec son exigence d’engagement dans la société. Nous reparlerons de tout cela et le travaillerons lors du pèlerinage de BOFFA, début Juin. J’en reparlerai. (Voir le message sur mon site).
    Repas chez l’évêque.
    Après deux heures de bouchon, nous arrivons enfin chez l’évêque qui a invité les spiritains et les responsables religieux, à l’occasion de la venue de notre responsable international, Jean Paul, Supérieur général. Comme d’habitude, l’ambiance est très sympathique et détendue. Et ça fait du bien de se retrouver ainsi, d’une manière décontractée en dehors du travail et des problèmes.

  • Jeudi 25 mars : Journée à l’Archevêché.
    Jean-Paul HOCH, le responsable international (Supérieur général) des spiritains venu nous visiter, est arrivé hier soir. Après la prière, nous allons rencontrer l’archevêque. Puis nous visitons les différents services et ateliers de l’archevêché. Je reste assurer mon travail ordinaire pendant que Jean-Paul rentre dans la Communauté avec mes deux autres confrères. Pour moi, nous nous retrouvons l’après-midi, et nous prenons tout le temps de parler ensemble.
    Le soir, nous partons ensemble, avec Jean-Paul à la paroisse pour les confessions de Pâques. Cela me donne un sérieux coup de main, car les deux autres prêtres étaient occupés, sinon je me serais retrouvé seul.

  • Mercredi 24 mars : Réunion de la communauté spiritaine.
    Nous tenons notre réunion mensuelle. Nous continuons notre réflexion sur notre vœu de pauvreté et notre solidarité avec les pauvres.
    Le soir, réunion et messe dans une communauté de quartier. Nous abordons les différents aspects de la vie de la communauté et du quartier. En particulier, l’accueil et l’aide aux pauvres. Et également, comment nous vivons le Carême et les efforts de réconciliation que nous avons décidé d’accomplir.

  • Mardi 23 mars : Formation des formateurs.
    Nous nous retrouvons avec les formateurs des deux commissions et le nouveau responsable de l’OCPH. En effet, nous travaillons beaucoup, mais il est important de nous former nous-mêmes. Et de réfléchir aux orientations données aux commissions.
    Dans une deuxième temps, nous voyons comment répondre à la question de dimanche : Comment former les chrétiens à mieux s’engager dans la vie du pays, selon les valeurs de l’Evangile et d’une façon désintéressée, pour le service du pays et le bien de tous. Nous préparons un questionnaire que nous allons envoyer dans toutes les paroisses, en vue de l’élaboration d’un plan d’action diocésain.
    Avant de rentrer, j’ai juste le temps d’enregistrer mon courrier mail sur mon ordinateur. Je le travaillerai cette nuit.

  • Lundi 22 mars : Un malade difficile.
    Le responsable de la communauté anglophone vient me voir. Un de ses membres est gravement malade du SIDA ; Il faut donc le prendre en charge. Pendant le Carême, nous avons fait des quêtes spéciales pour remplir une caisse d’entr’aide. Je m’adresse donc au Conseil Paroissial pour débloquer des fonds, ce qu’ils acceptent sans problème. Mais il nous faut encore faire face aux autres problèmes : soins médicaux, transport, nourriture, soutien moral, etc… La difficulté, c’est que sa maladie lui a porté sur le cerveau : il refuse de recevoir ceux qui veulent l’aider ; il pense qu’on le persécute et qu’on vole ses médicaments. C’est difficile de l’aider. Nous voudrions l’aider à retourner au Nigéria, mais il refuse de nous donner les coordonnées de ses parents.
    Il me reste un peu de temps pour commencer à saisir le compte-rendu de la rencontre de la Pastorale sociale d’hier ; mais des visiteurs arrivent et il me faut arrêter le travail !

  • Dimanche 21 mars : Commission diocésaine de Pastorale sociale.
    Comme toujours, nous travaillons avec la paroisse qui nous accueille, puis nous faisons le tour des autres paroisses pour voir les différentes activités menées pendant le mois. Les choses progressent peu à peu. En réfléchissant ensemble, nous arrivons à améliorer nos façons de travailler, à passer de la théorie aux actions concrètes, à élaborer des plans d’actions plus précis en déterminant des méthodes plus adaptées. Il reste que dans le contexte économique et social actuel, les actions de développement aussi bien que l’entr’aide sont très difficiles. C’est l’intérêt de nos rencontres de nous soutenir et de nous encourager. (Voir mon site : « Pastorale sociale » et le compte-rendu de cette rencontre L 67 que vous avez reçu).
    Bien sûr, nous prenons un temps pour réfléchir à la situation du pays et à l’éducation des populations. En particulier, une éducation à la paix pour que la Campagne électorale se passe dans le calme et que les gens acceptent les résultats. (Voir le document L 68, envoyé par mail, et le site « Situation du pays »). Mais nous sommes très inquiets par la soif du pouvoir et la course à l’argent qui se manifestent actuellement. Cela peut s’expliquer par la situation de pauvreté grandissante du pays (les caisses sont vides, la monnaie se dévalue sans cesse, l’inflation augmente). Mais les inégalités sociales ne font qu’augmenter et les pauvres deviennent de plus en plus pauvres.
    Ce qui nous inquiète aussi, c’est l’armée. Normalement, pendant cette période de transition, il est prévu une reprise en main de cette armée, mais nous ne voyons pas grand-chose qui se fait. Et cela nous inquiète beaucoup pour l’avenir.
    Reste enfin la question de l’engagement des chrétiens et des communautés chrétiennes. Et d’abord, pour leur formation. Pour qu’ils s’engagent vraiment pour le bien du pays et pas par intérêt. Avec la Commission, nous prenons un temps de réflexion sur tout cela. Et nous recueillons des éléments pour une déclaration pour la fête de l’Indépendance.
    Le soir, je suis bien fatigué, mais comme il n’y a pas d’électricité en journée, je reste pour travailler jusqu’à … tard (ou plutôt tôt !) dans la nuit. Je voulais rester me reposer le matin…. mais j’ai oublié de fermer mon téléphone ! Je suis donc réveillé de bonne heure.

  • Samedi 20 mars : Le Frère Stéphane, responsable de l’enseignement catholique, vient travailler avec moi sur un programme d’éducation à la paix, dans les différentes écoles. C’est une nécessité, car les programmes officiels d’instruction civique sont nettement insuffisants. Nous revoyons aussi le programme de formation des écoles de brousse, suite à ma dernière tournée.
    Aussitôt après, il faut passer à la pratique, car Marc, qui vient d’ouvrir une école privée, vient me demander un soutien.
    Délégation de l’O.N.U.
    Le soir, je reçois à l’improviste une délégation de l’ONU venue enquêter sur la situation de la femme en Guinée, suite en particulier à la tuerie et aux viols du 28 Septembre. C’est l’émoi dans le quartier à l’arrivée de quatre voitures de luxe, accompagnées de motards. Ce n’est pas dans mes habitudes ! Assez rapidement, j’essaie de dépasser les discours théoriques et la simple description des faits, pour analyser ce qui s’est passé et voir ce qu’il est possible de faire. Je leur explique les actions que nous avons menées, ce qui semble beaucoup les intéresser. Espérons que tout cela servira à quelque chose et que ce ne sera pas un dossier de plus qui va se perdre dans la nature.

  • Vendredi 19 mars : Travail à C.R.S. (évaluation de ma tournée à Ourous et projets de développement).
    Nous voyons comment prendre notre place et jouer notre rôle dans la transition et la préparation des élections. Un nouvel animateur vient d’arriver. Il faut donc lui expliquer nos différents projets et notre façon de travailler ; ce qui prend du temps, mais c’est nécessaire. (Voir mon site : « Pastorale sociale »).
    Le soir, après le Chemin de Croix, il y a une Conférence faite par un chrétien laïc de la paroisse. Aujourd’hui, le thème est : le pardon et la réconciliation. Nous prenons le temps d’en revoir le texte, car elle est vraiment trop théorique et avec des mots beaucoup trop compliqués. Alors que ce que nous cherchons, ce n’est pas un enseignement théorique mais vivre tout cela en vérité, dans notre quotidien.
    Après la prière, nous nous retrouvons avec les responsables du Mouvement des Enfants (CV-AV) qui ne marche plus très bien depuis quelque temps. La persévérance est toujours difficile. Et ils ont tendance à organiser des fêtes et des manifestations plus qu’à assurer une formation et à soutenir les enfants dans leurs engagements.

  • Vendredi 19 Mars : Toute la matinée, travail à CRS pour faire le point et tirer les conclusions de mon séjour à OUROUS, en particulier pour les écoles de brousse et les projets de développement. CRS vient de recevoir un nouvel animateur : il faut le mettre au courant et nous habituer à de nouvelles façons de travailler. Egalement de mon côté, car pour l’OCPH nous avons aussi un nouveau responsable. Espérons que ces changements vont nous amener des idées nouvelles et que ce sera au service des plus nécessiteux. (Voir mon site, rubrique « Pastorale sociale »).
    Pour la formation des observateurs indépendants pour les élections, les choses sont bloquées. Et tout le monde veut se lancer dans ce secteur, car il est soutenu par de nombreux pays occidentaux et ONG internationales ; il y a donc de l’argent à récupérer. Nous préparons d’ailleurs une déclaration à ce sujet, car avec le gouvernement de transition c’est la course au pouvoir et à l’argent de tous les côtés.

  • Jeudi 18 Mars : Un nouvel éducateur.
    Journée à l’archevêché avec les activités habituelles. Aujourd’hui, nous avons tout un travail avec Richard. Nous avons travaillé depuis longtemps ensemble dans l’accompagnement des malades du SIDA, mais le projet est maintenant arrêté, faute de financement. Richard est maintenant formateur dans la Commission de Pastorale sociale où nous apprécions ses qualités. C’est pourquoi nous lui avons proposé le poste d’éducateur, dont nous sentons de plus en plus la nécessité. En effet, à l’atelier « Savoir-Fer », nous avons deux bons formateurs pour l’apprentissage de la soudure, mais les apprentis viennent d’un milieu difficile. Ils ont donc besoin d’être suivis et soutenus dans leurs familles et leurs quartiers. Et aussi dans leurs milieux professionnels, quand ils commencent à travailler ; car certains patrons, profitant de leur origine sociale, ne se gênent pas pour les exploiter. Il y a aussi tout le problème de recrutement des nouveaux apprentis où nous voulons réagir également, car nous nous apercevons que des filières se mettent en place pour pouvoir taxer les familles. Richard ne va pas manquer de travail !

  • Mercredi 17 Mars : Argent et pauvreté.
    Réunion de notre communauté spiritaine. Depuis l’année dernière, nous avons entrepris une réflexion en profondeur sur notre vie religieuse et missionnaire. Aujourd’hui, nous parlons de notre pauvreté religieuse : notre style de vie, notre solidarité avec les pauvres et notre lutte contre la pauvreté. Ensuite, et avec la présence de notre stagiaire –car cela aussi fait partie de sa formation-, exercice pratique : nous étudions nos comptes et voyons comment nous en sortir le mois qui vient avec ce que nous avons. Puis nous parlons ensemble du travail à la paroisse ; il y a toujours des choses à voir et à organiser.
    Après-midi à la paroisse : catéchèse, préparations au mariage et au baptême. En même temps, visite des différents mouvements qui se trouvent en réunion : scouts, servants de messe, Sant Egidio, et CV-AV. J’ai juste le temps de visiter le chantier du presbytère avant la nuit. Puis je pars pour la réunion d’une Communauté de quartier, suivie de la messe. Je passe un bon temps à motiver les gens, parce que cela fait plus d’un mois qu’ils ne se sont pas réunis. Dans ces conditions, bien sûr, il n’y a pas d’actions menées. Nous cherchons ensemble comment motiver les personnes et comment répondre à leurs vrais besoins. Il y a tout un effort d’éducation et de formation à faire, mais c’est vrai que pour beaucoup la vie chrétienne se limite à la prière et à la messe du dimanche, et ils ne sentent pas la nécessité de s’engager, pour le pays et pour les autres, mais d’abord pour eux-mêmes et leurs familles.

  • Mardi 16 Mars : Je voudrais bien rester me reposer un peu, mais après ces jours d’absence il y a beaucoup de travail et de problèmes qui m’attendent. Et pour avoir un taxi, il faut partir à 6 h 30, sinon ce sont les bouchons et tous les taxis sont pleins.
    Dès le matin, encore dans le taxi, je reçois un coup de téléphone de NZEREKORE, à l’extrême sud du pays : un responsable « Justice et Paix » est en prison pour une sombre histoire d’argent. Il a réussi à s’arranger avec un gardien pour me téléphoner. J’arrive à trouver un avocat, ami du Procureur de Nzérékoré, pour prendre en main la situation, et je passe plusieurs appels à Nzérékoré. Cela prend un temps fou, car le téléphone marche très mal : quand le réseau n’est pas saturé, il saute.
    Puis ce sont les activités ordinaires : courrier mail, informations et recherches sur Internet dès que possible (là aussi, à partir de 10 heures, c’est saturé). Ensuite, préparation de la Commission de la jeunesse qui doit passer dans chaque paroisse pour organiser et mobiliser les jeunes. (Voir dans mon site, rubrique « Jeunesse »).
    Je dégage un créneau pour parler avec Bernard, un prêtre guinéen, qui se fait soigner en France et en même temps travaille dans le diocèse de Poitiers. C’est lui qui m’avait introduit à Mongo, en 1996. Il est venu pour les fêtes du Centenaire de Mongo avec deux collaboratrices françaises. Nous prenons le temps de parler, d’évaluer leur visite et de penser à la suite de notre collaboration.
    Nous continuons à travailler, comme chaque jour, à l’OCPH (Organisation Catholique pour la Promotion Humaine = Secours Catholique) pour la mise en œuvre de nos projets de développement, mais surtout pour la formation aussi bien des animateurs que des bénéficiaires. Dimanche dernier, la Commission « Justice et Paix » s’est réunie sans moi puisque j’étais à Koundara, ce qui est une excellente chose pour qu’ils se prennent en charge davantage. Nous avions préparé une réflexion sur la transition et les élections : Que faire ? Comment y participer en tant que chrétiens en mettant en pratique les valeurs de l’Evangile ? Nous avons demandé à chaque paroisse de composer un plan d’action dans ce sens. Vous avez déjà reçu notre document à ce sujet dans votre boîte mail.
    A 15 heures, je pars à la morgue : un Sénégalais avait été tué dans un hôtel, en Juillet dernier et on n’avait pas pu récupérer le corps, car il fallait d’abord que l’enquête soit faite. Et, en plus, les autorités réclamaient une somme très importante. Ensuite, on ne trouvait plus le corps. Nous pensions même qu’il avait été enlevé, comme de nombreux corps que l’on a emportés et cachés (enterrés clandestinement) après la tuerie du 28 Septembre. Finalement, on a retrouvé le corps. Nous allons prier avec quelques amis, avant son rapatriement pour le Sénégal.

  • Lundi 15 Mars 2010 : Après la fête qui a duré tard dans la nuit, c’est dur de se lever, mais il le faut bien si je ne veux pas rater le taxi brousse pour CONAKRY. J’attends quand même deux heures avant qu’il soit rempli et parte. Celui-ci est en bon état, nous n’avons pas d’ennuis en route ; puisque la route n’est pas trop mauvaise je fais mon courrier (j’ai trouvé la bonne position et la technique pour cela) ; sinon je travaille un gros bouquin que j’ai amené spécialement avec moi. Seize heures de route… ça me laisse le temps de travailler tranquillement, sans interruption. C’est rare et j’apprécie, malgré les secousses, la chaleur, et la « compression ». C’est vrai que la chair humaine est une matière « compressible » ! L’ambiance est agréable et malgré la barrière des langues nous arrivons à communiquer. A chaque ville que nous traversons, s’il y a du réseau, j’en profite pour passer un coup de téléphone aux prêtres, sœurs et responsables laïcs du lieu. Ce n’est pas tous les jours que nous en avons l’occasion.
    Le nouveau Gouvernement a demandé aux militaires d’arrêter les barrages et les tracasseries inutiles qui n’étaient que des occasions de rançonner les gens. Surtout qu’on contrôle les cartes d’identité des voyageurs par taxi, mais pas les autres ! A l’aller, nous sommes passés sans problème, mais au retour les barrages ont repris. On me demande même ma carte de vaccinations… à moi, et pas aux autres. Et il faut que je montre moi-même au militaire où se trouve le cachet ! Et ensuite, ils voulaient faire descendre tous les bagages de la galerie pour les vérifier. Il a fallu discuter… et payer ! A l’arrivée, un voyageur ne trouve plus son bagage : il était caché sous un autre (en fait, les vols sont très rares dans les taxis) ; mais cela fait une demi-heure de perdue.
    Deuxième arrêt : une femme est venue avec quatre jeunes enfants. Son mari devait l’attendre et payer le billet. Il n’est pas là. La femme retrouve un papier où est inscrit son n° de téléphone. Le chauffeur l’appelle. Il dit : « je viens »… et ne vient pas. Une demi-heure plus tard, on l’appelle à nouveau… il ne vient pas. On trouve quelqu’un qui sait où il habite et qui va le chercher. Il arrive enfin, mais sans argent ! Commence alors un long palabre… et je ne rentre à la maison qu’à 23 heures !

  • Vendredi 12 au Dimanche 14 Mars : Les écoles de brousse.
    Je n’ai pas le courage de me lever pour la prière du matin, à 6 h 30 ! Mais il faut quand même me secouer, car je dois aller à OUROUS rencontrer le Frère Jean-François qui assure une éducation de base à 700 enfants, avec 30 moniteurs, dans les villages reculés où il n’y a pas d’école publique. C’est ce que nous appelons les écoles de brousse, où nous ne cherchons pas seulement à apporter une alphabétisation mais une véritable éducation globale des enfants, et une animation et responsabilisation des parents, en vue d’un développement intégral du village à partir de l’école. Pour l’enseignement, malgré les difficultés, nous arrivons à assurer un travail de qualité. Si bien que lorsque les parents peuvent trouver une famille d’accueil dans les centres, les enfants peuvent entrer à l’école publique et sont souvent parmi les meilleurs élèves et les plus motivés. (Voir dans mon site : « Pastorale sociale »).
    Avec Jean-François, nous parlons bien sûr des problèmes économiques. Pour le paiement des enseignants, nous recevons un soutien de C.R.S. (Secours Catholique américain), mais c’est trop limité et il est difficile de faire cotiser les parents, ce qui s’explique facilement vu leur état de grande pauvreté, étant donné qu’il s’agit justement des villages les plus reculés. Nous demandons au moins aux parents de construire un hangar pour l’enseignement, avec l’aménagement (bancs, tables, etc…) car nous n’avons pas les moyens de construire des écoles en dur. Nous leur demandons aussi de travailler pour l’enseignant, en particulier de faire pour lui un champ d’arachides, par exemple. Mais bien sûr, il est très difficile de garder nos enseignants : quand ils sont formés, beaucoup partent dans les centres, dans les écoles officielles ; et c’est un gros problème pour nous.
    Nous abordons aussi la question de la formation des enseignants, qui est pour nous une priorité.
    Le Gouvernement organise actuellement des écoles communautaires. Nous allons voir comment assurer une coordination entre ces deux types d’école.
    Reste la participation des parents à l’éducation des enfants, en lien avec l’enseignant ; en fait, il est très difficile de réunir les parents. Et dans les réunions, on se limite souvent aux questions de cotisations, sans aborder les vrais problèmes d’éducation. Ce n’est pas facile de faire évoluer les choses.
    A la sortie de notre réunion, j’apprends le décès d’un jeune prêtre de Nzérékore, parti faire des études en Italie. Du coup, mon voyage est annulé et ma session de formation supprimée. En effet, la mort est vraiment très présente dans notre milieu. Et elle frappe souvent des jeunes adultes et surtout les bébés, ce qui est profondément injuste et nous pousse à nous engager contre toutes les forces de mort autour de nous : la pauvreté et le sous-développement, mais aussi la violence. Ces choses vont souvent ensemble, malheureusement. Ici, comme dans toute l’Afrique Noire, la mort est vécue publiquement et communautairement. Aussi, quand il y a un décès toutes les activités s’arrêtent. Et les familles en deuil ne sont jamais laissées à elles-mêmes. Le soir, j’apprends aussi le décès de la mère d’un prêtre de Conakry et deux personnes à Mongo.
    Session Justice et Paix.
    Au retour d’OUROUS, je ramène avec moi les participants à la session. J’ai emprunté le 4x4 de mes confères de KOUNDARA. C’est la seule voiture qui peut passer sur ces mauvaises pistes… ça n’est pas pour frimer sur les Champs Elysées ou la Promenade des Anglais ! Moi qui depuis deux ans me laisse transporter en taxi collectif à Conakry, je suis très heureux de me retrouver avec un volant solide entre les mains et de m’affronter aux trous, au sable, à la boue et aux passages difficiles de ces pistes du nord, à la frontière du Sénégal. Ca me rappelle mes tournées de brousse d’autrefois, au Congo, en Côte d’Ivoire, au Sénégal et au sud de la Guinée, et me rajeunit de 50 ans (47 ans, pour être exact, pour le Congo).
    La session se passe très bien et les gens sont très intéressés, comme d’habitude. En effet, nous abordons des sujets d’actualité et même brûlants, alors les participants sont très motivés et nous travaillons dur. (Voir mon site aux « Nouvelles » du mois dernier, et aux rubriques « Situation du pays » et «Justice et Paix »).
    Cette fois-ci, je me trouve en secteur rural et nous abordons les problèmes liés à la culture traditionnelle : problèmes des veuves, des orphelins et des héritages ; les initiations, avec les violences qu’elles entraînent, la maladie, le « maraboutage », la magie et la sorcellerie, le passage de la vie traditionnelle à la vie moderne, la place des femmes et des veuves dans la société, etc… Nous nous arrêtons très longtemps sur la recherche de solutions et d’aménagement des relations entre agriculteurs et éleveurs. Ils sont en conflit dans de nombreux pays. Nous voudrions éviter cela en Guinée ; il vaut mieux prévenir que guérir. Nous travaillons dur, du vendredi au dimanche.
    Appel des catéchumènes.
    A la messe du dimanche, nous reprenons tout cela en résumé avec toute la communauté. C’est aussi le Carême et le temps des scrutins : prière pour les catéchumènes qui se préparent au baptême pour Pâques. Ils sont une bonne cinquantaine. Je donne bien sûr la parole aux catéchumènes, mais surtout je donne leur place non seulement aux catéchistes mais aussi aux responsables de communautés. Je ne peux pas en faire autant pour les parrains et marraines, car malheureusement le parrainage n’est pas mis en place dans la paroisse, ce que je regrette beaucoup.
    Il y eu naissance de triplés dans le quartier. Bien sûr, c’est rare et cela, qui apparaît miraculeux, va aussi poser des problèmes économiques à la famille. A la fin de la messe, on fait donc une quête spéciale pour les soutenir. Chaque groupe vient à tour de rôle (ici les classes d’âge sont une réalité très vivante) : d’abord les enfants, puis les jeunes, ensuite les femmes, enfin les hommes. De telles initiatives sont fréquentes.
    Après la messe, nous reprenons le travail de la session pour terminer à 15 heures par un repas pris tous ensemble dans la joie !
    Les petits projets.
    Je profite de mon voyage pour voir su place le projet de jardins potagers, en faveur des veuves pour leur procurer des petits revenus. (Voir dans mon site, rubrique « Groupements »). Puis nous allons visiter une école de brousse à SIN THIOU-BORA. Je suis très satisfait. Le hangar est bien construit et bien entretenu. Les élèves sont bien formés (je les interroge, pour vérifier !), signe que l’enseignant fait bien son travail. Nous tenons une longue réunion avec les parents. Je les remercie car non seulement ils cotisent pour payer l’enseignant : 45 élèves, 3.000 FG par mois et par élève = 135 000 FG, (environ 17 euros par mois… ce ne sont pas des salaires européens !) mais ils prennent également en charge sa nourriture (sa femme est encore étudiante en pharmacie dans le Fouta Djallon au centre du pays, avec ses deux enfants, ce qui ne facilite pas les choses). Les parents ont offert aussi à l’enseignant une part de leur récolte et l’ont aidé dans son propre champ. Malgré tout, il a l’intention de les laisser pour aller enseigner en ville où il sera mieux payé, du moins l’espère-t-il. Pas facile !
    Les parents voudraient que nous leur construisions une école « en dur », avec leur participation. Mais où trouver les fonds pour cela ? Comme nous suivons le parcours des élèves, l’année prochaine il nous faudra construire un nouvel hangar et trouver un(e) 2ème enseignant(e). Enfin, je les encourage à se réunir régulièrement, pas seulement pour les problèmes de cotisations, mais d’abord pour réfléchir tous ensemble à l’éducation de leurs enfants.
    Au retour, avec le Frère Jean-François, d’OUROUS, et Lucien, le curé de KOUNDARA, nous faisons le point de tout cela pour une meilleure collaboration entre les deux paroisses et pour étudier la possibilité d’une intégration de ces écoles de brousse dans le système des écoles communautaires lancé par le Gouvernement. Ils vont se renseigner à ce sujet.
    Soirée communautaire.
    C’est l’anniversaire de Lucien. Le soir, nous nous retrouvons donc ensemble, prêtres, sœurs, frères et laïcs responsables des deux paroisses, pour fêter cet anniversaire dans la joie. Nous formons une équipe internationale (huit nationalités), très unie.

  • Jeudi 11 Mars : Voyage à KOUNDARA.
    Pour ne pas rater mon taxi, je me lève à 5 h 30. Mais à la gare routière les clients manquent : dix personnes dans une berline, bien serrées et compressées, et un tas de bagages sur le toit. Et pas question de partir avant que le taxi soit plein. Il est vrai que le voyage ne coûte pas cher : 117.000 FG, soit 15 euros, pour plus de 600 km, alors que la Guinée paie le carburant au prix international. Mais il faudra plus de 15 heures pour parcourir cette distance, sur des routes très mauvaises. En attendant, le chauffeur va faire « la chasse » aux clients et nous arrivons à quitter Conakry vers 9 heures.
    Une bonne nouvelle cependant : le nouveau Gouvernement a supprimé les barrages, contrôles d’identité et fouilles à l’entrée des villes. Nous pouvons circuler en paix, sans tracasseries policières, ni brimades des militaires. Ca change, et c’est très agréable ! (Voir dans mon site les « Nouvelles » du 17 au 24 Janvier).
    Bien sûr, comme à chaque voyage, nous tombons en panne. Cette fois-ci, ce n’est pas grave, seulement le pot d’échappement qui a lâché. Il faut dire que la plupart des taxis sont dans un état lamentable et les chauffeurs-mécaniciens font des prouesses pour les faire marcher. Mais cela n’empêche pas de nombreux accidents, souvent graves. Le pot d’échappement ne tient pas. Tous les 10 km il faut s’arrêter pour resserrer les boulons. Avec cela, nous arrivons la nuit au bac. Descendre avec une pente très accusée sur le bac en très mauvais état, en pleine nuit, avec une voiture qui n’a pas de démarreur, ce n’est pas facile ! A la remontée, d’abord une crevaison : ce n’est pas une panne, c’est normal. Mais il faut pousser la voiture pour la faire redémarrer. Un peu plus loin, nous passons un peu vite dans un trou et le châssis casse…. il faut dire qu’en plus des dix passagers, il y a plus de dix sacs de riz sur la galerie, avec tous les autres bagages. Nous le bricolons avec des branches d’arbre et des bouts de tissu pour les attacher. Mais maintenant, il nous faut passer doucement dans les trous… et nous n’arrivons qu’à 2 heures du matin.
    Je voyage avec un habitant originaire d’un village de MONGO, mais vivant depuis longtemps à Conakry et voyageant comme moi vers la frontière sénégalaise. Nous ne nous connaissons pas, mais il a entendu parler de moi. A cause de ce que j’ai fait pour son village, il me prend en charge pendant tout le voyage (repas…) et me fait un cadeau à l’arrivée. Cela fait chaud au cœur et suffit à rendre tout ce voyage difficile, agréable.
    Bien sûr, à l’arrivée tout le village dort. Heureusement, il y a du réseau sur le téléphone. Je peux réveiller un confrère qui vient me chercher.

  • Mercredi 10 Mars : A FRIA, quand j’ai animé la formation « Justice et Paix », j’ai rencontré Emmanuel, séminariste de Sierra Léone, en stage en Guinée. Je l’avais invité à venir à CONAKRY. Il est arrivé avant-hier. Nous partons ensemble à l’Archevêché et je le présente aux apprentis de l’Atelier Savoir-Fer  avec qui il peut parler, pendant que nous tenons notre réunion mensuelle avec les formateurs. Comme chaque mois, nous faisons le point des activités à partir du compte rendu du mois passé. Nous réfléchissons spécialement à la formation que nous offrons aux apprentis. Nous avons fait appel à une nouvelle enseignante pour évaluer la formation donnée par les formateurs. Mais ils ont beaucoup de peine à accepter ce qu’on leur demande et à assurer la préparation de leurs cours.
    Ensuite, nous faisons le tour des apprentis qui sont maintenant au travail. Certains travaillent bien, d’autres moins bien. Quelques-uns sont carrément exploités en travaillant depuis plusieurs années, sans contrat. Dans la situation économique actuelle, ce n’est pas facile de les défendre. Ni de défendre leurs droits quand ils sont dans le secteur informel.
    Ensuite, nous préparons les activités du moi à venir. Les choses sont maintenant organisées. Le problème, c’est plutôt de trouver des travaux à faire ; car il faut que l’atelier tourne et la formation coûte cher. (Voir mon site ; rubrique « Projets. Savoir-fer ». A la fin de la réunion, en accord avec le bureau, je déclare clairement aux deux formateurs que s’ils ne changent pas leur comportement, ils seront renvoyés, car malgré toutes les concertations, médiations et conseils donnés depuis trois mois, la situation ne fait qu’empirer. Et il est important de marquer le coup, en premier lieu pour l’intérêt de la formation des apprentis, mais aussi pour eux-mêmes. (Voir les « Nouvelles » de la semaine dernière). La leçon semble comprise. Espérons !
    Pendant ce temps, Emmanuel est parti se faire établir une carte d’étranger à l’ambassade de Sierra Léone et nous le récupérons en route. Nous passons à la gare routière pour réserver une place pour demain, mais la réunion a duré longtemps et quand j’arrive le premier taxi est plein. Je m’inscris dans un deuxième taxi, en espérant qu’il se remplira avant demain. On verra bien.
    Je rentre à la maison pour travailler les comptes rendus de la réunion du Conseil paroissial de samedi et de la réunion des enfants, auxquelles je n’ai pas assisté. Nous sommes invités chez les Sœurs de Notre Dame de Guinée. Mes confrères y vont, mais je dois y renoncer car il faut, en plus, que je prépare mon voyage de demain.
    Emission radio.
    De plus, j’attends une journaliste pour une émission sur le Carême. J’attendrai longtemps, et au bout de deux heures, elle me téléphone pour me dire qu’elle ne viendra pas, car il n’y a pas d’appareil de libre. Heureusement que j’étais à la maison, j’ai continué à travailler pendant tout ce temps-là. De telles choses arrivent souvent, surtout avec les radios libres. Ils se débrouillent avec les moyens du bord et n’ont pas assez de matériel. Ils travaillent à deux ou trois sur le même enregistreur… quand il n’est pas en panne !
    Emmanuel revient du repas. Nous avons un peu de temps pour faire le point d’un certain nombre de choses et d’évaluer nos activités. Puis je pars à la paroisse où je ne suis pas passé depuis une semaine et où plusieurs personnes m’attendent pour leur mariage ou le baptême de leurs enfants. Il faut que je les voie au moins une fois. Ensuite, ce sont les équipes de laïcs de préparation au mariage et au baptême qui les prendront en charge. Ils font d’ailleurs cela très bien, grâce à la formation que nous leur avons donnée ; il faut quand même le dire.
    18 heures. Réunion de la Communauté de quartier Notre Dame du Rosaire.
    Ils ont bien préparé la réunion et ils ont une bonne secrétaire. Elle nous lit le compte rendu de la dernière réunion (c’est rare qu’il soit écrit !) et nous avons ainsi une base solide pour travailler. Aujourd’hui, nous nous arrêtons d’abord à la question des catéchumènes. Ils viennent à la catéchèse, mais ne participent pas aux activités de la Communauté. Il faut redresser la barre car sinon, après leur baptême, ils ne feront plus rien.
    Ensuite, vient la question des Commissions. Pour la Pastorale sociale, ils ont demandé que l’on agisse contre l’insalubrité dans les quartiers, ce qui est une bonne chose. Cependant, ils n’ont fait aucun plan d’action ni précisé aucune méthode pour agir. Résultat, rien ne s’est fait. Et c’est la même chose pour la Commission « Justice et Paix » qui avait proposé de lutter contre le phénomène des chiens errants qui souvent attaquent et mordent les gens.
    Enfin, nous abordons la question des jeunes. Pour les attirer et leur proposer une activité intéressante : une compétition de football où nous veillons à l’esprit sportif et au jeu collectif. De plus, chaque match est précédé d’un temps de discussion et de réflexion entre jeunes. Mais il nous faut aller plus loin. En particulier pour la formation des jeunes à tous les niveaux : religieux, mais aussi humain (éducation), scolaire, etc. Nous proposons l’utilisation d’Internet, quand c’est possible. Surtout nous décidons d’impliquer davantage les parents et de travailler avec les Communautés.
    A la fin de la réunion, nous célébrons l’Eucharistie.
    Je suis bien fatigué, mais nous continuons le travail avec le Bureau du Conseil Paroissial, dont les membres sont venus nous rejoindre. Je les remercie car ils sont eux-mêmes très occupés et nous ne pouvons nous rencontrer que la nuit. Au-delà de l’évaluation des différentes activités et réunions, nous réfléchissons aux orientations de la paroisse et du diocèse.
    Personnellement, je trouve que la paroisse, et l’Eglise de Guinée en général, se limitent beaucoup trop à la prière et aux sacrements, et ne sont pas assez soucieuses de ce qui se passe dans le pays. Les Communautés de base (CCB) ont tendance à se centrer sur les questions de pratiques chrétiennes, beaucoup plus qu’à s’engager dans les quartiers. Le souci de la Commission diocésaine des jeunes est plus d’organiser des manifestations religieuses qu’à former les jeunes dans toute leur vie et à les soutenir dans leurs engagements dans la société. Les femmes catholiques sont très généreuses au moment des fêtes chrétiennes et s’occupent bien de l’aménagement de leur église ; mais elles prennent beaucoup moins en compte les problèmes des femmes et de toutes les femmes.
    A la paroisse, depuis le début de l’année, nous essayons de réagir contre tout cela, mais il nous faut vraiment ramer à contre courant. Les Commissions ont beaucoup de mal à fonctionner. En « Pastorale sociale », les chrétiens sont plus tournés vers l’aumône et les distributions de nourriture (ce qui reste nécessaire) que vers de vraies actions de développement permettant aux pauvres de prendre leur vie en main et de devenir acteurs de leur propre avenir. Pour la Commission « Justice et Paix », on reste au niveau de la sensibilisation et des conférences (des discours), sans parvenir à des actions de libération. Il y a vraiment beaucoup à faire, ce qui ne me fait pas peur.
    Ce qui m’inquiète, c’est qu’on ne s’oriente pas dans ce sens et que les blocages sont nombreux, par paresse, laisser aller, mauvaises habitudes ou même mauvaise volonté. Par exemple : du côté des prêtres, qui ne s’engagent pas dans la vie du pays et se conduisent souvent comme des notables. Or l’Eglise de Guinée est encore très cléricale.
    Comment mettre en place une formation qui permette de prendre de nouvelles orientations pour que l’Eglise se mette au service des hommes et du Royaume de Dieu, Royaume de justice et de paix, ouvert à tous les hommes, et d’abord aux pauvres et aux écrasés de la société ?
    C’est ma grande préoccupation, et même ma souffrance actuellement. Et elle s’est encore avivée lors du Centenaire de MONGO où, pendant 10 ans, réfugiés et Guinéens avons vécu des choses tellement fortes, sans doute parce que nous étions dans une situation de guerre terrible. Actuellement, j’ai souvent l’impression de ne pas être compris, ni même accepté. Mais sans doute que je suis trop pressé et donc que je porte trop de choses, et même les gens.

  • Mardi 9 Mars : Bien sûr, des tas de choses m’attendent à l’archevêché, après ces cinq jours d’absence ; aussi, je pars tôt. D’abord, j’enregistre mon courrier sur mon ordinateur portable pour le travailler plus tard. Puis je continue sur Internet pour savoir ce qui s’est passé dans le pays et les réactions aussi bien nationales qu’internationales. C’est important pour notre travail afin de ne pas être à côté de la plaque. Mais le système est toujours aussi lent. Puis, c’est le tour des activités.
    Le compresseur du projet hydraulique qui venait d’être réparé a lâché à nouveau. Il faut dire qu’il est complètement usé. Ils en ont emprunté un autre et ont terminé leur forage. C’était un test pour vérifier si les machines tiendraient le coup. On va pouvoir se lancer dans d’autres forages ; ce ne sont pas les besoins qui manquent. Mais notre matériel étant vraiment trop vieux, nous ne pouvons pas nous engager pour des forages à long terme, car nous avons très peur que le matériel ne nous lâche. Par contre, notre équipe à une grande expérience pour l’animation des villages et les actions de développement. Nous pensons nous orienter vers le creusement des puits mais avec une formation à l’entretien et à la prise en charge par la communauté, une éducation à l’hygiène de l’eau et à la santé. Et pour les forages, nous allons plutôt nous orienter vers l’entretien des forages déjà existants : soufflage, etc… qui ne nous demande pas de gros matériel (c’est ce qui nous manque le plus) et, par ailleurs, nous avons les compétences pour cela. (Voir mon site, rubrique « Projets »).
    A l’O.C.P.H., l’imprimante ne fonctionne pas. Je retourne au Projet hydraulique, mais je n’ai pas le disque nécessaire pour y adapter mon ordinateur.
    A l’atelier, on nous a donné un grand portail à repeindre (ce qui plaît aux apprentis), mais il faut d’abord le gratter (… ce qui leur plaît moins…).
    Un Jésuite, étudiant au Canada, vient me voir : il prépare une thèse sur la réconciliation à partir des pactes et systèmes d’alliance traditionnels. C’est d’actualité et important pour nous. Il a trouvé dans mon site des choses qui l’intéressaient. Comme il y a plus d’idées dans deux têtes que dans une, j’appelle Raoul, de l’OCPH, pour qu’il vienne réfléchir avec nous.
    Ensuite, travail avec les formateurs de « Justice et Paix et de « Pastorale sociale », pour le point du travail de la semaine dernière et préparer celui de la semaine qui vient.
    Un volontaire allemand, venu soutenir les enfants de la rue pour leur formation professionnelle, me contacte pour voir comment améliorer cette formation, et soutenir leur éducation sans se limiter à l’aspect technique. (Voir mon site : rubriques « Justice et Paix » et « Pastorale sociale»). Pendant ce temps, arrivent plusieurs personnes qui ont des besoins : des réfugiés de Sierra Leone, une mère de famille sans ressources, la directrice d’un orphelinat, etc…..
    Il y a encore tout le travail de secrétariat. Je trouve un ordinateur portable qui marche avec l’imprimante pour brancher ma clé USB. Je confie ensuite les photocopies au secrétaire de l’évêque, pendant que je travaille à la Procure, où l’on m’annonce que le versement annoncé n’est pas arrivé. Je vais donc à la banque pour négocier un prêt, et pars à la poste où le Receveur n’est plus là ! C’est ainsi que chaque jour, on perd du temps en masse, alors qu’il y a des tas de choses à faire.
    Action contre le génocide.
    Je retourne à l’archevêché où m’attend une délégation de l’ONU venue en Guinée pour la prévention des génocides. Ils nous interrogent longuement sur les situations de violence dans le pays et sur la tuerie du 28 Septembre. Nous cherchons à aller plus loin : ne pas se contenter de raconter ce qui s’est passé, mais analyser la situation en profondeur et en trouver les causes réelles. Et aussi, chercher des pistes d’actions. Pour cela, nous leur avons expliqué les petites actions que nous avions expérimentées : la mise en place de conseils inter-religieux dans les camps de réfugiés pour organiser la vie sociale, car souvent les ONG n’interviennent qu’au niveau « technique » (santé, agriculture….) et avaient tendance à décider les choses elles-mêmes, sans consulter les réfugiés.
    Après les tueries du 28 Septembre, nous sommes passés par les communautés chrétiennes de quartiers pour repérer et soutenir, économiquement, psychologiquement et moralement les blessés, femmes violées, familles en deuil. En effet, beaucoup ne voulaient pas aller se faire soigner dans les dispensaires et hôpitaux, par peur de se faire repérer par les militaires, et enlever. Nous avons donc travaillé à la base, avec la population mais aussi avec les chefs religieux musulmans et les autorités locales. A partir de là, notre objectif a été que chacun cherche à intensifier ses relations et tisse des liens d’amitié avec les gens des autres ethnies et des autres religions. Nous avons voulu aussi passer par les jeunes. D’abord en formant les responsables d’associations et mouvements de jeunes, ensemble chrétiens et musulmans. A charge à eux ensuite, d’aller rencontrer non seulement les différentes associations de jeunes, mais aussi les adultes, en commençant par leurs parents, et également les différents responsables religieux, pour qu’ils laissent les solutions de violence et apprennent à accepter leurs différences pour mieux vivre ensemble, et d’abord se réconcilier.
    Après les bagarres de NZEREKORE (Voir dans mon site les « Nouvelles » de Janvier), entre une femme guerzé et un policier peuhl qui a dégénéré en bagarres ethniques, rapidement traitées de conflit religieux, immédiatement une délégation gouvernementale, incluant les chefs religieux, a été constituée pour apaiser les gens. Mais ensuite, un travail de réflexion en profondeur a été accompli sur les causes de ce conflit, avec différentes organisations de la société civile, dont la Commission « Justice et Paix », qui a abouti à un plan d’action précis, dont nous suivons actuellement la mise en pratique.
    Il est important de continuer de telles actions à la base, car depuis le régime de Sékou Touré –et déjà au temps de la colonisation-, on a pris l’habitude régler les problèmes par la violence. Et cette violence reste sous jacente et toujours prête à exploser. D’où la nécessité d’une éducation à la paix et aux méthodes d’actions non violentes. Et aussi de lutter contre la pauvreté, qui est une grande violence faite aux personnes et qui entraîne souvent la révolte. Nous espérons que cette visite aura une suite et débouchera sur du concret.
    Je suis pressé de rentrer pour pouvoir parler un peu avec mes confrères de BOFFA, KATACO et DAKAR qui sont encore là. Mais tout de suite après le repas, je monte dans ma chambre, profitant de ce qu’il y a de l’électricité. Cette nuit, je vais enregistrer sur cassette de magnétophone ma conférence de Mongo sur l’évangélisation. Raymond, venu à cette occasion, la postera en France, car la poste ici ne fonctionne pas bien. Jocelyne qui vous envoie toutes ces nouvelles la saisira sur son ordinateur et me la renverra par mail. Je pourrai ainsi la revoir puis vous la faire envoyer par Jean-Jacques. C’est un peu compliqué, mais ça marche ! Jean-Michel, ensuite, la mettra sur mon site et Bernard sur notre blog « Justice et Paix ». C’est grâce à toute une chaîne d’amis que je peux ainsi travailler et communiquer.

  • Lundi 8 Mars 2010 : Nous avons dormi à BROUADOU, par terre, dans une maison qui n’est pas utilisée ordinairement. Même pas d’eau pour se laver le matin. Dès 5 h 30, nous allons à KISSIDOUGOU chez les Sœurs qui nous ont préparé un petit déjeuner. La route sera longue.
    Sur le chemin du retour, beaucoup d’arrêts de toutes sortes : pauses, visites, achats de nourriture, marché, etc… toujours dans la joie, car quels que soient les problèmes les gens sont toujours sympathiques. Nous arrivons le soir bien fatigués. Mais beaucoup moins que nos deux confrères et les sœurs qui ont voyagé dans un autre bus, qui est tombé en panne et ensuite a crevé. Ce n’est pas grave en soi, mais la jante de la roue de secours n’avait pas la bonne dimension ! Il a fallu aller en stop négocier une autre jante dans la ville voisine.
    Malgré la fatigue, dès mon arrivée, je me mets à l’ordinateur car avec tout cela j’ai pris beaucoup de retard. Et il me faut préparer les courriers urgents, ainsi que le document de préparation du Pèlerinage de BOFFA que j’enverrai dès demain par mail.

  • Jeudi 4 Mars : En route vers MONGO.
    Malgré tout, nous nous levons tôt le matin pour avoir le temps de prier et de célébrer l’Eucharistie avant de partir. La route est toujours aussi longue et comme nous n’en avons pas souvent l’occasion nous nous arrêtons en de nombreux endroits, à commencer par KINDIA dont nous avons célébré le centenaire il y a quelques mois. (Voir les nouvelles antérieurement). D’autant plus que le curé est malade. Nous nous préparons un sandwich dans la voiture pour ne pas perdre de temps. Mais la nuit, en arrivant à Kissidougou, la faim se fait sérieusement sentir. Nous allons déposer des médicaments chez les Sœurs ; elles nous retiennent pour dîner : ça nous fait du bien… le repas mais aussi l’amitié !
    En route, nous prenons ensuite Dominique pour l’amener à Mongo. Il a travaillé plusieurs années dans les ateliers de l’évêché de Kankan, et il s’est établi maintenant au village de WALTO pour travailler au développement à la base, dans l’agriculture, l’élevage et la petite mécanique. Nous arrivons à MONGO à 2 heures du matin et nous devons réveiller le curé, en ayant pitié de lui. Il ne va pas beaucoup dormir ces jours-ci !
    Les trois jours vont être très occupés… surtout pour moi, car dès que nous terminons une prière, une conférence ou une autre activité, je me retrouve entouré, tout le monde voulant me serrer la main, me demander de mes nouvelles et me donner des nouvelles de leur famille. C’est une très grande joie. Il faut dire que nous avons vécu 10 années extraordinaires : pleines de souffrances et d’épreuves pendant les attaques rebelles, mais aussi pleines de réconfort, grâce à l’union qui existait entre nous tous.
    Pour ce Centenaire, on a composé des nouveaux chants. Je suis touché par la profondeur et la foi pleine de méditation de ces chants.
    On m’a demandé de faire une conférence sur l’Evangélisation. Je suis parti de ce que nous avons vécu dans les communautés de Mongo. Si je trouve le temps, j’essaierai de la mettre par écrit, mais ce ne sera pas facile.
    J’ai été frappé en particulier par la qualité de la prière du matin, dirigée par les catéchistes, à partir de l’histoire de l’enfant prodigue, avec une excellente participation de tous. C’est le fruit d’une bonne formation, mais surtout d’une longue pratique.
    Un certain nombre d’autorités sont venues participer à cette grande manifestation. C’est l’occasion pour moi de les rencontrer et d’aborder nombre de questions sur la vie du pays.
    A la messe du dimanche, pour la procession de l’Evangile, nous avons mis en scène l’arrivée des premiers missionnaires, l’étonnement et la peur, puis la connaissance et l’inculturation, l’amitié et l’apprivoisement, et enfin la proclamation de l’Evangile ; le tout accompagné de danses et de gestes traditionnels, dans la langue locale bien sûr, le kissi.
    A la fin de la messe, l’évêque m’a revêtu à nouveau des habits traditionnels kissiens. Ce qui fut une grande joie pour moi. Après la messe, « tout le monde » a voulu me saluer : il y avait plus de 10.000 participants, si bien que je n’ai pas eu le temps de manger ; mais il y a des moments où on accepte facilement d’avoir le ventre vide, quand le cœur est plein d’amitié. En tout cas, les photographes ont fait fortune grâce à moi ! Tout le monde voulait me prendre en photo.
    Au retour, nous nous arrêtons chez Dominique pour voir ses installations. En guise de repas du soir, nous avons préparé du nescafé et un bout de pain ; mais les gens du village nous accueillent et nous préparent un bon repas. Pour aller à la pépinière nous devons traverser une rivière sur un rail. Je ne suis pas très solide sur mes jambes, surtout au retour, la nuit, mais j’arrive quand même à traverser. Maintenant que je suis en ville, j’ai perdu l’entraînement !

  • Mercredi 3 Mars : Visite à une Française, malade.
    C’est une dame qui s’était mariée à un Guinéen, en France et qui l’avait suivi en Guinée. Le mari est mort et elle est restée au pays. Maintenant, elle est âgée et malade, ses amis français sont rentrés, beaucoup de ses amis guinéens sont morts, elle n’a plus de point de chute en France et elle se retrouve seule et sans soutien, avec une petite retraite. Elles sont plusieurs personnes dans cette situation. Nous cherchons à les visiter et les soutenir autant que nous le pouvons.
    Avec C.R.S. : Un animateur qui était parti deux ans se former aux Etats-Unis est revenu. C’est lui qui va suivre nos projets maintenant. C’est une très bonne chose, mais il faut lui expliquer tous ces projets. Nous y passons toute la matinée, en essayant de poser des nouvelles bases et d’améliorer nos façons de travailler, spécialement pour la comptabilité, d’autant plus que je ne suis pas un spécialiste dans cette branche !
    Arrivée de notre responsable. Le responsable adjoint des spiritains d’Afrique de l’Ouest, Jean-Claude, est arrivé hier soir. Nous avons pris un bon moment pour parler ensemble et nous donner des nouvelles des uns et des autres. L’évêque a tenu à le recevoir et nous invite à manger ce midi. Ce soir, nous allons ensemble pour la réunion et la prière dans une Communauté de quartier et ensuite nous portons la Communion aux malades dans le quartier.
    La vie de la communauté. En fait, cette communauté ne marche pas très bien. Il y avait un certain nombre de jeunes décidés et actifs, mais le responsable de la communauté les a découragés. D’abord, il veut tout commander, seul, alors que nous avons mis en place une équipe d’animation de quatre personnes. De plus, il est très agressif et ne s’entend pas avec la trésorière. Après réflexion avec le bureau, nous décidons de le suspendre de ses fonctions tant qu’ils ne se seront pas réconciliés. Nous espérons que cela permettra de relancer la communauté.
    La nuit, nous accueillons trois autres confrères de Boffa et Kataco qui vont venir avec nous pour la célébration du Centenaire de MONGO. Nous parlons ensemble jusque tard dans la nuit.

  • Mardi 2 Mars : Problèmes à l’atelier « Savoir-Fer ». Nouvelle journée à l’Archevêché avec tout ce que cela comporte. Longue réflexion sur les différents aspects de la pastorale sociale. Nous avons un problème compliqué à l’atelier de soudure des enfants de la rue, « Savoir-Fer ». Cette action a été commencée par un couple de coopérants. Ils ont demandé le soutien de l’Eglise catholique puisque nous sommes bien implantés et dans la durée dans le pays. Nous avons logé les volontaires successifs venus de France, comme techniciens pour l’atelier, et fourni les bâtiments. Mais les choses devenant de plus en plus difficiles, il y a deux ans ils ont demandé à l’archevêché de prendre en charge totalement l’atelier, ce que nous avons accepté, vu l’importance de cette action. Le problème, c’est qu’ils n’ont pas accepté les orientations que nous avons prises et ont voulu continuer à téléguider les affaires depuis la France, alors que les gens changent et que la situation évolue très vite en Guinée. Cela arrive assez souvent : des gens commencent des actions,  très bien, mais ensuite ils ont beaucoup de peine à passer la main. Comme nous ne voulions pas suivre les orientations passées, non seulement ils nous ont coupé les vivres, mais ils ont monté la tête des deux formateurs. Comme ils n’étaient plus actifs, ils ont dissous leur association et ils ont décidé de donner tous les outils de l’atelier aux deux formateurs, alors que l’atelier ne leur appartient plus depuis deux ans. Bien sûr, nous avons refusé. Du coup, nous sommes arrivés à une situation de blocage. Non seulement les formateurs ne travaillent plus, mais refusent tout conseil et orientation. Ils ont même commencé à faire des fausses factures, à cacher les bénéfices et à détourner de l’argent. La situation est devenue impossible.
    Ce matin, nous nous sommes assis et il a fallu nous expliquer clairement. On va voir ce que ça va donner. Mais ce serait vraiment dommage qu’une action aussi importante s’arrête pour des conflits de personnes.
    Avec l’évêque, nous allons présenter nos condoléances à une famille de la paroisse. Puis nous tenons la réunion du Bureau du Conseil paroissial, pour préparer les activités à venir. D’autant plus que je vais être absent, avec notre stagiaire, toute la semaine qui vient et même pratiquement jusqu’à Pâques. La réunion se passe très bien, comme d’habitude ; chacun participe et donne son avis très librement. Cette fois, Catherine est là. En effet, il est souvent difficile d’avoir une jeune fille pour nos réunions à tous les niveaux, car elles sont prises par le travail de la maison, en plus de leurs études pour celles qui ont la chance d’aller à l’école. Nous abordons la vie de la paroisse et des différents groupes et faisons l’évaluation des activités de Carême à mi-parcours. Nous nous arrêtons plus spécialement sur l’action avec les jeunes où nous devons tenir l’équilibre entre les activités qui les attirent (football, soirées dansantes, etc.) et leur engagement dans la famille, le quartier et l’école. Ce qui nous inquiète, c’est le manque de motivation des hommes en général, des cadres en particulier : comment les aider et les soutenir dans leurs engagements. Bien sûr, nous abordons aussi les questions économiques qui sont toujours un casse-tête.
    Un enterrement. C’est souvent que nos activités sont perturbées par des décès. En effet, les morts imprévues sont nombreuses, de bébés, d’enfants et d’adultes (pas seulement de personnes âgées). Et dans ce cas, les activités s’arrêtent pour participer à la veillée mortuaire, à l’enterrement et aller ensuite visiter et soutenir la famille.

  • Lundi 1er Mars : Le matin, je reste travailler à la maison pour rédiger les conclusions de la session de BOKE. Mais cela n'empêche pas un certain nombre de personnes de venir me voir. L'après-midi, messe du 8ème jour dans la famille de Gérard. La famille est très reconnaissante pour tout ce que la Communauté a fait pour eux. A la fin de la messe, nous apprenons le décès d'une autre personne. Nous allons présenter les condoléances à la famille.

  • Dimanche 28 Février : Je suis de retour la nuit à CONAKRY. En descendant du taxi, je passe chez Bernard qui, très gentiment, me prête sa clé internet pour que je puisse consulter mon courrier mail et enregistrer le nécessaire sur ma clé USB cette nuit. Cela me permet de bien avancer dans mon travail. Je lui rendrai sa clé demain.
    Pas de taxi pour rentrer à la maison . En effet, le nouveau gouvernement vient d'annoncer une hausse du carburant de 35 % : le litre à 6.500 francs guinéens (environ 85 centimes d'euro). Ca se comprend, car il était subventionné et le gouvernement n'a plus les moyens de le faire ; mais comme à chaque fois, le prix de tous les produits d'importation va augmenter dans la même proportion, sinon plus. En particulier le riz, en grande partie importé. Et le reste va suivre. Bien sûr, les salaires des fonctionnaires sont également augmentés de 50 %... mais tous les travailleurs ne sont pas fonctionnaires ! Que vont faire les autres ? Ce sont toujours les mêmes qui sont oubliés et marginalisés. Car les prix de transports seront les mêmes pour tout le monde.

  • Vendrerdi 26 Février : Session "Justice et Paix" à BOKE.
    Dès le matin, je pars pour la gare routière prendre le taxi collectif pour Boké. D'abord, il faut attendre 2 heures pour que le taxi soit plein. Ensuite, 4 h 1/2 de route, car la 2ème partie du trajet est très mauvaise. Et quand j'arrive, les gens sont là qui m'attendent. Ils sont arrivés dès le matin. Nous nous mettons donc au travail. J'ai regroupé les cinq paroisses de la région du Bagataye (200 km) représentant une quarantaine de communautés de quartiers ou de villages (CCB). Je connais bien les participants, en particulier ceux de KATACO et BOFFA dont j'ai été le curé de 2006 à 2009 (voir mon site). Nous sommes très heureux de nous retrouver et l'ambiance est très sympathique. De plus, ils sont venus très nombreux : plus de 50 délégués. Nous nous en réjouissons, cependant nous allons avoir de la peine à joindre les deux bouts pour les repas et le remboursement d'une partie des frais de transport. Il faudra leur demander un effort supplémentaire.
    Je suis le programme habituel de formation (voir plus avant les sessions de KISSIDOUGOU et de KANKAN) mais bien sûr en faisant participer les gens et en m'adaptant aux réalités locales : Qu'est-ce que la justice et la paix ? Comment mettre en place une Commission ? Quelles actions mener ? etc... Cette fois-ci, nous nous arrêtons longuement sur notre engagement dans le pays, suite à la mise en place du gouvernement d'unité nationale, de la Commission indépendante pour les élections et du Comité de transition pour la révision de la Constitution. C'est important d'être présents à tout cela. Pour cette formation, il me faut jongler car parmi les participants il y a des chefs de service, des étudiants et des gens de la ville qui voudraient que l'on fasse tout en français, et les villageois(es) de KATACO qui ne parlent pas cette langue, mais le baga. Nous décidons de tout traduire en soussou, la langue véhiculaire, comprise par tous ceux qui ne parlent pas français (la majorité). Cela allonge les exposés et ralentit la réflexion, mais permet à tous de participer ce qui est l'essentiel, car souvent ceux qui ne parlent pas français sont marginalisés, au moins inconsciemment. Parmi les étudiants, et aussi les paroissiens, il y a un certain nombre de Kissiens qui viennent du sud (la "Forêt"), la région de MONGO où j'ai travaillé 10 ans. Ils se font un plaisir de me parler en kissien, pour montrer qu'eux aussi ils ont leur langue. Tout cela avec beaucoup de rires et de joie.

  • Jeudi 25 Février : Visite au dispensaire.
    Ma bronchite est terminée, mais je tousse encore beaucoup. D'abord ça me fatigue, mais surtout cela fatigue les gens qui doivent m'écouter, car avec le Carême et mes tournées de "Justice et Paix" je tiens beaucoup de réunions et au lieu d'écouter ce que je dis les gens me regardent tousser.
    Séance de travail à C.R.S. : Suivi des écoles de brousse, de la relance de l'OCPH, des deux Commissions, du soutien des victimes du 28 Septembre, et de beaucoup d'autres choses ! Ce ne sont pas les projets qui manquent ! Et je n'ai pas encore préparé le matériel pour la session de demain.

  • Mercredi 24 Février : Réunion spiritaine.
    Nous tenons notre réunion mensuelle de la communauté spiritaine, pour revoir notre vie commune et nos différentes activités. Nous attendons la visite de nos responsables généraux qui vont venir de Rome et visiter toutes nos communautés d'Afrique de l'Ouest francophone. C'est une grande joie pour nous. Ce sera aussi l'occasion de faire avec eux le point de notre travail missionnaire.
    Décès : Pendant la réunion, j'apprends le décès d'un membre d'une de nos communautés. Cela me rend très triste. Mais, au moins, il a été bien entouré par toute la communauté, qui a prié avec lui jusqu'aux derniers moments.
    Communauté de quartier :  le soir, réunion et eucharistie dans un autre quartier. Il y a un bon groupe de jeunes, mais pas beaucoup d'activités car les gens ne viennent pas aux réunions. C'est vrai que la mise en place de ces communautés est récente en ville : il va falloir un peu de temps pour que les gens comprennent ce que nous cherchons et s'y mettent. D'autant plus qu'ils avaient tendance à se réunir que pour des prières et maintenant nous leur demandons un engagement dans le quartier. (Voir mon site : "Activités paroissiales", réunion de communauté).

  • Mardi 23 Février : A l'Archevêché, après les rencontres ordinaires et l'ouverture de ma boîte mail, nous évaluons la semaine que Raoul vient de passer au titre de "Justice et Paix" avec la société civile à NZEREKORE, suite à des tensions entre chrétiens et musulmans (Voir plus haut). Nous cherchons quels moyens de prévention et quelles formations organiser pour éviter que de telles choses ne se reproduisent. Mais il y a aussi les problèmes matériels : l'atelier de soudure, la réparation des voitures, les achats pour Boké où je pars vendredi. Les membres du "projet hydraulique" ont essayé de réparer la foreuse et les autres machines. Le matériel est très vieux et nous n'avons pas les moyens d'en acheter du neuf. Aujourd'hui, nous commençons un nouveau forage ; nous verrons si les machines tiennent le coup !

  • Mardi 23 Février : La Cité de la Solidarité.
    C’est le nom d’une Cité construite par le Gouvernement pour abriter les handicapés et mendiants (les deux vont souvent ensemble) de la ville. Ils sont actuellement 110 familles environ. Mai peu à peu, l’Etat les a abandonnés et actuellement il ne les soutient plus. Les associations et des personnes généreuses viennent parfois les aider, mais c’est souvent ponctuel et insuffisant.
    Il y avait aussi environ 80 familles qui vivaient sur les trottoirs dans le centre ville, autour de la mosquée sénégalaise. L’année dernière, le nouveau gouverneur de la région a décidé de les expulser et on les a conduits à la Cité de la Solidarité (la mal nommée), sans aucune préparation. Les premiers occupants ont très mal accepté ces nouveaux arrivants qui ne pouvaient qu’augmenter leurs problèmes et leur pauvreté. Pour ces nouveaux, des ONG ont fini par construire des hangars, dans lesquels ils logent toujours actuellement, et les tensions restent très vives entre les deux groupes.
    Maintenant loin du centre ville, ces mendiants n’ont plus aucun moyen de vivre et se trouvent confrontés à de nombreux problèmes : nourriture, santé, habillement, scolarisation des enfants. Les fosses septiques sont bouchées, les bâtiments dégradés parce que pas entretenus.
    Nous sommes venus avec des membres de la Légion de Marie et des deux Commissions : « Justice et Paix » et « Pastorale Sociale ». Nous commençons par visiter les familles, après avoir salué les responsables des deux quartiers. Après la visite, nous parlons à nouveau avec les responsables. Puis nous nous retrouvons à la paroisse pour tirer les conclusions. Nous décidons d’organiser une rencontre des différentes associations qui interviennent à la Cité pour coordonner et améliorer les aides. Et aussi pour intervenir auprès des pouvoirs publics. Nous décidons aussi d’aller voir l’imam de la Cité pour voir avec lui comment poser les bases d’une réconciliation. Il va falloir maintenant prendre les contacts nécessaires pour cela.
    Améliorer l’éducation. A l’Atelier « Savoir-Fer » des enfants de la rue, les deux formateurs leur enseignent très bien la soudure. Ils leur donnent aussi des cours d’alphabétisation ou une scolarisation de base, selon leur niveau. Nous avons acheté des manuels pour cela, mais les formateurs ont de la peine. Ils manquent de pédagogie et ne préparent pas leurs cours. Nous allons voir une directrice d’école expérimentée, pour qu’elle vienne évaluer les formateurs, afin de leur donner une formation supplémentaire et améliorer les cours.
    Nous parlons avec elle des Centres aérés (activités de vacances pour enfants en difficultés). Là aussi, il ne s’agit pas de faire des cours de vacances, mais de donner aux enfants des bases pour qu’ils puissent s’en sortir à l’école ; et il nous faut également former les éducateurs en conséquence.
    Emission radio. Depuis une heure, une journaliste, Bernadette, m’attend à la maison. Nous enregistrons une émission sur le Carême qui passera sur une radio libre. Ces radios libres se répandent de plus en plus ; elles sont souvent éphémères, faute de moyens, et de qualités inégales, mais c’est important de les aider. Et c’est un gage de liberté dans le pays, même si la plus grande partie du temps d’antenne est occupé par de la musique ou des discussions plus ou moins oiseuses, les débats politiques ayant été interdits à cause des dérapages et du manque de formation des journalistes.
    A 15 heures, je vais saluer l'imam du quartier où est bâtie l’église. Je voulais le faire depuis mon arrivée, mais je n’avais pas trouvé un moment libre où il était disponible. La rencontre est très sympathique et agréable. J’essaierai de le voir régulièrement. Il me faut aussi rencontrer les autorités du quartier.
    Rencontres des Commissions. A 16 heures, après avoir fait les groupes de catéchèse dans les différentes langues, je rencontre les Commissions de la paroisse pour faire le point de leur fonctionnement. C’est un peu le travail à la chaîne, mais c’est le seul moment où je peux les voir. Et ainsi elles peuvent se rencontrer entre elles, se connaître, échanger des idées et poser les bases d’une collaboration mutuelle. En fait, ces Commissions ont de la peine à fonctionner, car cela demande un engagement personnel, mais une fois que les Commissions sont mises en place, les gens ont tendance à s’asseoir. Eternel recommencement. Très peu de personnes s’engagent pour « Justice et Paix ». Pour la « Pastorale sociale », ils ont tendance à attendre que des dons arrivent pour faire des distributions, au lieu de s’engager dans une action de développement à la base. La Commission des « Vocations » est au point mort et celle de « la Famille » se limite à la préparation des mariages, alors qu’il y aurait tout un travail d’éducation et de formation des couples et des parents à faire. La Commission d’organisation n’organise pas grand-chose et laisse les choses traîner et se détériorer. Courage !

  • Lundi 22 Février : Travail à la maison. Je prépare le compte rendu des dernières réunions et me repose un peu.

  • Dimanche 21 Février : Réunion diocésaine de la Commission de "Pastorale sociale". (Voir le document L 67).
    Là aussi, les choses avancent. Un certain nombre de Commissions sont en place. Il faut maintenant organiser leur façon de travailler, car elles ne se limitent encorer qu'à des dons (pas assez d'actions de développement) et attendent trop de recevoir des dons de l'extérieur. Nous voyons comment faire un plan d'action, comment mettre les gens à l'action et comment travailler avec les autorités et les musulmans. Puis nous faisons le tour des paroisses pour préciser les activités. A TAOUYAH, c'est d'abord la visite des familles, l'organisation de rattrapage scolaire, le soutien aux malades (effort de Carême) et la salubrité dans les quartiers. Nous reparlons avec tous de la Cité de la Solidarité (voir plus haut) et de la formation des éducateurs des Centres aérés.
    Avec le père Etienne et les éducateurs des Foyers St Joseph, nous parlons longuement du travail avec les enfants de la rue. Puis nous parlons de la formation et des moyens à trouver pour approvisionner la Caisse.
    Les Foyers St Joseph : Je m'y rends après la rencontre. Nous reprenons la réunion avec l'évêque, prions ensemble et prenons un temps pour la formation des formateurs.
    Je rentre à la maison bien fatigué. Encore une journée bien remplie !

  • Vendredi 19 Février : Charles, responsable diocésain de la Jeunesse, a en même temps des responsabilités et des problèmes dans sa paroisse, où il n’y a pas de prêtre pour le moment. Nous en parlons longuement ensemble.
    Puis, avec Richard, nous voyons comment soutenir les victimes de la tuerie du 28 Septembre qui n’ont pas encore été aidées. Les aides que nous avions reçues sont maintenant épuisées, mais heureusement la plupart des blessés sont en voie de guérison. Cependant, les traumatismes et souffrances intérieurs n’en sont pas terminés pour autant.
    Ensuite, je passe un bon moment à chercher de l’argent pour acheter des pagnes que nous allons imprimer pour le Centenaire de MONGO. C’est urgent. En fait, c’est que l’on fait les choses la plupart du temps au dernier moment, souvent par manque de moyens. C’est cela le sous-développement.
    Prière à l’Hôpital. A 15 heures, je vais à DONKA, le plus grand hôpital de la ville, donner le Sacrement des malades à une vieille femme de la paroisse qui souffre de problèmes cardiaques. Ce n’est pas la première fois que je m’y rends, mais je suis encore une fois choqué par l’état de délabrement, le manque d’entretien et les horribles conditions de vie des malades. Il n’y a pas de courant : il fait une chaleur épouvantable. Quand le courant revient, le ventilateur qu’on nous apporte ne fonctionne pas. Les malades sont dans une salle commune, séparés les uns des autres par une simple bâche. Un malade arrive, on lui fait une première injection, entouré de ses parents, devant tout le monde, en plein milieu de la salle. Et il faut nous faufiler pour pouvoir sortir, après la prière. On comprend que certains malades préfèrent rester à la maison ! … ce n’est pas seulement par manque de moyens financiers.
    Chemin de Croix à la paroisse à 17 heures. C’est une prière qui est très suivie, la mort est tellement présente dans la vie de tous les jours ! Elle est animée par chaque Communauté de quartier, à tour de rôle. Pour ne pas toujours répéter la même chose chaque vendredi nous méditons la passion du Christ à partir d’un des quatre Evangiles à tour de rôle, que nous divisons en 14 stations afin de ne pas trop changer les habitudes.
    Après le Chemin de Croix et pour ne pas faire revenir les gens deux jours de suite, nous prenons chaque vendredi un temps de formation. Aujourd’hui, c’est moi qui commence. Par la suite, ce seront des laïcs de la paroisse. Je voulais faire réfléchir sur le message de Benoît XVI pour le Carême 2010 sur la justice. J’avais bien préparé le commentaire, mais comme j’étais pressé j’ai oublié mes papiers à la maison. Je repars donc du Chemin de Croix que nous venons de suivre, et nous abordons trois points de réflexion :
    1°) Pourquoi Jésus est-il mort ? J’insiste sur sa volonté de servir Dieu et ses frères jusqu’au bout, dans un amour total.
    2°) Le comportement des différents acteurs du Chemin de Croix : les soldats, les prêtres juifs, Simon de Cyrène, Véronique, les apôtres, les femmes, les deux voleurs, et bien sûr Marie. Et nous, quel est notre comportement envers nos frères et sœurs, tout au long de notre vie.
    3°) Les sept paroles de Jésus sur la Croix.
    Après la prière, nous nous retrouvons pour régler le problème d’un garçon de la Communauté qui a « enceinté » une fille et réconcilier les deux familles. C’est cela aussi le Carême !

  • Jeudi 18 Février : Les foyers pour enfants de la rue et malades.
    Etienne a lancé des foyers pour enfants de la rue (garçons et filles) à CONAKRY et aussi à l’intérieur. Il vient d’en ouvrir un à NZEREKORE (au sud est du pays). Il a également des foyers pour personnes âgées et pour malades du SIDA ; Il fait un travail extraordinaire, avec les moyens du bord, et l’aide de nombreux bénévoles et de personnes généreuses, en s’établissant où il pouvait. Mais depuis quelque temps, nous sentons le besoin de donner des bases plus solides à tout cela, pour garantir l’avenir et pour la sécurité aussi bien des enfants que des éducateurs : avoir des titres de propriété des bâtiments, avoir des contrats de travail pour les éducateurs et les inscrire à la Sécurité Sociale. Et aussi rédiger des statuts et se faire reconnaître par les autorités. Nous travaillons à cela jusqu’à 15 heures. (Voir site, rubrique « Pastorale sociale »).
    A 15 heures, je m’éclipse pour aller au dispensaire, où j’arrive juste avant la fermeture. En effet, depuis le coup de froid que j’ai pris la nuit dans le taxi en revenant de Kankan, je traîne une bronchite qui me fatigue beaucoup. Il faut donc que je me décide à me faire soigner.
    Puis je pars rapidement en banlieue pour respecter mon rendez-vous avec une enseignante. Mais quand j’arrive, je ne trouve personne. Elle est partie à un enterrement, mais ne m’a rien dit. Cela arrive souvent.

  • Mercredi 17 Février : Mercredi des Cendres.
    Cérémonie très suivie en Afrique Noire. C’est un rite qui plaît mais qui n’est pas toujours bien compris. Nous prenons le temps de donner le sens du Carême et la signification des cendres. Et la resituant par rapport à l’importance de l’écoute de la Parole de Dieu et de la vie et l’engagement en Carême. La célébration se poursuit par une rencontre des catéchistes pendant que les responsables de Communauté vont donner les cendres aux malades.
    Hier, j’ai attendu toute la journée sans pouvoir ouvrir ma boîte mail. Bernard, qui travaille avec nous, me prête sa clé Internet à brancher sur l’ordinateur. C’est une belle invention mais qui coûte cher ! En tout cas, j’en profite et travaille sur Internet jusqu’à 2 heures du matin.

  • Mardi 16 Février : Je voulais multiplier le compte-rendu, ouvrir ma boîte mail et travailler sur Internet, mais, même au centre ville, de toute la journée il n’y a pas de courant. Bien sûr, cela bloque toutes les activités. Il est difficile à un pays de se développer dans ces conditions.
    Nous avons un nouveau gouvernement. Il a fallu un mois pour le mettre en place, mais il nous semble assez ouvert et représentatif. Les militaires y sont moins nombreux et ce sont les plus modérés qui sont restés. On verra ce qui se passera. Mais après tout ce qui s’est passé en une année, les gens sont assez septiques. Donc on regarde et on attend. De toutes façons, il ne s’agit que d’un gouvernement de transition, qui ne doit durer que six mois et préparer des élections présidentielles acceptées par tous. Il est à craindre que la population n’attende trop de ce gouvernement et soit déçue s’il n’y a pas de résultats concrets immédiats.
    Mais le deuxième problème qui nous préoccupe, c’est qu’à côté de ce gouvernement issu essentiellement de la société civile et de l’opposition, il y a un conseil de la présidence de plus de 20 membres, (certains ayant même un titre de ministre), parmi lesquels se trouvent des militaires de tendance beaucoup plus dure. Ne vont-ils pas bloquer l’avancée du pays ? Est-ce que ça ne sera pas un gouvernement parallèle qui imposera ses volontés ? Nous sommes assez inquiets par rapport à cela. Quant aux élections, elles ne pourront pas avoir lieu dans les 6 mois : les listes électorales ne sont pas prêtes et l’on sera en pleine saison des pluies et période de cultures.

  • Lundi 15 Février : Travail à la maison, pour saisir tout cela. Mais on vient m’avertir qu’il y a un enterrement. C’est Albert, un jeune qui avait des problèmes psychologiques, qui est mort hier. Il était très gentil et tout le monde l’aimait. Il y a beaucoup de monde et la cérémonie est très émouvante.

  • Dimanche 14 Février : Rencontre diocésaine de « Justice et Paix », comme chaque deuxième dimanche du mois. Les participants sont assez nombreux, les Commissions se mettent en place et les gens semblent avoir compris ce qu’est justice et paix. (Voir le compte-rendu déjà envoyé, L 66). Bien sûr, même si on a fait un plan d’action, il reste à le réaliser, mais au moins on a une base à partir de laquelle travailler. La paroisse d’ENTAG est très sympathique et j’en apprécie l’ambiance fraternelle.
    Nous réfléchissons à partir des problèmes actuels. Nous avons un nouveau gouvernement et venons de commencer une période de transition, préparatoire aux élections présidentielles. Nous parlons longuement du rôle de l’Eglise dans la situation politique actuelle et de l’engagement des chrétiens dans le pays.
    Nous venons de vivre des tensions assez fortes à NZEREKORE, dans le sud-est du pays, entre chrétiens et musulmans. C’est un signal pour nous. En cette période de grandes difficultés et de grande pauvreté, les tensions sont fortes et les problèmes, même personnels, sont souvent placés au niveau ethnique ou politique. Se sentant trop faible, on fait appel à son groupe pour se défendre. Avec toutes les conséquences que cela comporte. On se retrouve facilement entraîné dans un circuit sans fin, si on ne fait pas attention. Nous réfléchissons donc longuement aux relations à établir entre croyants, chrétiens et musulmans, aux contacts entre chefs religieux, chrétiens et musulmans, et aux activités communes entre jeunes pour faire grandir l’entente, la compréhension et l’acceptation mutuelle.
    Bien sûr, nous n’oublions pas les contacts avec la gendarmerie et la police, pour la protection et la défense des personnes arrêtées, en particulier les enfants (enfants de la rue, enfants travailleurs dans les marchés et les gares, enfants mendiants, ….).
    Pour terminer notre rencontre, nous prenons un temps de formation, à partir de la lettre de Benoît 16 pour le Carême, qui porte sur la justice et la paix, dans la ligne du 2ème Synode pour l’Afrique.
    Problème de mariage. Malgré la fatigue, je pars dans une famille. Au moment de la demande en mariage de sa fille, un père a refusé de la reconnaître. Cela a entraîné de grandes tensions et de multiples problèmes ; et ce n’est pas facile de recoller les morceaux. J’essaie de poser au moins les premières bases pour pouvoir arranger le problème peu à peu. Mais il faudra beaucoup de tact et de patience.

  • Samedi 13 Février : Un samedi bien chargé. Le matin, deuxième formation des futurs éducateurs pour les activités des vacances du mois d’Août (Centres aérés) (Voir mon site, rubrique « Jeunesse »). Ce matin, nous travaillons sur la psychologie de l’enfant et comment travailler avec des enfants en situation difficile.
    Après cela, je travaille avec l’évêque sur la mise en pratique du synode et la lettre de Carême de Benoît 16 : tout cela porte sur les thèmes de la justice et de la paix. Ill y a du travail à faire. Nous réfléchissons aussi à la formation des jeunes prêtres.
    Rencontre imprévue. Je remonte vers la route principale pour prendre un taxi collectif. Une voiture s’arrête. C’est Sia Tolno, une chanteuse guinéenne bien connue. Nous ne nous étions pas vus depuis longtemps. Elle était venue nous rejoindre à MONGO, juste après les attaques rebelles du Liberia et Sierra Leone en 2001, pour redonner courage et espoir à la population dispersée, partie se cacher dans la forêt. Elle avait été très courageuse et je lui en suis très reconnaissant. (Voir mon site, rubrique « Mongo »). Je suis donc très heureux de la revoir. Elle a composé un certain nombre de chants sur les droits des enfants. Nous parlons de tout cela dans sa voiture pendant qu’elle m’avance sur ma route.
    A 14 heures, nouveau mariage entre une catholique et un musulman. Ils sont de Kataco ; je me sens à l’aise car je parle leur langue, le baga. Nous célébrons leur amour, mais aussi l’alliance entre deux familles, une chrétienne et une musulmane. Et nous prions pour que cela dure et grandisse. Nous gardons bien sûr les rites traditionnels. Aujourd’hui, en tant que Père de la famille chrétienne, en plus des noix de cola, je reçois une bouteille de vin de palme, que je dépose au pied de l’autel. A l’offertoire, les deux familles apportent les offrandes en dansant. Et à la fin de la messe, ce sont les cadeaux aux mariés apportés aussi en procession.
    Après le mariage, réunion des catéchistes. Il nous faut préparer le Carême et l’appel décisif des catéchumènes qui attendent le baptême. Et surtout, tout leur accompagnement par les communautés, les parrains et les marraines. Nous réfléchissons aussi à la mise en pratique de la lettre de Carême.

  • Vendredi 12 Février : Travail à la maison. Le tas de documents à traiter diminue peu à peu. Mais le travail n’avance pas vite. J’ai pris froid (ça arrive assez souvent en Afrique, avec les changements de température). Je tousse et cela me fatigue et m’empêche de me reposer la nuit.

  • Jeudi 11 Février : La voiture de la Mission de DALABA (à 250 km) avait eu un accident, mais nous n’avions pas les moyens de la réparer. Nous avons trouvé un peu d’argent ; aussi un confrère est parti la chercher, avec une « Express ». DALABA est dans les montagnes (Fouta Djalon) et l’Express n’était pas assez puissante. Ils ont mis deux jours à rentrer, avec beaucoup de peine. Maintenant, il va falloir suivre les réparations de près, à CONAKRY.
    A 10 heures, réunion générale des volontaires qui suivent les victimes du 28 Septembre. Nous faisons le point de la situation des différents blessés, femmes violées, familles en deuil que nous soutenons pour évaluer notre action et voir comment l’améliorer. Ensuite, nous organisons la distribution de riz et d’argent. Malheureusement, ce sera la dernière, car nos fonds sont épuisés. Mais nous remercions les personnes et les associations qui nous ont permis de faire quelque chose…et même beaucoup.

  • Mercredi 10 Février : Je reste à la maison avec Emmanuel et j’en profite pour avancer quelques nouveaux dossiers. Je commence la saisie des documents de « Justice et Paix » et « Pastorale sociale », restés en plan depuis décembre. J’accueille la femme d’un coopérant travaillant à l’ambassade de France. Elle suit une chimio, mais malgré tout elle veut continuer des activités, en particulier auprès des enfants en leur projetant des dessins animés : ils ont le matériel pour cela (groupe électrogène, projecteur). Elle veut aussi s’intégrer dans le milieu et apprendre le soussou. Je vais lui trouver un professeur et déjà nous avons une conversation très intéressante sur les réalités guinéennes. Dommage que tous les coopérants n’aient pas les mêmes soucis, ni la même ouverture.
    L’après-midi, je pars à la paroisse pour tenir la permanence, préparer les mariages (il y en a un certain nombre en préparation), mais aussi malheureusement des problèmes de divorce.
    A 18 heures, très bonne réunion du bureau du Conseil paroissial. Nous revoyons le contenu du dernier conseil paroissial (voir dans les « Nouvelles », début de la journée du samedi 6 Février) pour en tirer des orientations précises, en particulier pour le Carême.

  • Mardi 9 Février : Rencontres et contacts à l’Archevêché.
    Il y a du courant, aussi j’en profite pour faire des photocopies. Mais je rentre vite car notre stagiaire a une forte crise de palud (chacun son tour !), il est très fatigué et il va falloir faire des analyses sérieuses.

  • Lundi 8 Février : Travail à la maison pour avancer les dossiers et documents. Mais il y a tellement de choses en retard !

  • Dimanche 7 Février : Aujourd’hui, je suis dans ma paroisse. Nous sommes heureux de nous retrouver. Comme je n’y célébrerai plus la messe jusqu’au mois prochain, je lance déjà le Carême, à partir de la rencontre du Conseil paroissial d’hier. Je pars du texte d’Isaïe 58, que j’aime beaucoup. Pendant la messe, les catéchumènes qui se préparent au baptême, accompagnés de leurs parents, parrains et marraines, viennent réciter le « Je crois en Dieu » devant toute la communauté.
    Rencontre des enfants. Je vous ai déjà parlé de nos rencontres de jeunes à la paroisse (Voir mon site, rubrique « Jeunes »). Les enfants participaient à ces réunions, mais elles n’étaient pas adaptées pour eux. Nous avons donc décidé de lancer quelque chose pour les enfants dont les responsables seraient les enfants eux–mêmes. Il y a déjà des Mouvements d’enfants : les CV.AV (Action Catholique des Enfants), le scoutisme (louveteaux et jeannettes), les enfants de chœur. Mais ce que nous voulons, c’est rassembler tous les enfants dans la joie, pour qu’ils se connaissent, créent des liens et passent à l’action, avec aussi les enfants qui ne sont dans aucun Mouvement. Nous avons parlé de tout cela ensemble, et avons décidé de nous engager chaque mois dans un secteur différent : la famille, l’école, le quartier, les loisirs, etc… Je vous enverrai sans tarder le compte-rendu de cette première réunion. L’ambiance a été très bonne et les enfants sont très motivés.

  • Samedi 6 Février  (Suite) : Rencontre des religieux.
    La réflexion portait sur notre vie de prières, notre vie communautaire et notre collaboration entre prêtres et religieux. Que faire pour que chacun vive profondément l’appel qu’il a reçu de Dieu, au service de la communauté humaine et pour le bien de tout le peuple de Dieu. Nous aurons le souci d’apporter… un meilleur témoignage et une évangélisation plus profonde, en étant solidaires les uns des autres, en nous accueillant et en acceptant nos différences.
    Voici quelques conclusions : Nous sommes au service de tous les hommes sans exception. Nous sommes au service d’un Royaume où les pauvres ont la première place. Un Royaume de justice et de paix, d’amour et de vérité, de pardon et de joie… Il ne suffit pas de bien gérer nos œuvres, en fermant les yeux sur toutes les pauvretés autour de nous. Donner l’exemple ne suffit pas. Il s’agit de nous engager avec les autres, ensemble, pour construire un monde de justice et de paix.
    Au-delà de cette réflexion commune et des encouragements mutuels dont elle a été l’occasion, nous avons beaucoup apprécié de nous retrouver dans l’amitié (les occasions sont rares) et de renforcer les liens entre nous. (Voir le site, rubrique « Religieux »).
    Le lendemain, la paroisse de KALOUM nous a accueillis. Le Frère Charles a parlé de la vocation des Frères, et Sœur Alice a donné son témoignage après 50 ans de vie religieuse (Voir site, à « Vie religieuse »).
    J’ai voulu profiter de cette rencontre pour consulter ma boîte mail, mais à aucun moment je n’ai pu avoir la connexion. Dommage !

  • Samedi 6 Février : Conseil paroissial.
    Cette fois, nous commençons par évaluer la marche de la paroisse, des mouvements, des commissions et des différents groupes. En gros, les choses avancent, les activités se développent et les gens sont contents. Ce sont les Commissions qui ont le plus de peine à fonctionner. C’est vrai qu’elles supposent un engagement plus important et que c’est plus exigeant que de simples activités paroissiales. C’est l’une de nos préoccupations, mais aussi de nos priorités. Après avoir lancé les Commissions de « Justice et Paix » et de « Pastorale sociale », nous allons maintenant organiser les Commissions de « la Famille » et des « Vocations ». Le problème, c’est que les autres chrétiens se déchargent sur les Commissions, comme si seuls leurs membres devraient agir. Alors que le rôle des Commissions est justement de mettre tout le monde à l’action, chacun là où il est. Il faudra du temps pour y arriver, car pour un certain nombre de chrétiens, la vie chrétienne se limite à la messe du dimanche. Et il y a beaucoup de jeunes qui sont engagés dans l’Eglise, les adultes hommes sont moins nombreux, spécialement les cadres. Bien sûr, ils ont de nombreuses occupations, mais le problème est plus profond.
    Le deuxième point, ce sont les questions économiques. Beaucoup de choses n’étaient pas claires dans la gestion depuis 2006. C’était plutôt une mauvaise comptabilité et beaucoup de dépenses ou de dépôts non inscrits plutôt que des détournements. Il n’empêche que cela entraînait un certain nombre de problèmes. Il a donc fallu mettre en place une nouvelle équipe, avec des gens compétents mais aussi disponibles. Cela a pris du temps, mais maintenant nous avons une bonne équipe. Tous les membres ont travaillé très dur, nous avons pu régler tous les cas litigieux à l’amiable et nous allons pouvoir repartir sur des bases claires. C’était nécessaire, si on veut exiger une gestion saine, avec des comptes rendus financiers réguliers de chaque groupe. Sinon, les gens refusent de participer et de cotiser, et cela peut se comprendre !
    Notre préoccupation, c’est la construction du presbytère. Nous avons pu rassembler 20 millions de francs guinéens dans la paroisse (environ 2 500 €) ; l’évêque nous donne 30 millions. Il nous restera à trouver 35 millions, ce qui va nous demander beaucoup de travail et d’efforts. Et nous ne voudrions pas que cette recherche de l’argent bloque les autres activités de la paroisse, l’aide aux pauvres, les actions de développement ou la lutte pour la justice.
    La troisième partie de notre conseil paroissial, c’est la préparation du Carême. Pour cela, la paroisse a l’habitude d’organiser un certain nombre de choses que je vais respecter, bien sûr. Le mardi gras, une grande rencontre pour préparer l’entrée en Carême. Ils m’ont demandé de l’animer et je l’ai préparée avec la Commission des Jeunes : il y aura une conférence avec des réflexions en petits groupes, une projection de film et un repas pris en commun, chaque groupe amenant sa part. Le lendemain, mercredi des Cendres, les responsables de communauté iront apporter les Cendres aux malades. Chaque vendredi, après le Chemin de Croix qui est très suivi, un temps de formation sur la vie chrétienne et l’engagement dans la société. Notre effort de Carême portera cette année sur le soutien et le suivi des malades à tous les niveaux. Pas seulement l’aide économique, mais aussi le soutien psychologique, moral, social et spirituel. Et la prise en charge des malades par leurs familles et les Communautés. Aux différentes prières, nous organiserons des quêtes et cotisations pour alimenter la caisse de soutien de la Pastorale sociale. Dans les communautés de quartier, chaque jour ils iront dans une famille pour une prière à partir de la Parole de Dieu (partage d’Evangile). Et j’irai célébrer la messe le mercredi, en tournant, et participer à leur réunion communautaire. Pour assurer une meilleure connaissance et des bonnes relations entre jeunes, ils ont organisé un tournoi de football (filles comme garçons) et un certain nombre de rencontres et de réflexions en commun. Nous avons également remis à chaque communauté un document de formation sur le Carême. Et chaque dimanche, nous lirons une partie de la lettre de Carême de notre évêque : « Vivre la messe en famille ». (Voir mon site, rubrique « Activités paroissiales»).
    Mais à travers tout cela, le plus important c’est d’arriver à une vraie vie communautaire, une conversion de tous et de chacun, des actions de vraie charité, un engagement plus profond et plus réel des Communautés, et l’avancée du pays vers le pardon et la réconciliation, en ce temps de transition si important.
    La rencontre des religieux. Aujourd’hui nous fêtons la Journée mondiale des religieux. Je pars les rejoindre dès la fin du Conseil paroissial. Cette année, nous réfléchissons à notre engagement de religieux dans nos paroisses et à la collaboration entre prêtres et religieux. Pour nous, il ne s’agit pas seulement d’avoir des activités et de donner un coup de main à la paroisse, mais d’apporter notre charisme et un esprit, et de travailler ensemble, religieux, prêtres et laïcs. Les laïcs nous aidant à mieux vivre notre vocation religieuse.

  • Vendredi 5 Février : Travail à l’Archevêché.
    Puis, le soir, comme chaque vendredi, je me retrouve dans une communauté de quartier. Nous commençons la réunion selon schéma habituel :
    1°) On se donne d’abord les nouvelles : celles du quartier, mais aussi celles venues d’ailleurs. C’est très important pour partager notre vie, nous encourager et créer un esprit de famille.
    2°) Puis c’est le partage de la Parole de Dieu. Après la lecture, chacun dit ce qu’il en pense. C’est très important que chacun ait la parole, pas seulement le prêtre ou le catéchiste, pour arriver à un vrai partage de la foi et que chacun devienne responsable dans la communauté, les femmes comme les hommes, les enfants et les jeunes autant que les adultes, et les personnes âgées. Nous insistons pour qu’on ne se limite pas à la morale, ni même aux actions à mener, même si c’est important, mais plutôt qu’on s’attache à regarder Dieu et se demander d’abord : qu’est-ce que ce texte nous fait connaître de Jésus-Christ ? et ensuite, quelle est la Bonne Nouvelle de ce texte ? Qu’est-ce qui nous donne force, joie, courage, espérance ? Le tout se termine bien sûr par la prière.
    3°) Ensuite, on passe à la vie de la Communauté. D’abord, quelles injustices avons-nous remarquées autour de nous ? Quelles personnes fait-on souffrir injustement ? Qu’allons-nous faire contre cela ? On travaille aussi à partir du plan d’action fourni par la Commission paroissiale de « Justice et Paix ».
    4°) L’aide aux pauvres. Quelles sont les personnes démunies autour de nous ? Comment allons-nous les soutenir (en leur donnant les moyens de se prendre en charge elles-mêmes ? Comment fonctionnent les petits projets que nous avons initiés (avec l’aide de la Commission de « Pastorale sociale) ?
    5°) La réconciliation. D’abord comment aider à vivre ensemble les personnes qui ne s’entendent pas ? Comment les réconcilier ? Comment désamorcer les conflits latents autour de nous ? Comment éduquer à la paix ?
    6°) A partir de là, nous pouvons élaborer notre programme de prières communautaires pour les malades, les familles en deuil, les nouveaux nés, la bénédiction des maisons et des différents travaux, etc… Et ensuite, organiser les travaux à faire et régler les questions d’argent (cotisations, comptes rendus, etc…) (Voir dans mon site la rubrique : « activités paroissiales).
    Bien sûr, cela marche plus ou moins bien, d’après les communautés, et il faut du temps pour que les gens s’y mettent. C’est encore très nouveau, surtout en ville où on n’a pas la même unité culturelle et partage de la vie que dans les villages. Mais c’est d’autant plus important en ville, pour permettre aux chrétiens, -souvent isolés et même perdus dans une grande majorité musulmane de plus de 90 %, parfois même fortement agressés, marginalisés et rejetés quand ils cherchent un emploi ou un logement- leur permettre donc de se retrouver entre gens de différentes ethnies (car jusqu’à maintenant l’unité nationale n’existe pas vraiment, c’est d’abord l’ethnie qui compte). Et nous luttons pour que les chrétiens, réunis en communauté, ne se renferment pas sur eux-mêmes, mais au contraire s’ouvrent à toutes les religions et travaillent avec tous. Et même cette mise en place des communautés est plus récente en ville, au moins nous avons des gens alphabétisés et formés sur qui nous appuyer et qui peuvent plus facilement prendre des responsabilités. Bien sûr, beaucoup ne viennent pas, d’autres sont en retard (ça, c’est général), mais les choses changeront au fur et à mesure que les communautés se mettront en place. (Voir mon site : « activités paroissiales »).

  • Jeudi 4 Février : Internet à l’archevêché.
    Il y a du courant, alors j’en profite pour travailler sur Internet, à la recherche de documents pour établir Cahier des charges, termes de références, contrat… autant de mots inconnus et de choses bizarres auxquels il faut bien que je m’habitue dans mes nouvelles responsabilités. C’est vrai que dans les ONG on utilise un vocabulaire spécial, la plupart du temps inspiré de l’américain : il n’y a plus de sexe féminin mais seulement du genre, on fait de la surformation, on qualifie (pas pour qualifier mais pour rendre meilleur) on capitalise (pas l’argent mais les expériences), on ne travaille plus avec des gens mais avec des groupes cibles (est-ce qu’il faut tirer dans le tas), il faut vendre….. Il faut s’y faire. Mais l’homme et ses valeurs risque de se perdre dans tout cela. Et ceux qui ne sont pas dans le coup sont laissés sur le bord du chemin.
    Avec Bernard, je travaille sur mon site et sur le blog « Justice et Paix ». J’ouvre mon courrier et reçois des messages d’un peu partout dans le monde. C’est beau Internet ! Par contre, je ne peux envoyer aucun message que j’avais préparé en brouillon, ni aucun nouveau message : pas de connexion, serveur saturé parce que trop faible. La technique a ses limites ! Je me replie sur la préparation de la formation pour les Centres aérés. De toutes façons, ce n’est pas le travail qui manque, et ça fait longtemps que je devais m’y mettre. Heureusement que les bics fonctionnement mieux qu’Internet… bien que parfois ils coulent dans ma poche : tant pis pour le pantalon !
    De retour à la maison, il y a encore du courant. Mais je me réjouis trop vite. Quand je branche mon ordinateur, je vois que le cordon d’alimentation est foutu. La batterie est vide ! Et demain je ne pourrai m’en occuper. Je téléphone à Bernard qui ira me chercher un autre transformateur. Heureusement que le téléphone fonctionne ! Pour trouver l’argent, on se débrouillera…. Comme d’habitude !

  • Mercredi 3 Février : Je décide de rester à la maison pour remettre en ordre et rédiger un certain nombre de documents en retard. Au moment où je veux imprimer les premiers à partir des panneaux solaires, le fusible saute. Je vais être bloqué pour longtemps, car on ne trouve pas ces fusibles à Conakry. Et du coup, il n’y a plus de courant pendant la journée, ce qui va nous handicaper longuement. Je commence à saisir sur l’ordinateur les comptes rendus des trois sessions de formation passées. Je devais aussi composer quelque chose sur le travail dans les prisons pour Caritas Allemagne, et également sur le travail avec les victimes du 28 Septembre pour les associations Raoul Follereau et Guinée Solidarité, mais la batterie est vide. Du coup, je me rabats sur la préparation des activités de la paroisse.

  • Mardi 2 Février : C’est l’anniversaire de la mort de notre deuxième fondateur (lors de la révolution française, la plupart des spiritains avaient disparu), un juif converti, François Jacob LIBERMANN : c’est donc un jour de fête pour nous, qui nous appelle à approfondir notre charisme et notre vocation missionnaire. Après un temps de prière, nous poursuivons nos activités diverses et nous nous retrouverons ce soir pour un repas un peu plus festif que d’habitude. Il y a cinq communautés de spiritains = au nord ouest, frontière du Sénégal, KOUNDARA, chez les Peuhls, Bassaris et Coniaguis ; au nord de Conakry, à KATACO, chez les Baga, et BOFFA, chez les Soussous, la dernière plein sud, à MONGO, chez les Kissiens, entre le Liberia et la Sierra Leone. J’ai travaillé dans ces trois dernières Missions. (Voir mon site, à ces noms). A CONAKRY, dans la banlieue, nous sommes trois qui, en plus de notre travail missionnaire (développement, accueil des étrangers, justice et paix, relations avec les autres religions, etc…) tenons deux paroisses : à LAMBANYI (John) et TAOUYAH (moi-même, aidé par un jeune Nigérian : Emmanuel, en stage de formation missionnaire pour une année). Mais bien sûr nous travaillons avec tous : prêtres guinéens et laïcs, chrétiens et musulmans, aux différents niveaux.
    Pendant la journée, nous avons une très longue réflexion avec l’Archevêque. Vu mes deux longues absences il y a beaucoup de choses à revoir. Et ensuite, je fais le tour des différents services pour suivre l’avancée des activités.

  • Lundi 1er Février : Je reste à la maison pour classer mes papiers, travailler des documents et rédiger des textes qu’on m’a demandés. Pendant la journée, un Rwandais vient me voir. Il est venu rejoindre son frère mais, en arrivant, il apprend qu’il est mort. Il loge au marché, n’a rien à manger et cherche du travail. De tels cas arrivent chaque jour.

  • Vendredi 29 à Dimanche 31 Janvier : Je pars pour Fria, à une centaine de kilomètres, pour une session de formation et la mise en place d’une Commission de « Justice et Paix ». Un peu comme je l’ai fait à Kankan et Kissidougou (Voir les nouvelles de la semaine dernière). Pour les personnes qui seraient intéressées par le contenu de la formation donnée, voir mon site, rubrique « Justice et Paix », page : formation.
    Je suis frappé par l’engagement des participants. Ils sont venus très nombreux pour une paroisse (45 personnes). Toutes les communautés de base, les groupes et mouvements divers ont envoyé un délégué. Et le curé a participé à toute la formation. Et cela bien que nous soyons en pleine Coupe d’Afrique… mais bien sûr, nous avons aménagé l’horaire en conséquence !

  • Vendredi 29 Janvier : Avec Bernard, volontaire qui nous aide à suivre un certain nombre de projets : l’atelier Savoir-Fer, le projet hydraulique, etc….
    La rencontre avec l’Archevêque se passe très bien. Il est satisfait du travail accompli et des orientations prises par la paroisse. Pour moi, je félicite devant lui les responsables pour leur engagement. Nous nous sommes lancés également dans la construction du presbytère. Cela fait plus de 10 ans que les travaux sont commencés ; chaque année nous faisons quelque chose, mais les prix augmentent de plus en plus. Nous voudrions terminer les travaux cette année. La paroisse a vidé entièrement sa caisse (20 millions de francs guinéens, soit 2 500 €), résultat des économies des trois années passées ; l’évêque nous accorde 30 millions. Il nous faudra encore trouver 35 millions pour terminer la première tranche. Il va falloir mobiliser toutes les troupes et faire un vrai travail de fourmi. Sans que cette recherche d’argent ne bloque les activités pastorales, les projets de développement et l’aide aux pauvres.

  • Jeudi 28 Janvier : Retour à l’Archevêché pour l’accueil des gens. Premier problème : une jeune maman, malade du SIDA, va accoucher. On va lui faire une césarienne pour éviter à l’enfant d’être contaminé ; ce sera pour elle la deuxième césarienne. Elle avait eu des problèmes pour allaiter son premier bébé ; il va nous falloir trouver du lait. Nous avons bien reçu du lait en poudre par l’Association Appel Détresse, mais dans ce cas précis, il ne fera pas l’affaire !
    Mon confrère de KATACO vient d’arriver. Sa voiture n’est pas grande, mais nous en profitons pour envoyer un premier lot de matériel reçu par le conteneur d’Appel Détresse. Nous voyons aussi comment trouver un camion pour envoyer le reste. Nous faisons appel à un ami du projet hydraulique, qui dépend aussi de la pastorale sociale (voir mon site), car c’est cela notre problème : comment faire arriver à ceux qui en ont le plus besoin le matériel que nous recevons, et veiller à ce qu’il soit utilisé le mieux possible. En tout cas, merci encore à tous ceux qui nous aident.
    Avec Richard, nous étudions un projet que les Salésiens vont lancer dans un quartier populaire, à NONGO : un centre pour l’éducation des jeunes, au point de vue culturel et sportif et pour l’alphabétisation et la réinsertion scolaire. C’est Richard qui a mené l’enquête préliminaire dans le quartier. Il est formateur dans la Commission diocésaine de « Pastorale Sociale » et passe chaque dimanche dans une nouvelle paroisse pour animer la Commission de pastorale sociale. Il est aussi formateur des futurs éducateurs des Centres aérés pour les enfants pendant les vacances. A cause de ses capacités et de son engagement, nous pensons l’intégrer dans l’équipe des éducateurs de l’atelier des enfants de la rue (dans mon site, voir la rubrique « Savoir-Fer »). Il est aussi bien engagé dans le soutien aux victimes du 28 Septembre. Je suis dans l’admiration de voir les progrès et l’engagement de ce jeune, et de beaucoup d’autres jeunes, avec lesquels j’ai la joie de travailler au fil des jours.

  • Mercredi 27 Janvier : J’ai une occasion pour faire partir mon courrier. J’en profite ! Puis je pars à C.R.S. pour le suivi des différents projets que nous avons travaillés hier : nous faisons une réévaluation pour les relancer et les améliorer pour cette nouvelle année : les écoles de brousse d’OUROUS et KOUNDARA, les Jardins d’enfants et le Centre de formation national de LAMBANYI, le soutien aux victimes du 28 Septembre, le Centre des handicapés de KIPE, l’atelier « Savoir-Fer » des enfants de la rue, les Commissions (Voir mon site, à ces différentes rubriques). Nous préparons aussi la lettre de présentation des activités de la paroisse pour notre rendez-vous avec l’évêque.
    C.R.S. accepte de prendre en charge le nouveau responsable de l’OCPH. Nous les en remercions, car nous n’aurions pas les moyens de le faire par nous-mêmes. Il va falloir préparer le Cahier des charges et le contrat. C’est important de bien préciser les choses pour éviter des problèmes inutiles. Mais ces formalités administratives ne sont pas mon fort ; là aussi je vais me faire aider !

  • Mardi 26 Janvier : Le centenaire de la Mission de MONGO.
    Winfried, mon successeur ghanéen à MONGO, est arrivé à temps à Conakry. Il prépare le centenaire de la paroisse de Mongo. Ce sera un événement important et nous tenons à le préparer le mieux possible. Il y a donc beaucoup de choses à prévoir et à organiser. (Voir mon site, rubrique « Guinée – Mongo »). Je passe toute ma journée à revoir le livret de 60 pages que nous avons préparé pour cette fête, et à relire les épreuves à l’imprimerie. C’est un gros travail qui demande beaucoup d’attention et de tension nerveuse.
    Je prends quand même un temps pour aller faire soigner au dispensaire ma deuxième cheville, où j’ai une plaie qui commence à s’infecter. Je veux me soigner tout de suite pour ne pas avoir les mêmes problèmes qu’avec la première cheville ! De plus, j’ai pris froid pendant le voyage de nuit à Kankan, dans un taxi avec toutes les vitres ouvertes. J’avais oublié qu’il fait frais en cette saison à l’intérieur du pays, avec l’Harmattan qui souffle. J’avais bien un deuxième tee shirt que j’aurais pu passer par-dessus, mais il était dans mon sac à dos, lui-même attaché sur le toit du taxi ! Du coup, j’ai une bonne angine !

  • Lundi 25 Janvier : Le carburant est rare et les files d’attente longues devant les stations-service. Ce problème vient de ce que le pays manque d’argent pour en acheter et que la situation du pays l’oblige à le payer « cash », d’une part, mais aussi de la spéculation : des gens s’arrangent avec les responsables des stations pour acheter du carburant la nuit et le revendre au prix fort au marché noir.
    Le nouveau gouvernement traîne à se mettre en place. Le premier ministre a été nommé : Jean-Marie DORE. Le président par intérim, le général KONATE, lui a envoyé une feuille de route. Il a réduit le nombre de militaires de 10 à 3 dans le gouvernement. Mais les syndicalistes demandent aussi leur place. Et le général a prévu un conseil à la présidence, de 20 membres : un gouvernement parallèle en quelque sorte et qui risque de s’imposer au gouvernement officiel. En ce moment, c’est la course aux postes. A cause de cela, le gouvernement tarde à être mis en place. Et surtout, cela nous inquiète beaucoup pour l’avenir. Beaucoup semblent plus soucieux de l’argent que du bien du pays.
    J’ai voyagé toute la nuit, avec tous les problèmes dont j’ai parlé la dernière fois. J’arrive très fatigué, mais je pars à l’archevêché car il y a bien des choses à voir et à faire… comme d’habitude. D’abord, il faut finaliser la lettre de l’évêque pour cette nouvelle année, qui a déjà beaucoup tardé. Il y a aussi des problèmes à l’atelier « Savoir-Fer » avec les formateurs, au sujet des outils et du changement de statut de l’atelier. Puis nous continuons la réflexion avec Raoul, le nouveau responsable de l’OCPH (Organisation Catholique pour la Promotion Humaine) qui ne marche plus et que nous essayons de relancer, ce qui n’est pas facile car il faut changer les habitudes de laisser aller et de recherche du profit à tout prix.
    Heureusement, Jacqueline me donne un bon coup de main pour saisir sur son ordinateur le compte rendu financier et le rapport d’activités de nos actions en faveur des victimes du 28 Septembre que Jean a préparé pour moi avec soin et rapidité. C’est une chance qu’il y ait ainsi des gens qui nous apportent leur aide. C’est ce qui nous permet de tenir le coup et de mener autant d’activités à la fois ; car, comme dit le proverbe ici : « Il faut cinq doigts pour bien se laver la figure » !

  • Mardi 19 Janvier 2010 : Tôt le matin (à 5 h 30), Raphaël me conduit en moto à la gare routière pour être sûr d’avoir le premier taxi en partance pour KANKAN où je vais commencer une deuxième session à partir de 15 heures. J’arrive juste à temps. Comme je n’avais pas pu faire de formation l’année dernière, il y a davantage de choses à reprendre ; et d’abord poser les bases nécessaires pour le travail. Mais comme les gens sont motivés, cela avance vite. Cette fois, les différentes paroisses ont envoyé des délégués, et, avec le soutien de l’OCPH du diocèse pour assurer le suivi, j’espère qu’il y aura une suite.
    Nous travaillons spécialement le document sur l’évolution du pays depuis une année et la prise du pouvoir par les militaires. C’est important de voir d’où l’on vient pour réorienter les choses et préparer l’avenir. Nous ne sommes pas tous d’accord, mais nous cherchons ensemble.

  • Lundi 18 Janvier : Je monte de bonne heure à l’Archevêché car il y a beaucoup de choses à faire et je dois voyager cette nuit. Nous commençons par la réunion du Bureau de l’Association de l’Atelier « Savoir-Fer » des Enfants de la rue. Cet atelier a été lancé par des bénévoles français pour répondre à un vrai besoin d’éducation et de formation des jeunes en difficultés. Ils ont très bien travaillé au début. Ils envoyaient des jeunes volontaires, logés et soutenus par le diocèse. Mais ne pouvant plus assurer le suivi et la charge de l’Atelier, ils étaient venus me voir jusqu’à Kataco pour me demander de prendre la relève de leur association. En accord avec l’évêque, nous avons accepté. Mais ils ont eu de la peine à accepter nos nouvelles orientations et surtout à abandonner le pouvoir. Bien sûr, nous n’avons pas pu accepter de nous laisser téléguider depuis la France, d’autant plus que la situation évolue sans cesse en Guinée et ils nous ont mis des bâtons dans les roues. Maintenant, ils veulent nous reprendre le matériel qu’ils nous avaient donné, alors même que leur association est dissoute ! C’est quand même dommage qu’une belle action de solidarité se termine ainsi ! Comme si les difficultés n’étaient pas assez nombreuses pour ne pas s’en créer des supplémentaires inutilement. Nos deux formateurs, Hervé et Abdoulaye, sont gravement perturbés par cette affaire.
    Après cela, nous allons à la banque pour retirer de l’argent pour la construction du presbytère, et d’abord pour assurer la réparation du forage qui nous a été offert par le CNDD mais qui ne fonctionne pas et qui devrait nous permettre d’avoir de l’eau, non seulement pour le chantier mais aussi pour les besoins des gens du quartier. Ce n’est qu’aujourd’hui que nous pouvons enregistrer nos signatures car jusqu’à présent nous n’avions pas pu mettre en place un Conseil économique viable. Il nous reste maintenant à trouver les finances pour terminer les constructions. Cela ne va pas être facile.
    Ensuite, je passe à la Caisse de Sécurité sociale. Voilà quatre mois que j’essaie d’y inscrire notre cuisinière, mais les papiers ne sont toujours pas faits ! Patience !....
    Ensuite, travail avec Raoul, le nouveau responsable de l’O.C.P.H. Nous étudions d’abord un certain nombre de petits projets, pour apprécier leur viabilité. Puis, nous réfléchissons à l’orientation à donner à l’OCPH pour qu’elle soit vraiment efficace et au service des plus pauvres : ne pas faire des gens des assistés, mais qu’ils agissent par eux-mêmes ; mettre en place une gestion claire, sans détournements d’argent ni coulage. Nous commençons aussi à préparer le prochain Contrat de Travail de Raoul.
    Je voulais partir à la gare routière, mais l’évêque me demande de travailler une nouvelle fois le projet de lettre pastorale pour cette année 2010. Après cela, son chauffeur me conduit à la gare routière.
    Voyage CONAKRY – KISSIDOUGOU.
    Finalement, il faut deux heures pour que le taxi-brousse se remplisse (tant qu’il n’a pas fait le plein, il ne part pas) et encore trois heures avant qu’il ne parte : le temps que le chauffeur aille manger et régle ses différentes affaires. Il fait nuit quand nous démarrons, pour 14 heures de voyage, à 10 personnes dans une berline, serrées plus que des sardines… La plupart des voyageurs parlent kissi ; je me retrouve donc en famille. Le chauffeur, pour ne pas s’endormir, met des cassettes de musique en permanence à tue-tête. Pas facile de dormir dans ces conditions. De plus, toutes les vitres sont baissées et comme c’est la saison fraîche, avec la vitesse, il fait très froid. J’ai bien en deuxième tee-shirt, mais il est enfermé dans mon sac, sur le toit du taxi, au milieu d’un nombre énorme d’autres sacs. Je m’attache un mouchoir autour du coup, mais cela ne m’empêchera pas de prendre froid. Je ne serai pas en forme pour assurer ma session de formation !
    Mais le pire, ce sont les barrages des militaires : 18 pendant le voyage ! Il faut descendre pour passer en rang à des postes de contrôle, en pleine brousse où, la nuit, on risque de tomber et de se blesser. On nous demande de présenter nos cartes d’identité, sous prétexte de lutter contre l’insécurité. En fait, c’est un véritable racket organisé. Il faut renouveler sans cesse ses cartes d’identité, de sorte que beaucoup de gens n’en ont pas, en particulier ceux qui habitent dans les villages. Car alors il faut aller faire de nombreux voyages jusqu’à la préfecture parce que la carte n’est jamais prête, ce qui oblige à revenir. Ensuite, ce sont des tracasseries sans fin : les militaires ne savent pas lire mon passeport (pour les étrangers, en Guinée, en plus du visa de séjour, il faut un visa d’entrée sortie ! : tout cela coûte très cher, mais c’est un moyen de gagner de l’argent pour l’Etat… ou pour les gendarmes, militaires, douaniers ou policiers de toutes sortes, car bien sûr l’argent va dans leur poche). Après le passeport, on me demande en plus une carte d’identité, puis un ordre de mission, puis mon carnet de vaccinations, et enfin 5.000 FG que je refuse de payer, puisque je suis en règle. Mais il ne suffit pas d’être en règle. Au poste, un malien, qui a pourtant ses papiers, et alors que la libre circulation est décrétée entre les différents pays d’Afrique de l’Ouest, se fait arrêter et dépouiller de tout son argent. Au retour, ce sont des Nigérians qui arrivent en Guinée et qui se font tout voler par les militaires. C’est une véritable honte ! Et les gens sont vraiment fatigués de ce comportement des militaires qui obligent à payer 5.000 FG à chaque barrage quand la carte d’identité n’est pas en règle. C’est déjà une somme importante, et énorme quand elle est payée à chaque barrage. C’est pourquoi à tous les arrêts, ce sont des discussions sans fin. D’ailleurs au retour, le chauffeur ne fera même pas contrôler les cartes. Il donnera directement l’argent aux militaires qui le laisseront passer, sans contrôle. Avec tout cela, au lieu d’arriver à 4 heures du matin, nous arrivons juste à 10 heures. Les gens m’attendent car la formation devait commencer à 8 heures. Heureusement qu’ils sont patients… et qu’ils connaissent les réalités du pays.
    A ma descente du taxi, deux Sierra léonais viennent me saluer. Je les avais connus dans les camps de réfugiés et ils sont restés en Guinée. Je suis tout heureux de les revoir et de constater que ça va à peu près bien pour eux.
    Formation à « Justice et Paix ».
    Cette formation va durer jusqu’à jeudi soir. J’étais venu l’année dernière pour une première formation ; je vois aussitôt que les gens en ont très bien assimilé l’enseignement, mais la mise en pratique n’a pas suivi et ils ne sont pas passés à l’action. C’est toujours le même problème ! Il va falloir avancer dans la formation, mais d’abord les remotiver. D’autant plus que les problèmes du pays sont énormes et que la situation a bien empiré depuis l’année dernière.
    Cette année, après avoir revu les explications de base et revu comment mettre en place une Commission « Justice et Paix », nous abordons des points nouveaux : comment bâtir un plan d’action ; comment agir sur les causes ; comment faire une analyse sociale. Nous voyons les méthodes et moyens d’action à notre disposition et expliquons la non-violence active, dans la ligne des Gandhi, Martin Luther King, Nelson Mandela, et donc de l’Evangile (Voir la Session d’Abidjan, « Nouvelles du 8 au 15 Août 2009).
    Ensuite, nous travaillons des passages importants de la Déclaration finale des évêques, à la suite du 2ème Synode pour l’Afrique.
    Puis nous travaillons le document que je vous ai déjà envoyé sur la  situation du pays au 23-12-2009, 1er anniversaire de la prise du pouvoir par les militaires. La discussion est très approfondie et intéressante. Les opinions sont diverses, la discussion a lieu d’une manière très pacifique, dans l’écoute mutuelle, sans se couper la parole, et dans le respect de tous. Cela nous permet d’améliorer notre texte et de préciser les actions à mener.
    Comme à chaque fois, les participants ont très bien travaillé. Mais ils n’étaient pratiquement que du Centre. La communication n’est pas passée. C’est un problème que nous retrouvons en permanence, faute de motivation des responsables, des prêtres en particulier. Le 2ème problème reste la mise en pratique de la formation.
    Le soir, il me reste un peu de temps. Je rencontre la communauté anglophone, composée essentiellement des anciens réfugiés avec qui je travaillais, et qui ont décidé de rester en Guinée. J’ai été très heureux de les revoir et de passer un moment avec eux.
    Je termine la journée chez les Sœurs, dont l’une, Jeanne, est très engagée pour « Justice et Paix ». Nous évaluons ensemble la session.
    A cette session, j’ai spécialement apprécié la présence du curé, Raphaël, qui a suivi la formation en permanence. C’est le premier prêtre dont j’ai assisté à l’ordination à mon arrivée en Guinée, en 1996. Nous nous entendons bien et j’apprécie la façon dont il essaie de bâtir sa paroisse. Nous avons d’ailleurs profité des pauses pour parler ensemble.

  • Dimanche 17 Janvier : Réunion de la Commission diocésaine de « Pastorale Sociale », comme chaque mois.
    Je concélèbre avec le prêtre qui a fondé cette paroisse de Notre Dame des Monts d’Hambdallaye. Il vient de rentrer de France après ses études et est venu saluer ses ex-paroissiens. La joie est grande ! C’est cette église qui a été construite par l’ex-ambassadrice de France en Guinée, qui, par ailleurs, m’avait décoré de la Légion d’Honneur. Bien sûr, j’étais à l’inauguration de l’église, à laquelle je me sens très lié.
    Pour la rencontre, j’ai comme toujours une impression mitigée. Les participants sont très sympathiques et semblent motivés, mais ils ont toujours autant de mal à passer à l’action. Et puis, j’ai l’impression de toujours recommencer à zéro, car ce ne sont presque jamais les mêmes personnes qui reviennent d’un mois sur l’autre.
    L’une des questions longuement abordée est celle des finances, car il faut bien sûr des moyens pour aider les pauvres et pour lancer des petits projets. Heureusement Suzanne est là, avec toute l’expérience de son quartier de Yimbaya. Elle leur explique comment se prendre en charge par des cotisations, des quêtes, une participation de la paroisse, et d’autres activités, pour avoir de l’argent. En effet, nous insistons beaucoup sur la contribution locale. Nous n’aidons les gens et groupements que s’ils ont commencé par faire quelque chose par eux-mêmes. Un proverbe d’ici affirme : « Si tu veux qu’on te lave le dos, commence par te laver le ventre ! ». Et nous insistons beaucoup sur le travail en commun, comme le dit un autre proverbe : « Un seul doigt ne peut pas ramasser un caillou par terre ». A Yimbaya, ils se sont lancés dans la fabrication de savon artisanal à partir de l’huile de palme : cela fournit un petit revenu à une vingtaine de veuves. A Sangoya, ils ont lancé une petite boulangerie ; à Hamdallaye, des femmes rassemblées en groupement vendent des légumes venus du village ; ailleurs, c’est un atelier de teinture.
    Le soir, à mon retour, des gens m’attendent pour des problèmes de mariages et autres.

  • Samedi 16 Janvier : Le matin, rencontre du Conseil Paroissial de la paroisse de TAOUYAH. La paroisse est en pleine évolution et il y a beaucoup de choses à traiter. Le premier point, c’est d’évaluer la façon dont nous avons vécu le temps de l’Avent, la préparation de Noël et les différentes fêtes (voir les « Nouvelles » du mois de décembre) à tous les niveaux : matériel et spirituel, personnel, familial et en communauté, par les chrétiens et avec les autres, etc… Comme les responsables de pratiquement tous les groupes sont venus, il y a beaucoup d’interventions. Les innovations pour les prières et les messes sont appréciées, de même que la Veillée de Noël où différents groupes –y compris d’adultes, pas seulement les enfants et les jeunes- ont présenté comment vivre Noël aujourd’hui. Au lieu de présenter toujours les mêmes tableaux de Noël.
    On a félicité les jeunes pour la Fête des enfants du 25 décembre, très bien organisée, et pour laquelle on a invité des enfants travailleurs, des enfants de la rue, des enfants mendiants et handicapés. Il faudra voir comment suivre et soutenir ces enfants tout au long de l’année.
    Pour la préparation spirituelle de Noël, nous avions demandé à tous de créer des liens et de soutenir les handicapés à tous les niveaux. Et de prendre un temps de réconciliation en famille, réunis tous ensemble. Cela n’a pratiquement pas été fait. Il faudra revoir cela au moment du Carême.
    Nous abordons aussi les aspects matériels et financiers. Au vu des activités réalisées, il n’y a pas eu de détournement d’argent. Mais il reste toujours difficile d’obtenir des comptes clairs et précis. Pourtant, cela est très important. Non seulement pour l’Eglise, mais aussi pour la vie du pays. Je n’ai pas encore pu obtenir les comptes des différents groupes de l’année passée. Nous décidons que toute aide sera bloquée tant que ces comptes ne seront pas présentés. Déjà, à mon arrivée à la paroisse en Octobre, j’avais constaté que le Conseil économique ne fonctionnait pas. Il nous a fallu deux mois pour mettre en place un nouveau Conseil ; maintenant, c’est fait. Nous leur avons demandé de reprendre tous les comptes depuis 2006 pour vérification et éclaircissements, afin de pouvoir élaborer un programme économique valable et réaliste pour cette année. C’est un gros travail. Heureusement que les documents sont là.
    A ce niveau, notre premier souci est de remettre en état le forage qui nous a été offert par le CNDD, mais dont certaines pièces sont défectueuses. Les soucis d’économie ne sont pas toujours rentables à long terme. Le remplacement des pièces va nous coûter cher, nous allons donc faire des quêtes spéciales car c’est nécessaire ; pas seulement pour avoir de l’eau à la paroisse, mais surtout pour fournir de l’eau aux gens du quartier qui n’en ont pas.
    Notre deuxième souci, c’est la construction du presbytère. Dans un premier temps, nous voudrions au moins aménager une chambre pour le prêtre qui vient dire des messes chaque week-end depuis le Grand Séminaire situé à 35 km de Conakry, puisque mes autres responsabilités font que je ne suis dans la paroisse que le premier dimanche de chaque mois. Nous avons mis un lit dans un futur bureau, mais il n’y a ni eau, ni électricité, ni cabinet.
    Les nombreuses interventions et les problèmes abordés nous empêchent d’aller au bout de l’ordre du jour. Je me contente de donner quelques impressions sur la marche de la paroisse et des différents Mouvements. Le responsable de la Jeunesse donne des pistes pour la relance des activités des jeunes à partir de demain. Et la vice-présidente annonce le lancement d’une coordination des enfants pour la paroisse pour le 1er dimanche de février. C’est pour nous une nouvelle étape importante dans l’organisation de la paroisse et dans laquelle nous mettons beaucoup d’espoir.
    Il nous reste beaucoup de points à aborder ; ce sera pour la prochaine fois, car le temps est dépassé et nous sommes fatigués. De plus, des gens nous attendent déjà pour la catéchèse, la préparation des baptêmes et des mariages, les contacts, les problèmes, les cas sociaux, les souffrances à soulager, les gens à défendre, les cas à solutionner, et tous les autres soucis et difficultés.
    J’ai bien avancé le travail à la paroisse (sans l’avoir terminé… car c’est un travail sans fin !) et cela fait plaisir de voir que les choses avancent.

  • Vendredi 15 Janvier : Retour à l’Archevêché. Activités diverses, avec tous les imprévus… ça met du piment dans la vie !
    Avec Jean, nous préparons la suite du soutien aux blessés du 28 septembre et aux familles en deuil.
    Le diocèse de NZEREKORE. J’apprends qu’Eléonora, une volontaire du Secours Catholique d’Italie, vient de rentrer. Elle travaille à l’extrême sud du pays d’où la difficulté de nous rencontrer. J’en profite donc pour parler avec elle de ce qui se passe dans le diocèse de Conakry, des projets de développement qui sont en cours, et du travail de « Justice et Paix ».
    J’étais parti donner une première formation l’année dernière, mais il faudrait assurer le suivi et reprendre les choses. Ce n’est pas facile, vu les distances, les difficultés de déplacement et de communication, la situation actuelle du pays, et tout le travail qui est le mien, sans parler de la fatigue et des problèmes de santé. Eléonora m’explique ce qu’ils sont en train de mettre en place ; je lui donne mon point de vue et nous voyons ensemble ce qu’il est possible de faire. Nous travaillons dans des conditions vraiment très difficiles. La bonne volonté et le courage ne peuvent pas toujours surpasser ces nombreux obstacles.
    Dans la foulée, j’en profite pour rencontrer David, le responsable de C.R.S. qui vient de rentrer lui aussi d’Italie. Il partage avec Eleonora et moi ses différents contacts au niveau de l’organisation internationale et le bureau pour l’Afrique des Caritas (Secours Catholique). Nous voyons les conclusions à en tirer pour améliorer notre travail sur le terrain. Nous dégageons des priorités pour cette année et préparons la rencontre avec les évêques la semaine prochaine.
    Puis nous passons aux projets que nous avons en cours : les deux commissions de « Justice et Paix » et de « Pastorale Sociale), le soutien aux victimes du 28 septembre (voir les « Nouvelles » antérieures), les écoles de brousse, les jardins d’enfants, les enfants de la rue, etc…

  • Jeudi 14 Janvier : Réunion mensuelle de notre communauté religieuse missionnaire spiritaine.
    Comme chaque mois, nous faisons le point de notre vie de prière et de communauté, depuis « l’entente fraternelle » toujours à améliorer jusqu’aux « questions matérielles et financières ». Nous cherchons à faire le maximum pour nous-mêmes, et à vivre aussi simplement que possible, en communion et à l’unisson des Guinéens.
    Ensuite, je me retrouve avec Emmanuel, notre stagiaire, pour examiner les différentes activités de la paroisse. C’est une très grande paroisse, avec un certain nombre de problèmes et de tensions. Il y a donc beaucoup à dire… et à faire. Emmanuel est nigérian, il faut donc l’aider à entrer dans la culture guinéenne et la vie du pays. Et aussi lui faire comprendre nos façons de travailler en fonction des réalités locales. Cela demande du temps, mais il est en formation. C’est donc très important. Mais Emmanuel est très engagé et a d’excellents contacts avec les gens ; nous nous entendons donc bien. Il est en formation, mais il nous apporte aussi son expérience du Nigeria et du Sénégal. Et aussi un parfum de jeunesse.
    A la fin de notre rencontre, Georges, le responsable des CV-AV, le Mouvement des enfants, vient nous rejoindre. Nous préparons le travail avec les enfants. Cette année, notre thème d’action porte sur « les droits de l’enfant ». Nous voulons aider les enfants à devenir des acteurs actifs et engagés de leurs droits (et aussi de leurs devoirs, cela va ensemble. D’ailleurs les droits des autres, ce sont nos devoirs !) Et tous les enfants ont des droits. Nous sommes donc spécialement attentifs à ce que les enfants les plus faibles ou démunis ne soient ni oubliés, ni marginalisés.
    Le soir, je travaille à un texte « Vivre la messe dans toute notre vie ». C’est le thème que notre évêque a choisi pour le diocèse, cette année. J’aurais préféré que l’on travaille à la mise en pratique du 2ème synode pour l’Afrique, mais c’est l’évêque qui décide ! Nous allons veiller à ce que, au moins, ce texte rejoigne la vie des gens, aborde des choses concrètes, et aboutisse à des actions avec tous, sans se limiter à la seule liturgie. Ce n’est pas facile.

  • Mercredi 13 Janvier : Toute la matinée avec un certain nombre de personnes engagées, ayant des responsabilités dans la Société, nous travaillons un document où nous essayons d’analyser et d’évaluer ce qui s’est passé dans le pays depuis la prise de pouvoir par les militaires du CNDD (Comité National pour la Démocratie et le Développement) le 23 décembre 2008, le lendemain de la mort de l’ancien président Lansana CONTE. La rédaction en est difficile car, bien sûr, les avis sont partagés, mais surtout la situation est très délicate et évolue sans cesse ; il faut donc bien réfléchir à ce qu’on dit et bien peser les mots. Mais cette réflexion nous semble absolument nécessaire au moment où nous entamons une étape nouvelle et une période de transition dans le pays.
    L’après-midi, rencontre de la Commission diocésaine de la Jeunesse, avec les délégués de toutes les paroisses, autour de l’Archevêque. Depuis 2 ans, et suite en particulier à l’assassinat du Frère Joseph DOUET à Kataco (Lien avec « Kataco » dans mon site), nous avons lancé tout un travail de réflexion et de formation avec les jeunes, pour répondre à leurs problèmes (manque de formation, chômage, pauvreté, etc…) et les aider à s’engager dans la vie du pays. L’évêque a envoyé un message aux jeunes qui a été lu personnellement et en groupes, et ensuite travaillé dans des assemblées générales (Forum) : plus de 700 jeunes à Kataco pour le BAGATAI (région de Kataco et Boffa où je travaillais alors). Nous avons poursuivi cette réflexion au cours des vacances, pendant les trois sessions bibliques d’une semaine, organisées pour les jeunes. Suite à tout cela, nous avons rédigé un document reprenant les réflexions et propositions des jeunes, en cinq points :
    1) L’engagement dans l’Eglise ;
    2) L’engagement dans la Société ;
    3) Justice et Paix : mise en pratique du 2ème synode pour l’Afrique ;
    4) Les problèmes des jeunes : chômage, drogue, violence, sorcellerie et maraboutage ;
    5) l’Evangélisation et le dialogue avec les autres religions.
    Aujourd’hui, nous faisons le point du travail accompli. Comme toujours, les actions menées sont variables selon les groupes. Puis nous voyons comment continuer formation et actions.
    Dans un deuxième temps, nous examinons ce qu’il faudrait faire au niveau des enfants. Il existe plusieurs mouvements d’enfants, mais il est nécessaire de coordonner ce qui se fait et de proposer des actions communes à tous les enfants. Et mieux adaptées à la vie des enfants. Pour cela, nous posons les bases d’une commission de l’enfance, animée par les enfants eux-mêmes et distincte de la Commission de la jeunesse. Nous allons partir de la base, en commençant par les paroisses volontaires, pour avoir une base d’expériences concrètes sur lesquelles bâtir cette commission.

  • Mardi 12 Janvier : Les fêtes sont terminées, il faut se remettre au boulot ! Je monte donc à l’Archevêché pour le travail avec les différents services, l’accueil des personnes en difficultés, les différents contacts, le suivi de l’atelier « Savoir-Fer » des enfants de la rue, le travail à l’imprimerie et à la procure, la réorganisation de l’OCPH (Organisation Catholique pour la Promotion Humaine, l’équivalent du Secours Catholique en France), etc… Bien sûr, comme chaque jour, nous prenons un temps de réflexion avec l’Archevêque sur la situation du pays qui évolue très vite en ce moment, et sur les différents problèmes en cours. (Voir mon site, à ces différentes rubriques).

  • Lundi 11 Janvier : La crise de palud m’a beaucoup fatigué ; je prends donc une journée de repos, ce qui me permet de classer un certain nombre de documents. Il faudrait aussi que je nettoie sérieusement ma chambre. Je dois le faire depuis longtemps, mais je n’en ai pas le courage !

  • Dimanche 10 Janvier : Première rencontre de la Commission diocésaine de « Justice et Paix » pour cette année. Nous sommes dans le quartier de KOLOMA. Comme d’habitude, nous prenons un temps pour rencontrer les responsables de la paroisse et pour travailler avec la Commission paroissiale. Ensuite, les délégués des différentes paroisses font le point de leur Commission, puis nous y réfléchissons tous ensemble, pour améliorer notre travail et tracer de nouvelles pistes d’actions. Enfin, nous prenons un temps de formation qui porte sur deux points : 1) L’analyse sociale : comprendre ce qui se passe en réalité avec les différentes structures, pour agir sur les causes des injustices. 2) Une réflexion sur les méthodes d’action non violentes, dans la ligne de Gandhi et Martin Luther King, mais aussi d’Africains, comme Nelson Mandela et Desmond Tutu par exemple. D’ailleurs de nombreux groupes d’actions non violentes actives naissent et agissent actuellement un peu partout en Afrique.
    A la fin de la rencontre, nous distribuons les documents que nous avons préparés pour la formation continue des membres. Puis nous nous retrouvons avec les 32 animateurs diocésains de la Commission pour évaluer tout cela et établir notre plan de travail pour le mois.

  • Samedi 9 Janvier (suite) : Les Centres aérés sont une expérience qui nous semble très importante et à laquelle nous tenons beaucoup. Nous l’avons lancée l’année dernière dans quatre quartiers et nous voulons maintenant l’étendre. En effet, beaucoup d’enfants traînent pendant les vacances. Ils restent à ne rien faire, quand ils ne se bagarrent pas. Ils passent leur temps à jouer aux cartes pour un peu d’argent, ce qui les entraîne à voler pour avoir l’argent nécessaire au jeu. Certains sont même récupérés par des bandes qui les entraînent dans la délinquance et la drogue. Leurs parents, totalement pris par des activités de survie pour faire vivre la famille, n’ont pas le temps de s’occuper d’eux. C’est pourquoi nous voulons organiser ces centres aérés avec trois types d’activités :
    1°) Des activités scolaires : il ne s’agit pas de vrais cours de vacances, mais plutôt de donner aux enfants scolarisés les bases qui leur manquent : apprentissage du français, lecture et écriture, calcul ; et alphabétisation pour les enfants qui ne vont pas à l’école.
    2°) Education par le jeu. En particulier par des jeux que nous avons composés sur « les droits de l’enfant ». Pour qu’ils soient formés, engagés et responsables des autres enfants. Et actifs dans leurs familles, leurs écoles et leurs quartiers.
    3°) Des chants, danses, jeux, théâtres, bricolage, activités manuelles, et tous les types de formation qui sont possibles avec les petits moyens qui sont les nôtres.
    Bien sûr, nous nous adressons en priorité aux enfants de familles nécessiteuses et aux enfants en difficulté ou en danger moral, sans aucune distinction d’ethnie ou de religion. Et nous cherchons à impliquer le maximum de personnes. Ce qui nous amène à travailler avec les autorités, les différentes personnes ressources et responsables dans les quartiers, et aussi les imans. Nous cherchons à impliquer également les Mouvements de Jeunes (Scouts, CV.AV, …) et autres groupes actifs (Communauté Sant Egidio, chorales….). Mais il nous faut former en même temps des éducateurs pour cela.
    Les éducateurs travailleront bénévolement avec les enfants pendant tout le mois d’Août. Ils sont motivés pour cela. Mais bien sûr il nous faudra trouver un minimum de moyens. L’année dernière, c’est un ancien coopérant de Guinée qui nous avait aidés. Pour cette année, des personnes se sont déjà manifestées pour nous aider, à commencer par des Guinéens ; nous espérons qu’il y en aura d’autres, car les besoins ne manquent pas !

  • Samedi 9 Janvier 2010 : Aujourd’hui début de la formation des éducateurs pour les Centres aérés de l’été 2010. Là, je ne peux pas y couper, il faut y aller ! Mais comme ça se passe bien et que les participants sont vraiment motivés et intéressés, je n’ai pas trop de peine à suivre et à faire avancer le travail.
    Il n’empêche que je suis bien fatigué et que je n’irai pas à la paroisse ce soir. Emmanuel, le stagiaire, assurera la permanence. Il faut que je me ménage jusqu’à ce que j’aie repris des forces, car le trimestre ne fait que commencer, et il va certainement se passer des tas de choses.

  • Lundi 4 Janvier 2010 : J’essaye de reprendre les activités, avec difficulté : rencontres avec les paroissiens et à l’archevêché (Justice et Paix, Pastorale sociale). Le soir, nous nous retrouvons dans une famille pour une messe du 8ème jour après l’enterrement. Il y a beaucoup de monde, car c’était une vieille dame chrétienne d’une famille très connue et qui a fait des tas de choses dans sa vie.
    Le reste de la semaine, j’espère pouvoir limiter les activités et les alterner avec des temps de repos. Le vendredi soir (8 janvier), après une journée très chargée à l’Archevêché, je dois renoncer à aller dire la messe dans une communauté de quartier. Ils feront la réunion de communauté sans moi… ce qui n’est pas mal d’ailleurs.

  • Dimanche 3 Janvier 2010 : Réunion générale des femmes.
    Les choses se mettent en place peu à peu. Les femmes ont tracé un programme d’action avec des choses intéressantes. Mais je voudrais qu’elles se centrent davantage sur leurs problèmes de familles, qui ne manquent pas, pour chercher ensemble des solutions, car personne d'autre ne le fera à leur place.
    Pendant la messe, nous accueillons les nouveaux catéchumènes de cette année, en six langues : français, soussou, gbele, loma, kissi et baga, avec les différentes communautés, en reprenant les rites d’accueil des différentes cultures guinéennes. Dans la joie, et la danse !