Armel Duteil

Nouvelles de 2009

  • Jeudi 31 Décembre 2009 : De 22 h. à minuit : veillée en trois temps pour la fin de l’année : 1. demande de pardon ; 2. offrande de tout ce que nous avons fait ; 3. préparation de l’année qui vient et vœux de bonne année… que je renouvelle pour tous.

  • Mardi 22 Décembre : Comme j’ai de la peine à me déplacer, je reste à la maison pour classer les différentes affaires. Cela tombe bien car mes confrères de Kataco et de Boffa, les deux paroisses où j’ai travaillé les années précédentes, arrivent. Nous faisons le point du travail du trimestre précédent, des fêtes à venir et de la préparation de l’année prochaine. J’en profite pour organiser une deuxième expédition des produits du conteneur, en particulier vers les dispensaires.
    J’écoute la radio. On annonce l’exécution en Chine d’un militant des droits de l’homme, sur RFI (Radio France Intrernational : « la radio du monde »). Bien sûr, ça me révolte. Mais le journaliste ajoute : « C’est le 1er européen exécuté en 50 ans ». Et s’il avait été chinois ou africain, est-ce que cela n’aurait pas été aussi grave ? Est-ce que toute vie humaine n’a pas la même valeur ? S’il s’agissait encore d’une radio française s’adressant à des français… mais c’est une radio internationale, émettant en Afrique et pour l’Afrique. Et c’est la même chose quand il y a un accident ou une guerre : tant de blessés français, tant de morts européens… Et les autres alors ?
    Nous préparons Noël dans une situation très tendue et très difficile. Ce n’est pas simple d’être le plus près possible de ceux qui souffrent et sont traités injustement, sans se faire récupérer. Ni de s’engager à fond pour l’avenir du pays, tout en restant indépendant et cependant constructif. C’est pourquoi nous nous retrouvons régulièrement pour échanger nos points de vue et chercher ensemble des solutions valables et acceptables par tous. Car les chrétiens sont conduits eux aussi par des intérêts ethniques, économiques ou autres. Nous avons bien besoin de la lumière de l’Evangile du message de Noël. De même, on nous demande des prières pour la santé du Président, ce qui est normal. Mais certains cherchent à cette occasion à compromettre l’Eglise et à faire croire qu’elle soutient absolument le président, le CNDD et tout ce qu’ils font. Rien n’est simple. J’ai apprécié que l’Archevêque, dans son homélie de Noël, ait demandé de prier aussi bien pour la santé de tous les blessés du 28 Septembre que pour celle du Président. Et pour tous les morts, de quelque côté qu’ils soient.
    Les deux semaines qui suivent ont été difficiles pour moi. Mon palud me fatigue beaucoup et traîne en longueur, car à la fin de ce trimestre, avec ma plaie à la cheville, toutes les activités et les nombreux problèmes, j’arrive à être très fatigué. Je suis donc couché, pour cause de palud. Je me lève pour les messes et différentes prières et, aussitôt, je retourne me coucher. Comme les paroissiens ne veulent pas que je rentre en taxi collectif, ils se relaient pour me ramener, à tour de rôle. Heureusement que nous avions préparé les cérémonies à l’avance.
    A NOEL, pour la veillée, ils présentaient toujours les mêmes tableaux bibliques. En réunion du Conseil Paroissial, nous avions décidé de changer, et nous avons demandé à chacun des groupes paroissiaux de nous présenter comment vivre Noël aujourd’hui, à chacun selon ses orientations. Ce fut très réussi et apprécié par tous.
    Pour la préparation de Noël, nous avions demandé à chaque famille de prendre ensemble un temps de réconciliation pour vivre Noël dans la paix et, à partir des familles, mettre la paix dans les quartiers. Comme point d’attention pendant l’Avent, nous avions choisi les handicapés qui sont malheureusement nombreux à Conakry, avec pour objectifs : les connaître, créer des liens d’amitié, les soutenir de toutes les manières possibles.
    Depuis Octobre, nous avions préparé la fête des enfants pour le jour de Noël et pour cela nous avions contacté les enfants du quartier vivant dans la rue, ceux des orphelinats, les enfants travailleurs au marché et à la gare routière, ceux de la cité des mendiants, etc… Nous avons voulu que ce soit un jour de fête pour eux tous. Mais nous ne voulons pas nous limiter au repas et aux cadeaux. Nous allons donc voir comment continuer à travailler avec eux tout au long de l’année.
    Le jour de Noël, baptême des bébés. Bien sûr, je fais participer et donne la parole et un rôle aux parents, parrains et marraines, catéchistes et responsable de Communautés. Pour une première fois, ça étonne les gens, mais ils apprécient.

  • Lundi 21 Décembre 2009 au Mercredi 13 Janvier 2010 : Je fais la navette entre mon lit et les trois paroisses de notre secteur. Mon palud me fatigue énormément, mais il n’est pas question de négliger la préparation de Noël : réconciliations, prières, rencontres, confessions. Heureusement que les gens sont patients et compréhensifs. Et que beaucoup prennent leur part au travail et font même le maximum : cela fait du bien et encourage !

  • Dimanche 20 Décembre 2009 : Rencontre de la Commission diocésaine de Pastorale sociale.
    Dans cette paroisse, les choses ont beaucoup de peine à se mettre en place. Les gens ne se mobilisent pas et ne s’organisent pas. Ils sont prêts à faire l’aumône et à aider leurs concitoyens autour d’eux, mais pas à avoir une action d’ensemble, à attaquer les vraies causes de la pauvreté ou à lancer des action de développement. Il y a toute une éducation à faire et une réflexion qui demandera beaucoup de temps et d’efforts. Malgré tout, nous faisons le tour des différentes paroisses représentées pour voir ce qu’elles font déjà et préparer les actions futures. Puis nous prenons un temps de formation, à partir des documents et comptes rendus que nous avons préparés et que vous pouvez retrouver à la rubrique « Pastorale sociale ».
    Je rentre avec la fièvre : une crise de palud que je sentais venir depuis plusieurs jours. J’ai l’habitude, c’est la même chose chaque année avec le changement de saison et la fatigue du premier trimestre. J’ai les médicaments nécessaires en réserve, mais la crise va durer plusieurs jours et je ne serai pas en forme pour Noël. Tant pis ! Il faudra quand même tout faire pour apporter la joie à tous.
    En attendant, il y a tous les préparatifs de la fête, et aussi les confessions à assurer dans les différentes paroisses de notre secteur. En effet, nous nous regroupons, tous les prêtres du secteur, pour faire successivement le tour des différentes paroisses (une par jour). Mais pour aujourd’hui, je déclare forfait ! Et, pour la suite, j’essaie d’alterner  un temps de repos après chaque activité (quand c’est possible). Ca me permet au moins d’écouter la radio. En particulier le compte-rendu de la Commission d’enquête des Nations Unies au sujet de la tuerie, des coups et viols du 28 Septembre. Ils sont déclarés « crime contre l’humanité ». Mais nous avons de la peine à comprendre les accusations portées par exemple contre le lieutenant PIVI qui n’était pas présent au stade ce jour-là (même s’il a été cause de nombreuses violences dans le passé) ; ou contre le capitaine THIEGBORO, alors que dès le lendemain les chefs de l’opposition avaient affirmé que ce dernier les avait protégés et qu’ils l’avaient remercié. Il est vrai qu’il ne s’agit que d’une enquête et d’accusations. De même, contre le Président Dadis CAMARA ; c’est lui-même qui a demandé cette enquête de l’ONU et il s’est présenté devant elle. S’il était aussi coupable qu’on le dit, l’aurait-il fait ? On a l’impression que l’ONU est manipulée par un certain nombre de grandes puissances, en fonction de leurs intérêts ou du moins de motifs que nous n’arrivons pas à comprendre. On nous annonce la venue d’un T.P.I. (Tribunal Pénal International). Espérons qu’ils feront une enquête plus sérieuse, suivie d’un jugement impartial !
    Un ancien ambassadeur de Côte d’Ivoire affirme : « Bernard KOUCHNER en fait trop ». Et c’est vrai qu’il vient d’affirmer à l’Assemblée Nationale que le Président Dadis « ferait mieux de rester dans son lit au Maroc ». Je pense que ce n’est pas ainsi que l’on parle d’un Chef d’Etat devant des députés. Les Guinéens ressentent cela comme un manque de respect grave et une immixtion inadmissible dans la vie de leur pays. Le ministre guinéen des Affaires étrangères l’a dit calmement, mais avec force.
    Bien plus, Bernard KOUCHNER affirme que « le retour de Dadis en Guinée entraînerait une guerre civile ». A partir de quoi dit-il cela ? Alors que nous faisons tout pour rétablir de bonnes relations sociales, on n’a pas besoin que l’on vienne nous parler de guerre civile. Que cherche-t-on ? C’est vraiment de la provocation !
    Enfin, ce même ministre affirme que la population vit dans la terreur et que « les mères n’osent plus aller au marché avec leurs enfants ». C’est complètement faux, comme j’en suis témoin. Les enfants vont normalement à l’école, sans problème. Et même si les mères ne vont plus au marché, ce n’est pas à cause de l’insécurité, mais de la pauvreté. Et de cela, l’Union Européenne en est en grande partie responsable, car elle a bloqué toute aide économique à la Guinée depuis plus d’un an maintenant. Il y a des choses qui nous font honte et nous révoltent. A l’inverse, j’apprécie les députés maliens venus sur place voir eux-mêmes ce qui se passe en Guinée et qui affirment : « Ce n’est pas le moment d’abandonner la population » ! En tout cas, nous sommes fatigués des contre vérités et affirmations tendancieuses sur la Guinée de la part non seulement de média, mais aussi de responsables occidentaux.

  • Samedi 19 Décembre : Plusieurs rencontres tout au long de la matinée.
    A 14 heures, un nouveau mariage mixte : une chrétienne avec un musulman, entourés d’une très nombreuse assistance. Nous introduisons bien sûr les rites traditionnels, mais cette fois-ci, les jeunes mariés sont d’une autre ethnie : ce ne sont plus des guerzés, ce sont des tomas, du sud de la Guinée. (J’ai déjà parlé longuement, il y a quelques jours, de ces mariages mixtes).
    Je ne peux pas rester longtemps à la fête, car nous avons une rencontre des catéchistes : le trimestre se termine, il faut en faire l’évaluation, organiser l’accueil des nouveaux catéchumènes et préparer le prochain trimestre avec les différentes cérémonies (étapes du baptême).

  • Vendredi 18 Décembre : Journée chargée. D’abord avec CRS pour revoir notre plan d’action pour l’année 2010 et son financement. Beaucoup de choses ont évolué depuis le moment où nous avions rédigé le projet. Il va falloir revoir le projet pour l’adapter aux réalités actuelles : situations de violence, pauvreté grandissante, etc…
    Ensuite, nous nous retrouvons avec les volontaires pour faire le tour de leurs activités. Ils ont trouvé de nouveaux blessés du 28 Septembre et familles en deuil qui se cachaient jusqu’à maintenant. Puis nous organisons la distribution de nourriture et de soutien aux 81 familles que nous suivons actuellement.
    Et les problèmes de chaque jour à régler : une femme renvoyée par son mari, une jeune fille reniée par son père, un directeur d’école à la recherche de livres scolaires (que je vais pouvoir lui donner, j’en ai quelques-uns en réserve), et la suite de la distribution du matériel médical et aliments pour bébés reçus dans le conteneur d’Appel Détresse.
    Après tout cela, nous nous asseyons avec Raoul pour commencer à analyser les différents petits projets de développement qu’on nous a soumis.
    Mais il est temps que j’aille dans un quartier de la paroisse, dans la grande banlieue, pour la réunion de la Communauté, suivie de la Messe. Une journée bien remplie.

  • Jeudi 17 Décembre : Le matin, rencontre avec Philippe qui arrive de France. Il a longtemps travaillé en Guinée, à l’OCPH et à KATACO, où j’ai moi-même servi. Actuellement, il est responsable en France de la D.C.C. (Délégation Catholique à la Coopération). Ils préparent des personnes à partir en coopération, pour deux ans généralement. Nous étudions avec lui la possibilité de faire venir un coopérant pour la gestion du centre de formation au développement de WONKIFON que nous sommes en train de lancer et dont j’ai déjà parlé plus haut. Nous parlons ensuite de la situation de la Guinée et des différentes activités. Pour nous, ces visites sont importantes. Elles nous permettent de faire le point et de voir plus clair dans ce que nous faisons.
    L’après-midi, nous nous retrouvons avec les responsables des Centres aérés de l’année dernière pour élaborer un programme de formation à partir de janvier jusqu’en août. Le problème va être maintenant de trouver des volontaires pour être éducateurs et surtout mobiliser les paroisses pour qu’elles les soutiennent.
    Le soir, rencontre avec le Conseil économique et le Conseil paroissial autour de notre évêque, au sujet des questions financières de la paroisse. Il est venu avec un Frère, arrivé du Burkina Faso pour nous aider pour toutes ces questions financières. C’est très important, car il faut que progressivement nous arrivions  à nous prendre en charge, sans toujours dépendre de l’extérieur même si, en même temps, nous restons très reconnaissants à tous ceux qui continuent à nous aider, pour nous permettre d’aider ceux qui en ont besoin et qui sont nombreux autour de nous.

  • Mercredi 16 Décembre : Travail à l’Archevêché : organisation des activités de la jeunesse au niveau de la ville. Il y a des choses à réorganiser. Un certain nombre de responsables paroissiaux sont en place depuis longtemps. Ils se sont mariés. Il ne sont plus jeunes et sont déphasés. Mais ils ne veulent pas laisser la place ! Cela en traîne beaucoup de lourdeur, et dans certaines paroisses les activités n’ont pas encore démarré.
    De plus, la Commission a pris l’habitude d’organiser des activités comme des conférences, des grandes manifestations, des soirées dansantes, des compétitions de foot-ball, mais du coup il n’y a plus d’actions à la base, ni d’engagement réel dans la vie du pays. Il va falloir revoir tout ça.
    A l’Atelier, un professeur à la retraite d’un lycée technique vient nous voir en disant : je n’ai pas d’argent à vous donner, mais j’ai une expérience dans l’enseignement. Je peux vous donner des documents et des conseils. Ce que nous acceptons avec joie.
    Rencontre avec les Sœurs, sur l’éducation à la paix dans leur école. Le 8 Décembre, elles ont fait une marche pour la paix dans la ville de COYAH avec leurs élèves. Je leur ai laissé aussi des fiches d’éducation à la paix pour les différentes classes. Je leur donne rendez-vous pour leur expliquer nos jeux sur les droits de l’homme et les droits de l’enfant la semaine prochaine.
    L’OCPH (Organisation Catholique pour la Promotion Humaine), la Caritas Guinéenne, équivalente du Secours Catholique, ne marchait plus depuis quelques années, à la fois par le laisser aller et par manque de moyens. Les responsables s’étaient fonctionnarisés, ils voulaient des projets grandioses au lieu de commencer par des petites actions que les gens peuvent prendre eux-mêmes en main. Nous avions dû arrêter les choses l’année dernière. Après avoir longuement réfléchi, nous allons maintenant relancer les activités avec un nouveau responsable. Il a une longue expérience professionnelle et a travaillé longtemps dans la Commission Justice et Paix.

  • Mardi 15 Décembre : Je reste à la maison pour préparer un certain nombre de documents et réponses à des courriers importants.
    A 11 heures, arrive Bernadette, une jeune journaliste. Elle vient enregistrer une émission radio. Elle est un peu intimidée car elle débute dans le travail. Je lui donne des indications pour monter l’émission et pour son animation. Depuis que l’autorisation en a été donnée, il y a deux ans, de nombreuses radios libres, comme des journaux indépendants, se sont lancés, ce qui est un excellente chose. Le problème, c’est que ces radios et journaux n’ont pas toujours les moyens de fonctionner… ni parfois les compétences nécessaires : on passe surtout de la musique, entremêlée d’enquêtes ou d’interviews plus ou moins valables, avec souvent des débordements. C’est pourquoi il me semble utile de prendre le temps nécessaire pour aider et former les jeunes journalistes qui se lancent.
    Pour cette émission sur l’Avent, dans un premier temps je cherche à expliquer ce que veut dire « Jésus vient nous sauver » dans les circonstances actuelles du pays. Et je propose des lignes d’actions possibles, aux niveaux personnel et communautaire. Ce ne sont ni les besoins, ni les possibilités qui manquent. Dans un 2ème temps, j’essaie de montrer en quoi les trois lectures de ce 4ème dimanche de l’Avent nous concernent et comment les mettre en pratique. L’enregistrement se passe bien, et nous nous reverrons.

  • Lundi 14 Décembre : Comme chaque semaine, celle-ci commence également par une rencontre avec l’évêque pour organiser la semaine : les différents problèmes à régler (et ils sont nombreux), les personnes à rencontrer, les actions à mettre en place. Sans oublier la préparation de Noël et les activités des vacances.
    Nous nous arrêtons sur le thème d’année du diocèse, dans le cadre de « l’Année du Sacerdoce » : « Vivre la messe ». Comme on le voit, il ne s’agit pas seulement d’aller à la messe, mais de VIVRE la messe dans toutes ses dimensions, et tout au long de la semaine, dans nos différentes activités et dans nos engagements. Et aussi de donner toute sa place aux laïcs et au sacerdoce des fidèles, selon le texte de Pierre (1ère lettre, 2, v. 5). Et de voir comment vivre la messe en particulier en famille et dans nos communautés de quartier.
    Nous revoyons le livret que nous avons préparé et qui présente un point spécifique chaque dimanche, avant de commencer la prière.
    Parallèlement à cela, nous lançons un effort de partage d’Evangile et de prière, à partir de la Parole de Dieu dans tous les groupes et Mouvements, avec un questionnaire simple pour cela.
    Nous avons également noté que de nombreux groupes n’ont pas de programme d’action précis. Ils passent leur temps à discuter de petites choses plus ou moins inutiles, ou de tenues, de cotisations, ou préparation de fêtes. Et de participer à des manifestations au niveau de la ville : matchs de foot, soirées dansantes, conférences….
    Nous avons donc composé un schéma de réunion pour chaque Mouvement, en respectant l’esprit et les orientations de chacun. Cela a été un très gros travail. Après Noël, dans ma paroisse il va falloir faire le tour de chaque groupe pour voir comment ces programmes sont mis en œuvre
    Suite de la distribution des colis du conteneur aux différents bénéficiaires. Cela va nous prendre encore plusieurs jours, pour que ces colis soient distribués aux personnes qui en ont vraiment besoin et leur arrivent dans les meilleures conditions possibles.

  • Lundi 14 Décembre : C’est dur de redémarrer la semaine, sans jour de repos. Mais il y a beaucoup à faire avec la préparation de Noël. C’est important que ce soit une occasion de joie pour tous.

  • Dimanche 13 Décembre : Comme d’habitude, je vais dans une paroisse différente. Aujourd’hui, à St Etienne où 100 enfants, avec jeunes et adultes font leur entrée dans l’Eglise, première étape vers le baptême. Belle cérémonie, pleine d’espoir. Après la messe, rencontre diocésaine mensuelle des Commissions de Justice et Paix. Nous sommes bien accueillis par les responsables de la paroisse (J.M. : lien avec L 64). Les choses se mettent en place lentement. Les gens connaissent maintenant la Commission et comprennent son rôle. Mais il est difficile de trouver des volontaires qui s’engagent vraiment. Et beaucoup de commissions ont fini de faire leur plan d’action mais n’ont pas vraiment commencé le travail. Cependant, par de telles rencontres les gens s’encouragent mutuellement et les choses se précisent.
    Une nouvelle complètement aberrante : le groupe international de contact avec la Guinée (Union Africaine, Union Européenne, ONU) demande l’envoi de troupes étrangères « pour protéger les civils » alors que nous vivons normalement. Et au moment même où le Général KOUYATE est en train de reprendre l’armée en mains. Nous ne comprenons absolument pas cette décision. Les militaires au pouvoir, de toutes façons n’accepteront pas la venue de militaires étrangers en Guinée. Au lieu d’envoyer des soldats, il vaudrait mieux soutenir les efforts de paix : on se demande ce que les gens cherchent !

  • Samedi 12 Décembre : Rencontre du Conseil paroissial. C’est un moment très fort de la vie de la paroisse. Les représentants de tous les groupes sont là. Il y a donc beaucoup de choses à régler. Surtout que la paroisse est en pleine restructuration. Mais les choses avancent bien et les gens sont heureux de participer à la réflexion et à la mise en place des décisions. Les deux points sur lesquels nous nous arrêtons sont la mise en place de la catéchèse dans les quartiers (avant, tout se faisait à l’église) et l’organisation des communautés de quartier pour ne plus se limiter à la vie interne de l’Eglise, mais s’engager avec tous les habitants pour l’avancée du quartier. Dans cette action, les Commissions Justice et Paix et de Pastorale sociale ont, bien sûr, un grand rôle à jouer, mais aussi la Commission de la Famille. Sans oublier celle des Relations avec les autres religions. Justement, les premiers pèlerins musulmans commencent à revenir de La Mecque, et c’est important de les accueillir. Pour que ce pèlerinage serve non seulement à leur conversion et à l’avancée de la communauté, mais aussi à une meilleure entente entre chrétiens et musulmans et à la paix dans le pays.
    Ensuite, nous passons aux questions économiques, toujours compliquées. Puis à l’organisation des différentes fêtes : Noël, 31 Décembre, 1er Janvier, Fête de la Ste Famille, de l’Epiphanie. Je vous expliquerai au fur et à mesure comment nous les aurons vécues. Mais déjà nous cherchons comment animer ces fêtes avec la participation du maximum de personnes et en intégrant les valeurs culturelles et les rites traditionnels, ce qui est plus difficile en ville que dans les villages, car nous travaillons avec plus de dix ethnies différentes, ensemble.
    Dans les « divers », reviennent la place faite aux jeunes dans l’Eglise et la Société (dans la société traditionnelle, ils doivent être soumis aux anciens), et les conditions de vie faites aux veuves et aux orphelins.
    L’après-midi, travail à la paroisse suivi de la messe et de nombreuses rencontres : catéchèse, préparations aux mariages et aux baptêmes, réunions de différents groupes et mouvements.

  • Vendredi 11 Décembre : Nous partons de bonne heure avec John, mon confrère, pour vider le conteneur. Il faudrait une grande salle pour pouvoir trier et classer les colis, mais nous n’avons qu’un petit magasin. On va se débrouiller. Et aussi pour trouver des occasions pour expédier les colis dans les différents endroits.
    Comme chaque jour, nous recevons des appels de personnes travaillant dans des ONG ou autres organisations qui souhaiteraient venir, mais sont inquiètes de la situation. Nous avons beau les rassurer et leur dire que nous les prendrons en charge, elles ont de la peine à nous croire.
    Ma vieille voiture de Kataco, en panne depuis septembre 2008, a enfin pu être ramenée au garage de la Procure. Il faut être patient ! Maintenant, il ne reste plus qu’à la réparer !
    Toujours des problèmes de visa ! Une de nos Sœurs guinéennes doit aller se former en médecine en Haïti. Mais elle doit juste passer trois jours par la France. Depuis Octobre, elle n’arrive pas à obtenir de visa. On me demande d’intervenir. Et aussi de préparer le voyage vers la France d’un prêtre guinéen qui ne peut pas être soigné sur place. Là, le problème est plus sérieux, car bien sûr il n’est pas inscrit à la Sécurité sociale. Et les frais d’hôpitaux sont énormes.

  • Jeudi 10 Décembre : Ce matin, réunion de notre Communauté spiritaine, comme chaque mois, pour revoir non seulement nos activités pastorales, mais notre vie religieuse : vie ensemble, vie de prière, etc…
    Ensuite, Xec, mon confrère salésien, vient nous rejoindre pour une dernière lecture de notre demande de soutien pour les centres aérés.
    Puis séance de travail avec l’évêque. Ce soir, la famille du Président Dadis a demandé une messe pour lui ; les autorités seront là : c’est l’occasion de dire un certain nombre de choses.
    Juste un temps pour souffler avant d’aller visiter les différents groupes à la paroisse. En Guinée, le jour libre n’est pas le mercredi, mais le jeudi. C’est le jour anniversaire de la déclaration universelle des Droits de l’Homme. Cette célébration passe complètement inaperçue ici. Il faut dire que nous sommes dans un grand climat de tension. Et, après tout, l’important ce ne sont pas les grandes célébrations qui comptent, mais la réalité des actions menées sur le terrain.
    La soirée se termine par la mise en place du conseil économique. Il y a des absents et des démissions. Nous mettons en place un bureau provisoire pour examiner les comptes de la paroisse des deux dernières années et rouvrir le compte à la banque, car depuis octobre tout est bloqué.

  • Mercredi 9 Décembre : Nous revoyons l’appel de l’évêque pour le mettre en forme et l’envoyer aux journaux et radios libres, ainsi qu’aux ambassades. Ensuite, je rencontre l’ambassadeur de France, puis le Nonce (représentant du Pape en Guinée). Je ne peux pas me faire soigner car le médecin est parti soigner les prisonniers, ce qui est une très bonne chose.
    Le conteneur, envoyé par l’ONG « Appel Détresse » est arrivé et grâce au travail de la Procure il est sorti sans trop de problèmes. Cela va nous permettre d’aider un certain nombre de paroisses et communautés dans leurs activités, pour soutenir les gens en difficulté.
    Nous avons la joie de voir revenir chez nous le Père André qui faisait une grande dépression. Il a été soigné par un guérisseur traditionnel et ça va beaucoup mieux. Espérons que ça dure.
    Le soir, rencontre de la Commission diocésaine de la Jeunesse, pour faire le point des activités depuis octobre. Bien sûr, les choses sont très différentes selon les paroisses.

  • Mardi 8 Décembre : Activités ordinaires. Je tire et multiplie les comptes rendus des rencontres Justice et Paix et de Pastorale sociale ; cela fait longtemps que ça traînait !
    Le gros de la journée, c’est la réunion des volontaires. Après une semaine, nous voyons ce que nous avons pu faire pendant la semaine. Nous faisons le tour des différents cas. Nous avons pu trouver sept nouvelles personnes que nous pourrons aider.
    Ensuite, c’est la messe du 8 Décembre, fête de l’Immaculée Conception et fête de l’archidiocèse. Les gens sont très nombreux à venir et la messe très animée. L’évêque lance un appel très important que je vous ai déjà envoyé sur la situation du pays, appelant à l’unité. Après la messe, une procession mariale, clôturée par un salut au Saint Sacrement. Un paroissien me ramène, ce qui m’arrange bien.

  • Lundi 7 Décembre : Comme chaque semaine, beaucoup de choses à voir, de problèmes à régler et de personnes à rencontrer. Mais avant tout cela, nous nous retrouvons avec notre évêque pour rédiger une déclaration sur la situation actuelle du pays. La situation est très complexe et il faut bien peser ses mots. Ensuite, travail sur Internet, comme chaque jour. Heureusement que ça existe, même si ça ne marche pas très bien, car la poste fonctionne très mal. Heureusement aussi qu’il y a les téléphones portables, car les fixes ne fonctionnent plus.
    A l’atelier, l’un des deux formateurs est malade. Palud ! C’est courant, surtout en cette saison. Il faut donc nous organiser. Mais notre problème actuel, c’est le manque de commandes. C’est le signe d’une crise économique grave, dont les conséquences vont se faire sentir de plus en plus. Cette crise est due en particulier aux sanctions économiques des pays occidentaux qui ont arrêté toute aide économique au pays depuis la prise de pouvoir par les militaires. Mais ce ne sont pas les militaires qui en souffrent, c’est la population.
    Nous apprenons qu’il y a des vaccins disponibles au dispensaire St Gabriel. Il n’y en avait plus dans le pays depuis plusieurs mois. Nous allons faire vacciner nos apprentis contre le tétanos, mais aussi la fièvre jaune. Ils ont fait aussi le test SIDA. Tout cela est un « luxe » pour la plupart des gens ! Mais nous y tenons pour nos jeunes qui viennent de la rue et de situations familiales difficiles. C’est une façon pour nous de les valoriser et de les respecter. Comme aussi de leur assurer une hygiène, une protection (lunettes pour la soudure, gants, chaussures, tenues de travail…) et une sécurité qui n’existent pas dans la plupart des ateliers de la ville. Ce qui d’ailleurs leur pose problème quand ils passent au travail. Mais il faut faire avancer les choses, et ça passe aussi par cela.
    Je vais faire soigner ma cheville. On désinfecte la plaie et puis on « m’oublie », malgré plusieurs appels. Au bout de deux heures, je m’en vais. C’est la 2ème fois que cela m’arrive. Et la semaine dernière, quand je suis venu, c’était le jour de repos du médecin.
    Avec tout ça, j’ai pris du retard. Impossible de trouver une place dans les taxis collectifs. Je me rabats sur les mini-bus où on est encore plus serré, surtout aux heures de pointe. Et où on voyage courbé, car ils sont trop bas pour qu’on puisse se tenir debout. Heureusement, dès que j’entre, un jeune me donne aussitôt sa place. Déjà ce matin, j’étais sur le bord de la route, sans trouver de place ; un automobiliste s’est arrêté et m’a invité à monter en me disant : « J’ai fait mes études en Allemagne de l’Est. J’allais à l’Université en stop et on me prenait toujours. Alors c’est normal que je le fasse moi-même. Ce n’est pas bon de faire souffrir les étrangers ».
    Avant cela, à l’imprimerie, nous terminons de mettre au point la vente de l’agenda liturgique pour demain. Et comme chaque jour, les rencontres. D’abord avec Philippe qui vient d’OUROUS, à la frontière du Sénégal. Nous en profitons pour préparer une session de formation « Justice et Paix ». En effet, il est impossible de les contacter par téléphone : il n’y a pas de réseau. J’en profite pour envoyer à mes confrères de KOUNDARA des hosties, du vin de messe et une clé USB avec des documents.

  • Dimanche 6 Décembre : C’est le premier dimanche du mois, je suis donc dans la paroisse de TAOUYA dont on m’a confié la responsabilité cette année. C’est le seul dimanche où je suis présent chaque mois, aussi il y a toujours beaucoup à faire. Comme nous sommes dans l’Avent, nous avons prévu une liturgie pénitentielle (demande de pardon et démarche de conversion), à partir de l’Annonciation (l’annonce de l’ange à Marie) ; nous avons préparé et décoré une statue de la Vierge. Les gens qui savent écrire ont écrit leurs demandes de pardon sur une feuille de papier ; les autres sont venus avec une feuille d’arbre sèche sur laquelle ils font leur demande de pardon en silence. Puis nous brûlons tout cela devant l’autel, pour montrer que le par le Christ, Dieu nous libère et nous purifie par le feu de son amour et le feu de l’Esprit-Saint. Après une longue prière spontanée dans les différentes langues parlées dans la paroisse et une conclusion par moi-même en soussou, les enfants présentent un petit sketch pour nous aider à actualiser l’Evangile de ce jour et à le mettre en pratique.
    2ème partie de la célébration : l’engagement des différents responsables, chacun avec une lecture et un geste adapté. Pour les catéchistes, l’importance de l’enseignement et du témoignage (2 Tim 4, 1-5) : ils viennent poser leurs mains sur l’Evangile. Pour les responsables des communautés, lecture des conseils de St Paul (1ère Tim 3, 1-7) : ils viennent poser leurs mains sur la croix. Pour les responsables de la chorale, des servants de messe, des lectures, des groupes de prières, d’autres conseils de St Paul (1ère Tim 3, 8-13) : ils se passent l’un à l’autre le cierge allumé de l’autel, pour montrer qu’ils veulent travailler ensemble et éclairer leurs frères. Le tout accompagné de chants adaptés pendant qu’ils viennent signer leurs engagements sur l’autel. La joie s’exprime alors dans la danse.
    Après la messe, nombreux contacts et demandes, car je n’étais pas là hier après-midi. Les jeunes sont patients et attendent. Au bout de 30 minutes, nous commençons la grande rencontre mensuelle des jeunes. Le thème de ce mois c’était l’engagement dans l’Eglise. Chaque groupe et mouvement vient dire à son tour ce qu’il a fait pendant le mois passé. Puis nous passons aux actions individuelles. Je suis frappé par l’engagement des jeunes et leur disponibilité. C’est facile de travailler avec eux. Dans mes postes précédents, en secteur rural, à MONGO et à KATACO, le travail avec les jeunes était très difficile. Car dès qu’ils entraient au Lycée, ils partaient en ville. De même que ceux qui étaient formés et pouvaient trouver un travail à l’extérieur.
    La deuxième partie de la réunion porte sur la préparation de Noël. Pour la veillée, nous avons demandé à chaque groupe de préparer un sketch ou un texte chanté et dansé. Le jour de Noël, grande sortie avec repas pour les enfants, où nous inviterons les enfants mendiants de la cité « Solidarité », les enfants handicapés, les enfants qui travaillent au marché et les petites vendeuses, etc… Mais nous ne voulons pas nous limiter à des cadeaux le jour de Noël. Nous commençons à penser ce que nous allons faire pour eux et avec eux tout au long de l’année. Pour nous préparer à la fête, nous avons prévu aussi deux conférences organisées par les jeunes eux-mêmes.
    Le soir, nous nous retrouvons auprès de deux Sœurs qui fêtent leurs 50 ans de vie religieuse. C’est l’occasion de vivre ensemble, avec leurs familles, autour de l’évêque, une soirée très sympathique.

  • Samedi 5 Décembre : Le matin, travail avec les enfants de la rue, puis les apprentis de l’atelier de soudure. Mais d’abord, nous nous sommes longuement rencontrés avec l’Archevêque pour faire le point de la situation, voir quoi dire aux différentes radios qui nous interrogent et commencer à préparer une déclaration sur la situation du pays. Il me reste un peu de temps pour travailler à l’Internet, aussi bien pour répondre aux nombreux messages que pour étudier les documents reçus. Ils sont nombreux, aussi je me contente de les enregistrer. Je les travaillerai plus tard.
    Rencontre des religieux(ses).
    A 16 heures, nous nous rencontrons à plus d’une vingtaine. Ceux qui sont à l’extérieur de la ville de Conakry n’ont pas pu venir, à cause des barrages. En effet, la ville est bouclée pour empêcher les soldats qui ont tiré sur le Président de s’échapper ; déjà plusieurs ont été arrêtés.
    Nous commençons par travailler les passages les plus significatifs, et qui nous concernent le plus, du Message final du 2ème Synode pour l’Afrique. Puis, nous étudions les propositions des évêques concernant les religieux. Enfin, je présente la session pour les religieux qui s’est déroulée à Bamako en Juillet 2009, dont je vous ai déjà envoyé le compte-rendu en son temps, où nous avions appris à analyser l’organisation de la société, pour pouvoir agir sur les causes profondes et réelles (souvent cachées) des problèmes de pauvreté et des manques de justice et de paix.
    A partir de là, nous nous retrouvons en carrefour pour voir ce que nous pouvons faire dans ce domaine de justice et paix, dans les conditions actuelles, selon nos possibilités. Je vous enverrai, dès que possible, les résultats de notre réflexion et le compte rendu de la rencontre. En plus de la réflexion que nous avons menée, il est très important pour tous de nous retrouver de temps en temps pour renforcer nos liens d’amitié et pour nous encourager.
    Pour terminer, nous prenons un pot ensemble, ce qui nous permet de continuer nos échanges d’une façon plus décontractée. Dommage que la bière ne soit pas fraîche !

  • Vendredi 4 Décembre : Nous préparons un dossier de demande de soutien pour les Centres aérés que nous voulons organiser de nouveau en 2010. Comme toujours, quand il s’agit de faire des demandes à des ONG, c’est toujours compliqué et en plus ce n’est pas mon fort. D’ailleurs, nous ne finissons pas le dossier. Il faudra le reprendre un autre jour.
    Nous suivons les nouvelles. Le Président a été évacué au Maroc. Mais, contrairement à ce que disent les radios et télévisions étrangères, sans doute influencées par les « forces vives » de l’opposition vivant à l’étranger, la situation est calme. Bien sûr, il y a des militaires aux carrefours, mais c’est normal. Et ça vaut mieux pour rétablir le calme. En tout cas, les magasins et les marchés sont ouverts et chacun continue ses occupations. Le n° 3 du CNDD (Comité National pour la Démocratie et le Développement), qui était au LIBAN, revient pour reprendre les choses. Nous espérons que aussi bien l’anarchie que les chocs entre militaires vont pouvoir être évités.

  • Jeudi 3 Décembre : Le matin, permanence à la paroisse. L’après-midi, rencontre avec les responsables de la liturgie et de la chorale. Nous recevons des coups de fils nous disant que les militaires se tirent dessus au quartier des affaires, au « centre ». Nous sommes à plus de 17 km, aussi nous continuons notre réunion régulièrement. C’est en écoutant la radio, de retour à la communauté, que nous apprenons que c’est sur le Président qu’on a tiré, mais qu’il est toujours vivant. Nous sommes très inquiets pour la suite.

  • Mercredi 2 Décembre : Il me faut remonter de bonne heure en ville. Nouvelle séance d’Internet, travail à l’atelier, rencontre avec l’évêque pour différents problèmes, soins au dispensaire, et enfin enregistrement d’une radio libre sur le travail de la Commission Justice et Paix. Ce soir, il y aura peut-être du courant dans notre quartier (c’est un jour sur deux… quand ça marche). Je pourrai regarder les informations nationales et travailler à l’ordinateur.
    Il me faudra aussi prendre des contacts pour la mise en place de la Commission économique de la paroisse, qu’il faut à tout prix rénover. L’ancienne commission ne marche pas, il faut donc absolument en installer une nouvelle. Le problème, c’est de trouver des gens compétents qui ont aussi le temps et la volonté de s’engager.

  • Mardi 1er Décembre : Journée Mondiale contre le SIDA.
    On en parle à toutes les radios, mais la situation n’est vraiment pas la même en Afrique et en Europe. En Guinée, très peu de malades peuvent avoir la trithérapie. Même les moyens de dépistages et la possibilité d’avoir des condoms sont limités. Sur les radios occidentales, on ne parle que de condoms. Sur les chaînes africaines, on parle des trois moyens de lutte ensemble : protection, abstinence et fidélité. Et nous cherchons à agir effectivement à ces trois niveaux ensemble. Actuellement, l’information et la sensibilisation. Le problème est celui de la maîtrise sexuelle responsable et de permettre de vivre une vie de couple dans l’amour et une vie de couple réussie…. Et de donner aux gens les moyens de vivre cela à tous les niveaux.
    Comme chaque matin, je passe plusieurs heures sur Internet. Il faut de la patience, car c’est vraiment très lent.
    A 10 heures, nous nous retrouvons avec les volontaires. Il s’agit de donner à chacun l’argent pour les soins des blessés légers et graves ayant besoin d’une intervention chirurgicale ; de la nourriture et de l’argent aux veuves et aux orphelins ; un soutien aux femmes et jeunes filles violées ; du matériel scolaire pour les enfants des blessés ou familles en deuil, etc… C’est tout une organisation qui nous prend plusieurs heures. Après cela, chacun part faire ses distributions et suivis.
    Ensuite, travail avec les foyers St Joseph : c’est tout un ensemble de foyers pour enfants de la rue, filles comme garçons, malades du SIDA ; femmes abandonnées et personnes âgées malades. Le Père Etienne fait un travail extraordinaire avec bon nombre d’éducateurs et d’éducatrices. Mais les actions auraient besoin d’être organisées pour davantage de résultats et une meilleure éducation. Nous réfléchissons à cela ensemble, pour dégager des pistes d’actions. Je lui remets aussi six de nos jeux sur les droits de l’homme, auxquels j’avais initié les éducateurs le mois dernier.
    Au retour, Michel, du dispensaire St Gabriel qui est monté en ville, me prend dans sa voiture et me ramène jusque chez moi. C’est plus agréable que dans les taxis, serrés à sept dans une berline !

  • Lundi 30 Novembre : Achat de riz et de matériel scolaire pour les victimes du 28 Septembre.
    A l’atelier soudure, un ancien vient nous visiter. Cela nous fait toujours plaisir de voir des jeunes qui s’en sortent, trouvent du travail après la formation reçue et se prennent en main. Nous lui demandons ce qu’il pense de la formation que nous assurons. Puis nous parlons de ses conditions de travail : il se plaint du manque d’entente entre les travailleurs, spécialement les jeunes. C’est vrai qu’à l’atelier nous veillons à la qualité des relations et le passage au monde du travail est parfois difficile.
    Ensuite, nous examinons un certain nombre de projets pastoraux (pour le travail de l’Eglise) que nous voulons soumettre aux OPM (Oeuvres Pontificales Missionnaires). Il y a aussi des projets de développement que nous étudierons plus tard :
    - Projet sel : Parmi ces projets, un me semble intéressant. C’est la fabrique de sel par évaporation naturelle à la chaleur du soleil. En effet, jusqu’à maintenant, on obtient le sel en faisant chauffer l’eau de mer. Cela demande beaucoup de bois et augmente la déforestation et toutes ses conséquences : érosion, appauvrissement des sols, etc… Avec un matériel très simple (planches et bâches), on peut obtenir du sel de très bonne qualité. Mais il va falloir étudier les possibilités concrètes et les motivations des intéressés, car c’est souvent là que ça pêche. Affaire à suivre.
    Après cela, avec un chauffeur, nous allons chercher la vieille « Express » dont je me servais à Kataco. Nous avons trouvé un petit fonds pour la remettre en état.

  • Dimanche 29 Novembre : Aujourd’hui, je suis dans la grande banlieue, au km 36. En effet, Conakry est une presqu’île. La ville est donc très allongée. J’essaie d’assurer une bonne participation des chrétiens à la messe. Ils n’en ont pas l’habitude, mais ils répondent bien.
    Après la messe, rencontre avec les deux Commissions de « Justice et Paix » et « Pastorale sociale ». J’étais venu les voir il y a deux ans (il me faut ce temps pour faire des paroisses). Depuis, plusieurs formateurs étaient passés les voir, mais jusqu’à maintenant les Commissions n’ont toujours rien fait. Il faut donc essayer de les motiver et recommencer depuis le début. C’est cela qui est fatiguant et parfois décourageant. Espérons que cette fois-ci sera la bonne !
    Je passe faire un tour à la fête des enfants (CV.AV) des différentes paroisses qui se sont réunis. Le thème d’action de cette année, c’est : « Les droits des enfants : dépassons nos différences ». En effet, il faut à tout prix rétablir la justice et le droit dans le pays et apprendre à vivre ensemble. En commençant par les enfants, car ils peuvent faire beaucoup, pas seulement entre eux mais aussi dans leurs familles et auprès des adultes.
    Repas fraternel : Le soir, Xec, un confrère salésien espagnol, vient préparer une demande de soutien pour nos Centres aérés. Il est venu avec Cisco et nous terminons la soirée ensemble. Nos deux paroisses sont voisines et nous travaillons beaucoup ensemble, spécialement pour les jeunes. Cela nous offre une soirée très agréable.

  • Samedi 28 Novembre : Lendemain de fête.
    Les gens se visitent de famille en famille pour se souhaiter la paix et les enfants pour recevoir des cadeaux. Malgré l’état de pauvreté généralisé, tout le monde cherche à être bien habillé et il y a un climat de joie dans l’air.
    Cela me donne le temps de terminer mes demandes de soutien à CRS, pour chacune des deux Commissions de Justice et Paix et Pastorale sociale, qui traînaient depuis longtemps. Mais il me faut quand même monter en ville pour soigner ma cheville. Michel, un ami, s’est brûlé le pied. Il doit aussi aller se faire soigner. Il me prend dans sa voiture climatisée : c’est quand mieux que d’être comprimés à quatre sur la banquette arrière d’un taxi surchauffé ! Et à la sortie, Michel m’invite dans un restaurant libanais en ville : un vrai jour de fête ! J’en profite pour ouvrir ma boîte mail. Le serveur n’est pas surchargé, je peux donc accéder plus facilement à mes messages.
    Mais il me faut rentrer rapidement à la paroisse pour visiter les différents groupes de catéchèse. Le nombre augmente à chaque séance, mais on est déjà en décembre ! Les choses mettent vraiment du temps à se mettre en place, mais il est vrai que nous avions beaucoup de points à revoir dans la paroisse. Et surtout les gens ne s’organisent pas encore eux-mêmes et n’ont pas pris leurs responsabilités. Ca viendra ! Je salue aussi les mouvements et groupes de prière qui se rassemblent aujourd’hui. Dès la fin de la catéchèse, nous nous retrouvons pour faire le point de la situation, voir comment mieux responsabiliser les parrains et les marraines ainsi que les parents, voir où en sont les cotisations et les inscriptions. Puis nous abordons la question de la pédagogie et du suivi des catéchumènes, car c’est cela le plus important. Il ne faut pas l’oublier.
    Le Bureau du Conseil paroissial assiste à la fin de la réunion. Puis avec eux, nous faisons le tour des activités de la paroisse. Nous nous arrêtons en particulier sur la question de la célébration des mariages et l’inculturation. Et nous traçons des orientations pour les semaines qui viennent et le temps de l’Avent.

  • Vendredi 27 Novembre : Fête de la Tabaski
    Aujourd’hui, fête de la Tabaski, sacrifice du mouton en souvenir d’Abraham. Depuis hier, tout le monde se préparait à la fête : 90 % des Guinéens sont musulmans et l’ambiance religieuse se faisait vraiment sentir. Nous prions pour eux et en union avec eux.
    C’est une journée chômée et payée. Cela me laisse le temps de travailler certains documents, en particulier pour les CV-AV, le Mouvement des enfants. Et l’évaluation des Centres Aérés d’Août dernier, toujours inachevée.
    L’après-midi, je bénis mon premier mariage dans la paroisse de TAOUYA. C’est un mariage entre un musulman et une chrétienne. J’ai déjà parlé, plus haut, des problèmes que ça pose. En positif, cela permet une collaboration entre chrétiens et musulmans. Et quand le couple marche, cela permet un enrichissement pas seulement du couple mais aussi des deux familles, de leurs amis et de leurs communautés. Nous avons bien préparé la cérémonie, en reprenant un certain nombre de rites traditionnels : la remise de la noix de cola, signe d’engagement ; les barres de fer, symbole du mariage selon la coutume. Les parents ont commencé par accepter le mariage de leurs enfants et leur donner des bénédictions. Puis, ce sont les témoins et les responsables de la communauté du quartier qui leur donnent des conseils et assurent de leur soutien. C’est le mari, musulman, qui a demandé de lui-même à lire l’Evangile, avant que nous partagions la Parole de Dieu. La cérémonie se prolonge dans la joie, avant la procession d’offertoire, où beaucoup apportent leurs offrandes en dansant.
    J’ai le temps de passer dans la famille pour partager leur joie, avant d’aller rencontrer une communauté de quartier.
    Cette communauté de quartier ne marche pas très bien. Le responsable veut tout commander et refuse tous les efforts de participation que nous avons faits. Du coup, les gens sont démobilisés. Déjà que beaucoup sont réticents au départ : ils se contentent de venir assister à la messe, mais refusent d’en faire plus et de s’engager dans la communauté et le quartier. Il faut donc reprendre les choses à la base. Heureusement qu’il y a un noyau de jeunes qui semblent motivés et sur lesquels nous allons pouvoir nous appuyer.

  • Jeudi 26 Novembre :
    Le matin, je monte en ville me faire soigner au dispensaire. Depuis quatre mois, l’ulcère que j’ai à la cheville ne se cicatrise pas. Aujourd’hui, nous commençons un nouveau traitement. J’espère que ça va marcher.

  • Dimanche 22 Novembre : De très bonne heure, nous partons à KINDIA pour le centenaire. Il n’y a que 136 km mais il nous faut 4 heures pour les faire, vu l’état de la route. Beaucoup de monde est venu depuis jeudi, début de la célébration, et c’est l ’occasion de revoir de nombreux amis. Et aussi de régler certains problèmes, car les communications sont très difficiles et c’est également souvent difficile de se parler, même au téléphone ; il n’y a pas de réseau partout.
    Une grande reconnaissance est faite aux missionnaires pour leur travail courageux, dans des conditions très dures en ce temps-là. Ce n’est pas pour rien que la paroisse s’appelle « La Croix Glorieuse ». La volonté de tous, c’est que cette grande fête ne soit pas seulement une belle cérémonie, mais l’occasion d’un nouveau départ. A la procession d’entrée, le Supérieur des Spiritains portait un cierge, symbole de l’Evangile apporté par les premiers missionnaires, mais aussi signe qu’ils ont passé le flambeau à l’Eglise locale.
    A cette fête, les survivants des maçons qui ont construit l’église et des premiers enseignants de l’école, musulmans et chrétiens, ont été spécialement honorés. Le préfet était là, avec aussi une délégation présidentielle et ministérielle. Ils ont beaucoup participé à la fête et vont soutenir les réalisations prévues : réaménagement d’un collège, ateliers, etc… La ville fêtera son propre centenaire dans trois ans.
    Une délégation de la paroisse de Notre Dame des Champs de PARIS est venue. Ils accueillent régulièrement des prêtres guinéens qui étudient en France, et nous soutiennent beaucoup dans nos actions sur place. Nous les en remercions.
    Gérard, l’archiviste général des Spiritains, est là également. Il a travaillé de longues années en Guinée, jusqu’à son expulsion avec tous les autres missionnaires, par Sékou Touré. C’est lui qui fait la conférence sur le Père LACAN, le fondateur de la paroisse.
    Ces invités reçoivent un pagne du centenaire à l’effigie du Père LACAN, avec la devise de la paroisse. Et aussi une belle statue, fabriquée par les sculpteurs de la paroisse dans le bois de l’un des arbres plantés par les premiers missionnaires. Tout un symbole.
    Mais nous ne vivons pas dans le passé et n’oublions pas la situation actuelle dans nos prières. L’Evêque a des paroles spécialement fortes, demandant au gouvernement comme à l’opposition, et à tous les citoyens, de chercher le bien réel du pays et une vraie démocratie, et non pas leurs intérêts partisans. Dans la vérité, à la suite du Christ Roi, dont c’est la fête aujourd’hui, venu sur terre pour rendre témoignage à la Vérité. Pour construire ensemble en Guinée « un Royaume de justice, de paix, de pardon, d’amour et de vérité », comme le dit justement la Préface de ce jour. L’évêque insiste spécialement sur la nécessité d’une vie de famille épanouissante et l’engagement dans les communautés de quartier, pour y arriver. Tout cela, dans la ligne du 2ème Synode pour l’Afrique qui vient de se terminer.
    Bien sûr, nous célébrons la fête dans notre culture guinéenne, avec, en particulier, une procession de l’Evangile et une danse d’offertoire, où de nombreuses personnes –notamment les 83 jeunes qui reçoivent la Confirmation aujourd’hui- apportent leur offrande.
    Le repas qui suit nous permet de nous retrouver à nouveau. Et le soir, c’est la veillée culturelle avec théâtre et danses.

  • Samedi 21 Novembre : Je prends une journée de repos. J’en ai bien besoin.

  • Vendredi 20 Novembre : Yves-Marie part à KINDIA pour le début des célébrations du Centenaire. Je ne pourrai y aller que dimanche car j’ai trop de travail en retard et je dois faire soigner ma cheville. Je passe toute la matinée à essayer d'ouvrir ma boîte mail, sans succès. Yahoo coupe sans arrêt. J’ai l’impression d’avoir perdu tout mon temps ; car ce ne sont pas les activités qui manquent ni les personnes qui attendent pour me voir.

  • Jeudi 19 Novembre : Rencontre des spiritains.
    Nous nous retrouvons toute la journée. D’abord, pour nous donner des nouvelles les uns des autres, et recevoir celles de nos frères d’un peu partout dans le monde, en particulier des malades. Et spécialement de nos confrères d’Afrique de l’Ouest, notre « fondation ». Nous échangeons sur les grandes orientations de notre congrégation et préparons la visite de nos responsables internationaux, l’année prochaine.
    Ensuite nous faisons le tour de nos activités sur place, en nous apportant appui et conseils, sous la direction d’Yves-Marie, notre responsable. Le tout terminé par un bon repas fraternel. L’après-midi est consacré aux contacts personnels et informels. Le soir, nous regardons ensemble les informations à la télévision guinéenne (ce soir, il y a du courant) et nous échangeons longuement sur la situation du pays et la rencontre sur l’avenir de la Guinée à OUAGADOUGOU, autour du Président Blaise COMPAORE

  • Mercredi 18 Novembre : Avec Pascal, le stagiaire de MONGO, nous allons à la Rencontre des éducateurs des enfants de la rue, de neuf Foyers différents. Je vais leur présenter un jeu sur les droits de l’homme qu’ils vont pouvoir utiliser dans leurs différents foyers. Et tout de suite, nous faisons un premier exercice avec les enfants, ce qui nous permet de faire l’évaluation du jeu et de répondre aux questions des éducateurs.
    A midi, avec CRS, nous voyons comment répartir l’argent qui vient d’arriver et les différentes opérations à faire, ce qui n’est pas une mince affaire.
    A 17 heures, nous nous retrouvons à la paroisse avec les responsables des scouts, des CV-AV (Mouvement des enfants) et des Enfants de Chœur, pour présenter un nouveau jeu sur les droits de l’enfant, qu’ils vont pouvoir utiliser tout au long de l’année. En fait, il ne s’agit pas d’un simple jeu mais d’un moyen éducatif avec des méthodes actives (théâtre, jeux, danses, poèmes, enquêtes….). Le but étant de faire des enfants des acteurs de leurs propres droits, responsables de leurs camarades et engagés dans leurs familles, écoles, quartiers, selon la méthode de l’Action Catholique : les enfants eux-mêmes sont les apôtres des enfants.
    Au retour, nous accueillons notre nouveau responsable. Il vient du Sénégal pour les célébrations du Centenaire de KINDIA. Nous en profitons pour nous retrouver ensemble, les Spiritains de la région avec lui. Il y a beaucoup de choses à voir, car c’est un nouveau départ que nous prenons.

  • Mardi 17 Novembre : J’ai emprunté l’ordinateur portable de l’atelier Savoir-Fer, et je reste à la maison pour travailler à saisir tous les documents en retard et ils sont nombreux. En même temps, j’essaie de récupérer les documents perdus par mail et auprès des amis. Heureusement que j’avais un certain nombre de choses sur mes clés. Et je cherche à trouver un ordinateur portable d’occasion en ville. Je prends un temps de lecture personnelle car c’est nécessaire pour moi de continuer à me former.

  • Lundi 16 Novembre : Cette semaine, nous célébrons le Centenaire de la fondation d’une des paroisses de Guinée : KINDIA, fondée par les Spiritains bien sûr comme la plupart des paroisses de Guinée. C’est un événement très important pour l’Eglise, mais aussi pour le pays. Le curé actuel de Kindia a travaillé plusieurs années dans une paroisse de Paris et nous en accueillons la délégation ce matin, avec joie, en les remerciant de leur accueil et de leur soutien. Avec eux, vient un confrère, Gérard VIEIRA, qui a travaillé de longues années en Guinée en particulier dans la catéchèse, jusqu’à son expulsion en 1967, comme tous les autre missionnaires, par Sékou Touré. Il a été ensuite notre responsable religieux pour l’Afrique de l’Ouest francophone, quand je travaillais à St Louis du Sénégal. Et c’est lui qui m’a demandé de venir en Guinée pour travailler dans les Camps de Réfugiés à MONGO. Nous restons en contact régulier par Internet ; il est maintenant responsable des Archives générales de notre Congrégation. C’est dire que je suis très heureux de le revoir et que nous avons beaucoup de choses à nous dire. Pour ces fêtes du centenaire, il va assurer une conférence sur le Père LACAN, le fondateur de la paroisse de KINDIA. Nous allons tous ensemble rencontrer l’évêque et nous nous retrouverons à midi pour le repas.
    Aussitôt après, nous rencontrons les volontaires. Nous avons fini les premiers contacts avec les blessés et les familles des morts du 28 Septembre, et évalué leurs besoins, ainsi que ce que nos possibilités nous permettront de faire. Aujourd’hui, nous travaillons le projet d’engagement des volontaires, qui est important pour que les conditions de travail soient claires. Ensuite, nous nous répartissons les blessés et les familles en deuil, afin que chaque volontaire suive personnellement six ou sept personnes. Ils vont faire une nouvelle tournée et apporter à chacun ce dont il a besoin. Les choses vont enfin pouvoir commencer ; en effet, il nous a fallu beaucoup de temps pour découvrir les gens, car beaucoup se cachent par peur d’être repérés, et il nous faut absolument travailler dans la discrétion. Il y a même des tentatives, de différents côtés, pour récupérer des listes d’adresses et les utiliser pour des intérêts politiques ou autres. Bien sûr, nous nous y refusons absolument. Par ailleurs, les moyens ont mis du temps à arriver. Maintenant ils sont là et nous remercions l’Association Guinée Solidarité de Provence, l’Association Raoul Follereau, et surtout CRS (la Caritas des Etats-Unis)
    Rapidement, je pars pour la paroisse où nous tenons une réunion des catéchistes. La catéchèse est maintenant lancée, mais il y a beaucoup de choses à mettre au point. Et surtout, il faut assurer la formation continue des catéchistes. Ce soir, nous travaillons les premiers documents que j’ai préparés. Malheureusement, les catéchistes sont peu nombreux à venir. Il faut dire qu’ils ont leur travail et les moyens de transport sont très compliqués. La prochaine fois, nous essaierons de nous retrouver le samedi après-midi, après la catéchèse. On verra ce que ça donne.
    Nous nous rendons ensuite chez l’Evêque, qui a invité les spiritains de Conakry, les supérieur(e)s des religieux(ses) et les responsables du diocèse, pour accueillir le Père Gérard VIEIRA. C’est une soirée très sympathique qui renforce nos liens d’amitié.

  • Dimanche 15 Novembre : Rencontre des délégués de pastorale sociale des différentes paroisses de la ville. Les participants, cette fois-ci, sont assez nombreux et c’est encourageant. Nous cherchons à mettre en place la Commission de la paroisse de COLEAH qui nous accueille et qui n’a pas fonctionné l’année dernière. Après le tour des activités des différentes paroisses, nous tirons les conclusions nécessaires pour la suite du travail de cette année. Ensuite, nous abordons un certain nombre de questions : la préparation des Centres aérés pour l’année prochaine, la rédaction des plans d’action paroissiaux, etc… Je vous en enverrai le compte-rendu…. quand j’aurai le temps de le rédiger ! Les membres du Conseil Paroissial ont participé activement à toute la réunion, ce qui est un signe d’engagement important.

  • Samedi 14 Novembre : L’après Synode.
    Toute la matinée, formation sur le 2ème Synode pour l’Afrique. Nous étudions le message final, et les 56 propositions des évêques, puis nous commençons à voir comment les mettre concrètement en œuvre, dans nos conditions de vie actuelles.
    Ensuite, nous nous retrouvons auprès de l’évêque pour voir justement le suivi à donner au Synode en tenant compte de la situation du pays.
    Nous examinons également les réactions à la dernière déclaration de l’évêque, qui sont très diverses et vont un peu dans tous les sens, chacun retenant, comme d’habitude, ce qui va dans son sens et peut soutenir ses propres choix.
    L’après-midi, comme chaque samedi, présence à la paroisse : catéchismes, réunions de différents groupes, préparations au baptême et au mariage, contacts personnels.

  • Vendredi 13 Novembre : Pascal va mieux. Hermann, curé de BOFFA, vient me voir. Nous y avons travaillé ensemble avant qu’il me succède. Nous parlons de la paroisse, des constructions, de l’organisation du prochain pèlerinage diocésain, du stagiaire (à Boffa, c’est un Camerounais), et du travail en général. Nous profitons ainsi à chaque fois de nos rencontres pour faire le tour de nos activités.
    Le reste de la journée, je prépare des documents pour la formation des catéchistes de lundi prochain.

  • Jeudi 12 Novembre : Ce matin, Pascal s’est retrouvé avec une grosse crise de paludisme. Nous l’amenons à la Clinique voisine qui nous connaît bien et où il sera bien soigné (perfusion, analyse, etc…). C’est l’avantage d’être en ville.
    Puis il me faut monter à l’archevêché pour les activités « ordinaires », sans oublier de me faire soigner, pour ma cheville. Le nouvel ambassadeur de France vient juste de venir saluer l’archevêque et de s’entretenir avec lui de la situation du pays. Il dit à l’archevêque qu’il n’apprécie pas mes prises de position. Tout le monde ne peut être d’accord…. Mais en plus j’ai justement l’impression que nous ne vivons pas dans le même monde ! Il est vrai que nous ne vivons pas avec, ni ne rencontrons, les mêmes personnes. Nous reprenons tout cela longuement avec l’archevêque. Car sa dernière déclaration entraîne, elle aussi, de nombreux remous. C’est inévitable. Nous cherchons ensemble comment tout cela participe à construire le pays plutôt qu’à apporter la division.
    Avec CRS, nous continuons à organiser le soutien des blessés et familles en deuil du 28 Septembre. Il y a tant à faire !
    Ensuite, visite de l’atelier de soudure. La confection de la grande Croix en tôle pour le Centenaire de la paroisse de Kindia avance bien et les apprentis sont très fiers d’y travailler, en particulier les musulmans. D’ailleurs, ils iront tous ensemble sur place pour l’installation de la croix et assisteront à la célébration. Ils l’ont bien mérité !
    Les Enfants de Chœur. Le soir, première rencontre générale avec eux. J’avais déjà bien travaillé avec ce groupe pour mettre en place une formation à la prière, qui s’est bien passée. Jusqu’à maintenant, ils ne recevaient qu’une formation « liturgique » très théorique (connaître les noms des vases sacrés et des linges liturgiques) qui n’avait pas grand-chose à voir avec leur vie de jeunes et d’enfants. Ensemble nous élaborons un programme d’action pour l’année : Le dimanche, réflexions sur le programme général des jeunes ; le mois prochain : l’engagement dans la société. Le mercredi soir : lecture de l’Evangile, partage et prière. Et un certain nombre d’activités pour les jeunes : compétition de foot ball, soirées, etc…
    Après cela, préparation au mariage. Les gens voient que la paroisse se réveille, et du coup ils se réveillent eux aussi.

  • Mercredi 11 Novembre : Après la célébration de la chute du mur de Berlin, qui n’a pas résolu tous les problèmes ni les inégalités, nous suivons de loin l’anniversaire du 11 Novembre, en regrettant toutes ces morts inutiles. Et pour nous, ici, nous sommes encore loin de l’armistice, malheureusement. Nous cherchons simplement à faire tomber patiemment les murs entre les ethnies et les religions.
    Réunion de communauté. Ce matin, nous nous réunissons pour faire le point de notre vie de communauté et de nos différentes activités. Il y a beaucoup de choses à voir et c’est important d’en parler ensemble, même si nous ne sommes pas toujours d’accord. Mais c’est ce qui fait avancer les choses.
    Après cette réunion, je m’assois avec Emmanuel, le stagiaire, pour évaluer les différentes activités de la paroisse de TAOUYA. Là encore, nous sommes nouveaux tous les deux ; c’est essentiel pour nous d’échanger nos impressions et nos expériences passées. Puis je prends un temps avec Pascal, le stagiaire sénégalais qui travaille à MONGO. Il est venu à Conakry chercher l’argent pour les projets de développement de la paroisse que nous envoie Appel Détresse, une association qui nous soutient depuis de nombreuses années déjà. Nous lui en sommes très reconnaissants. Pascal va en profiter pour m’accompagner dans un certain nombre d’activités, car le travail en ville à Conakry n’est évidemment pas le même que dans les villages de Mongo et c’est important pour sa formation et son apostolat futur.
    Pastorale sociale. Le soir, rencontre avec la Commission de Pastorale sociale qui a de la peine à se mettre en place. Des responsables ont été choisis, mais ils ne s’engagent pas. Nous décidons de refaire le tour des différents groupes et communautés de quartier, pour expliquer ce qu’est la Commission et motiver les gens. Heureusement, nous pouvons compter sur deux ou trois personnes convaincues.

  • Mardi 10 Novembre. Contrat de soutien aux blessés et familles en deuil.
    Avec CRS nous rencontrons l’Archevêque pour signer le protocole d’accord et obtenir les moyens pour aider les différentes victimes de la tuerie du 28 Septembre. Les blessés légers seront soignés au dispensaire catholique d’Etat St Gabriel. Les blessés graves seront pris en charge par des ONG internationales médicales qui pourront vraiment les suivre, le tout dans la discrétion. Car jusqu’à maintenant, beaucoup ont peur d’aller se faire soigner dans les dispensaires par crainte de se faire repérer et arrêter. Les familles ayant perdu un membre recevront une assistance en nourriture. Les enfants de ces familles recevront aussi une aide en matériel scolaire. Les jeunes filles violées recevront des soins spéciaux dans la discrétion. Et les cas des personnes disparues seront signalés au CICR, toujours dans la confidentialité. Cela va être un gros travail.
    Tout de suite après la signature, nous nous retrouvons avec les volontaires pour préciser le travail et donner les premières orientations. Cela demande beaucoup de précision et aussi beaucoup de temps. Nous assurons la prise en charge des volontaires pour leur nourriture, les déplacements, les cartes téléphoniques et une gratification pour le travail. Mais certains voudraient beaucoup plus et voudraient aussi être embauchés définitivement comme travailleurs salariés. Malheureusement, nous ne pouvons pas assurer tout cela.
    Cette question du bénévolat est très complexe, car les gens sont pauvres et souvent en chômage ; ils sont donc à la recherche d’argent pour eux et leur famille. Mais, d’un autre côté, peu de gens, même ayant un salaire régulier, acceptent de faire un travail gratuitement ou de mener une action bénévole.
    Problèmes d’ordinateur. Je voudrais bien ouvrir ma boîte pour envoyer mon courrier et aussi pour chercher à récupérer certains documents. En effet, la carte mère de mon ordinateur a lâché, mon ordinateur est foutu et beaucoup de documents perdus. Je suis bloqué dans mon travail. Je me débrouille en amenant l’ordinateur de l’atelier Savoir-Fer la nuit.

  • Mardi 10 Novembre : Les Moines de SEGEYA
    Longue conversation avec les moines de Segeya. Ces moines sont venus du Monastère de KEUR MOUSSA au Sénégal depuis une dizaine d’années et ont fondé un prieuré en Guinée. Tout de suite, ils se sont mis au travail et ont maintenant une grosse exploitation agricole qui fait l’admiration de tous et entraîne le développement du secteur, car ils ont le souci de faire profiter les autres paysans de leur expérience. Avec eux, nous parlons de deux jeunes qui veulent être missionnaires spiritains et qui ont vécu deux semaines de prière et de réflexion au Monastère.

  • Lundi 9 Novembre : Je reste à la maison pour mettre au clair tout cela et rédiger quelques comptes rendus parmi tous ceux qui sont en retard.

  • Dimanche 8 Novembre : Rencontre « Justice et Paix ».
    Rencontre des délégués des paroisses de la ville. Aujourd’hui, nous nous retrouvons dans une paroisse de la grande banlieue. L’Evangile est celui de l’aumône de la pauvre veuve. Nous réfléchissons sur la place donnée aux femmes dans notre communauté et la société en général. Et à la défense des veuves et des pauvres. Bien sûr, les femmes prennent une place importante dans notre partage.
    Après la messe, réunion. Il y a un certain nombre de nouveaux et nouvelles. Heureusement, car les membres de la Commission créée l’année dernière n’ont pratiquement rien fait et ne sont même pas présents aujourd’hui. C’est cela qui est épuisant. Malgré tout, les choses avancent peu à peu.
    Les délégués des différentes paroisses ne sont pas nombreux non plus. Il est vrai que les gens vivent actuellement dans un climat de peur et de découragement général, contre lequel nous essayons de réagir malgré tout. Pas facile de redonner un peu d’espérance dans un tel contexte.
    Nous reprenons donc le travail de mise en place des Commissions. Nous voyons comment faire un plan d’action pour cette année. Puis nous abordons un certain nombre de questions dont le soutien de deux orphelinats pour enfants abandonnés et d’un foyer de jeunes filles en difficulté. Nous commençons à penser aux Centres aérés de l’année prochaine, en voyant comment faire pour qu’ils touchent davantage les enfants en difficultés, en danger moral et de familles pauvres. Il va falloir revoir nos objectifs et réorganiser la formation dans ce sens.

  • Samedi 7 Novembre : 2ème rencontre du Conseil Paroissial élargi.
    Les représentants de tous les groupes sont là et ils sont nombreux. Plus de 30. La 1ère fois, en accord avec le Bureau, je leur avais fait un certain nombre de propositions, conformément aux orientations données par l’évêque. Ils en ont discuté dans chaque groupe et maintenant nous accueillons leurs réactions, avant de prendre des décisions.
    Nous faisons le tour de chacune des communautés de quartier, des commissions, des mouvements de jeunes et d’adultes et des autres groupes. Mais avant cela, je prends le temps de présenter rapidement le message final du 2ème Synode pour l’Afrique et les propositions des évêques qui sont très intéressantes. En fait, ce qui va nous prendre le plus de temps, ce sont les problèmes économiques qui sont toujours complexes et où les différents intérêts s’affrontent.
    La conciliation au Burkina Faso.
    Le président du Burkina Faso a fini de recevoir les « forces vives » de l’opposition. Cette semaine, il va recevoir les militaires et le gouvernement. Pour le moment, les positions sont inconciliables, chaque groupe voulant prendre ou garder le pouvoir. Espérons que chacun va accepter de mettre de l’eau dans son vin.
    Après-midi. C’est samedi ; plusieurs groupes et mouvements tiennent leur réunion. C’est aussi le jour du catéchisme, qui a bien de mal à démarrer. Il y a donc beaucoup de choses à régler. En même temps, la préparation des mariages chrétiens-musulmans se continue. Un nouveau couple est venu s’ajouter. Et pour couronner le tout, les inscriptions des baptêmes de bébés. Là aussi il faut prendre le temps d’accueillir et de parler avec les gens. Ca fait vraiment beaucoup.

  • Vendredi 6 Novembre : Journée « ordinaire » à l’archevêché, avec de nombreuses visites et occupations habituelles.

  • Jeudi 5 Novembre : Travail avec le Conseil économique de la paroisse. Il s’agit de finaliser les comptes de l’année dernière pour les présenter au Conseil paroissial et à toute la communauté. Et aussi de refaire ce Conseil, suite à des problèmes internes, de problèmes de personnes et de déménagements. Les questions d’argent sont toujours difficiles.
    Le soir, rencontre avec les catéchistes qui ne sont pas venus à la réunion de lundi. Cela arrive très souvent et fait perdre beaucoup de temps. Les gens ne répondent pas aux invitations et il faut reprendre le travail un par un.

  • Mercredi 4 Novembre : Je reste à la maison pour rédiger un certain nombre de documents en retard. Et pour recevoir un certain nombre de personnes. En particulier, un jeune qui voudrait être spiritain. Nous parlons longuement mais il me semble plus chercher une situation sociale et une sécurité qu’à être missionnaire au service des plus pauvres, dans l’amitié et l’ouverture à tous. Nous continuerons notre réflexion, mais je pense que les bases nécessaires à une vie religieuse et missionnaire n’existent pas… au moins pour le moment.
    A ce moment-là, je suis appelé par CRS d’urgence. Ils ont lancé un grand programme de vaccinations, d’éducation sanitaire et de lutte contre le paludisme, en particulier en distribuant des moustiquaires imprégnées de produits qui chassent les moustiques. En effet, le paludisme tue plus que le SIDA en Guinée, surtout les bébés. Le projet est en cours, mais on a besoin de personnes engagées et sérieuses pour superviser les distributions, payer les travailleurs, etc… On sollicite les Commissions de « Justice et Paix » pour assurer cette supervision. Bien sûr, j’accepte… en espérant que les gens choisis seront compétents et surtout sauront résister aux pressions et aux tentatives de corruption. Ce qui n’est pas facile.

  • Mardi 3 Novembre : Travail à l’Archevêché.
    En arrivant au cyber-café, une mauvaise surprise : mon ordinateur portable ne marche plus. La carte mère est fichue. C’est vrai que je le promène partout, pour trouver du courant ou un réseau internet, et cela ne l’arrange pas. Le problème va être de m’en procurer un autre.
    Je pars donc à l’Atelier où les jeunes préparent une grande croix pour le centenaire de la paroisse de Kindia, fondée par un spiritain, le Père LACAN ; c’est un gros travail de plusieurs semaines, pour former à la main en tôle un Christ plus grand que grandeur nature et une croix de plus de 6 mètres de haut. Ce sont des jeunes musulmans qui font ce travail. Ils sont très heureux et même fiers de le faire.
    Je me retrouve ensuite avec les responsables diocésains de la jeunesse pour évaluer l’avancée du thème d’action de ce mois de Novembre : l’engagement dans l’Eglise.
    Puis, c’est le problème de l’impression de l’agenda liturgique 2010. Il est prêt au tirage depuis début octobre, mais notre machine nous a lâchés. En effet, notre imprimerie est très vieille, et, malgré de très nombreuses démarches, nous n’avons pas trouvé de financement pour acheter de nouvelles machines. On va essayer de bricoler quelque chose sur place.
    Après cela, je vais soigner ma cheville au dispensaire de l’ambassade de France, où je suis très bien soigné et accueilli. Mais il s’agit d’un ulcère, donc il faut beaucoup de temps pour qu’il se cicatrise. De plus, le médicament utilisé étant terminé, il a fallu passer commande pour une nouvelle livraison. Et pendant ce temps, la plaie s’est réinfectée. Patience ! Mais ces soins me prennent beaucoup de temps et me fatiguent beaucoup, m’empêchant de travailler comme d’habitude, alors qu’il y a tant à faire en ce moment. Par ailleurs, certains s’étonnent que j’aille me faire soigner à l’ambassade, alors que je ne suis pas d’accord avec la politique qu’elle mène en Guinée. Mais je pense qu’il ne faut pas mélanger les choses !

  • Lundi 2 Novembre : Evaluation des actions.
    Ce matin, nous nous retrouvons à CRS pour faire l’évaluation des activités de toute l’année. C’est un gros travail, mais c’est important pour voir où l’on va. Et évaluer le travail nous permet de l’améliorer. Il s’agissait, en premier lieu, de mettre en place des commissions de justice et paix et de pastorale sociale dans chacune des paroisses. Les formateurs ont vraiment bien travaillé et les commissions sont en place. Il reste cependant un certain nombre de problèmes : d’abord il faudra que les commissions se mettent effectivement au travail. Mais nous notons qu’un certain nombre de responsables de paroisse n’ont pas compris ce que nous cherchons ; et pour certains, c’est un moyen de gagner de l’argent et de l’influence, plutôt que se mettre au service du pays et des pauvres. Il va falloir remotiver les gens et réorienter les choses. Nous prévoyons plusieurs sessions de formation pour cela.
    A 16 heures, nous nous retrouvons au cimetière pour la prière pour les morts. A 18 heures, nous sommes à l’église paroissiale pour une prière spéciale pour les défunts de la paroisse et pour les membres de leurs familles, et une intercession pour les veuves. L’Eucharistie se prolonge dans les salutations et les discussions amicales.
    Discours du Président.
    Je rentre ensuite rapidement à la Communauté pour pouvoir suivre le discours du Président. Il ne se manifestait pratiquement plus depuis le 28 Septembre. Il a beaucoup changé son comportement : il n’a plus son béret rouge, il parle assis et calmement. Mais dans le contenu, il reste des problèmes et il n’a pas beaucoup changé : il continue à mettre la faute des tueries sur les partis d’opposition qui ont maintenu la manifestation contre sa candidature alors qu’il l’avait interdite. Bien sûr, il a présenté ses condoléances aux familles des tués mais il n’a exprimé aucune demande de pardon, se contentant de dire que c’est un événement malheureux et imprévu. Et aucun regret exprimé de la part de l’armée.
    On se contente de dire : il faut mettre en place le dialogue, s’asseoir à la même table et se pardonner. Mais il n’y a pas de réconciliation sans justice ! Au contraire, on a fait monter en grade d’office tous les militaires avec augmentation de salaire (sans doute pour se concilier l’armée). Et les militaires ont fêté la fête de l’armée le 1er Novembre sans arrière-pensée. Mais le problème, c’est que si on enlève le Président Dadis, qui aura l’autorité pour tenir les militaires en main et qu’ils acceptent un gouvernement démocratique ? Et du côté de l’opposition, ils sont divisés entre eux, et de toutes façons on ne voit pas très bien qui pourrait être président actuellement. Nous espérons que les rencontres avec le Président Blaise COMPAORE, le médiateur choisi par la Conférence des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDAO), pourra faire quelque chose. Nous suivons les événements dans l’inquiétude et la prière.
    Discours de l’Evêque.
    Juste après le discours du Président, c’est le discours de l’Evêque : c’est peut-être voulu, pour récupérer ce que l’Evêque va dire. D’autant que la situation est très délicate.
    L’évêque a essayé de juger les choses calmement et en se mettant au-dessus de la mêlée, mais ce n’est jamais facile. Et comme toujours, chacun cherche dans ce que l’évêque a dit ce qui peut conforter ses options et être utilisé à son avantage ; et, au contraire, supporte très mal les critiques que l’évêque fait à son camp.
    Pour moi, au-delà de la forme, dont on pourrait corriger certaines expressions, le fonds me semble valable et assez équilibré. Je regrette simplement que l’on n’ait pas condamné les tueries qui sont absolument indéfendables. C’est pourquoi nous attendons impatiemment les résultats de la Commission d’enquête nationale et surtout celle de l’O.N.U.
    Dans sa déclaration, l’évêque demandait que l’on ne cherche pas à récupérer la religion pour des fins politiques. Et c’est justement cela qui nous inquiète. D’abord le président lui-même demande des prières et des « récitations de la Bible et du Coran » dans toutes les églises et les mosquées, pour la paix et le dialogue. Nous pensons que ce n’est pas à lui de décider cela. Et pour la paix, il faudrait d’abord reconnaître de quel côté est la faute et au moins demander pardon. Ce n’est pas celui qui a été tué qui doit demander pardon –ou qui a eu tort-, mais bien celui qui a tué.
    Autre chose. Le lendemain, la déclaration de l’évêque est reprise à la télévision nationale avec des commentaires d’un journaliste. Le problème, c’est que pendant ces commentaires on passe des photos non pas de l’évêque ou de l’Eglise catholique mais du président Dadis et de ses premiers meetings, du temps où il avait beaucoup de succès. On a le sentiment que le pouvoir veut récupérer le discours de l’archevêque et donner l’impression que l’Eglise soutient inconditionnellement le pouvoir en place. Alors que, bien sûr, il ne peut pas en être question.
    De même, de nombreux groupes organisent des rencontres de prière pour la paix et le pays, jusque dans le camp militaire siège du CNDD (le Comité militaire au pouvoir) et où loge le Président. Cela aussi nous semble équivoque et nous met mal à l’aise. Bien sûr, il faut prier pour le pays, mais encore faut-il que les objectifs et les motivations soient clairs.

  • Dimanche 1er Novembre – Toussaint. Vers une prière plus ouverte et plus enracinée dans la culture.
    Je rappelle que tous ces saints que nous fêtons, ce ne sont pas seulement les saints chrétiens anonymes, mais aussi les saints des autres religions. Et également les ancêtres qui ont écouté la voix de Dieu dans leur cœur et vécu selon leur conscience. Et nous leur faisons une libation, en signe de respect, avec de l’eau bénite, devant l’autel. Et en suivant la 1ère lecture, nous amenons des pagnes blancs et des palmes devant l’autel.
    C’est mon 2ème dimanche à TAOUYA. En accord avec le Conseil paroissial et après discussion en assemblée, nous commençons un certain nombre de choses. D’abord, une liturgie de la Parole spéciale pour les enfants qui leur soit adaptée, avec une seule lecture (l’Evangile), des explications conformes à leur âge et à ce qu’ils vivent, et surtout une meilleure participation de leur part. Ils viennent nous rejoindre au moment du Credo pour participer avec nous au sacrifice de l’Eucharistie. La Prière Universelle est spontanée et dans les douze langues principales de la paroisse (six, chaque dimanche en alternant) pour que chacun puisse entendre au moins une prière dans sa langue. Moi-même, j’introduis des prières et la lecture de l’Evangile en soussou, qui est la langue commune de Conakry. Tout cela passe très bien.
    Dans l’homélie, à partir des béatitudes, j’insiste sur la nécessité de s’ouvrir à tous et de vivre notre foi à l’intérieur de nos cultures africaines. Là, ça passe moins bien. Il y a encore beaucoup de réticences à ce niveau et même de blocages.
    Rencontre des jeunes.
    Après la messe, rencontre générale des jeunes. C’est une action prolongée et suivie sur tout le diocèse. En septembre 2008, notre évêque avait un message aux jeunes. A Pâques (avril 2009), nous avons tenu deux grands forums avec les jeunes de KATACODI, dans le Bagataye (plus de 700 jeunes) et à CONAKRY. Voir les « Nouvelles » de cette époque. A partir des rapports, des interventions et des propositions des jeunes, nous avons donc élaboré un plan d’action en cinq temps : un thème d’action chaque mois. Et nous allons rédiger chaque mois un dossier pour donner aux responsables paroissiaux de la jeunesse les éléments nécessaires pour mener cette action. Les cinq grands thèmes retenus sont :
    1) L’engagement des jeunes dans l’Eglise,
    2) L’engagement dans la société,
    3) La mise en œuvre du Synode : Réconciliation, Justice et Paix,
    4) Témoignage et Evangélisation,
    5) Les problèmes de la jeunesse : drogue, violence, sorcellerie et magie, chômage, etc…
    Aujourd’hui, les responsables des jeunes de la paroisse présentent le premier thème. Ils ont très bien préparé les choses, si bien que je peux me « dédoubler » et aller suivre l’assemblée des femmes dont c’est en même temps la réunion générale, puisque c’est le seul dimanche où je suis là et que, elles aussi ont grand besoin d’organisation et d’orientations. Après que les responsables-jeunes aient présenté le thème à leurs camarades, nous avons une réflexion commune, à partir de l’Evangile, sur les engagements importants à prendre et les choses à faire. Je suis frappé par le sérieux et la profondeur de leur réflexion. Et la qualité de leurs témoignages et de leur foi chrétienne. C’est très réconfortant. Il est vrai que nous sommes en ville et qu’il y a parmi eux un certain nombre de jeunes cadres et d’étudiants, qui ont donc reçu une formation et ont l’habitude de réfléchir. Cela me change des villages de Kataco et Boffa, où tous les jeunes scolarisés étaient partis en ville et où il fallait travailler dans une langue que je ne parlais pas parfaitement, ce qui est toujours difficile et un de nos handicaps. Nous décidons donc d’un certain nombre d’actions à mener personnellement, à deux ou trois, ou en groupe et mouvements. Bien sûr, il faudra agir. Nous ferons le bilan le mois prochain.
    Rencontre des femmes.
    Les femmes de la paroisse ont de la peine à se mobiliser. Elles ont aussi de la peine à s’organiser car ce sont les hommes qui commandent la plupart du temps. De plus, les femmes ont été rassemblées en fraternité qui s’occupe de la préparation des fêtes, des repas et autres activités paroissiales. Mais elles n’ont pas été formées à prendre en charge leurs problèmes de femmes. Ni à travailler dans le quartier (pas seulement à la paroisse). Ni à agir ensemble avec les autres femmes (musulmanes et autres). Avec elles, avant même de décider des actions à mener, il va falloir assurer tout un travail de sensibilisation et de prise de conscience des problèmes. Et ensuite leur donner une formation. Il y a des femmes tout à fait capables pour cela. Il suffit de les repérer et de les motiver.

  • Samedi 31 Octobre : Tous les samedis, surtout en ce début d’année scolaire, je suis pris maintenant par ma grande et nouvelle paroisse. Je ne plus aussi disponible pour les Commissions des Justice et Paix et pour la Pastorale sociale, alors qu’il y a tant à faire, surtout avec les événements actuels. Le travail en retard s’accumule sur mon bureau et cela me pose un réel problème. Que faire ? A la paroisse, beaucoup de questions étaient restées en suspend. Souvent, justement parce que ce sont des problèmes délicats. Heureusement, avec le Bureau du Conseil paroissial, le courant passe bien et nous collaborons facilement. Pourtant, ce n’était pas évident pour eux, ni pour personne, d’accueillir un nouveau curé envoyé pour remettre de l’ordre avec tout ce que cela comporte.
    Préparation d’un document.
    Notre archevêque vient de revenir du 2ème Synode pour l’Afrique. C’est donc l’occasion de faire une déclaration sur la situation du pays, à la lumière des textes du synode. En effet, la situation est toujours aussi délicate et tendue. L’insécurité grandit. Un directeur de banque a été agressé. Du coup, toutes les banques sont fermées. Les « forces vives » de l’opposition, comme les membres du gouvernement et des militaires, se préparent à rencontrer le médiateur, Blaise COMPAORE, Président du Burkina Faso, mais au lieu de chercher le dialogue, et pour cela reconnaître ses torts, on a l’impression que l’opposition fait de la surenchère et que les militaires n’ont rien compris et font de la provocation. Il est important que l’Eglise intervienne en se tenant au-dessus de la mêlée et en proposant des solutions, mais il nous faut bien examiner tous les aspects et réfléchir à ce que nous allons dire.
    Le Conseil économique.
    Après cela, nous nous retrouvons avec le responsable économique. La paroisse de Taouya est une très grosse paroisse mais jeune. Beaucoup de choses sont donc à mettre en place. Pour le moment, la priorité est la construction du presbytère .Et il y a aussi et surtout la prise en charge des différentes activités, notamment en ce début d’année scolaire. Le conseil est devenu inefficace suite à des problèmes de personnes. Il va donc falloir d’abord régler tous ces problèmes, ce qui n’est jamais facile, d’autant plus qu’ un certain nombre d’opérations pas très claires réalisées dans le passé font qu’il y a un blocage sur toutes ces questions financières. Mais je ferai tout pour assainir les choses. C’est une question de crédibilité pour la paroisse et ses responsables, et même pour toute l’Eglise de Guinée. Il va seulement me falloir beaucoup de tact et de patience….. et ce n’est pas mon fort !
    Permanence au presbytère.
    Aujourd’hui, je me suis libéré pour la paroisse. De nombreuses personnes viennent me voir, car c’est une paroisse difficile (c’est d’ailleurs pour cela que j’y ai été nommé) et les problèmes ne manquent pas. Nous préparons trois mariages qui sont restés à la traîne, car ce sont des cas difficiles : mariages de chrétiennes avec des musulmans. J’en ai déjà parlé début octobre : il s’agit de faire respecter la liberté et la religion de ces femmes. Nous acceptons que le mari reste musulman ; il faudrait que lui, et surtout ses parents et ses chefs religieux, acceptent que la femme puisse rester chrétienne.
    Puis c’est le tour des parents qui veulent baptiser leurs bébés. Jusqu’à maintenant, on donnait le baptême sur simple demande. Mais nous sentons la nécessité absolue d’une formation plus approfondie des chrétiens à tous les niveaux. Je demande donc une préparation des parents et parrains/marraines, avec plusieurs rencontres pour cela. Tout comme pour le mariage. Et je tiens à ce que ce soit des laïcs, parents et couples mariés à l’Eglise, qui fassent ces préparations. Je leur ai remis des schémas de rencontres pour cela et j’ai commencé à les former. Mais cette exigence de préparation sérieuse à la célébration des sacrements a du mal à passer. Nous allons en reparler samedi prochain au Conseil paroissial. Je prends déjà le temps de rencontrer les parents et de parler avec eux.
    Avant la messe, j’ai juste le temps de saluer les groupes de catéchisme et les Mouvements de jeunesse qui se réunissent le samedi, pour que nous fassions connaissance. Et aussi pour assurer leur lancement effectif.
    Ce soir, à la Messe, il y a une prière spéciale pour une veuve qui finit son veuvage. Mais c’est surtout la clôture du Mois du Rosaire. Chaque jour, les chrétiens se sont retrouvés dans les quartiers populaires pour prier ensemble le chapelet. Ce soir, nous sommes donc tous ensemble à l’église. Notre prière démarre à partir de l’Evangile de la visite de Marie à Elisabeth : nous réfléchissons à la disponibilité, au sens du service de Marie et surtout aux paroles de son chant : « Dieu renverse les puissants de leurs trônes. Il élève les petits. Il donne à manger à ceux qui ont faim et renvoie les riches les mains vides. Il se souvient de son peuple avec nous ». Des paroles qui nous parlent beaucoup au milieu de tout ce que nous vivons

  • Vendredi 30 Octobre : Je pars de bonne heure pour pouvoir ouvrir ma boîte mail et ouvrir mon courrier, toujours aussi abondant. Mais il n’y a pas de courant, même en plein centre ville. Tout est bloqué. Je passe donc un moment à l’atelier de soudure où ils préparent une grande croix pour le centenaire de la paroisse de KINDIA.
    L’après-midi, rencontre de formation avec les CV-AV, le mouvement des enfants. Le soir, rencontre dans une communauté de quartier. Je recueille leurs conclusions après les deux réunions tenues par moi-même et par Emmanuel, le stagiaire. Elles sont, en gros, positives. Nous mettons donc en place un bureau et nous tenons notre première réunion en suivant le programme élaboré ensemble. La secrétaire en particulier est très dynamique et fait bien avancer les choses. C’est bon signe pour la suite. Comme d’habitude, la communauté nous a préparé un repas que je ramène en taxi à la maison. Il sent très bon et les autres voyageurs en salivent pendant tout le voyage.

  • Jeudi 29 Octobre : Avec Igbé, ce matin nous continuons notre réflexion en abordant la question des projets de développement, en privilégiant les femmes (un projet de jardinage) et les jeunes filles (en centre de couture). Pour ces jeunes filles, il s’agit à la fois d’apporter un complément de formation pour celles qui ont quitté l’école (ou même n’y sont jamais allées) et leur donner un moyen de gagner un minimum d’argent. Nous espérons que cela permettra de réduire en même temps le nombre de jeunes filles enceintes, qui est élevé malheureusement.
    Le dispensaire St Gabriel.
    A midi, nous allons avec les responsables de CRS voir l’équipe animatrice du dispensaire St Gabriel pour qu’elle assure le suivi des blessés du 28 Septembre, CRS prenant en charge les frais. En effet, ce dispensaire catholique est reconnu pour la qualité de ses soins, mais aussi le sérieux et la conscience professionnelle des agents de santé, ainsi que le coût très réduit des soins étant donné que tous les médicaments arrivent directement aux malades, sans être détournés et revendus à prix fort. De plus, les malades sont tranquilles, car les médicaments sont sûrs, il ne s’agit pas de faux médicaments venus du Nigeria ou de Chine, ou même fabriqués sur place. C’est d’ailleurs à cause de tout cela, que ce dispensaire privé catholique a été intégré dans la fonction publique, pour avoir une influence très positive sur les autres dispensaires de la ville. Ce dispensaire était dirigé par des volontaires européens d’une association. Après les événements du 28 Septembre, ils ont pris peur et sont tous rentrés, poussés en particulier par leurs parents, sans doute paniqués par ce qui se disait dans les médias européens sur la Guinée. Les responsables de l’association m’ont alors demandé le suivi du dispensaire. Une équipe de direction a été mise en place à partir du personnel guinéen qui travaille très bien. Donc, nous sommes sûrs que les blessés seront très bien pris en charge. Reste à trouver le moyen de débloquer le conteneur de médicaments qui est en attente au port.

  • Mercredi 28 Octobre : Nouvelle réunion avec les volontaires pour préparer les actions à mener et se répartir le travail.
    Aujourd’hui, cela fait un mois qu’a eu lieu la tuerie du 28 Septembre. Pour marquer ce triste anniversaire, les « forces vives », c’est-à-dire l’opposition, ont décidé une « ville morte ». Nous regrettons beaucoup cette décision, car elle continue à se situer dans la ligne de la confrontation, au lieu de chercher des voies pour le dialogue, qui est pourtant la seule solution valable et qui est encore possible malgré tout. D’ailleurs beaucoup de gens continuent à vaquer à leurs occupations, car ils sont fatigués de toutes ces manifestations et oppositions stériles. Beaucoup vivent dans la pauvreté et ont besoin de travailler pour vivre. La rentrée scolaire vient juste d’être faite et on arrête les cours ! Et les forces vives qui demandent cette ville morte ne s’entendent pas entre elles et n’ont pas de programme ni de solution à proposer. En fait, ce sont surtout les banques, les commerces et les stations services qui ont fermé, mais c’est par peur d’être attaqués et pillés, et non pas par soutien à l’opposition. En effet, les gens commencent à être très fatigués, et comme toujours, ce sont les plus pauvres qui subissent les conséquences. Selon nos moyens, nous continuons à chercher des voies constructives et des solutions de dialogue, tout en veillant à trouver des solutions constructives pour bâtir le pays. Ce n’est pas facile de mobiliser les gens !
    Formation des éducateurs.
    En tout cas, les formateurs et les apprentis de notre atelier de soudure sont tous venus au travail. Moi-même, je vais assurer la formation prévue des éducateurs des foyers des enfants de la rue. Après avoir réfléchi, il y a 15 jours, à notre façon de travailler et notre organisation, aujourd’hui nous réfléchissons à notre engagement d’éducateurs et voyons comment vivre cet engagement dans la foi. Nous commençons par une messe, où nous prenons largement le temps de partager la Parole de Dieu (Col. 3 et Matthieu 22) : les qualités de l’éducateur selon St Paul, et Jésus qui nous envoie sur les routes et les chemins à la recherche de nos frères et sœurs.
    Je dois les abandonner après la messe, car notre archevêque, qui revient du 2ème Synode pour l’Afrique après presqu’un mois d’absence, souhaite me rencontrer. Je laisse donc les éducateurs en carrefours, avec un questionnaire à réfléchir. Ils m’enverront leurs réponses que je travaillerai la prochaine fois avec eux tous.
    La tension augmente.
    Au retour, notre taxi est dépassé par une escorte militaire qui nous fait nous ranger d’une façon très agressive et en nous insultant. C’est ceci qui m’inquiète beaucoup. Suite à toutes les attaques médiatiques et diplomatiques contre la Guinée, les militaires se sentent agressés. Et ils répondent par des attaques verbales, mais aussi physiques, et même des arrestations arbitraires. Tout cela augmente la peur et l’insécurité. Nous sommes pris dans un cercle vicieux et un enchaînement sans fin. La volonté d’imposer des solutions par la force et de prendre parti à priori pour l’opposition de la part des pays et organisations étrangères, au lieu de chercher des chemins de dialogue, ne favorisent vraiment pas les choses et n’aident pas à la réconciliation. Nous nous retrouvons tout à fait dans le message final du 2ème synode pour l’Afrique qui vient de se terminer (n° 36 et 37)

    N° 36 – Le Synode s’attriste en remarquant que c’est la honte qui caractérise plus d’un pays africain. Nous pensons en particulier au cas lamentable de la Somalie empêtrée dans de violents conflits depuis près de deux décennies, avec des conséquences sur les nations avoisinantes. Nous n’oublions pas non plus la tragédie des millions de personnes dans la région des Grands Lacs et la durable crise au nord de l’Ouganda, au sud Soudan, au Darfour, en Guinée Conakry, et en d’autres endroits. Les gouvernants de ces nations doivent prendre leur responsabilité devant leurs prestations génératrices de douleur. En bien des cas, on se trouve devant la situation de soif du pouvoir et des richesses au détriment du peuple et de la nation. Quel que soit le niveau de responsabilité attribuable aux intérêts étrangers, on ne peut nier une honteuse et tragique complicité des leaders locaux : des politiciens qui trahissent et mettent leurs nations aux enchères, des hommes d’affaires éhontés qui se coalisent avec les multinationales voraces, des africains vendeurs et trafiquants d’armes qui spéculent sur les armes légères cause de la destruction de vies humaines, des agents locaux d’organisations internationales qui se font payer pour diffuser des idéologies nocives auxquelles ils n’adhèrent pas eux-mêmes.

    N° 37 – Les conséquences néfastes de toutes ces menées ne sont cachées pour personnes : pauvreté, misère et maladie, des réfugiés dedans, dehors et outre-mer, recherche d’une meilleure vie qui conduit la fuite des cerveaux, migrations clandestines, trafics d’hommes, guerres, effusion de sang, souvent par personnes interposées, atrocité d’enfants soldats, l’indicible violence faite aux femmes. Comment peut-on être fier de régner sur un tel chaos ? Qu’est devenue la pudeur traditionnelle africaine ? Ce Synode le proclame haut et fort : le temps est venu de changer des habitudes pour l’amour du présent et des générations futures.

    En ce moment, nous avons l’impression d’être assis sur une bombe. Et au lieu de la désamorcer, on augmente encore la température. Cela nous fait penser à l’ancien président des Etats-Unis, Bush. Lui aussi il a voulu imposer des solutions de force. Et nous avons vu à quoi cela a abouti en Irak et en Afghanistan. Nous ne voulons pas que la même chose arrive en Guinée, et pourtant nous en prenons le chemin.
    Aide à un orphelinat.
    A cause de tout cela, les problèmes à la base et les difficultés quotidiennes ne font qu’augmenter, pour le plus grand mal des populations déjà en situation de détresse. Plusieurs personnes viennent me voir, avec leurs problèmes personnels ou communautaires. Parmi eux, Charles, responsable d’un orphelinat où 37 enfants ont été accueillis. Depuis un an, une association allemande qui les soutenait a arrêté de les aider. Ils sont reconnus par le Ministères des affaires sociales, mais qui ne leur fournit aucune aide. La Communauté Sant Egidio prend en charge la scolarité des enfants dans une école privée, car l’enseignement dans les écoles publiques est malheureusement très mauvais. Mais il reste à assurer le logement et surtout la nourriture, les frais de santé, l’habillement, et tous les autres frais. Nous cherchons des moyens sur place et des actions pour gagner un peu d’argent et ne pas compter seulement sur l’extérieur, même si cette aide extérieure restera nécessaire sans doute pour longtemps encore.
    Malgré toutes nos difficultés, la vie reste agréable et les gens sont très attentionnés. Je me promène sans arrêt avec mon sac plein de papiers. Et les gens m’arrêtent pour me dire : « Attention, ton sac n’est pas fermé ! ». L’autre jour, tous les taxis collectifs étaient rares et donc pleins. J’ai réussi à entrer dans un « car rapide » où j’étais debout et courbé, le car rapide n’étant pas assez haut pour se tenir debout. Tout de suite, un jeune m’a donné sa place pour que je puisse m’asseoir. Comme je venais d’un endroit que je connais mal, il m’a expliqué l’itinéraire et à l’arrivée, il m’a dit : « Je sais que c’est difficile de vivre en pays étranger. Est-ce que je peux vous payer votre transport ? ». Bien sûr, j’ai accepté !
    Kataco.
    Le soir, j’ai la joie d’accueillir Igbé, un confrère nigérian, qui a pris la responsabilité de Kataco, après que nous ayons travaillé ensemble d’abord à Mongo, puis à Kataco. Nous réfléchissons ensemble toute la soirée sur la façon de travailler et préparer les formations et les actions pour cette nouvelle année pastorale.

  • Mardi 27 Octobre : Travail à la maison.
    Après-midi : rencontre avec CRS. Longue séance pour évaluer nos moyens et voir comment répondre aux différents besoins.

  • Lundi 26 Octobre : Soutien aux blessés.
    Rencontre des volontaires. Nous avons terminé les rencontres des blessés et des familles en deuil qui nous avaient été signalés. Nous évaluons les différents besoins.
    La journée se continue avec les activités ordinaires.

  • Dimanche 25 Octobre : La Commission « Justice et Paix ».
    Aujourd’hui, je suis dans la paroisse de BONFI pour rencontrer la Commission paroissiale. L’Evangile de la guérison de l’aveugle nous permet de réfléchir avec toute la communauté à la nécessité d’ouvrir nos yeux, non seulement sur notre propre vie, mais sur ce qui se passe dans le pays. Et de regarder les événements avec le regard du Christ, ce qui n’est pas toujours évident. Ni de regarder les autres avec le regard de Dieu, surtout s’ils sont d’une autre ethnie ou d’une autre religion.
    Après la messe, réunion de la Commission avec, en plus, un certain nombre de volontaires intéressés. La formation est faite, la commission est mise en place, il reste à passer à l’action, ce qui est toujours difficile. Nous revoyons les orientations et, comme beaucoup de travail m’attend à la maison, je les laisse préparer leur plan d’action qu’ils me transmettront. A la rencontre, ont participé deux jeunes : un Guinéen qui veut devenir missionnaire spiritain et pour lequel il est donc important de se former et de s’engager dans ce domaine ; et un étudiant sénégalais qui est prêt à faire quelque chose au niveau de l’Université.
    Le soir, il y a du courant. Je peux donc regarder la télévision guinéenne. Elle a beaucoup évolué depuis ces derniers temps et présente davantage la réalité des choses sans cacher les problèmes.
    On nous annonce entre autres les sanctions européennes contre les auteurs présumés de la tuerie du 28 Septembre : interdictions de voyager, blocage de leurs fonds, suppression de visas, etc… Il est absolument nécessaire que les responsables soient punis. Mais il faudrait mieux attendre qu’ils soient au moins jugés et reconnus coupables. D’autant plus que la Commission d’enquête indépendante nationale, mais aussi la Commission de l’ONU, ont commencé leur travail. Cela exaspère beaucoup de Guinéens et les confirme dans l’idée que l’Union Européenne, la France en particulier, s’acharne contre la Guinée et pour des raisons autres que celles mises en avant. Et cela le jour même où on déroule le tapis rouge à Paris pour recevoir le Président de Mauritanie, qui, justement, est arrivé au pouvoir par un coup d’état et s’est ensuite présenté aux élections présidentielles. Justement ce que l’on veut interdire au Président guinéen.

  • Samedi 24 Octobre : Séance de travail avec Marc pour tirer les conclusions de sa visite aux blessés et familles en deuil : évaluer les besoins, voir ce qu’il est possible de faire. Préparation du programme de visites des Commissions dans les paroisses pour Novembre.
    Mariage inter-religieux
    Après-midi, à la paroisse : Préparation d’un mariage mixte (musulman – chrétienne).
    Il y en a plusieurs en préparation. C’est toujours une question délicate. Quand ça marche, ça peut être une vie très riche et permettant une ouverture aux deux religions pour un dialogue en profondeur. Mais la femme n’a pas toujours la liberté et la responsabilité nécessaires pour cela. Par ailleurs, l’idée est encore forte que la femme doit suivre la religion de son mari. Et même si le mari est d’accord pour que sa femme continue à pratiquer sa religion, la famille de celui-ci, elle, exerce souvent des pressions très fortes sur la partie chrétienne. D’où la nécessité de construire un tel mariage sur des bases solides. Et que la partie chrétienne soit engagée dans un groupe et garde un lien fort avec sa communauté. D’autant plus que les chrétiens ne sont qu’une petite minorité (5 %).
    Le Mouvement des enfants.
    Ensuite, travail avec les responsables des CV-AV (Action catholique de l’enfance). Il y a un gros travail d’organisation et surtout de formation à faire. Ils se contentent de participer à de grandes fêtes et manifestations de masse. Mais j’ai l’impression qu’il n’y a pas une véritable éducation des enfants ; donc pas de responsabilisation de ceux-ci pour qu’ils deviennent actifs et construisent eux-mêmes leur avenir dans leur famille, leur école et leur quartier, ce qui est pourtant le but du Mouvement. Il va falloir reprendre les choses à la base et d’abord assurer la formation des responsables du Mouvement. Encore du travail en perspective.
    Les femmes.
    Après cela, c’est le tour des femmes. Je suis obligé de voir les gens à la suite, le même jour, car je ne suis presque jamais dans la paroisse à cause de mes autres responsabilités. Les femmes sont organisées en fraternités. Cela leur permet de se retrouver entre elles, ce qui est très bon. Mais elles ne sont pas suffisamment reconnues et n’ont pas une autorité réelle au niveau de la paroisse. Dans les Communautés de quartier et au Conseil paroissial, j’ai demandé que leur responsable ne soit plus seulement présidente des femmes, mais présidente de toute la communauté, à égalité avec le président (homme) et travaillant ensemble, en collaboration avec les deux responsables de la jeunesse (là encore, un garçon et une fille). C’est une petite (grande !) révolution, et il va falloir prendre les moyens pour que cela passe effectivement dans les actes.
    Il va falloir prendre les moyens pour cela. La première chose, c’est d’organiser les femmes elles-mêmes ! De les former, et à, partir de là, d’élaborer un programme d’action valable. En effet, jusqu’à maintenant les femmes sont très engagées dans la paroisse. Mais c’est surtout pour le nettoyage de l’église et la préparation des repas et des fêtes. Je voudrais qu’elles s’engagent davantage dans leurs quartiers et travaillent à transformer leur vie, en s’attaquant à leurs différents problèmes et en cherchant des solutions, toutes les femmes ensemble, pas seulement les chrétiennes. Les problèmes ne manquent pas : d’abord, tout ce qui touche le mariage lui-même : éducation sexuelle, fiançailles et préparation au mariage, vie conjugale, éducation des enfants, relations avec les deux grandes familles, soutien aux couples en difficultés et familles désunies. Et puis, il y a tous les problèmes de santé : grossesses précoces et non désirées, accouchements difficiles, régulation des naissances, maladies des enfants, SIDA. Egalement les problèmes économiques : pauvreté, malnutrition avec toutes les conséquences. D’où la nécessité de lancer des groupements de femmes avec des petits projets de développement : teinture, couture, fabrique de savon artisanal, tissage, etc… Ce sont souvent les mères qui nourrissent et font vivre la famille. Enfin, il y a tout l’engagement au niveau social pour la promotion de la femme et de la famille, et déjà l’aménagement des quartiers, l’amélioration des écoles et postes de santé, etc… Il y a du pain sur la planche !!
    Ce soir, nous commençons par élaborer un programme de réunion où seront abordés ces différents points. On verra si les femmes vont accepter de se mobiliser dans ce sens ; car c’est plus exigeant que d’organiser simplement des fêtes avec tenues et cotisations pour les repas !
    Messe pour les défunts.
    A 18 heures, messe du 30ème jour après le décès d’un des piliers et fondateurs de la messe, d’ailleurs originaire de la paroisse de Kataco d’où je viens. En Guinée, comme partout en Afrique Noire, le respect et les prières pour les morts sont très importants. Il y a d’abord, au moins chez les chrétiens, la prière du 8ème jour, puis celle du 30ème jour (don c un mois après le décès), puis le 1er anniversaire de la mort. Tout cela permet une progression très importante dans le deuil. Même s’il y a des choses à revoir, par exemple pour les cérémonies où s’introduisent parfois des affaires de sorcellerie, des peurs, des malédictions et des accusations. Il y a aussi la question de l’héritage et les tensions entre familles, même si le rôle et la responsabilité de chacun sont déterminés à l’avance par la Coutume. Et encore la condition faite aux veuves et aux orphelins. Nous en parlons au cours de l’homélie et après la messe.
    Ce soir, trois familles sont regroupées pour la prière, car nous sommes en ville où tout le monde est sur place, ce n’est pas comme en secteur rural où les villages sont dispersés. A la fin de la messe, je bénis les boissons et les biscuits qui vont être distribués à la sortie (le « sacrifice ») en signe de partage et d’amitié. Après la messe, nous nous retrouvons dans une des familles, pour un repas et une rencontre familiale. Hervé, le défunt, était très connu et avait fait beaucoup de choses, aussi les gens sont-ils très nombreux. Ce qui me permet de parler avec beaucoup de monde. Je rentre assez tard dans la nuit, sans rencontrer aucun problème.

  • Vendredi 23 Octobre : Journée à l’Archevêché.
    Tôt le matin, je pars pour l’évêché où déjà des gens m’attendent. J’échange assez longuement avec un prêtre français venu enseigner au Grand Séminaire. Il connaît déjà l’Afrique, car il a enseigné au Mali. Mais la Guinée se trouve dans un e situation spéciale et difficile. De plus, il a des problèmes de santé et doit rentrer en France. Je parle aussi avec trois prêtres guinéens malades, venus se faire soigner à Conakry. Je les connais et je prends le temps de parler avec eux.
    Aujourd’hui, au menu : Travail avec la Commission de la jeunesse : lancement des activités et préparation des documents. Courrier internet à relever et auquel répondre : c’est toujours très long. J’ai dû rouvrir Yahoo 12 fois, ça bloquait à chaque fois. Rédaction d’un projet pour un Foyer de jeunes filles en situation difficile. Rencontre avec le nonce sur la situation du pays.
    A mon retour, très fortes pluies. Ici aussi le climat est perturbé. La saison des pluies devrait être terminée depuis le début du mois, mais continue à pleuvoir abondamment.

  • Jeudi 22 Octobre : Travail à la maison.
    Je reste à la maison. J’ai un tas de comptes rendus et de documents à composer et à saisir, mais je n’arrive pas à m’en sortir. Et aujourd’hui encore, j’ai l’impression que je n’ai rien fait.
    Ce matin, Emmanuel, notre stagiaire, commence ses cours à l’auto-école. Il a besoin du permis pour son service à la Maison d’Accueil.
    L’après-midi, il me fait le compte rendu de la réunion dans la 1ère communauté de quartier. Pour ce 2ème passage, je préfère le laisser aller seul avec les membres du Conseil paroissial pour recueillir les réactions des gens à ce que je leur ai dit lors de mon premier passage. En ma présence, ils n’oseraient pas parler aussi librement. Et il faut qu’ils apprennent à s’organiser sans la présence obligatoire du curé à chaque fois. Mais bien sûr, il faut reprendre tout cela avec Emmanuel et approfondir sa formation. C’est pour cela qu’il est en stage !
    Ensuite, je prépare un compte rendu d’activités pour les différents organismes qui nous aident (Secours Catholique, Caritas Allemagne, Raoul Follereau, etc…) et j’en profite pour les remercier ici.

  • Mercredi 21 Octobre (suite) : La journée se passe vite avec les différents contacts, les visites, le passage à la banque, les soins au dispensaire, les messages à recevoir et à envoyer, les communications téléphoniques, les contacts avec les bénévoles pour le suivi du travail : une journée ordinaire qui passe vite.

  • Mercredi 21 Octobre : L’atelier « Savoir-Fer »
    Ce matin, réunion du Conseil d’administration. Le mois dernier, le travail a été très perturbé avec tout ce qui s’est passé. Il faut donc le réorganiser, accueillir les nouveaux candidats et les initier, car venant d’un milieu difficile ils ont de la peine à s’adapter à un rythme de travail régulier.
    Mais aujourd’hui, notre souci ce sont surtout ceux qui ont trouvé un travail après leur formation. Certains sont mal payés ; d’autres n’ont pas de masque ni de gants pour souder ; d’autres sont maltraités. Nous voulons les laisser se défendre et prendre leurs responsabilités au maximum, mais pour nous il est parfois nécessaire d’intervenir. Au moins à Conakry. En effet, un de nos anciens a des problèmes, mais c’est à MACENTA, à plus de 600 km ! C’est difficile de faire quelque chose !
    Nous nous interrogeons aussi par rapport à nous-mêmes. Par exemple, pour la formation : les besoins et la technique évoluent et, dans l’un ou l’autre cas, nous voyons qu’il y a des manques dans la formation donnée. La première chose, c’est de permettre aux formateurs de se recycler. Nous allons nous y mettre. Et visiter chacun de nos anciens. Il y a aussi les problèmes financiers, qui ne manquent jamais ! Mais dans l’ensemble, nous sommes satisfaits. Les jeunes évoluent bien, les formateurs font bien leur travail et nous arrivons à maintenir l’équilibre entre la formation (l’essentiel) et la production (pour faire marcher l’atelier). Avec le départ de certains Français imposé par l’ambassade, quelques-uns des travaux que nous avons faits ne seront jamais payés. Tant pis !

  • Mardi 20 Octobre : Je reste à la maison, car nous avons notre réunion de Communauté. Nous sommes trois : John, le supérieur, nigérian, qui a longtemps travaillé au Congo ; Emmanuel, également nigérian, en formation et qui effectue son stage missionnaire avec moi, dans la paroisse de Taouya.
    John, lui, est curé de la paroisse de Lambanyi. Je l’ai remplacé les trois mois passés, pendant qu’il était en congés. Nous habitons en banlieue, dans un quartier populaire et réputé « chaud », ce qui correspond bien à notre vocation. Mais à cause de mes responsabilités je monte presque chaque jour à l’archevêché, au centre ville, en fait à la pointe extrême de la presqu’île de Conakry, à près de 20 km, en « taxi » : en fait une voiture ordinaire où nous nous entassons à 6 ou 7 (3 devant, 4 derrière), sur des routes impossibles et donc des tas de bouchons… et de pannes, car ces « taxis » sont dans un état abominable. Mais on arrive toujours à se débrouiller !
    Avec Emmanuel, nous avons déjà organisé le travail à la paroisse la semaine dernière. Il reste toute la question des comptes et des finances, aussi bien pour les deux paroisses que pour la communauté. Je ne suis pas un expert en la matière, mais avec Emmanuel nous essayons de nous débrouiller.
    « C’est Dieu qui m’a choisi ».
    Avec tout cela, le temps a passé et je ne pourrai faire le quart de ce que j’avais prévu. Je vais donc au plus pressé. D’abord une réflexion sur la question du pouvoir et des élections. En effet, la plupart des chrétiens sont originaires de la Forêt (du sud), comme le président militaire actuel Dadis CAMARA. En plus, il se présente comme chrétien dans un pays où il y a environ 90 % de musulmans. Le danger c’est que les chrétiens soutiennent Dadis uniquement parce qu’il est de leur région et de leur religion. Les peuhls musulmans de leur côté disent : c’est notre tour d’avoir un président (en effet, le premier président Sékou Touré était malinké, le deuxième Lansana Conté, soussou). Or les peuhls sont l’ethnie la plus nombreuse. On risque une guerre tribale et religieuse. D’où la nécessité de faire réfléchir les gens sur des bases solides.
    Le travail ordinaire continue, malgré la situation. Je reprends donc le plan d’action de Justice et Paix de la paroisse de Lambanyi, pour le communiquer aux autres paroisses.
    La communauté métisse.
    A 18 heures, messe à la paroisse pour le premier anniversaire du décès de M. CURTIS. Comme son nom l’indique, c’est un métis descendant des anglais qui ont colonisé la Guinée en alternance avec les Français, les Hollandais et les Portugais. On retrouve à Conakry, comme dans la plupart des capitales de l’Afrique de l’Ouest, des familles métisses qui ont la nationalité de l’ancien colonisateur. Au moment de l’indépendance, beaucoup sont rentrés en France (ou en Angleterre) ; certains ont préféré rester dans leur pays. La plupart sont chrétiens, mais ils sont souvent traditionnels et coupés de la culture africaine. Ce qui fait qu’ils ont parfois de la peine à comprendre nos orientations et nos recherches et à entrer dans nos façons de travailler. Ce soir, c’est l’occasion pour eux de se retrouver et de prier ensemble. En fait, la femme du défunt est partie pour une autre messe à Paris avec ses enfants venus de différentes villes de France, mais aussi des USA et autres pays.
    La rencontre est sympathique, mais bien sûr il n’est pas question de partage d’Evangile ni de tam tam. Je fais donc une homélie et une messe classique. C’est vrai qu’il n’est pas toujours facile de s’adapter à la mentalité et aux désirs des gens

  • Lundi 19 Octobre : Début de semaine.
    Aujourd’hui, rentrée des classes. Elle a été plusieurs fois reportée…. comme chaque année, à la fois par manque de moyens et par manque d’organisation et de prévision, aussi bien du côté des parents que du côté de l’administration. En tout cas, tout se passe dans la tranquillité, sans pression.
    Par contre, Internet marche toujours aussi mal. Je passe un temps fou, sans arriver à envoyer des pièces jointes et sans pouvoir faire d’envoi groupé. Même la photocopieuse n’a plus d’encre.
    Je continue à me faire soigner la cheville. Je suis très bien soigné, mais la plaie ne se ferme pas vite ! C’est la vieillesse.
    A 14 heures, réunion de la Commission « Justice et Paix » pour le suivi des blessés et le soutien des familles en deuil. Les volontaires bénévoles ont très bien travaillé. Ils sont allés voir les familles qui nous ont été signalées par les paroisses pour les soutenir et connaître leurs besoins réels. Avec le responsable, nous élaborons un premier plan d’entr’aide. Et posons les premières bases pour un comité de pilotage pour organiser l’éducation à la paix et à la non-violence. Et ensuite, les actions au niveau des jeunes.
    Après cela, je me sens fatigué, mais je ne peux pas oublier que je suis curé de paroisse. A 17 h 30, je vais donc prendre un premier contact avec le groupe du renouveau charismatique. C’est un groupe de prière qui rassemble chaque lundi une cinquantaine de personnes. Ils prient dans la joie et l’action de grâces, avec de nombreux chants et danses, ce qui ne les empêche pas de lire l’Evangile. Ils organisent chaque mois une nuit de prières pour le pays, au Palais du Peuple, à laquelle participe beaucoup de monde. Nous nous retrouvons avec les responsables, après la prière.
    Réflexions sur la situation du pays.
    Je me lève à 4 heures du matin pour répondre en direct à « Radio Notre-Dame », décalage horaire oblige. Je sors profondément frustré de cette interview : comment, en trois minutes, apporter un éclairage valable et équitable sur une situation aussi complexe que celle de la Guinée ? Et surtout, je sens que je me heurte à des préjugés et des idées toutes faites. Quand je dis que la ville est calme et que je circule sans problème et sans danger, même de nuit, à pied et par les transports publics, je me trouve devant un mur d’incompréhension de la part du journaliste.
    Et pourtant nous continuons nos réunions, même de nuit, sans problèmes (voir aux dates précédentes). On me dit : « Mais alors pourquoi l’Ambassade de France demande-t-elle aux Français de rentrer ? ». C’est justement ce que ni nous, ni même nos amis qui travaillent à l’Ambassade, ne comprenons. Et cela a été très bien organisé. On a commencé par fermer l’école française de Conakry ; du coup, les parents ont dû envoyer leurs enfants à Dakar ou en France… accompagnés de leurs mères, pour continuer leurs études. Et c’est ainsi qu’on a créé un mouvement de peur, puis de panique injustifiée chez les Français, et un climat d’incompréhension puis d’opposition aux Français de la part des Guinéens.
    Ensuite on a fermé les Services techniques de l’Ambassade ou, par exemple, le Centre culturel français ; et les gens ont été obligés de partir à leur tour. Puis, les familles des militaires…. sans leur demander leur avis.
    C’est vrai qu’il y a eu la tuerie du 28 Septembre qui est absolument inadmissible et épouvantable. Mais on ne parle que de ça, sans voir tout ce qui s’est passé depuis l’Indépendance et surtout sans voir tout ce qui se fait pour rétablir la paix et le dialogue dans le pays. Pour le passé, il y a eu la dictature de Sékou Touré avec des pendaisons en public, puis le régime corrompu de Lansana Conté ; mais à ce moment-là ni la France, ni l’Union Européenne, ni l’Union Africaine, ni l’ONU n’ont fait quoi que ce soit, car grâce à cette corruption généralisée on pouvait exploiter les richesses, minières et autres, du pays, sans honte.
    Mais quand le président Dadis arrive et prétend réviser tous les contrats pour respecter les intérêts légitimes du pays et défendre le bien de la population, alors là les multinationales, et les pays occidentaux qui les soutiennent, ne sont plus d’accord. Et quand cette tuerie arrive, au lieu de pleurer les morts et de chercher les moyens pour que cela n’arrive plus jamais, on a l’impression que certains en sont heureux, pour pouvoir chasser le président et défendre leurs intérêts égoïstes. On parle des droits de l’homme, mais dans le fond on pense à l’or, au diamant et à la bauxite. Et quand en plus le président reçoit de l’argent de la Lybie et signe des contrats avec les Chinois, alors on ne se retient plus,on nomme un médiateur, Blaise Compaoré, président du Burkina Faso. Mais avant même qu’il commence son travail, on a déjà décidé que le président Dadis doit s’en aller, de même que tout le CNDD (Comité National pour le Développement et la Démocratie).
    On veut un gouvernement d’unité nationale, mais avec qui ? Les partis politiques sont tous unis contre Dadis. Mais dès que celui-ci sera parti, ils vont se battre entre eux, c’est sûr. La plupart n’ont même pas de programme. Comment faire un gouvernement d’unité nationale avec les chefs des partis politiques qui pour la plupart sont des anciens premiers ministres de Lansana Conté qui ont mis le pays à plat et fait preuve de leur incompétence. On demande le dialogue, tout en voulant le départ de Dadis. Mais alors, avec qui va-t-on dialoguer ? Avec les soldats qui ont tué et violé le 28 Septembre ? Ne vaudrait-il pas mieux soutenir les efforts qui sont faits aussi bien pour le redressement du pays que pour le dialogue, en corrigeant les erreurs ? Il faut absolument réformer l’armée, libérer ceux qui sont arrêtés sans jugement et juger les auteurs de brigandage et de meurtres. Tout le monde est d’accord là-dessus. Mais on sait en même temps qu’il ne sera pas possible de réformer cette armée en un jour, malheureusement. Elle a été désorganisée dès l’Indépendance par Sékou Touré, et dominée par les milices populaires. Depuis les guerres du Liberia et de Sierra Leone, beaucoup de soldats guinéens sont des drogués, des voleurs et des violeurs. Le président est le premier à s’en plaindre. Actuellement, il fait construire des casernes pour que les militaires ne se promènent pas armés partout dans la ville. Il vient de leur interdire de sortir la nuit avec leurs armes. Il leur a ordonné officiellement de ne pas répondre aux provocations et d’abandonner la violence. Les militaires se sentent maintenant sous contrôle et savent qu’ils ne peuvent plus se permettre n’importe quoi. Et, surtout, la population s’est réveillée et n’accepte plus n’importe quoi des militaires.
    Le président a mis en place une Commission nationale indépendante pour juger les auteurs de la tuerie du 28 Septembre. Il a accepté de collaborer avec une Commission internationale. L’envoyé de l’ONU est déjà sur place. Et on attend le médiateur.
    Au lieu de se bloquer sur le 28 Septembre, malgré l’horreur de ce qui s’est passé, il faut voir d’où on vient et tout ce qui a déjà été fait de positif. Et soutenir les efforts actuels pour reconstruire le pays. C’est ce que nous essayons de faire. Mais du côté des media et des gouvernements étrangers, on ne reçoit que des critiques négatives, alors que nous avons tellement besoin de soutien et de compréhension ! La seule solution pour le moment, c’est de créer des liens et de renouer le dialogue à tous les niveaux et avec tous. C’est ce que nous essayons de faire, comme je l’ai longuement expliqué dans toutes les pages précédentes et les documents que j’ai envoyés. Une solution de force et imposée ne servira à rien. Les gens ne l’accepteront pas.
    Et je tiens à affirmer que ce que je dis c’est l’opinion de presque tout le monde ici, y compris les gens de l’Ambassade de France. Mais, à l’extérieur, on préfère chercher ses intérêts, au lieu d’écouter les personnes qui sont sur place
    La seule solution, c’est le dialogue, sinon on va aboutir rapidement à une guerre ethnique aux conséquences irrémédiables. Le problème actuel, ce n’est pas de savoir si le président Dadis doit partir ou rester. Le problème, c’est de rétablir le dialogue et de reconstruire. Ensuite, ce sont les élections qui désigneront le président.
    En tout cas, nous avons besoin de votre amitié, de votre soutien et de votre prière.

  • Dimanche 18 Octobre : Rencontre de Pastorale sociale.
    Je pars à la paroisse de DABOMPA. Je suis bien accueilli par le curé guinéen. Nous concélébrons : il me demande de présider et de prêcher et il insiste pour la mise en place d’une Commission « Justice et Paix » dans sa paroisse. Nous avions déjà essayé l’année dernière, mais les gens ne s’étaient pas engagés.
    Nous nous retrouvons donc avec les volontaires. Il y a là quelques responsables d’ONG qui veulent tout de suite mettre en place une grosse structure avec un programme, des statuts, un bureau. C’est ce qui se passe fréquemment, et quand le bureau et les structures sont en place, les gens sont contents, ils ont un titre et une fonction, et ils ne font plus rien ! C’est d’ailleurs ce qui s »’est passé l’année dernière. J’arrive à renverser la perspective en leur demandant : « Comment voyez-vous la situation du pays ? Dans cette situation, qu’êtes-vous arrivés à faire ? ». Ainsi, on arrive à parler de choses concrètes et d’actions précises. Car effectivement ils font déjà des tas de choses (Je mettrai bientôt le compte rendu sur mon site… dès que j’aurai un moment pour le rédiger !). La plupart des actions tournent autour de l’aide apportée aux blessés et aux familles qui ont perdu un parent le 28 Septembre ; de nombreux efforts nécessaires pour renouer le dialogue entre tous au niveau personnel ou entre associations. Mais il y a aussi d’autres actions en faveur par exemple des filles mères et des femmes abandonnées ou renvoyées par leur mari, ou pour la défense des enfants de la rue. A partir de là, nous pouvons mettre en place la Commission et expliquer comment élaborer leur plan d’action. Espérons qu’ils se mettront vraiment au travail cette fois-ci !
    A la rencontre, il y avait un éducateur des Foyers des enfants de la rue. Nous rentrons ensemble et nous parlons longuement sur les difficultés de son travail, les relations avec les enfants et entre éducateurs qui n’ont pas le même caractère, ni la même conception du travail.
    Le soir, nous nous retrouvons entre amis français et italiens et nous ne pouvons pas nous empêcher de partager notre déception par rapport à la politique de nos pays respectifs envers la Guinée.

  • Samedi 17 Octobre : Ce matin, réunion des éducateurs pour l’évaluation des centres aérés du mois d’Août. Malgré le manque de moyens, les éducateurs ont très bien travaillé ; je les encourage beaucoup et les remercie. Je mettrai bientôt le compte rendu de notre réunion sur mon site. Nous évaluons la marche des Centres en positif et en négatif, en nous attachant surtout à l’éducation donnée aux enfants et à leur prise de responsabilité dans leur milieu de vie. A partir de là, nous voyons comment réajuster la formation pour qu’elle corresponde davantage aux besoins et soit mieux adaptée. Enfin, nous tirons des conclusions pour les Centres aérés de l’année prochaine. Nous repartons pleins de force et de courage.
    Une rencontre.
    Au retour, dans le taxi, je me trouve assis à côté d’un jeune musulman responsable d’un comité local de la paix. Nous parlons ensemble pendant tout le trajet pour partager nos efforts pour la paix et envisager une collaboration. Il part à Labbé, dans le Fouta Djallon, centre du pays et aussi de l’opposition, pour assurer rencontres et formation. Nous nous verrons à son retour.
    Bernard KOUCHNER s’est attaqué sans mesure ni réalisme à la Guinée. France 24 et RFI (les medias français pour l’Afrique) assurent un véritable matraquage médiatique en ne parlant que des tueries et en en repassant les images en boucle à chaque fois qu’on parle de la Guinée, comme s’il n’y avait aucun effort de paix ni dialogue dans le pays. L’ambassade demande aux français de quitter la Guinée, en se basant sur des rumeurs infondées. Malgré tout, en tant que Français, je me déplace sans problème.
    Dans le taxi dont je parle, le chauffeur achète deux sachets d’eau fraîche et il m’en donne un. Il y a loin entre les discours officiels et la réalité.
    Le soir, après la messe, nous nous retrouvons avec le Bureau du Conseil paroissial pour le point de toutes les rencontres de ces trois semaines et préparer les semaines qui suivent. Conformément à mon désir, je ne parle plus avec une seule personne, le vice-président (toujours un homme !) mais avec une équipe de quatre, à égalité : un homme, une femme, un jeune garçon et une jeune fille). Les choses avancent.

  • Vendredi 16 Octobre :
    Départ tôt le matin, car à partir de 7 heures il est pratiquement impossible d’avoir une place dans un taxi collectif. En fait, aujourd’hui, je ne prendrai pas le taxi. Au carrefour où je me tiens en attente, une voiture s’arrête : « Montez mon Père, je vous emmène ». Je ne sais pas qui c’est, mais lui me connaît ! Et cela m’arrive très souvent ! Les gens me connaissent, même si je ne me souviens pas d’eux. Avant d’arriver au carrefour où j’attendais le taxi, un homme m’a abordé. Nous avions travaillé ensemble avec Handicap International pour fabriquer sur place des appareillages avec du matériel local pour les handicapés, suite aux attaques rebelles venue du Libéria en 2001. Il a voulu m’offrir un petit déjeuner. Comme je n’avais vraiment pas le temps, il m’a offert un pain ! Hier, c’est un garagiste que j’avais protégé au cours de ces mêmes attaques. Nous avons parlé dans sa langue (le Kissi)…. et il m’a payé mon déplacement. Et au moment de monter dans la voiture, c’est un anglophone, réfugié du Sierra Léone, qui me serre la main (et ne veut plus la lâcher) et me remercie chaleureusement en « créole » anglais.
    L’ambiance à Conakry.
    Arrivé à l’archevêché, l’ambiance est autre ! L’ambassade de France demande aux Français de quitter le pays. Cela apparaît comme un abandon de la Guinée au milieu de tous ses problèmes. France 24 continue à passer en boucle les tueries du 28 septembre à chaque fois qu’on parle de la Guinée. Cela ne fait que nous enfoncer dans notre détresse et augmenter la peur de tous. RFI nous transmet sans cesse les réactions –et même les menaces- de l’Union Européenne, ce qui ne nous apaise pas et ne nous aide pas dans nos efforts de paix et de réconciliation. En tout cas, aujourd’hui, à cause de tout cela, je dois supporter de nombreuses agressions verbales : « les étrangers, vous êtes contre nous » ; « les français, rentrez chez vous ; vous voulez casser tous nos efforts et détruire notre pays ». C’est sûr qu’il y a eu des tueries et qu’il faudra en juger les responsables. C’est sûr qu’il faut réorganiser l’armée et la nettoyer de tous ses éléments troubles. Mais pourquoi cet acharnement contre le pays, sans proposer aucune solution constructive ! Nous en arrivons à nous demander s’il n’y a pas des intentions inavouées derrière tout cela. Par exemple, chasser à tout prix le président parce qu’il veut revoir les contrats miniers signés par plusieurs sociétés multinationales, grâce à la corruption, au détriment du pays et de la population guinéenne ? Et qui va-t-on mettre à la place ? Un homme de paille ? Avec quels moyens ? Derrière les grandes déclarations pour les droits de l’homme, beaucoup se demande s’il n’y a pas de gros intérêts économiques cachés. D’autant plus que les chinois viennent de signer un énorme contrat avec la Guinée. Et la Lybie est derrière. C’est vrai que eux, ils ne se préoccupent pas des droits de l’homme ! Mais de toutes façons, c’est la population qui est prise en otage et qui souffre.
    C’est sur toutes ces questions que nous réfléchissons ce matin, avec les différents services et Commissions. J’aurais de nombreux messages et documents à envoyer, mais tout est bloqué : Internet (mails), téléphone, SMS : est-ce que ces services sont simplement saturés à cause de demandes trop nombreuses, en panne, ou bloqués par les pouvoirs publics ?
    Les membres du Conseil chrétien (regroupant les différentes Eglises) se retrouvent aussi pour voir ce qu’il est possible de faire pour la paix et le maintien du pays.
    Des Frères salésiens sont venus de Kankan. J’en profite pour voir avec eux comme mettre les Commissions en place et soutenir leurs activités dans cette région du pays.
    Le soir, malgré la situation, nous nous retrouvons dans une communauté de quartier où nous tenons notre réunion après le chapelet, suivi de l’Eucharistie. Quand nous nous quittons, il fait nuit depuis longtemps, mais chacun rentre chez lui sans problème. Notre seul problème, c’est de ne pas renverser la sauce du plat que la communauté a préparé pour notre repas !

  • Jeudi 15 Octobre : Le travail paroissial.
    Comme chaque jour, la journée commence par la prière et la messe. Aussitôt après, nous nous retrouvons avec Emmanuel, notre stagiaire, pour faire le point des activités de la paroisse, depuis notre arrivée. Chaque groupe nous a envoyé son rapport d’activités, que nous avons étudié séparément et maintenant nous en parlons ensemble, en abordant les différents points les uns après les autres. Il y a beaucoup de choses à dire. Nous partagerons nos réflexions avec le Bureau du Conseil paroissial, samedi soir après la messe.
    Le dispensaire St Gabriel.
    C’est un très gros dispensaire, catholique mais intégré dans la fonction publique et connu pour le sérieux, l’honnêteté, la compétence de son personnel, et la qualité de ses soins et de son accueil. Les volontaires de la FIDESCO qui l’animaient sont rentrés en Europe après les événements du 28 septembre. Les Guinéens se sont organisés et ont continué le travail sans difficulté. Je suis venu les saluer et les remercier. Et aussi leur apporter mon soutien et voir leurs problèmes. En fait, le gros problème, c’est celui des médicaments. Il y a un conteneur au port, mais dans les conditions actuelles, c’est très difficile de le faire sortir. Sinon, ils continuent à se regrouper chaque matin pour une prière de louange, ensemble chrétiens et musulmans. Et chacun s’organise et prend ses responsabilités.
    De mon côté, je leur explique nos différentes actions dans les quartiers et leur demande d’y participer chacun où il vit et agit, ce qu’ils acceptent avec joie.
    Séance de travail avec CRS.
    Nous faisons le point des nouvelles et de l’évolution du pays. Puis nous évaluons l’action des volontaires. Je leur explique nos projets de formation des jeunes, définis hier (voir plus haut). Nous pensons contacter les différents chefs religieux, pour les impliquer et mettre en place un Comité de pilotage interreligieux. Et à diversifier nos actions de sensibilisation à travers le chant, le théâtre, etc. Il y a aussi tous les postes de secours et de volontaires à mettre en place pour pouvoir répondre immédiatement aux besoins, avec des personnes disponibles sur place, au cas où des nouveaux troubles apparaîtraient. La situation n’est pas sûre, et il faut tout prévoir. Nous travaillons nos documents, en particulier une page sur la Parole de Dieu et des prières sur le pardon et la réconciliation pour nous permettre de mieux vivre nos problèmes dans la foi. Nous prévoyons un texte semblable, commun aux chrétiens et aux musulmans.
    Tout cela me fait du travail pour ce soir. Bonne nuit à tout le monde !

  • Mercredi 14 Octobre : Les Foyers de enfants de la rue.
    Journée chargée ! Je me retrouve au Centre de ces foyers (il y en a 8) tôt le matin. Nous nous rencontrons avec les éducateurs chrétiens et nous prenons le temps de partager longuement la Parole de Dieu : Lettre de St Jacques, 2, sur l’attention aux pauvres ; St Luc XIV, sur l’accueil de tous ceux qui souffrent. C’est essentiel pour nous de baser notre action sur la Parole de Dieu.
    En Juillet, à BAMAKO, j’avais contacté des Associations travaillant avec les enfants de la rue, et ramené un certain nombre de documents que je leur avais distribués. C’est à partir de cela que nous menons notre réflexion d’aujourd’hui.
    La plupart de nos enfants sont musulmans. Nous voyons comment les éduquer dans le respect de leur foi et en collaboration avec leurs parents. Et comment travailler avec les responsables musulmans. Ce n’est pas toujours évident.
    Puis nous réfléchissons comment intégrer davantage le travail des foyers dans l’action de l’Eglise. Ce n’est pas simple non plus. Souvent les gens ont peur de ces enfants dont nous nous occupons. Ils disent que ce sont des voleurs et des drogués !
    Après cela, nous abordons les problèmes internes : l’organisation, la marche des foyers, l’éducation des enfants, la formation des éducateurs, les problèmes financiers. Cela nous amène à aborder des questions de fond : l’équilibre entre le suivi dans la rue et les foyers ; comment ne pas faire de nos enfants des assistés ? comment permettre un retour en famille réussi, etc…
    Il faut nous arrêter, malgré l’intérêt de tous, car l’équipe des volontaires m’attend en ville et je suis déjà très en retard. Je leur téléphone pour leur demander de commencer la réunion sans m’attendre. Ils me feront le compte rendu.
    Réunion des volontaires.
    Les volontaires sont passés dans les paroisses recueillir les noms des personnes blessées non soignées et des familles en deuil. Nous en faisons la liste. Cette semaine, ils vont recenser leurs besoins et leur apporter les premiers soutiens.
    Nous allons continuer nos actions pour renforcer le dialogue et la paix dans les quartiers. Mais nous constatons que de nombreux jeunes sont encore révoltés et prêts à en découdre à nouveau. Nous allons organiser une formation à la paix et à la non violence, regroupant des jeunes chrétiens et musulmans des 99 quartiers de la ville de Conakry. Ensuite, ils iront deux par deux (un chrétien et un musulman) rencontrer les chefs de quartier, les imams des 400 mosquées de la ville, les prêtres et pasteurs des 30 églises chrétiennes, pour qu’ils s’adressent tous aux jeunes et les poussent au calme, usant pour cela de leur influence.
    Nous organiserons aussi dans les quartiers le maximum de rencontres entre associations de jeunesse chrétiennes et musulmanes pour retisser des liens d’amitiés entre eux
    Ensuite, nous retravaillons nos réflexions sur la situation du pays. A chaque lecture, nous ajoutons des nuances et des corrections, car il faut vraiment bien préciser ce que nous allons dire, vu la situation.
    Nous précisons tout cela avec le vicaire général et le secrétaire épiscopal, puisque les évêques sont à Rome pour le synode.
    Il me reste encore à rencontrer les responsables des jeunes des différentes paroisses de la ville pour préparer le programme de l’année scolaire. L’année scolaire doit commencer demain, mais avec tout ce qui se passe nous ne savons pas ce qui va se passer. On verra bien.
    Internet ne fonctionne toujours pas. Donc pas de possibilité de recevoir de courrier ni surtout d’envoyer nos messages, ce qui est beaucoup plus embêtant dans la situation actuelle.
    Kennedy, un confère nigérian, a dû arriver de Boffa. Il va partir en congés. Je serai heureux de le voir ce soir et de parler un peu avec lui. Et aussi avec les Frères salésiens venus de Kankan, un diocèse où j’ai travaillé pendant 10 ans, avant de venir à Conakry. Ils vont m’apporter des nouvelles des amis. Nous essayons d’avoir des informations sur l’évolution de la Guinée à partir de la télévision nationale et des télévisions étrangères, mais le courant saute sans arrêt. De plus, nous sommes souvent déçus par la qualité des informations données qui sont souvent approximatives, quand elles ne sont pas tendancieuses et même très malveillantes. Par exemple, ce soir, l’interview d’un artiste guinéen vivant en France qui manifestement ne connaît pas grand-chose sur la situation réelle du pays. Et un compte rendu très orienté et partisan de la rencontre à ABUJA (Nigeria) du Gouvernement et de l’opposition guinéenne avec le groupe de contact de l’Union Africaine CEDEAO.

  • Mardi 13 Octobre : Je reste à la maison et prépare les différents documents, appels et déclarations. Et aussi un recueil de prières et de la Parole de Dieu, pour nous aider à vivre tous ces événements tragiques dans la foi. C’est vraiment très important pour nous tous.
    A 17 heures, rencontre avec la troisième communauté de quartier de ma nouvelle paroisse. Le téléphone arabe a déjà fonctionné, un certain nombre des idées sont déjà passées. La réflexion est donc plus facile et plus approfondie.

  • Lundi 12 et Mardi 13 Octobre : La situation reste tendue. Les syndicats ont demandé que ces deux jours soient des jours de recueillement et de compassion, en souvenir des morts du 28 Septembre. Les militaires qui ont peur d’une nouvelle manifestation interdisent tout rassemblement. Du coup, cela se transforme en deux jours de ville morte. J’arrive cependant à attraper un taxi pour monter au centre ville. J’espère que le serveur internet, en panne depuis jeudi, sera réparé, car j’ai énormément de documents à envoyer, en particulier des envois groupés. Malheureusement, le serveur ne fonctionne toujours pas ; je suis venu pour rien. Et j’ai toutes les peines du monde à trouver un taxi collectif pour rentrer.

  • Dimanche 11 Octobre : Je suis dans la paroisse de NONGO aujourd’hui. Là encore, nous prions fortement pour le pays. Et nous voyons comment continuer notre action de consolidation du dialogue dans les quartiers et du soutien des familles des blessés et des morts du 28 Septembre. Mais aujourd’hui, toute la journée, nous tenons notre réunion diocésaine de pastorale sociale. Nous mettons en place la Commission paroissiale pour les actions de « charité et de développement ». Puis nous évaluons et réorientons le travail des commissions des différentes paroisses. Enfin, nous retravaillons longuement le texte sur la situation du pays, élaboré dimanche dernier avec la Commission « Justice et Paix ». La question est très délicate. Je reprendrai à nouveau ce texte lundi avec l’équipe des volontaires, avant d’en faire une rédaction finale et de la multiplier. Cela fait encore une journée bien remplie, car la nuit il me faut retravailler toutes mes notes et les mettre en ordre.

  • Samedi 10 Octobre : Conseil paroissial.
    Première rencontre avec le Conseil paroissial de la paroisse. J’ai demandé que toutes les communautés, les mouvements et autres groupes soient représentés, aussi il y a du monde. En fait, nous nous sommes rencontrés plusieurs fois avec l’évêque, les prêtres qui étaient là les années précédentes, et le Bureau du Conseil paroissial. Je suis donc déjà assez bien au courant de la situation. Mais je tiens à ce qu’ensemble ils me présentent la paroisse, son fonctionnement et les actions menées, puis que chacun fasse ses propositions. Après les avoir écoutés, je leur propose mes orientations. Chaque groupe y réfléchira et nous nous retrouverons ensemble dans un mois pour qu’ils réagissent à mes propositions après en avoir parlé entre eux.
    Aujourd’hui, nous réfléchissons à la catéchèse puisque c’est la rentrée scolaire. Nous voulons la décentraliser, pour qu’elle soit faite dans les quartiers, et prise en charge par les communautés. Mais pour cela, il nous faut trouver des nouveaux catéchistes. La mise en place et l’animation de ces communautés de quartier sont vraiment notre priorité, à la fois pour que les chrétiens se prennent en main et que les communautés s’engagent pour faire avancer le quartier et pas seulement dans l’église.
    Pour les jeunes, il y a beaucoup de mouvements. Ils marchent bien, même s’il va falloir revoir leurs orientations et leurs activités. Mais notre préoccupation actuelle, c’est surtout la coordination entre les différents mouvements pour arriver à une action d’ensemble au niveau de la jeunesse. Il va y avoir de gros efforts à faire à ce niveau.
    C’est la rentrée des classes, et donc la rentrée du catéchisme. C’est une activité importante qu’il nous faut bien organiser. Il nous manque des catéchistes. Mais surtout nous voulons que les communautés, les parrains et marraines, et d’abord les parents, prennent sérieusement en charge l’éducation de leurs enfants. Nous commençons par décentraliser la catéchèse, pour qu’elle se fasse dans les communautés de quartier ; nous allons lancer des réunions de parents et parrains ; et nous demandons à chaque catéchumène d’avoir un parrain ou une marraine dès le début de la catéchèse. C’est toute une mentalité à changer. Il s’agit de responsabiliser les gens, pour qu’ils prennent vraiment en charge, non seulement leur vie chrétienne, mais aussi la vie du quartier et la vie du pays tout entier.
    Pour les Commissions, nous mettons en place d’abord celle de « Justice et Paix », essentielle dans les circonstances actuelles. Et celle de « Pastorale sociale » pour le travail avec les pauvres et les démunis, et le lancement de petits projets leur permettant de gagner leur vie. Nous continuerons ensuite avec la Commission pour les relations avec les musulmans, la Commission de la famille, etc… Reste la question de l’inculturation. Pour cela, nous organisons nos communautés en tenant davantage compte de la culture guinéenne : complémentarité homme femme, classes d’âges, place des anciens et rôle des « sages » (conseillers), organisation de la réconciliation « sous l’arbre à palabre ». Nous veillons à introduire les rites traditionnels et les objets symboliques dans les prières et les célébrations.
    La question de la langue est beaucoup plus difficile. En effet, nous sommes en ville et les langues sont multiples : nous allons commencer par faire la prière universelle dans les principales langues parlées. L’homélie sera résumée en soussou, la langue véhiculaire, de même qu’un certain nombre de prières. Ce sont là de nombreux changements, mais le Bureau du Conseil paroissial a bien compris ce que nous cherchons, et il l’explique bien, ce qui aide beaucoup. Car dans la mentalité traditionnelle ce n’est pas toujours facile de changer les choses.

  • Vendredi 9 Octobre : Rencontres diverses… et nombreuses visites et contacts. Travail à partir des mails reçus.
    De l’Hôpital Ignace Deen, on nous demande des fonds pour un blessé à la tête… plus de 10 jours après les événements. Il nous demande aussi des médicaments, du matériel et des médicaments pour 75 hospitalisés et 1600 blessés traités en ambulatoire. Actuellement, chaque jour on montre à la télévision des entreprises ou associations qui viennent apporter des dons et visiter les malades. C’est surtout pour se montrer, mais au moins cela apporte quelque chose. Encore faut-il que tous ces dons ne disparaissent pas.
    Le soir, prise de contact et formation dans une deuxième communauté de quartier. Il y a du monde et les questions nombreuses, ce qui est bon signe. Mais avant cela, nous avons une nouvelle rencontre à CRS pour organiser notre action, et aussi pour étudier un projet de lettre des évêques des Etats-Unis pour soutenir l’Eglise de Guinée. Il nous faut bien étudier les termes, car la situation est très délicate. Et souvent, quand on ne connaît pas la culture ni la situation du pays de l’intérieur, en voulant aider on amène involontairement des problèmes. C’est souvent le cas avec les média étrangers qui, même avec les meilleures intentions, enveniment souvent les problèmes.

  • Jeudi 8 Octobre : On me réclame la Conférence sur la Paix que j’ai faite fin septembre. Je l’avais faite à partir de notes en sténo. Je vais donc l’enregistrer sur cassette et Jocelyne la mettra au clair et me la renverra par mail, comme elle le fait régulièrement. Cela me rend souvent de grands services et je l’en remercie en mon nom… et au vôtre, car vous allez en profiter.
    Après cela, il me faut préparer les documents de travail pour les deux commissions de Justice et Paix et de Pastorale sociale. Et m’atteler à la préparation des prochains envois groupés par mail.

  • Mercredi 7 Octobre : De bonne heure, je vais faire soigner ma cheville au dispensaire. J’apprends qu’un Français qui travaille à l’intérieur du pays à un projet d’élevage a été hospitalisé dans une clinique de la ville. Il est seul et abandonné par sa famille. Je vais donc le voir. Finalement, son état de santé est meilleur qu’annoncé et nous voyons comment l’accueillir dans notre maison d’accueil à sa sortie de clinique.
    Ensuite, à la Commission « Justice et Paix », nous préparons une émission pour la télévision, afin de faire passer notre message et proposer nos actions. Nous en faisons l’enregistrement qui sera diffusé dimanche soir.
    Le soir, messe d’adieu du Frère Yvon, spiritain de Kipe. Il a travaillé pendant 7 ans dans les paroisses de TAOUYA, NONGO et LAMBANYI et les paroissiens, en particulier les jeunes avec lesquels il a spécialement travaillé, tiennent à le remercier. Nous avons une cérémonie très chaleureuse. Yvon va maintenant continuer sa mission au Sénégal.

  • Mardi 6 Octobre : Ce matin, je reste à la maison : j’ai besoin de faire le point et de prier sur tout cela, et ensuite de mettre par écrit toutes nos réflexions, en particulier celles de dimanche, de la Commission.
    Le soir, rencontre dans la première CCB de la paroisse. D’abord, prière du chapelet commenté, avec lecture de la Parole de Dieu, chants et intentions de prière. Puis, temps de formation : je leur explique ce qu’est une Communauté de quartier et la ligne selon laquelle je voudrais que nous travaillions cette année. Puis nous terminons par l’Eucharistie.

  • Lundi 5 Octobre :D’abord lecture des mails, réponses, et préparation des documents. Puis réunion de l’équipe de volontaires pour faire le point des activités. Les différents dispensaires ont été visités et l’appel a été lancé dans les églises pour restaurer le dialogue et construire la paix dans le pays. Nous préparons la descente dans les quartiers qui devient maintenant nécessaire.
    Le président COMPAORE, nommé facilitateur, est arrivé. Aujourd’hui, il rencontre les différentes composantes de la Nation pour voir comment sortir de cette crise.

  • Dimanche 4 Octobre : Premier dimanche à TAOUYA. Je suis heureux de me retrouver là, même si je sais que ce sera difficile. Les gens participent bien au partage de la Parole de Dieu au moment de l’homélie et la prière est vivante. Pour ce même jour, vu la situation, j’ai prévu une rencontre générale des Commissions « Justice et Paix » de la ville. Au moment des annonces, nous lisons notre appel à la population guinéenne en reprenant les trois points : soutien de toute sorte aux blessés et familles des tués, lutter contre les rumeurs et chercher la vérité, renforcer le dialogue et la paix.
    Après la messe, jusqu’au soir, rencontre des Commissions des différentes paroisses. Nous organisons la Commission de TAOUYA, faisons le tour des autres paroisses et surtout préparons une nouvelle réflexion sur les événements du pays, car les choses évoluent vite. Voilà une nouvelle journée bien remplie.

  • Samedi 3 Octobre : Le Président propose un gouvernement d’unité nationale. Les forces vives (l’opposition), elles, demandent son départ. Le Président annonce une enquête nationale sur les tueries. L’opposition réclame une enquête internationale. Le Président Blaise COMPAORE, du Burkina Faso, est nommé médiateur par la CEDEAO (Communauté Economique des états d’Afrique de l’Ouest). Le secrétaire d’état des affaires religieuses fait une nouvelle déclaration au nom des chefs religieux de Guinée. De nombreuses personnes et entreprises viennent offrir de l’argent, de la nourriture et des médicaments dans les hôpitaux pour les blessés. De notre côté, nous continuons à travailler avec C.R.S. Le soir, messe du dimanche anticipée, à ma nouvelle paroisse de TAOUYA.

  • Vendredi 2 Octobre : Restitution des corps.
    Les corps des morts du lundi, qui étaient conservés dans les morgues des hôpitaux, sont rendus aux familles. Mais cela se passe mal. En effet, on a parlé de 157 morts. On n’en remet que 38 aux familles. Le bruit court que des militaires ont enterré de nombreux corps la nuit, pour cacher le nombre de morts et cacher qu’ils ont été tués par balles. Les familles se révoltent, des jeunes commencent à lancer des pierres, les militaires les dispersent à coup de grenades lacrymogènes, et on ne peut pas terminer la prière à la Grande Mosquée. Beaucoup de corps ne sont pas réclamés et sont enterrés au cimetière de la Mosquée. Ainsi, après cette tuerie du lundi, les corps n’ont même pas pu être inhumés dans la paix et la prière.
    Fête de l’Indépendance.
    C’est aujourd’hui le 51ème anniversaire de l’indépendance de la Guinée. Elle est vécue dans la peur. Peu de monde s’est déplacé : les militaires sont plus nombreux que les civils ! Après la cérémonie, le président fait une déclaration à la presse, où il rejette la responsabilité des atrocités commises sur les partis politiques : « Ils n’auraient pas dû maintenir cette manifestation, puisqu’elle avait été interdite ».
    Elle se passe dans un triste contexte ! Bien sûr, nous prions beaucoup pour le pays. Le soir, comme chaque soir pendant ce mois d’Octobre, toutes les communautés du pays se retrouvent pour prier le chapelet. Les intentions de prières ne manquent pas.
    A la place des martyrs, pour la célébration officielle de la fête, les militaires du service d’ordre sont plus nombreux que les participants ! En fait, la population a peur et cela risque de durer. Nous allons faire le maximum pour rétablir la paix et le dialogue.
    Mois du Rosaire.
    Depuis hier, les Communautés chrétiennes se réunissent dans chaque quartier pour réciter le chapelet.

  • Jeudi 1er Octobre : Actions d’urgence.
    Nous nous retrouvons avec la Caritas Américaine (C.R.S.) et la Communauté Sant Egidio pour voir ce que nous allons faire. D’abord, il y a l’action urgente à mener pour les blessés et pour les familles des morts. Nous avons regroupé un groupe de jeunes bénévoles qui avaient déjà travaillé (bénévolement) en 2007 lors de l’état de siège où nous avions également déploré beaucoup de blessés et de morts. Ils ont donc l’habitude (malheureusement !) et savent ce qu’il faut faire. Avant hier, ils ont visité les deux grands hôpitaux de la ville. Hier, nous avons fait le point des blessés à aider, à tous les niveaux. A partir d’aujourd’hui, ils vont faire le tour des dispensaires des quartiers pour recenser les blessés et les besoins. Avec C.R.S., nous commençons à penser comment mettre en place des postes de secours, avec des personnels de santé bénévoles et disponibles, des stocks de médicaments en réserve, et nous voyons aussi comment former des secouristes dans chaque quartier, en cas de nouveaux problèmes.
    Nous voudrions mettre en place des équipes de différentes ethnies, regroupant des chrétiens des différentes Eglises et des musulmans. Cela nous semble très important pour maintenir le dialogue et contribuer à l’unité du pays et l’entente dans la population.
    Enfin, dimanche dans chaque église, un appel sera lancé, d’abord pour repérer les personnes blessées dans les quartiers. En effet, beaucoup de blessés n’osent pas aller se faire soigner dans les hôpitaux, par peur d’être repérés et emmenés par les militaires. Nous allons aussi visiter toutes les familles en deuil. Et voir comment aider toutes ces personnes, en particulier celles dont le chef de famille a été blessé et tué et qui ne peuvent donc plus nourrir leurs enfants.
    Nous demandons aussi à chaque chrétien de recréer le tissu social en parlant avec tout le monde dans le quartier, en particulier ceux qui parlent une autre langue ou sont d’une autre religion, pour rétablir le dialogue et la paix qui ont été cassés par ces événements, et ainsi reconstruire peu à peu la paix. Pour tout cela, nous travaillons en particulier avec la Communauté Sant Egidio.
    Nous allons ensuite présenter notre réflexion et nos propositions d’action à l’archevêque, qui les approuve totalement en particulier les efforts de dialogue et de paix et la collaboration avec les musulmans.
    Après cela, nous nous retrouvons avec l’équipe des volontaires bénévoles pour organiser cette action dans les quartiers.
    Je trouve quand même un moment pour faire soigner ma plaie à la cheville. Le médecin me reproche de ne pas en prendre soin suffisamment. Mais comment faire avec tout le travail a assurer et quand il faut aller dans les quartiers qui ne sont pas nettoyés, où les caniveaux sont bouchés et où on doit marcher sans cesse dans des eaux polluées ! Et c’est vrai qu’en plus la chaleur n’arrange pas les choses.
    Malgré les tueries, il y a toutes les activités, car la vie continue. Deux de nos évêques partent demain à Rome pour le 2ème Synode pour l’Afrique. Nous nous retrouvons donc pour mettre le dernier point aux interventions. Le soir, nous participons avec notre évêque au Conseil paroissial de TAOUYA.
    Rappel. Curé d’une nouvelle paroisse.
    Je suis arrivé en GUINEE en 1996, venant de St Louis du Sénégal. Je suis venu rouvrir la Mission de MONGO, fermée depuis 1967 suite à l’expulsion de tous les missionnaires par Sékou Touré. Pendant 10 années à Mongo, j’ai travaillé spécialement dans les camps de réfugiés du Libéria et de Sierra Léone, venus à cause de la guerre. (Voir mon site, rubrique « MONGO »). Puis, je suis venu dans la capitale pour lancer les Commissions de « Justice et Paix » et de « Pastorale sociale ». Mais on m’a demandé de réanimer la paroisse de KATACO, fermée à cause de menaces de mort contre les missionnaires. Ce qui se terminera par l’assassinat du Frère Joseph, en Avril 2008. En Septembre 2008, l’évêque me confiera en plus la paroisse de BOFFA dont le curé, un jeune confrère spiritain sénégalais, venait de mourir. Kataco se trouve à 250 km de Conakry, avec neuf communautés de village, sur un rayon de 75 km, avec des pistes très mauvaises. Cela devenait trop difficile : on ne peut pas tout faire ! J’ai donc demandé à être libéré de ces deux paroisses pour me consacrer au travail de « Justice et Paix » et de « Pastorale sociale » au niveau national, ce qui est déjà immense. L’évêque m’a libéré de Kataco et Boffa, mais à la place il me demande de prendre en charge la paroisse de TAOUYA, une grosse paroisse de la ville qui a beaucoup de problèmes. En fait, c’est une situation plus que boiteuse, car, à cause de mes autres responsabilités, je ne pourrai être dans la paroisse que le premier dimanche du mois ; les autres dimanches, ce sera un prêtre du Grand Séminaire (à 35 km) qui viendra assurer la messe. Cela va me faire un gros supplément de travail, mais nous manquons cruellement de personnel.
    Donc, ce soir, l’archevêque vient me présenter au Conseil paroissial et donner ses premières directives. Après, nous verrons ensemble ! En fait, je connais déjà cette paroisse car j’y suis passé plusieurs fois pour justice et paix et la pastorale sociale. Mais c’est vrai qu’il y a beaucoup de problèmes et qu’il faudra du doigté. En tout cas, ça commence bien. La rencontre se passe dans un très bon climat. Simplement, les paroissiens regrettent que je ne puisse pas être à plein temps, surtout pour assurer une formation de base. Mais je ne peux pas être partout !

  • Jeudi 1er Octobre : Nous nous retrouvons avec l’équipe de volontaires pour faire le point de la tournée dans les hôpitaux et rédiger un rapport. Avec l’archevêque, nous préparons une déclaration présentant nos condoléances aux familles et appelant gouvernement et opposition au dialogue. Nous préparons également la rencontre avec le Président Dadis CAMARA des chefs religieux.

  • L’action des chefs religieux. Les évêques de Guinée ont beaucoup agi, soit au nom de l’Eglise Catholique, soit au sein du Conseil Chrétien regroupant les Eglises Catholique, Anglicane et Protestante de Guinée, soit avec les Chefs Religieux musulmans, au sein du Conseil Interreligieux. Déjà, en février 2007, lors des précédentes tueries, ce conseil avait été érigé en Comité de Veille pour tout le pays, pour veiller à la bonne marche du pays et prodiguer ses conseils aux différentes responsables politiques et autres. Beaucoup dans le pays demandent que ce Comité de Veille soit réactivé. Dès le lendemain des massacres, les chefs religieux ont été voir le Président pour qu’il libère les leaders politiques qui étaient soignés sur son ordre à la clinique Pasteur, où ils étaient sous surveillance militaire. Le Président a accepté, à condition que ce soit eux-mêmes les chefs religieux qui les prennent en charge. Le lendemain, ces mêmes responsables sont retournés réfléchir avec le Président à la situation politique et sur ce qu’il serait possible de faire. Ils sont allés également dans les hôpitaux visiter les blessés et aussi les chefs de partis, plusieurs fois, chez eux. Enfin, ils ont préparé deux déclarations communes qui sont passées à la radio et à la télévision nationales, la première le mercredi, sur la situation du pays ; et la deuxième après l’enterrement des morts du 28 septembre (voir plus loin).

  • Mercredi 30 Septembre : Soutien aux blessés et aux familles.
    On commence à circuler un peu, bien qu’avec beaucoup de difficultés. Je rassemble des jeunes volontaires qui habitent autour de l’archevêché, pour lancer toute de suite une action auprès des blessés. Nous nous répartissons en deux équipes pour aller dans les deux grands hôpitaux de la ville pour visiter les blessés, les encourager mais aussi voir leurs besoins en médicaments et également en pagne, savon, habits, nourriture, etc… C’est la priorité. Nous travaillons en lien avec M.S.F. (Médecins sans Frontières) et la Croix Rouge Internationale, et avec le soutien de CRS (Caritas Américaine) et les Caritas d’Allemagne et de France (Secours Catholique). Demain nous allons visiter les dispensaires de la ville. Mais nous voulons surtout travailler dans les quartiers, à partir des paroisses, en concertation avec les chefs de quartiers et les imams, pour agir tous ensemble, chrétiens et musulmans, et mobiliser le maximum de personnes. En effet, dans les quartiers, il y a beaucoup de blessés qui ne vont pas se faire soigner dans les dispensaires ou hôpitaux, par peur d’être repérés et emmenés par les militaires.
    Il y a aussi toutes les familles en deuil à soutenir et encourager. Et aussi à aider. En effet, parmi les blessés et les morts il y a un certain nombre de chefs de famille, et leurs enfants n’ont plus de quoi vivre. Avec la Commission « Justice et Paix », nous rédigeons un « APPEL » pour lancer cette action envoyé par mail, sur notre blog et sur mon site. Et mon interview sur internet : www.radiovaticana

  • Mardi 29 Septembre : Après les tueries.
    Nous avons arrêté notre session de formation des jeunes. La ville est morte et les gens ont très peur. Dès le matin, je me retrouve avec notre évêque pour réfléchir à la situation et voir ce qu’il est possible de faire. Puis nous allons à la grande mosquée pour rencontrer les chefs religieux musulmans. Ensuite, nous montons à l’archevêché travailler avec nos différents services.
    Des tas de rumeurs circulent. Par exemple, qu’on a empoisonné le service des eaux de Conakry (ce qui était faux, heureusement). Avec des responsables de justice et paix, après une longue réflexion car la situation est délicate, nous jetons les bases d’un appel aux autorités et à toute la population. Toute la journée se passe en contacts, pour mieux comprendre ce qui s’est passé et voir que faire. Le soir, il a fallu rentrer à la maison. Mais il n’y avait pas de moyen de transport pour notre quartier qui est un quartier « chaud » : c’est d’ailleurs pour cela que nous l’avons choisi, pour être plus près des populations marginalisées et appauvries. Je suis donc passé par l’aéroport, un quartier plus protégé. Mais ensuite, il m’a fallu faire plus de 3 km à pied : aucun moyen de transport ne circulait. J’ai dû parler avec les jeunes pour traverser leurs barricades et ensuite avec militaires, gendarmes et policiers pour passer leurs différents barrages, et ensuite traverser un grand point tout seul.
    Le soir, il y a du courant dans notre quartier (c’est un jour sur deux, en alternance, de 18 à 24 heures, ou de 24 h à 6 heures). Comme il a beaucoup plu, les barrages sont pleins et il y a aussi de l’électricité de temps en temps dans la journée. Nous pouvons donc écouter le discours du Président. Il met la faute sur les chefs des partis politiques en les rendant responsables des tueries et en niant la responsabilité des militaires. C’est vrai que les partis politiques ont, pour le moins, manqué de prudence. Et qu’organiser une aussi grande manifestation dans le contexte actuel, était très risqué. C’est vrai que les partis n’ont pas d’accès aux médias publics. Mais il reste quand même les radios libres, les journaux privés et internet. Et surtout ils n’ont présenté aucun programme pour le pays, leur but principal semblant être le pouvoir pour s’enrichir sans grand souci du bien commun. Ils sont tous unis contre Dadis, mais il n’y a pas d’unité entre eux. Et les chefs des principaux partis sont des anciens premiers ministres qui ont détourné des sommes énormes, et mis le pays à plat du temps de l’ancien président, Lansana Conté. C’est d’ailleurs pour cela que beaucoup de gens mettaient leur espoir dans Dadis CAMARA. Mais maintenant, en qui mettre notre confiance ? Même si le président Dadis n’a pas commandé ces tueries et ces horreurs, ce qui est vrai c’est qu’il ne maîtrise pas son armée, et c’est très inquiétant. Nous ne savons plus à quel saint nous vouer. La France et l’Union Européenne refusent tout contact avec le président Dadis, alors que le président Blaise COMPAORE du Burkina Faso est envoyé lui comme médiateur par l’Union Africaine. Le président Dadis propose un gouvernement d’union nationale, ce que l’opposition refuse absolument ne voulant plus traiter avec le président. Tout le processus de transition est bloqué.

  • Lundi 28 Septembre (suite) : La manifestation sanglante.
    D’après ce qui se dit et ce que j’ai moi-même constaté puisque j’étais sur place, la manifestation a commencé d’une façon très pacifique. Mais des provocateurs ont lancé des pierres sur les marcheurs. Ceux-ci ont répliqué. Les policiers sont intervenus. Alors les manifestants ont brûlé deux voitures, attaqué le commissariat et libéré les détenus.
    Le bruit a couru qu’un policier avait été tué. Alors les militaires sont intervenus avec la violence que j’ai décrite plus haut, en tirant à balles réelles. Ce qui est absolument inadmissible. Et ce qui est inquiétant, c’est que le Président s’appuie sur les militaires, mais qu’il ne tient pas son armée en main.
    De leur côté, les leaders politiques ont manqué de prudence et ont refusé d’écouter les conseils. Or, on sait bien comment se terminent les marches en villes et les grands rassemblements. Il faudrait vraiment trouver d’autres moyens de manifester et de s’opposer.
    Le soir, je n’ai évidemment pas pu rentrer chez moi. Je suis resté dormir dans la paroisse où avait lieu la formation. Et nous avons suivi les informations sur les télévisions et radios étrangères (BBC et RFI). En effet, c’est souvent par ces radios que nous avons des nouvelles, même si nous pouvons en avoir aussi en Guinée grâce aux radios libres qui ont été autorisées ces dernières années. Cependant, nous restons prudents et circonspects, car les radios étrangères ont tendance à exagérer et à tirer des conclusions à partir d’une interview qui n’est pas toujours crédible. Et à donner le point de vue des pays européens. Or, on sait qu’en politique il n’y a pas d’amis, il n’y a que des intérêts. Et les intérêts de la France sont bien présents en Guinée !

  • Mardi 29 septembre : Réflexion et secours
    Nous nous retrouvons pour réfléchir à la situation, prévoir une déclaration et voir que faire. Première action : réconforter les blessés en allant les visiter dans les deux hôpitaux de la ville, contacter leurs familles, veiller à éviter les représailles, acheter des médicaments pour les soigner et mettre en place une équipe d’intervention. Les Caritas (Secours Catholiques des Etats-Unis et d’Allemagne) nous soutiennent. Je vous en reparlerai. » (Armel Duteil)

  • Lundi 28 septembre : Manifestation sanglante.
    Depuis Juin nous avions prévu une session de trois jours de réflexion et formation pour des jeunes garçons voulant être religieux (frères, prêtres ou moines) avec la collaboration des différentes congrégations religieuses travaillant en Guinée. Cette formation est très importante pour l’africanisation (l’inculturation) de l’Eglise en Guinée. Du fait de la manifestation prévue, seuls 15 jeunes ont pu arriver à la session, à cause du manque de moyens de déplacements, les avenues étant bloquées par les forces de l’ordre.
    La rencontre débute très bien, mais très vite nous devons travailler au son des kalachnikovs, des grenades lacrymogènes et du sifflement des roquettes. A partir de 9 heures, nous voyons une grande foule vers le stade et deux heures plus tard les derniers arrivants se font refluer. Nous ne savons pas ce qui se passe au stade. Aussi nous continuons la formation et nous travaillons même très bien, avec une très bonne participation des jeunes et un grand sérieux dans la réflexion. A 16 h 30, nous profitons d’une accalmie pour nous faufiler, mais à la sortie, devant le portail nous apercevons trois morts étendus sur la route. Et ce n’est que le soir que nous apprenons ce qui s’est passé au stade. Il s’agissait d’une manifestation organisée par les « forces vives » (les partis politiques, les syndicats et les organisations de la société civile, ensemble) contre la dictature militaire et la candidature du Président actuel (Dadis CAMARA) aux prochaines élections présidentielles, puisqu’après avoir pris le pouvoir le 28 décembre 2008, il avait promis de rendre le pouvoir et de ne pas se présenter aux élections. La manifestation était prévue dans le grand stade de Conakry, et cela depuis longtemps mais a été interdite au dernier moment, alors qu’ils n’ont pas accès aux médias officiels (télévision et radio) et n’ont pas la possibilité de tenir les meetings, alors que le président actuel a toutes ces possibilités, ce qui entraîne un déséquilibre grave. C’est pourquoi les forces vives ont voulu tenir ce meeting à tout prix. Les participants ont donc forcé les portes du stade pour se rassembler. Les militaires les ont alors enfermés dans le stade et la répression a commencé. Plusieurs centaines de personnes ont été blessées à coups de crosse, dont les leaders des partis politiques qui ont dû être hospitalisés. Suite à la charge des militaires, les gens se sont repliés au fond du stade, et plus de 50 sont morts étouffés sous la pression des militaires. Puis ceux-ci ont tiré à balle réelle sur ceux qui cherchaient à s’enfuir. Au total, on parle aujourd’hui de 187 morts. Et le nombre va encore augmenter, car beaucoup de blessés graves ne peuvent pas recevoir les soins, même les plus élémentaires, et beaucoup vont mourir. C’est pour cela que nous avons demandé aux commissions « Justice et Paix » et de « Pastorale sociale » d’aller dans les hôpitaux mais aussi dans les quartiers repérer les blessés qui n’ont pas pu se faire soigner faute de moyens, et de soutenir les familles qui ont perdu un des leurs, même si jusqu’à maintenant on ne peut pas récupérer les corps. D’ailleurs les militaires ont emporté de nombreux corps, à la fois pour qu’on ne voie pas qu’ils ont été tués par balle, et pour « diminuer le nombre de morts déclarés » (Voir notre papier : « Appel » déjà envoyé et mis sur mon site). Cette tuerie a été accompagnée d’atrocités sadiques et innommables, en particulier des viols en public et enlèvements qui se continuent dans les commissariats et les camps.

  • Dimanche 27 septembre :
    Dernière messe, toujours aussi animée mais dans l’anxiété. Au début de la messe, nous lisons la déclaration des chefs religieux qui demandent des prières dans toutes mosquées et églises, pour que la manifestation des partis d’opposition demain se passe dans le calme et que le pays retrouve la paix.
    Au moment de l’homélie, nous réfléchissons à notre responsabilité de chrétiens dans le pays. A la fin de l’Eucharistie, je confie au conseil paroissial les décisions d’hier devant toute la communauté. Puis nous nous donnons la paix et les responsables vont donner la paix à tous, pour nous séparer dans la réconciliation et la joie. Et après la lecture de l’appel de l’Eglise catholique pour la paix dans le pays, je leur remets le plan d’action de la paroisse.
    Après la messe, grandes salutations. Cela ne nous empêche pas de tenir une rencontre des catéchistes pour organiser la rentrée du catéchisme, animer les parents et former les parrains et marraines. La journée se termine par un repas, dans la joie, où nous échangeons nos souvenirs, spécialement des trois mois passés, et partageons nos projets.

  • Samedi 26 septembre : Suite à la déclaration de l’Eglise Catholique, les chefs religieux des différentes religions de Guinée se retrouvent ce matin à leur tour pour rédiger un appel au calme et à la paix et demander des prières dans toutes les églises et mosquées pour le pays. Cet appel commun est évidemment très fort et important. Il va être lu à la radio nationale et dans les radios libres. Espérons qu’il soit entendu !
    A la paroisse, réunion du Conseil paroissial avec les différents groupes et mouvements. Il s’agit de faire l’évaluation du travail de ces trois mois passés (temps des vacances !)
    Conseil paroissial.
    Pendant 2 mois ½, j’ai pris en charge la paroisse de Lambanyi, alors que mon confrère John était en congés au Nigeria. Nous avons eu un certain nombre d’activités (Voir les « Nouvelles »). J’ai assuré aussi un certain nombre de formations, en particulier pour les jeunes, les communautés de quartier et les commissions. Ceci afin de les rendre plus opérationnels. Nous avons ainsi fait des plans d’actions. Aujourd’hui, il s’agit de faire l’évaluation de tout cela. Et à partir de là de faire des propositions pour l’année pastorale et scolaire qui commence. Chaque groupe est représenté et chacun présente ses propositions qui sont ensuite discutées par tous, puis approuvées. Pour les jeunes, nous notons qu’ils sont bien organisés en mouvement et qu’ils travaillent. Mais qu’il y a trop de choses, et elles vont dans tous les sens. Il faudra donc assurer une coordination entre les différents mouvements pour assurer une action auprès de toute la jeunesse. Et aussi que les jeunes soient présents dans les communautés de quartier et participent aux activités générales de la paroisse.
    Pour les communautés de quartier, elles sont surtout centrées sur la prière. En plus, elles ne se réunissent pas souvent et certains n’y participent pas. Il va falloir qu’elles prennent en charge l’animation du quartier et s’engagent pour le développement et le soutien des pauvres, pour la justice, la paix et la réconciliation. Et déjà pour le suivi de la catéchèse, le soutien des parents et des parrains et marraines, la formation des catéchistes.
    Les commissions « Justice et paix » et de « Pastorale sociale » sont maintenant en place. Il ne leur reste plus qu’à travailler.
    Nous mettons en place la commission de la famille, avec un homme et une femme dans chaque communauté.Le tout se fait sans cacher les exigences, mais avec beaucoup d’amitié. A partir de là, nous dégageons des orientations que le conseil paroissial présentera à John, le curé, qui revient la semaine prochaine.

  • Vendredi 25 septembre : Les événements importants arrivent au niveau politique : la grande manifestation des opposants au président militaire actuel, Dadis CAMARA, partis politiques, syndicats, organisations de la société civile, prévue pour le lundi 28, avec marche dans la ville, pendant que le président prépare deux grands meetings à l’intérieur du pays dans le Fouta Djallon, à Mamon et Labé.
    Nous organisons donc la distribution de l’appel au calme de l’Eglise catholique dans les radios et journaux libres de Conakry, les partis politiques, les syndicats, les associations et organisations de la société civile. Il faut faire du porte à porte car internet fonctionne très mal en Guinée. C’est un gros travail, mais absolument nécessaire.
    Cela ne nous empêche pas de nous retrouver avec la commission diocésaine de la jeunesse, pour le lancement de l’année. Nous finalisons le document de base du mois d’octobre pour les jeunes.
    Pour ce premier mois, le thème de réflexion et d’action est : l’engagement dans l’Eglise. Suivra, l’engagement dans la société, le mois prochain, etc..
    La maison d’accueil.
    Et comme chaque jour, il y a les rencontres avec tous les gens qui passent à l’Archevêché et ses différents services, où se trouve également la maison d’accueil, avec de nombreux passages.
    C’est toujours une occasion de contacts très intéressants et d’échanges enrichissants. En particulier, avec les prêtres de l’intérieur et des autres diocèses qui viennent pour se faire soigner, qui partent en Europe et aux Etats-Unis, ou qui en reviennent. C’est un des moyens qui nous permet de rester ouverts et au courant de ce qui se passe ailleurs. C’est très important pour nous. Nous rencontrons aussi beaucoup de personnes qui soutiennent des actions en Guinée et qui viennent les visiter, ou y travailler. Cela nous permet de les introduire aux réalités du pays pour mieux les comprendre et s’y insérer. Et nous les aidons aussi pour tous les problèmes de visa, transport et autres, grâce à nos relations et à la connaissance que nous avons du pays.
    Nous apprenons une triste nouvelle : le décès de l’ancien vicaire général du diocèse de NZEREKORE. Il avait le diabète depuis longtemps. Je suis vraiment touché, car il était très sympathique et nous nous entendions très bien. Demain, nous allons prier pour lui avec toute la paroisse.

  • Jeudi 24 septembre : Animation des jeunes.
    Au programme aujourd’hui : préparer le document de travail pour les jeunes pour le mois d’Octobre. Nous repartons du message de l’évêque aux jeunes de l’an dernier, des rencontres forum des jeunes de Pâques (voir « nouvelles » d’Avril 2009) et les deux sessions bibliques (voir nouvelles fin Juillet et fin Août). Nous cherchons à mobiliser tous les jeunes, en regroupant toutes les bonnes volontés et en regroupant les différents mouvements, groupes et commissions. Nous proposons un thème d’action par mois pour l’ensemble du diocèse. Nous espérons ainsi lancer une dynamique, aider les jeunes à mieux se former et agir plus efficacement, dans les différents secteurs : la vie de l’Eglise, la vie du pays et l’engagement dans la société guinéenne, l’évangélisation et les relations avec les autres religions, et des points spécifiques : la violence, la drogue, la sorcellerie, le chômage des jeunes, etc…

  • Mercredi 23 septembre : Réflexion dans le cadre du Conseil chrétien.
    Un conseil qui regroupe les différentes Eglises chrétiennes et qui est très écouté au niveau du pays. Nous menons une réflexion plus large sur la situation générale du pays, avec des propositions de solutions.
    Petit problème de santé.
    Depuis le mois dernier, je me suis accroché la cheville. La plaie s’est infectée et n’arrive pas à cicatriser, malgré les soins dans plusieurs dispensaires. C’est assez douloureux et m’empêche même de dormir. Ce matin, je me suis fait « secouer » sérieusement par une sœur infirmière de la Commission justice et paix qui travaille à l’hôpital. Je vais donc au dispensaire de l’Ambassade de France qui a davantage de moyens. J’y retrouve un médecin ami, d’une de nos paroisses. Je suis très bien accueilli et muni de médicaments. Je pense que cela va s’arranger maintenant. En plus, je suis content car il y a des gens qui s’occupent de moi. Il faut dire que les plaies ont de la peine à guérir car c’est la saison des pluies : il fait chaud et humide ; et nous marchons sans arrêt dans l’eau, la plupart du temps polluée. J’ai quand même pris trois comprimés de FANSIDAR, comme dose préventive contre le palud. ; car à chaque petit problème de santé, le palud se réveille !
    Visite au CRS (Secours Catholique américain ).
    En début d’après-midi, je vais rencontrer CRS. Nous parlons du travail des ONG et de la collaboration avec les organisations de l’ONU, de la lutte contre le paludisme, le suivi des écoles de brousse et surtout de la relance des activités de pastorale sociale et de justice et paix. Au lieu de prévoir une grande organisation, nous privilégions des actions à la base, au niveau des paroisses. Nous nous retrouverons jeudi prochain pour finaliser le projet.
    Enfin, nous continuons la mise au point de l’agenda liturgique pour l’année prochaine.

  • Mardi 22 septembre : Problème avec mon ordinateur et avec internet. Cela arrive souvent !
    Une grande manifestation de l’opposition est prévue pour le lundi 28. Nous avons peur que cela tourne à la confrontation, avec casse d’un côté et répression de l’autre. Nous préparons un appel au calme et à la responsabilité au nom de l’Eglise Catholique (voir mon blog et mon site).

  • Lundi 21 septembre : Nous étudions un gros projet sur le SIDA qui est assez difficile. D’abord, parce que le problème est complexe, et surtout parce que nous ne voulons pas nous limiter aux actions habituelles qui sont inefficaces ou à des conférences qui n’aboutissent à aucune réalisation concrète.
    Ensuite, prise de contact avec les deux nouveaux volontaires qui vont venir travailler au nord, à la mission catholique de KOUNDARA pour la direction de l’école primaire et la formation des enseignants. Nous parlons de la situation du pays, de leurs conditions de travail, et du travail de l’Eglise en particulier dans l’enseignement.

  • Dimanche 20 septembre : Deux messes, en anglais puis en français/soussou, comme d’habitude. En ce moment où aussi bien les chefs politiques que les militaires cherchent à prendre ou à garder le pouvoir, la Parole de l’Evangile d’aujourd’hui est la bienvenue : «ue le plus grand parmi vous se fasse le serviteur de ses frères ». Mais il s’agit de la mettre en pratique, chacun à notre niveau. Et aussi cette autre parole : « Celui qui accueille un enfant, c’est moi qu’il accueille ». Ensemble, nous avons réfléchi à l’accueil des enfants mais aussi de tous les petits de la société, étrangers et marginalisés.
    Après la messe, les responsables des Commissions « Justice et Paix » et « Pastorale sociale » de la paroisse présentent le plan d’action pour les mois qui viennent. (Voir le blog : http://justice.paix.guinee.free.fr ) Ils ont bien travaillé. Bien sûr, il restera toujours à réaliser ce qui a été proposé. C’est toute la question du suivi qui est toujours importante.

  • Samedi 19 septembre : Rencontre sur la Paix.
    Conférence au Palais du Peuple : rencontre interreligieuse sur la Paix, organisée par la Communauté Sant Egidio, à la suite de la grande rencontre interreligieuse d’Assise organisée par Jean-Paul II, en 1994. Le thème en est : Religions et Culture en dialogue. Pour un Humanisme de Paix.
    De nombreux intervenants prennent la parole, après l’introduction de l’archevêque de Conakry : l’imam RATIB de la grande mosquée de Conakry, l’évêque anglican, le secrétaire de la Commission nationale interreligieuse, la présidente des femmes musulmanes de Guinée, mais aussi le secrétaire national du CNDD (Comité National pour le Développement et la Démocratie) qui dirige le pays, le président du Conseil Economique et Social. On m’a demandé de développer le thème choisi. Je vais mettre cette conférence sur mon site. C’est un événement très important, car comme on le voit, il regroupait des représentants et des autorités des différents éléments de la nation. De plus, il se situait la veille de la fin du ramadan. A la fin de la conférence, nous avons d’ailleurs distribué le message du Vatican aux musulmans pour la fête de la fin du ramadan. La rencontre s’est terminée par une célébration de la lumière avec chants sur la paix où le représentant de chaque groupe est venu allumer une bougie. Après cela, nous avons pris le temps de faire connaissance et de nouer des contacts intéressants.

  • Vendredi 18 septembre : Synthèse des comptes rendus des centres aérés. (Voir nouvelles du 16 au 28 Août).

  • Jeudi 17 septembre : Avec les deux commissions de pastorale sociale et justice et paix, nous réfléchissons à la situation du pays pour préparer une déclaration. Mais c’est très complexe. Il va falloir élargir et approfondir la réflexion.
    Le soir, je travaille un certain nombre de documents, en particulier sur le développement rural et la mise en place de petits projets.

  • Mercredi 16 septembre : Je termine mon chapitre pour notre manuel pratique sur la réconciliation. Le thème : « La Parole de Dieu sur la réconciliation dans les différentes religions africaines ». C’est ce que nous avons travaillé le mois dernier à Abidjan. (Voir les nouvelles, du 10 au 15 Août). C’est urgent, mais depuis un mois je n’ai pas pu m’asseoir calmement pour y travailler. Or nous voulions que ce manuel soit prêt pour le présenter pour le début du 2ème Synode pour l’Afrique.
    La situation du pays.
    Les tensions s’exacerbent. En réponse à la visite des présidents du Sénégal, Abdoulaye WADE, et du Liberia, Madame Helen Sirleaf JOHNSON, venus soutenir le président-militaire, Dadis CAMARA, il y a eu une très grosse manifestation d’un parti politique, dimanche (voir plus haut). Ce qui nous inquiète, c’est que les partis sont fortement ethniques en Guinée. Ici, il s’agissait d’un parti peuhl qui réclame le pouvoir après Sékou Touré (MALINKF) et Lansana Conté (SOUSSOU). Maintenant, en réponse aux nombreux groupes de soutien suscités pour soutenir Dadis CAMARA, des jeunes manifestent contre lui dans la rue et brûlent des pneus. Heureusement, cela se passe sans casse et il n’y a pas de répression policière. C’est un signe d’espoir et de maturité. L’ambassadrice du Sénégal rencontre les forces vives, incluant les partis d’opposition : en effet, suite aux visites du président sénégalais venu soutenir Dadis CAMARA, de nombreux Sénégalais vivant en Guinée sont l’objet d’attaques verbales dans la rue. Les forces vives la rassurent, car beaucoup sont très reconnaissants aux Sénégalais pour l’accueil qu’ils ont accordé aux opposants guinéens du temps de Sékou Touré.

  • Mardi 15 septembre : Travail à la maison pour classer différents documents et en travailler d’autres. C’est important de se tenir au courant ! Et surtout, il me faut préparer la conférence de samedi. Le soir, préparation au mariage. Le couple est très sympathique et nous commençons à nous connaître ; nous avons un échange très intéressant.

  • Lundi 14 septembre : Aujourd’hui, début d’évaluation des activités de vacances et préparation du prochain Synode.
    Séance de travail avec l’archevêque, (revenu de deux semaines de Congrès au Canada sur les questions économiques et sociales), pour voir ce qu’il est possible de faire, en particulier dans le secteur rural, avec les groupements de paysans.
    Visite des ateliers soudure, menuiserie, mécanique auto et électricité (formation des jeunes en difficulté).
    Mise au point, pour des veuves, d’un projet de fabrique de savon.
    Rencontre avec la commission de la jeunesse et différents responsables de mouvements.
    Je mets deux heures avant d’avoir une place dans un taxi collectif pour rentrer. Les gens préparent les fêtes de la fin du ramadan et sont montés très nombreux en ville pour les achats. Avant de partir, j’ai récupéré le message du secrétariat d’état pour les relations avec l’Islam, sur le site du Vatican, et je l’ai envoyé à ma liste des quelque 500 correspondants en Guinée. J’en ai tiré aussi des photocopies à distribuer directement.

  • Appel aux prêtres, conseils paroissiaux et commissions Justice et Paix Pastorale Sociale

  • Mardi 29 septembre  : Message du webmaster d'Armel.
     J'ai eu des nouvelles d'Armel suite aux récents événements en Guinée. "[...]je tiens à vous rassurer tout de suite et à vous dire que tout va bien pour moi. Je suis en sécurité, mais nous sommes débordés de boulot.[...]Pensez à nous car la situation est difficile [...]
    J'en profite pour signaler que suite à un problème de PC j'ai perdu toutes les adresses mails et je ne suis plus en mesure de vous envoyer les mails pour annoncer les modifications sur le site. Renvoyez moi donc vos adresses mails." (Le Webmaster)

  • Dimanche 13 septembre  :  Messe à la paroisse de LAMBANYI
    Au début, un rite pénitentiel, inspiré des gestes traditionnels de pacification, avec les responsables de la paroisse, des communautés de quartiers, de mouvements et de commissions.
    Après la 2ème lecture de St Jacques, nous apportons à l’autel des habits et de la nourriture pour  visualiser  et actualiser la lecture ; et pour montrer notre engagement à donner des habits à ceux qui sont nus et à manger à ceux qui ont faim. Nous aimons utiliser des objets symboliques de cette façon dans nos liturgies.
    Après la messe, les délégués pour les deux commissions de  Pastorale sociale  et de  Justice et Paix  ont amené les résultats des enquêtes menées dans les différents groupes et ils en font la synthèse, chaque commission de son côté. Ensuite, ils établissent un calendrier : un type d’actions différent à mener chaque mois, dans chaque groupe, à la base. Par exemple, pour justice et paix : l’insécurité dans les quartiers, les recrutements préférentiels, les grossesses non désirées, les enfants travailleurs, la discrimination des enfants dans les familles, l’ethnocentrisme, etc… Ou pour la pastorale sociale, les différentes personnes à aider : les veuves, les orphelins, les handicapés, etc.. et les petits projets de développement comme la commercialisation des produits du village, la fabrique de savon artisanal à partir de l’huile de palme, etc… mais aussi l’alphabétisation et le rattrapage scolaire. Pour chaque question, il s’agit de voir les actions à mener et les moyens à notre disposition.
    La rencontre se passe bien, les participants sont motivés, et j’espère que ces deux commissions paroissiales vont pouvoir démarrer et travailler réellement (pas seulement faire des réunions !).
    Je les laisse terminer le travail et je pars rencontrer notre évêque qui rentre du Canada avec Yves Marie notre nouveau responsable. L’évêque a invité tous les spiritains de Conakry à manger. Nous abordons un certain nombre de points importants de la vie du diocèse. 

  • Samedi 12 septembre  :  Récollection au dispensaire St Gabriel.
    C’est un dispensaire privé catholique mais intégré dans la Santé publique. Il est très important, pas seulement à cause du nombre de malades soignés, mais par le sérieux de son travail et la compétence de ses agents de santé.
    Cette récollection est prévue depuis longtemps. Elle va réunir tout le personnel, une soixantaine de personnes, aussi bien chrétiens que musulmans, pour voir comment être soignants en tant que croyants et résoudre les problèmes de santé avec l’aide de notre foi commune en Dieu.
    Après un exposé devant tout le personnel, entrecoupé de nombreuses interventions toutes très positives, nous nous sommes divisés autour de quatre questions :
    1°) Qu’est-ce que Dieu nous dit sur la maladie ? En deux groupes : un groupe de chrétiens et un de musulmans, pour respecter les différences de religion.
    2°) Que pensons-nous de la sorcellerie, des sacrifices traditionnels et de la médecine traditionnelle ?
    3°) Comment aider les malades (à tous les niveaux) ?
    4°) Que faire pour la santé en Guinée (au niveau du pays et de la société) ?
    Le tout s’est passé dans une très bonne ambiance, avec beaucoup de respect et d’amitié. Après la prise de photo, nécessaire à chaque rencontre, nous nous sommes retrouvés entre chrétiens pour célébrer l’Eucharistie. 

  • Vendredi 11 septembre  :  Formation de la 5ème CCB (Communauté de quartier) de la paroisse de LAMBANYI.
    Toujours les mêmes problèmes.
    1°) Les chrétiens n’ont pas compris ce qu’est une CCB. Ils en font un simple groupe de prière, alors que ce devrait être un moyen de vivre sa vie chrétienne en communauté, dans toutes ses dimensions, et un moyen d’animer le quartier avec tous, chrétiens ou non.
    2°) La communauté ne se réunit pas régulièrement et il y a beaucoup d’absences, car ce n’est pas une priorité pour eux.
    3°) Les responsables élus ne sont pas suffisamment engagés et ne tiennent pas leurs responsabilités
    J’espère que cette formation va lancer les activités et donner un souffle nouveau. 

  • Jeudi 10 septembre  :  Il faut reprendre le travail. Je pars donc de très bonne heure pour l’Archevêché où de nombreuses questions m’attendent. En particulier, ouvrir ma boîte mail. Dès que je termine, je pars à CRS, où nous avons plusieurs choses à régler : le travail de  Justice et Paix , de  Pastorale sociale , les élections, etc… 

  • Mercredi 9 septembre  :  Comme nous sommes tous là (les Spiritains de Guinée), nous nous retrouvons avec nos jeunes confrères et nos jeunes en formation, autour d’Yves-Marie notre nouveau responsable pour l’Afrique de l’Ouest et du Nord (FANO). Nous abordons nos différents problèmes, en particulier notre manque cruel de personnel (malgré les jeunes qui nous rejoignent) qui nous empêche de répondre aux très nombreux appels que nous recevons. Puis nous précisons les orientations de notre dernière rencontre de Dakar (Chapitre), en particulier sur la vie de prières, essentielle pour notre engagement. Et la vie religieuse et communautaire, base de notre travail missionnaire. Et le rappel de nos priorités : l’Evangélisation dans le respect et le dialogue avec les autres religions et le service des plus pauvres. Nous voyons aussi comment maintenir le travail pour la justice et la paix, sans nous laisser totalement absorber par le travail paroissial. ; et nous réfléchissons à la nouvelle organisation à mettre en place pour toutes ces actions.
    Enfin, nous préparons le 300ème anniversaire de la mort de notre fondateur, Claude POULLART des PLACES, un jeune breton plein d’avenir qui s’est consacré totalement à la formation d’étudiants sans moyens, pour le service des plus pauvres et les missions. C’est l’occasion de nous resituer face à notre vocation.
    Après un repas très fraternel, nous nous dispersons pour rejoindre nos différents postes en Guinée et, pour les nouveaux engagés, leurs lieux de formation au Sénégal, au Ghana et au Cameroun. 

  • Mardi 8 septembre  :  Aujourd’hui, engagement religieux et missionnaire de six de nos jeunes frères : deux Sénégalais et quatre Guinéens, dont l’un originaire de MONGO et que j’ai donc suivi depuis son enfance. C’est une grande joie pour nous tous et nous sommes très entourés par la paroisse de Boffa et de nombreux prêtres, frères, sœurs et laïcs qui sont venus participer à cette profession religieuse.
    La cérémonie est très émouvante, à la fois solennelle par le sérieux de l’engagement et très simple et fraternelle par l’ambiance amicale qui règne entre tous. Bien sûr, la joie a éclaté avec les chants et les danses de tout le monde.
    Pour moi, j’ai la joie de revoir des gens de MONGO et d’avoir des nouvelles des nombreux amis que j’y ai laissés. Je retrouve également le Conseil paroissial et les responsables de  Justice et Paix  de BOFFA, car il y a toujours des choses à préciser et des actions à mettre en place. Cela permet aussi de rencontrer les autorités : préfet, maire et député, et autres responsables. 

  • Lundi 7 septembre  :  Notre nouveau responsable est arrivé du Sénégal, de même que plusieurs confrères. La journée passe vite, car nous avons beaucoup à nous dire. Et à 16 heures, nous partons pour le noviciat de BOFFA, à 150 km. D’abord, nous ratons le rendez-vous avec les parents d’un des novices, originaire de MONGO, où j’ai travaillé 10 ans dans les camps de réfugiés, qui doit faire sa profession (engagement religieux) demain. Ils ne connaissent pas la ville et nous n’arrivons pas à les trouver.
    A 15 km de Boffa, à un barrage de gendarmerie, nous n’arrivons pas à redémarrer. C’est une vieille voiture et la distance était trop longue pour elle. Elle a chauffé. Il faut attendre qu’elle se refroidisse et remettre de l’eau dans le radiateur. Mais, à ce moment-là, nous nous apercevons que le radiateur fuit. Il ne reste plus qu’à nous faire remorquer. 

  • Dimanche 6 septembre  :  Messe à LAMBANYI.
    Aujourd’hui, nous accueillons deux prêtres du diocèse de Nzerekore qui partagent notre prière. Il y a très peu de monde, car il pleut très fort. Mais les anglophones sont venus aussi nombreux que d’habitude. Je donne l’eucharistie aux délégués choisis par leurs communautés pour aller la porter aux malades. Après la messe, différents contacts : il y a toujours des choses à régler ! 

  • Samedi 5 septembre  :  Journée en communauté pour accueillir les confrères et les stagiaires qui viennent des différents postes de la Guinée pour assister à l’engagement de nos six jeunes novices, mardi prochain. Mais je dois m’échapper pour voir avec CRS la préparation des prochaines élections législatives. 

  • Vendredi 4 septembre  :  Je m’occupe à nouveau de notre  étranger  car il n’a pas été reçu à l’ambassade hier. Je lui écris aussi quelques lettres, en particulier au sujet de son hypothétique parfumerie. Il aurait aussi été contacté par des trafiquants de drogues originaires de Hollande. Comme souvent, la situation est très difficile, mais en plus elle n’est pas claire du tout !
    Ensuite, je commence à travailler les documents et comptes rendus des Centres aérés.
    A 17 heures, rencontre de formation de la 4ème Commission de quartier de LAMBANYI, suivie de la Messe et Communion aux différents malades. 

  • Mardi 1er septembre  :  L’atelier de soudure  Savoir Fer  : Rencontre avec les formateurs de cet atelier (enfants de la rue) pour préparer la rentrée et organiser toute l’année scolaire. Pour cela, nous reprenons le rapport de fin d’année des deux formateurs, avec leurs suggestions. Ils font bien leur travail, mais ne peuvent pas tout faire ! Avec eux, nous allons intensifier la formation, les préparations des cours, etc.. Et nous allons chercher un éducateur de plus pour suivre les jeunes dans leurs familles et leurs quartiers, soutenir ceux qui ont commencé à travailler.
    Ensuite, je passe à l’Imprimerie pour préparer le calendrier liturgique de l’année prochaine.
    Un cas difficile : Je reçois un coup de téléphone de l’Ambassade de France, me demandant d’accueillir et de prendre en charge un Français. Cela nous arrive souvent d’être appelés pour des  cas difficiles . En effet, un certain nombre de Français viennent tenter leur chance en Guinée. Certains sont des aventuriers, d’autres vont chercher à travailler vraiment, sans aucune préparation ni moyens au départ. Or les conditions sont très difficiles en Guinée pour les étrangers, tout comme en France d’ailleurs, même si c’est dans d’autres circonstances. La personne d’aujourd’hui a essayé de relancer une parfumerie dans les montagnes du Fouta Djallon, où il y a beaucoup de fleurs très parfumées. Une parfumerie existait il y a 10 ans. Elle ne fonctionne plus, mais les fleurs sont toujours là ! Cette personne a été arrêtée par des  coupeurs de route  qui l’ont entièrement dépouillée. Elle n’a donc plus rien. Nous lui trouvons des habits. Ensuite, il faut régler sa situation. Ce matin, je le ramène donc à l’Ambassade de France. Après toutes mes démarches pour différents visas, ils me connaissent, mais je ne voudrais pas qu’ils se déchargent sur nous de leurs responsabilités auprès des Français. En effet, les cas de ce genre sont fréquents.
    Je me retrouve ensuite au secrétariat général de la lutte contre le SIDA. J’ai un premier contact avec le directeur des programmes qui, vu notre expérience passée, nous demande de faire de nouvelles propositions. En effet, nous avions une activité de prévention auprès des jeunes ; et une autre d’appui auprès des malades du SIDA. Mais nous avons dû arrêter faute de moyens. Nous allons donc essayer de relancer les activités. Ensuite, avec un imam nous posons les premiers jalons pour une éducation religieuse par rapport au SIDA.
    Je passe ensuite au cyber, mais au bout d’une heure j’abandonne. Je ne peux ni enregistrer mon courrier, ni ouvrir ma boîte mail. Le serveur est saturé.
    Je m’arrête donc à l’atelier de soudure, saluer les apprentis. Ils sont tous revenus. Ce qui est très encourageant pour nous. Trois d’entre eux ont fini leur formation. Nous allons essayer de leur trouver une bonne place, mais nous leur demandons de chercher de leur côté. Nous les préparons en leur apprenant à se présenter et à s’exprimer clairement en français, ce qui n’est pas facile pour eux.
    A 15 heures, réunion de la Commission de  Pastorale sociale  sur les problèmes du monde rural et le soutien des paysans, dans le prolongement de ma session à BAMAKO. Nous avons demandé un rendez-vous au Ministère de l’Agriculture.
    Puis, une responsable du Mouvement des enfants (CV-AV) de BOFFA vient me voir pour l’inscription de 13 enfants à la colonie de vacances. Elle est suivie d’une animatrice qui m’apporte l’évaluation du Centre aéré de SIMBAYA. Cela va me faire de la lecture, et du travail.
    Après un passage à la Procure et au secrétariat de l’Archevêché, il est temps de rentrer…. Et de se battre pour trouver une place dans un taxi collectif. Ils sont trop rares et les clients trop nombreux. Je me rabats sur un minibus surchargé, où je voyage debout. Il n’est pas nécessaire de s’accrocher, nous sommes tellement serrés que nous nous tenons les uns les autres. 

  • Lundi 31 août :  Réunion de communauté.
    Le matin, nous tenons notre rencontre mensuelle de communauté pour évaluer le mois passé. C’est une réunion très importante pour nous, non seulement pour faire le point de nos activités, mais pour mieux nous connaître, partager nos joies et nos soucis, et former peu à peu notre communauté. D’autant plus que Emmanuel, notre nouveau stagiaire nigérian, vient d’arriver. Il faut donc revoir ensemble notre vie commune.
    Pour le travail pastoral, j’assure un remplacement à LAMBANYI. Je ne connais donc pas bien la paroisse. J’essaye d’y apporter le maximum de formation et d’ouverture. Mais il faut tenir compte de l’histoire de la paroisse. Et aussi de la mentalité et de la sensibilité des personnes. Les conseils du Frère Yvon, qui est là depuis longtemps, me sont très précieux. De même que son soutien fraternel.
    Ensuite, nous allons à l’aéroport accompagner Henri Jo, un frère guinéen qui repart travailler comme enseignant au nord du Sénégal.
    Le soir, rencontre avec un jeune couple qui se prépare au mariage. Le mari, médecin militaire, responsable au niveau national de la lutte contre le SIDA, est encore catéchumène. Notre première rencontre est très sympathique. Je commence par lui parler, pour dégeler la glace, du temps où j’étais militaire, engagé dans l’infanterie de marine (la  coloniale ), ayant fait escale en 1963 à Conakry, en route pour le Congo. 

  • Dimanche 30 Août :  Dans la paroisse de LAMBANYI avec les activités habituelles. Messe en anglais, suivie de la réunion de la communauté anglophone. Puis la grand’messe en français-soussou, au cours de laquelle je donne encore une place spéciale aux enfants : dimanche dernier, ils avaient porté la paix aux adultes ; et, comme nous avions réfléchi au mariage, les hommes sont allés serrer la main de leur femme au moment de l’offertoire. Aujourd’hui, les responsables de communautés se lavent les mains avec moi au moment de la prière pénitentielle ; et, pour la prière du Credo, les enfants viennent en procession poser les main sur la Croix pour montrer leur foi et leur engagement. A la fin de la messe, je remets la communion à la personne choisie dans chaque communauté pour les malades, en demandant aux autres chrétiens de les accompagner pour une prière communautaire dans les maisons.
    Le moment des annonces est important le dimanche. Dimanche dernier, ce sont les enfants qui nous ont fait le compte rendu de leur formation dans le mouvement des enfants (CV-AV). Le dimanche précédent, les scouts nous avaient parlé de leur camp. Aujourd’hui, c’est le compte rendu des Centres aérés,Dimanche prochain, ce sera le compte rendu de la session biblique des jeunes
    Après la messe, chaque groupe et mouvement se retrouvent comme d’habitude. Pour moi, je rencontre les responsables de  Justice et Paix  et de  Pastorale sociale  pour voir où ils en sont dans les deux enquêtes dans les quartiers que nous avons demandées : l’une sur les situations de pauvreté et les possibilités de petits projets de développement ; l’autre pour repérer les gens qui sont exploités ou humiliés et qu’il faudrait défendre. Il faut poursuivre les enquêtes. 

  • Samedi 29 Août :  Clôture du Centre aéré de Simbaya.

  • Vendredi 28 Août :  Nous accueillons les novices dans notre communauté. Ils viennent préparer leur engagement dans la vie religieuse, le 8 Septembre prochain.
    Puis je vais à la clôture du Centre aéré de Nongo. Malheureusement, la fête est perturbée par de fortes pluies. Nous invitons les enfants à partager ce qu’ils ont appris et à continuer par eux-mêmes ce qu’ils ont fait au Centre. Au retour, je prépare mon courrier et classe un certain nombre de documents.

  • Jeudi 27 Août :  Je vais visiter le 4ème Centre aéré à Nongo. Nous avons d’abord une rencontre avec les enfants. Ici, ils sont plus âgés. La réflexion est plus approfondie. Ils ont apprécié spécialement les jeux ou les droits de l’homme et de l’enfant. Ensuite, nous nous retrouvons avec les éducateurs pour préparer la rencontre avec les parents demain, l’évaluation du Centre aéré et la suite du travail l’année prochaine.
    Après cela, avec le père Xec, salésien espagnol, nous travaillons sur les comptes de l’atelier  Savoir Fer  et préparons la réunion avec les formateurs, ainsi que l’ouverture et le travail de l’année prochaine.

  • Mercredi 26 Août :  Retour en ville.
    Je quitte Coyah tôt pour aller visiter le Centre aéré de Simbaya. Je suis accompagné d’Emmanuel, notre stagiaire. Il a participé à la session biblique depuis le début. Il vient avec moi pour découvrir les centres aérés.
    A l’entrée de Conakry, du kilomètre 36 (Conakry est une longue presqu’ïle, ce qui ne favorise pas la circulation) nous sommes arrêtés par un gros embouteillage (c’est fréquent !). Et comme à chaque fois, contrôle des pièces d’identité par les policiers, contrôle de la voiture par la gendarmerie, contrôle des bagages par les douaniers et contrôle des personnes par les militaires. C’est vrai qu’il y a de l’insécurité dans le pays et spécialement dans la ville de Conakry. Mais c’est surtout le moyen pour ces quatre groupes de taxer chauffeur et passagers et de se faire de l’argent pour compléter leur salaire. Certes, il est insuffisant pour vivre, mais c’est malheureusement le cas de la majorité des Guinéens. Et cela ne justifie pas ce racket organisé sur des gens encore plus pauvres et qui n’ont même pas de salaire.
    Visite du 3ème Centre aéré.
    Il y a un peu plus de problèmes dans ce Centre. En effet, il n’était pas prévu à l’origine. La paroisse ne s’est pas impliquée, ni la commission de pastorale sociale, ni le conseil paroissial. Les jeunes éducateurs se sont débrouillés par eux-mêmes, mais ils ont eu de la peine à trouver une école disponible. Ils se sont adressés surtout aux chrétiens, sans contacter ni impliquer les chefs de quartier, ni les imams. Des parents ont voulu se  débarrasser  de leurs jeunes enfants. Résultat : les éducateurs sont débordés. Les activités prévues pour des enfants et jeunes de 7 à 15 ans ne sont pas adaptées, ni les moyens pédagogiques. Les parents ont imposé leur vision utilitaire : des cours de vacances gratuits, au détriment de toute la dimension éducative que nous voulions donner et qu’ils n’ont sans doute pas compris. Je remercie bien sûr les éducateurs pour tous les efforts qu’ils ont fournis et je les encourage ; d’autant plus qu’ils ont accepté de travailler bénévolement, ce qui n’est pas évident. Mais dans un deuxième temps, nous examinons les différents problèmes et nous essayons de voir ce qu’il faut faire et de redresser la barre. Nous tirons aussi les première conclusions pour la suite : comment continuer ce Centre aéré tout au long de l’année, avec des temps forts à Noël et à Pâques ? Comment améliorer la formation donnée aux éducateurs ? Comment mieux faire comprendre nos objectifs aux parents ? Comment mieux les impliquer, de même que la commission de pastorale sociale, les autorités du quartier, les responsables religieux chrétiens et musulmans ?
    Cette première réflexion sera continuée par différentes évaluations. D’abord avec les enfants, ensuite les éducateurs (par centre aéré), puis tous les éducateurs ensemble avec l’équipe d’animation, durant tout un week-end. C’est nécessaire si nous voulons améliorer notre travail pour la suite.
    Je remonte rapidement à l’Archevêché où on me demande d’urgence pour différents problèmes. Je termine juste à temps pour sauter dans un minibus, passer à la paroisse avec le responsable de l’atelier  Savoir Fer  pour étudier la fabrication de deux portails coulissants et rejoindre la CCB pour une réunion de formation, comme celle de vendredi dernier,
    Aujourd’hui encore, les participants me disent apprendre des choses nouvelles et découvrir des nouvelles dimensions à la CCB, en particulier pour ce qui concerne les actions pour la justice, la paix et la réconciliation, l’aide aux pauvres et le développement. Il faudra sans doute encore du temps pour arriver à des réalisations concrètes.

  • Mardi 25 Août :  Deuxième session biblique.
    Je vais rejoindre la session biblique des jeunes à 50 km de Conakry, à Coyah, qui se déroule dans les locaux du grand séminaire qui vient de s’ouvrir cette année, dans la communauté de St Jean. Je reprends mon intervention de Kamsar (lien avec Nouvelles du vendredi 7 Août). En route vers la gare routière, je suis  attrapé  par un gros orage : nous sommes en pleine saison des pluies et à Conakry il pleut beaucoup. Heureusement, il ne fait pas froid et se faire tremper, ça rafraîchit ! Arrivé à la gare routière, je m’abrite sous un hangar où je suis très bien accueilli. Il y a déjà beaucoup de monde, mais on me fait de la place. On me fait même asseoir sur une caisse. Cela va durer plus de deux heures. Nous engageons une conversation très amicale : les gens avec les éléments de français qu’ils possèdent ; moi, en poulaar (la langue des peuhls) et en soussou (la langue de Conakry) avec le peu que je possède. Il n’y a ni sissiens, ni bagas (les deux langues de Guinée que je parle) dans le groupe. Nous parlons même en ouolof avec des personnes qui ont travaillé au Sénégal et en anglais avec des Sierra Léonais et un Libérien, avec beaucoup de gestes et de rires nous arrivons à nous comprendre !
    Avec les jeunes de la session, nous faisons le point sur les actions menées depuis les deux forums de Pâques. Puis ils travaillent en carrefours sur les trois questions :
    1) comment travailler avec les musulmans (la majorité de la population : 90 %)
    2) comment nous engager dans la société, en lien avec tout ce qui se passe actuellement dans le pays ?
    3) que faire pour la justice, la paix et la réconciliation, en rapport avec le 2ème Synode pour l’Afrique ?
    Nous n’avons pas le temps de travailler les réponses, mais je les conserve précieusement. Nous les retravaillerons plus tard : cela nous fait une bonne base de départ pour l’année prochaine. Je préfère leur expliquer notre plan de travail (un thème d’action par mois) pour l’année qui vient. Les jeunes commencent à être fatigués (c’est la 2ème semaine de formation) et cette rencontre a lieu l’après-midi à la place du sport et du théâtre ; malgré tout, ils s’y mettent bien et nous sommes satisfaits du travail accompli.
    Ce voyage me permet d’échanger aussi, au moment des repas, avec l’équipe des formateurs (prêtres, sœurs et laïcs) et avec les deux communautés des Frères et Sœurs de St Jean. L’année dernière dans leur école primaire les sœurs ont fait un excellent travail d’éducation des élèves à la paix et à la réconciliation. Elles me demandent nos deux jeux d’éducation aux droits de l’homme et de l’enfant pour la prochaine année scolaire.
    La nuit, rencontre avec les animateurs pour évaluer le travail de la journée.

  • Lundi 24 Août :  Reprise des activités habituelles à l’archevêché : réunions, contacts, visites. Nouvelle longue réunion à écouter d’autres membres des deux familles sur notre problème de mariage. Ensuite, un dossier pour une demande de voiture pour la paroisse de Dalaba. Nos routes sont très mauvaises et malgré la débrouillardise des mécaniciens locaux, et notre volonté de les faire durer au maximum, il y a souvent des problèmes. Et encore plus pour en avoir une neuve !
    La nuit, je prépare mon intervention de demain.

  • Dimanche 23 Août :  Messe à la paroisse de Lambayi animée comme d’habitude. Nous sommes partis de la lettre de Paul sur le mariage. Dès le début du partage, des jeunes nous posent des questions très pertinentes. La réflexion dure assez longtemps, mais c’est à la grande satisfaction de tous. Après la messe, nous nous retrouvons avec les femmes pour voir leur engagement dans la communauté et dans le quartier.
    Réunion avec les femmes. Elles sont pour la plupart très dévouées. Pour les fêtes, elles prennent en charge la nourriture et le service. Elles cotisent pour la paroisse régulièrement. Elles se visitent et se soutiennent en cas de maladie et de décès. Je les encourage à continuer. Mais nous cherchons comment aller plus loin. En effet, elles sont très centrées sur les activités paroissiales liturgiques. Nous réfléchissons à ce qu’elles s’engagent davantage dans les quartiers et qu’elles s’organisent pour cela ; qu’elles aient le souci de la promotion et de la formation de leurs sœurs ; et de la défense des femmes rabaissées ou exploitées ; et également qu’elles aient le souci de travailler avec toutes les femmes et en particulier les associations de femmes musulmanes. Elles me disent avoir beaucoup apprécié la réflexion qui leur a ouvert les yeux et présenté de nouvelles pistes. Reste maintenant à passer à la pratique.
    L’après-midi est calme. Pas d’activités de prévues. J’en profite pour travailler plusieurs dossiers délicats.

  • Samedi 22 Août : SOS Mineurs – Les enfants de la rue.
    Ce matin, réunion avec tous les éducateurs des enfants de la rue et de la prison = SOS mineurs. Nous avons beaucoup de questions à aborder. Le Foyer des enfants est bien tenu. Mais que deviennent les enfants retournés dans leur famille ? S’ils quittent à nouveau leur famille et se retrouvent dans la rue au bout de quelques mois, ce n’est pas la peine ! Quelles autres possibilités valables leur offrir ? Nous formons les enfants à la soudure et la menuiserie. Les filles à la couture et la broderie. Est-ce suffisant pour qu’ils puissent gagner leur vie ou au moins entrer en apprentissage quand ils quittent le Foyer ? Quel suivi leur apporter ? Et quel soutien apporter aux enfants travailleurs dans les quartiers ? Il faudrait développer cet aspect également ou sinon travailler en collaboration avec d’autres associations davantage engagées dans ce domaine. Nous nous attardons sur cette question de la collaboration qui n’est pas facile. Car souvent, c’est plutôt la compétition et la concurrence. J’invite les éducateurs à ne pas se décourager et à persévérer dans ce sens, malgré les difficultés, car cela me semble essentiel.
    Nous abordons ensuite la question de l’accueil au Foyer des enfants condamnés pour qu’ils y terminent leur temps au lieu de rester en prison. Cette question est très délicate car ils risquent de voler ou d’être violents avec les autres enfants du Foyer plus jeunes, ou envers les filles. Ils risquent aussi de s’évader.
    Autre point : le soutien espéré du CCFD (Comité contre la Faim et pour le Développement) avec des points litigieux. L’installation solaire pour avoir l’énergie nécessaire aux travaux (ordinateurs) et aux loisirs des enfants (télévision) mais qui coûte cher. Le financement d’un jardin potager et d’un petit élevage pour gagner des fonds nécessaires au fonctionnement de l’association. Le lancement d’activités génératrices de revenus (AGR) pour permettre aux jeunes de s’établir et de démarrer dans la vie. Nous abordons alors la question de la vie d’équipe qui est aussi essentielle, aussi bien pour le soutien des éducateurs que pour le bien des enfants. Dans la même ligne, nous abordons la question de la formation continue et je leur donne quelques documents de même que les coordonnées d’associations en lien avec des enfants travailleurs, pour voir comment travailler avec eux.
    Pour terminer, nous examinons les cas plus difficiles de certains enfants. Et nous abordons la question du quartier des mineurs de la prison centrale. En effet, nous y avions construit des salles d’alphabétisation et des ateliers de formation (soudure, menuiserie). Mais à la suite de mesures frauduleuses, une autre ONG a récupéré les bâtiments avec le soutien du régisseur. Cela nous bloque énormément dans notre travail auprès des enfants. Nous cherchons comment rétablir la situation dans les meilleures conditions possibles, dans le dialogue et l’entente. Pour terminer, nous voyons les modalités de la participation de SOS Mineurs à la Commission de Pastorale sociale chaque mois.
    Après la réunion avec SOS Mineurs, je me prépare à aller à la morgue de l’hôpital Ignace Deen pour la levée du corps d’un jeune sénégalais, venu en Guinée pour lancer une entreprise. Il a été assassiné et volé. Nous attendions les parents qui sont finalement arrivés du Sénégal hier vendredi. Mais au moment de partir pour l’hôpital, je reçois un coup de téléphone m’informant que le procureur n’a pas donné le permis d’inhumer. Il doit y avoir d’abord enquête et autopsie, puisque c’est un cas d’assassinat. Il faut dire que l’insécurité est grande en ce moment, surtout vis-à-vis des étrangers.
    Le soir, je passe un long temps à regarder une nouvelle intervention du Président DADIS CAMARA à la télévision. C’est nécessaire pour notre travail de Justice et Paix. Ainsi, j’ai suivi sa rencontre avec les  forces vives de la nation  constituées par les syndicats, les partis politiques et les organisations de la société civile, en présence du corps diplomatique où il a accepté le report des élections présidentielles jusqu’en janvier 2010, alors qu’elles devaient avoir lieu avant fin 2009. Puis j’ai suivi la rencontre du président avec la presse, où il a laissé entendre qu’il pourrait se présenter aux élections présidentielles. Ce soir, c’est la retransmission de sa rencontre avec les femmes, venues le soutenir dans sa démarche. Alors que les forces vives s’y opposent absolument. La situation est donc très indécise en ce moment.

  • Vendredi 21 Août :  Une communauté chrétienne de quartier.
    Nous reprenons notre problème de mariage d’avant-hier. Cela nous tient jusqu’à 16 heures. Je suis obligé d’annuler le conseil d’administration de Savoir Fer, et aussi la visite du 3ème de nos Centres aérés, ce que je regrette beaucoup. Mais il y a des priorités. J’ai juste le temps d’aller à YATAYA, un quartier de Conakry, pour rencontrer la première des cinq communautés de base de la paroisse de LAMBANYI dont j’ai la responsabilité pendant les vacances. J’y tiens beaucoup car pour moi il est très important d’expliquer ce qu’est réellement une communauté de quartier, (lien avec la rubrique  Activités paroissiales  page …..) et de mettre en place ces communautés pour qu’elles puissent commencer à travailler à la rentrée d’octobre : créer un esprit de famille et de bonnes relations dans le quartier, partager la Parole de Dieu, organiser la catéchèse, lutter contre les injustices, aider les pauvres, développer le quartier, réconcilier les gens…. Et travailler pour gagner les moyens financiers d’assurer tout cela. Et d’abord former les responsables pour que chacun connaisse bien son travail.
    La rencontre se passe bien, même si les gens arrivent les uns après les autres… comme d’habitude ! Ils sont intéressés et posent beaucoup de questions, car un certain nombre de choses leur paraissent nouvelles. Après la messe, je fais le tour du quartier, très étendu, pour donner la communion à sept malades. La plupart des personnes présentes à la messe m’accompagnent à pied, ce que j’apprécie beaucoup. Je les remercie et je leur demande de venir prier régulièrement chez ces malades. Nous rentrons tard, mais heureux.

  • Jeudi 20 Août :  Visite du Centre aéré de KOUNTIYAH
    Aujourd’hui, je trouve enfin le temps d’aller visiter un 2ème Centre aéré. Malgré la pluie, éducateurs et enfants sont venus. Malgré le manque de moyens, ils se sont mis très sérieusement au travail, avec beaucoup de courage. Je prends d’abord le temps de visiter chacun des trois groupes. Je salue les enfants et je les écoute. Ils ont toujours des choses originales à dire. Je les interroge sur ce qu’ils ont appris, mais surtout ce qu’ils vivent ensemble. Ensuite, nous nous retrouvons avec les éducateurs pour faire le point et améliorer les activités. Ca marche bien, mais on peut toujours mieux faire. Les parents insistent surtout sur l’aspect scolaire. D’autant plus que nous avons privilégié les enfants de familles démunies qui ne pourraient pas payer de cours de vacances à leurs enfants. Mais je rappelle aux éducateurs l’importance de l’éducation à donner aux enfants, à partir des moyens pédagogiques qu’on leur a fournis : jeux éducatifs et sur les droits de l’enfant, chants, théâtre, etc.. et au climat d’écoute et communautaire à apporter : accueil, écoute, joie, danses…. Auprès des enfants, nous insistons sur l’importance de partager ce qu’ils vivent à la maison et dans leur quartier et à le reproduire. Nous voulons vraiment en faire des acteurs actifs et responsables et des animateurs des droits de l’enfant. Les enfants comprennent bien cela.
    Il nous reste à préparer ensuite la dernière semaine, la clôture où nous voulons inviter parents et autorités et donner la parole aux enfants avec les moyens de s’exprimer : chants, danses, théâtre, jeux, tout en présentant aux adultes ce qui a été vécu. Nous posons aussi les jalons de l’évolution du Centre et de l’évaluation générale avec les différents éducateurs.
    Cette rencontre m’a vraiment regonflé et encouragé, car nous avons dû travailler avec très peu de moyens et je ne savais vraiment pas si ça allait marcher. Les éducateurs en particulier, étudiants pour la plupart, ont accepté de travailler bénévolement, ce qui est très appréciable vu l’état de pauvreté générale, car le temps des vacances est celui où ils cherchent de l’argent pour financer leurs études.
    Les élections présidentielles.
    L’après-midi, nous nous retrouvons avec tout un groupe pour réfléchir à la conférence de presse d’hier soir du président de la république. Ce qu’il a dit n’est pas facile à décrypter. Et pourtant il a abordé un nombre de choses importantes. Les questions habituelles : les futures élections, la lutte contre la corruption et l’ethnocentrisme, l’engagement pour le développement du pays et le patriotisme, le problème des sociétés minières, l’insécurité…., mais aussi des points nouveaux comme l’audit des différents gouvernements qui se sont succédés depuis l’indépendance, pour juger les responsables de corruption et de détournements. Ce n’est pas une mince affaire ! Ensuite, il demande à tous les journalistes présents s’ils sont d’accord pour qu’on démarre une enquête sérieuse, promise depuis longtemps, mais jamais réalisée, sur les tueries de 2006 et 2007, en particulier quand les militaires ont tiré sur la foule qui marchait pacifiquement vers le centre ville et ont fait plus de 180 morts. Ces deux dernières choses sont très importantes, mais sont-elles réalisables en si peu de temps, avant que le président (et les militaires) ne laissent le pouvoir au plus tard en février 2010 ? Nous nous demandons si ce ne sont pas des manœuvres qui cachent des desseins inavoués.
    La nuit, je prépare ma prochaine circulaire aux amis

  • Mercredi 19 Août :  Il y a un gros problème de mariage qui a été jusqu’aux coups et à la gendarmerie. Cela fait un gros palabre qui prend toute la journée. Et il faudra encore suivre les affaires.
    Messe anniversaire. A 17 heures, messe anniversaire de l’ancien jeune chef de la chorale, Bernard, décédé l’an dernier. C’était un jeune très engagé. Il y a donc beaucoup de monde. Nous commençons par le rite de la lumière, signe de la résurrection. Dans le partage d’Evangile (Matthieu 26, 30-45) nous relevons l’importance de commencer dès aujourd’hui une vie éternelle à travers nos engagements pour construire une terre nouvelle et de lutter contre toutes les forces de mort qui sont en nous et autour de nous et qui tuent la société. La prière d’intentions qui suit est très émouvante, surtout celle de la mère de Bernard. Ensuite, les membres de la famille viennent poser les mains sur la Croix, pour montrer qu’ils veulent vivre ce temps de deuil et de tristesse dans la foi et l’espérance. Puis suivent des témoignages. A la fin de la célébration, les participants viennent faire le signe de la croix avec l’eau bénite, en souvenir de notre baptême qui nous a déjà fait ressusciter à une vie éternelle. A la fin de la messe, distribution d’offrandes aux participants (le  sacrifice ). Puis nous prolongeons la soirée dans la maison de Bernard, autour de la famille. Hier soir, nous y avions déjà tenu une veillée de prières.

  • Mardi 18 Août :  Une journée bien remplie.
    Je monte tôt à l’Archevêché car après 10 jours d’absence beaucoup de choses m’attendent. D’abord je vais au P.A.M. (Projet Alimentaire Mondial de l’ONU) où j’avais demandé de la nourriture pour les Centres aérés. On me répond que ce n’est pas possible car ce n’est pas un projet gouvernemental. Même réponse à l’UNICEF pour le financement (simple reproduction) de nos jeux sur les droits de l’enfant. Sans doute aussi que les montants ne sont pas assez importants ! Je retourne rendre mon passeport à l’ambassade de France, où on me dit que ce n’est pas nécessaire et qu’on aurait dû me le remettre directement le mois dernier ! (voir le  feuilleton  dans les nouvelles passées !). Au cyber, je n’arrive pas à enregistrer mes messages (serveur saturé, courant trop faible). Je me rabats sur Yahoo, mais c’est très lent et ça bloque sans arrêt. Il faut tout reprendre à zéro. Je me contente de lire les mails essentiels. Avec la Commission de la jeunesse, nous évaluons la session biblique de KAMSAR, préparons celle de COYAH qui commence jeudi et commençons à poser les jalons pour l’année prochaine. Avec l’archevêque, nous examinons un certain nombre de questions. Le projet hydraulique pour creuser des puits ou des forages dans les villages qui n’ont pas d’eau. Nous élaborons le projet de calendrier diocésain pour 2010, avec photos et textes. Nous pensons y aborder les thèmes de la doctrine sociale de l’Eglise en lien avec les événements du pays et les prochaines élections, celui de la jeunesse à partir de nos deux forums, et celui du 2ème synode pour l’Afrique. Il va nous falloir choisir et préciser les choses. (Liens avec  Justice et Paix  et  Pastorale sociale ). Il nous faut aussi relancer la pastorale de l’enfant pour le suivi et le soutien des femmes enceintes et des bébés. Nous préparons aussi le prochain synode à partir des documents que nous avons reçus et travaillés. Nous commençons à étudier les comptes rendus d’activités de l’année pastorale passée des différentes paroisses, pour en dégager les questions de fonds et les lacunes, afin de décider des formations à mettre en place pour l’année prochaine.
    Nous pensons aussi au Ramadan que les musulmans vont commencer. Nous sommes évidemment concernés par ce temps de jeûne et de prière.
    L’après-midi, nous nous retrouvons pour étudier la participation de notre Commission  Justice et Paix  à la préparation des élections et à la formation d’observateurs indépendants et commencer à choisir des personnes volontaires engagées et compétentes pour ce travail.

  • Lundi 17 Août :  Les Centres aérés.
    Après l’Eucharistie célébrée ensemble comme chaque matin, précédée de l’Office des Laudes, je pars rapidement pour la ville voisine de DUBREKA pour visiter le 1er des quatre centres aérés que nous avons lancés cette année. Nous avions formé les éducateurs en Juin et Juillet. Les Centres aérés ont démarré début Août, pendant que j’étais à Kamsar à la session biblique, puis en Côte d’Ivoire. Je suis donc pressé de les visiter. Nous avions prévu 50 enfants, mais ils sont maintenant plus de 150 ! Preuve à la fois que ça marche bien et que cette expérience correspond à un besoin réel. De plus, cela a permis des contacts très intéressants avec les autorités civiles, les responsables religieux musulmans et les parents. En effet, la plupart des enfants sont musulmans.
    La matinée est occupée par l’alphabétisation ou des cours de vacances, par niveau. De midi à 14 heures, jeux éducatifs sur les droits de l’homme et les droits des enfants. Ces jeux intéressent beaucoup les enfants. Et nous insistons pour que le soir ils partagent en famille ou avec leurs camarades ce qu’ils ont vécu le matin. Ceci a été possible grâce au soutien de Michel, un ancien volontaire ayant longtemps travaillé en Guinée. Grand merci à lui. Nous cherchons un soutien pour l’année prochaine, d’autant plus que nous voudrions élargir cette expérience à d’autres villes et quartiers.
    A 14 heures, les enfants rentrent à la maison. Nous aurions voulu leur fournir un repas le midi, mais nous n’en avons pas les moyens.
    Je passe d’abord dans les différents groupes pour écouter ce que les enfants ont à nous dire. Ensuite, je leur demande comment ils mettent en pratique ce qu’ils ont appris. Et nous parlons de leur vie communautaire et des actions en équipe.
    A 14 heures, nous nous retrouvons avec les éducateurs pour faire le point, réorienter les choses et améliorer l’éducation donnée. Je leur laisse mes observations par écrit. Ensuite, nous préparons la fête du dernier jour, où nous voulons partager avec les parents, les autorités et les autres adultes ce que les enfants ont vécu. Nous cherchons aussi comment aider les enfants à continuer à vivre tout cela pendant la fin des vacances et aussi pendant l’année prochaine. Les enfants ont déjà repéré des enfants vraiment nécessiteux dont il faudra soutenir les familles. Et aussi des enfants à problèmes ou ayant une vie difficile qu’il faudra continuer à suivre. C’est d’ailleurs l’un des buts de ces Centres aérés.
    Je rentre à la communauté tout heureux.

  • Dimanche 16 Août :  (suite)
    Après la Messe, nous nous retrouvons avec les responsables de CCB. Nous faisons le programme des eucharisties dans les quartiers. Nous leur distribuons ensuite le rapport d’activités de l’année passée de la paroisse et, à partir de là, nous traçons déjà quelques orientations pour l’année prochaine. Puis, après qu’ils aient donné leurs réactions à la présentation des CCB à la fin de la messe, nous préparons le programme d’activités pour les deux mois qui viennent.
    Ensuite, nous rentrons à la maison et nous retrouvons Kenedy, responsable du noviciat de Boffa. Il est venu avec Célestin, originaire de Mongo, où j’ai travaillé 10 ans. Il doit faire ses vaccinations et demander un visa pour le Cameroun où il va continuer ses études de théologie.
    Et enfin, un peu de repos après cette nuit écoutée.

  • Dimanche 16 Août 2009 : Je ne suis vraiment pas en forme pour présider les deux Eucharisties, mais il faut le faire. Le matin, je croise à la maison Armand qui rentre au Cameroun pour prendre en charge le Noviciat. A la paroisse, le vice-président du Conseil paroissial m’accueille en me souhaitant ma fête. Ca fait plaisir !
    A l’homélie, nous réfléchissons ensemble à la messe comme sacrifice. C’est important. En effet, on continue à faire des sacrifices dans les circonstances importantes de la vie : les sacrifices traditionnels aux ancêtres, mais aussi le sacrifice du mouton chez les musulmans. Et ces sacrifices sont souvent accompagnés de malédictions ou d’accusation de sorcellerie. Il est donc important de réfléchir à tout cela.
    Pour préparer la rentrée pastorale, chaque dimanche nous tenons une rencontre avec un groupe différent. Dimanche dernier, c’étaient les jeunes. Aujourd’hui, ce sont les responsables des CCB, communautés de quartiers. A la fin de la messe, j’explique à nouveau à tous le rôle d’une CCB, car je veux que tout le monde comprenne bien ce qui est en jeu et s’engage, non seulement dans l’Eglise mais également dans la société, concrètement pour l’avancée du quartier.

  • Samedi 15 Août : Retour en Guinée.
    La session s’est terminée par une célébration avec la présence très active d’un groupe de jeunes filles participant à un camp sur les vocations.
    L’après-midi, je suis accueilli chez les Sœurs où je peux me reposer avant qu’elles me conduisent à l’aéroport. Il y a trois jours, j’ai appris que l’avion est retardé de 3 heures, ce qui me fait arriver à Conakry à 2 heures du matin, heure où il n’y a plus de taxi. Pendant trois jours, je téléphone pour avoir des renseignements : le standard ne décroche pas. Il faut dire que c’est le 15 Août ! Par précaution, je pars tôt à l’aéroport, au cas où l’annonce du retard serait une fausse nouvelle. A l’aéroport, le vol n’est pas affiché. J’attends donc pendant 3 heures. Toujours rien. Je me renseigne, on me dit qu’il y a bien un départ, mais pas à l’heure indiquée et que l’enregistrement n’est pas commencé. Comme je me méfie, je retourne 10 minutes plus tard, et on me dit de me dépêcher car l’enregistrement est terminé ! Je me dépêche… au guichet on me dit qu’il n’y a pas de place, l’avion est plein, alors que j’ai un billet en règle et que j’ai confirmé mon retour il y a quatre jours. J’attends au guichet. Personne ne s’occupe de moi. Finalement, on me met en classe « Affaires ». Mais à la sortie, nouveau problème : ils n’ont pas été prévenus. Finalement, je monte dans l’avion et là on me remet dans la classe « Tourisme », car en fait il y avait de la place ! Finalement nous décollons ; même si c’est avec retard, c’est avec soulagement, car il y a quelques mois, dans l’autre sens, l’avion avait été supprimé sans que soyons prévenus et sans personne à l’aéroport pour nous informer.

  • Mardi 11 Août : Session sur la réconciliation.
    Je viens encore plus tôt qu’hier et heureusement, car j’ai juste le temps de me faire enregistrer : l’avion décolle une heure avant l’heure annoncée.
    A l’arrivée, comme je suis en avance, personne n’est là pour m’accueillir. J’attends donc et enfin Célestine et son frère viennent gentiment me prendre, car la session se passe en dehors de la ville, chez les Frères de Chaminade, dans un lieu très calme et propice au travail. La session est déjà commencée, mais je suis très bien accueilli et je n’ai donc aucun mal à m’intégrer au groupe. Je ne connais que Maria, l’animatrice ; mais c’est l’heure du repas, nous pouvons tout de suite faire connaissance.
    Nous sommes là, des personnes engagées et des formateurs expérimentés, de différents pays d’Afrique Noire, réunis par le M.I.R. (Mouvement International pour la Réconciliation) et la Congrégation des Sœurs de la Providence, pour composer un manuel africain de pédagogie pratique pour la réconciliation, s’adressant à des animateurs et responsables de groupes. Nous commençons donc par analyser nos expériences, à partir d’un certain nombre de réconciliations que nous avons vécues nous-mêmes ou organisées. Car nous voulons partir de notre vie et des réalités concrètes : problèmes de couples ou de communautés, vie en foyer de jeunes filles, problèmes entre adultes, réconciliations suite à la guerre civile et la rébellion et aux meurtres dans nos différents pays, tensions entre personnes de différentes nationalités, etc… Nous en tirons des conclusions pratiques pour l’élaboration de notre manuel. Après réflexion, nous organisons les différents éléments et les rassemblons en onze têtes de chapitres. Chaque participant rédige un chapitre, en relation avec les autres. Ces différentes réactions vont être rapidement envoyées pour correction et évaluation à chacun. Puis Maria, Thérèse et Nicole se chargeront de la rédaction finale. En cinq jours, nous avons abattu un travail énorme, et je pense de qualité, qui sera utile à beaucoup d’éducateurs et de responsables de groupes à la base.
    J’ai beaucoup aimé cette méthode qui part du concret et d’expériences vécues ; c’est la même méthode que nous avons utilisée lors de notre dernière rencontre « Justice et Paix » des religieux, à Bamako (voir les « Nouvelles » du 11 au 24 Juillet, et la page « Session de Bamako » dans la rubrique « Justice et Paix »).
    Ce que nous avons apprécié, c’est l’excellente ambiance qui régnait entre nous : religieux(ses) et laïcs, catholiques et protestants, jeunes et vieux (j’ai eu droit au titre de « NANA » « grand-père » en baoulé), entre Blancs et Noirs. Nous avons pu, non seulement échanger nos expériences mais partager notre vie en toute confiance pour nous soutenir et nous encourager en toute fraternité. J’ai reçu de vrai(e)s ami(e)s pour une amitié profonde et vraie qui va durer, puisque nous avons décidé de nous retrouver l’an prochain pour continuer à travailler ensemble.
    Pour couper nos séances de travail intense et animer nos veillées, nous avons regardé et ensuite discuté largement à partir de certains films : des dessins animés (la prophétie des grenouilles ; AZUR et ASNAR) et des documentaires (La marche des sans terre en Inde, la Commission Vérité et Réconciliation en Afrique du Sud), ce qui a largement contribué à notre formation continue.
    Tous ont particulièrement apprécié nos temps de prière très intense et nos eucharisties. Nous avons prié ensemble, catholiques et protestants, d’une façon très libre, avec de nombreux partages, gestes et symboles, en faisant le lien entre notre vie et la Parole de Dieu. Cela nous a marqués en profondeur. (J’en reparle dans ma Circulaire d’Août 2009)
    Maintenant, nous nous sentons pleins de courage, d’idées et de confiance pour notre travail futur, sans parler du manuel que nous avons composé. Nous avons décidé de ne pas prendre de droits d’auteurs, et de mettre ce travail à la disposition de tous. Dans un 1er temps, nous allons l’envoyer par mail à un maximum de personnes pour qu’elles puissent non seulement l’utiliser, mais aussi apporter leurs corrections et améliorations. Il sera disponible sur différents sites, dont le mien. Nous allons le présenter au moment du Synode, les 17-18 Octobre à Rome et dans nos différents pays. Ensuite, nous le publierons. C’est un gros travail, mais nous sommes suffisamment motiver pour le mener à bien.

  • Samedi 8 Août :  Messe les pieds dans l’eau, avec une pluie battante. Le bruit de la pluie sur les tôles est assourdissant. Je demande à un  crieur  de répéter plus fort ce que je dis, car il n’y a pas de micro. Et aussitôt après, retour sur Conakry toujours sous la pluie.
    En route, la courroie du ventilateur lâche. Heureusement, un motard nous croise. Il revient avec un mécanicien qui a réussi à trouver une autre courroie à Boffa, pas très distant. Le voyage se termine sans problème. Je vais directement à l’Archevêché, où j’ai laissé l’ordinateur à Bernard, pour préparer une lettre à envoyer dans toutes les paroisses de Guinée, pour la préparation des élections et pour demander les noms et les coordonnées des candidats aux rôles de formateurs, superviseurs ou observateurs des dites élections. Il faut que je fasse cela aujourd’hui avant de partir pour la Côte d’Ivoire, car le grand problème c’est la communication. La poste ne fonctionne pas. J’en profiterai également pour enregistrer mon courrier sur mon ordinateur et je le lirai de retour à la maison.
    J’espère trouver une occasion par des gens de passage qui rentrent en France pour y faire poster mon courrier écrit. En particulier une demande de soutien pour notre travail de Justice et Paix, et Pastorale sociale, à l’Organisation  Aide aux Eglises d’Afrique . 

  • Vendredi 7 Août :  Nous commençons par la prière et la messe. Pour cette session, il y a 4 niveaux (pour 4 années successives). Le matin : 1°) Initiation à la Bible. 2°) L’Ancien Testament. 3°) Le Nouveau Testament. 4°) La messe et les sacrements.
    L’après-midi : Sport et conférences débats sur des thèmes d’actualité intéressant les jeunes.
    Le soir : veillée culturelle, chants et danses.
    Mais la première journée est différente. Nous travaillons dans la ligne de la lettre de l’archevêque aux jeunes, de septembre 2008, qui leur proposait cinq points de réflexion : 1. L’engagement dans l’Eglise. 2. L’Evangélisation et le témoignage dans un monde musulman. 3. La justice, la paix et la réconciliation, pour la préparation du 2ème Synode pour l’Afrique. 4. Le comportement des jeunes face à la drogue, la violence, la sorcellerie, l’argent. 5. L’engagement dans la Société.
    Nous avons réfléchi à tous ces problèmes lors des deux forums des jeunes à Katacodi, pour le Bagataye, et à Conakry et avons dégagé des pistes d’actions. Aujourd’hui, il s’agit de préciser les choses et de préparer les actions de l’année prochaine.
    Dans un premier temps, les jeunes répondent aux deux questions : Qu’avons-nous retenu du forum ? Quelles actions avons-nous menées ? – Nous avons alors rappelé les décisions du forum et évalué les actions menées. Suite à cela, nous prenons un long temps de formation, jusqu’à 14 h 30, sur des questions de fond importantes pour mener des actions de qualité : la doctrine sociale de l’Eglise,
    L’après-midi, les jeunes repartent en carrefours pour travailler, à partir de la formation reçue, trois questions qu’ils avaient moins bien comprises et pour lesquelles les actions menées étaient insuffisantes : Quelles actions mener 1) pour l’Evangélisation ; 2) pour la justice et la paix (en lien avec le Synode) ; 3) pour faire avancer le pays (dans la situation actuelle, avec la préparation des élections…). La mise en commun des réponses permet de préciser les choses et d’élaborer un plan d’action.
    Il ne reste plus qu’à expliquer la méthode de travail pour l’année prochaine. Chaque mois, nous travaillerons un des cinq thèmes cités plus haut, l’un après l’autre, avec un dossier élaboré essentiellement à partir des réflexions des jeunes, au cours des différentes rencontres que nous avons eues. Et, à la fin de chaque mois, les responsables des jeunes des différentes paroisses nous enverront les résultats de leurs réflexions et la liste des actions menées.
    Le travail est tellement intéressant que nous continuons jusqu’à 19 heures. Il faut dire que cela touche directement la vie des jeunes et ils se sentent concernés à plein. Et que j’ai été très bien soutenu par Igbé, mon confrère de K ataco, très proche des jeunes, et par Charles, le responsable diocésain des jeunes, avec qui nous collaborons très bien. Il y a une grande complicité entre nous, et les jeunes l’ont bien sentie. 

  • Jeudi 6 Août :  La session biblique
    Il pleut comme ce n’est pas possible ! Nous quittons Conakry très tard et le voyage est plus long que d’habitude. Comme il est d’usage, j’ai apporté du travail avec moi. Je prépare le calendrier diocésain 2010, le calendrier liturgique et l’annuaire du diocèse, la session biblique avec les rapports de deux forums des jeunes et le document  Suggestions pour le 2ème Synode pour l’Afrique . Au retour, je travaillerai les rapports d’activités de différentes paroisses pour préparer la prochaine année pastorale. Et j’écrirai les nouvelles (que vous lisez maintenant !).
    A l’arrivée, il faut tout mettre en place. Les jeunes sont déjà là –une bonne centaine- car ils viennent des cinq paroisses de la région de Kataco, le Bagataï, dont je suis encore responsable pour le moment. Mais l’intendance n’a pas suivi, malgré toutes les organisations mises en place et les réunions de préparation que nous avons faites. A 22 h 30, nous nous débrouillons pour leur remettre un petit sandwich car beaucoup n’ont pas mangé depuis le matin. Mais cela ne les empêche pas de garder le sourire, dans la joie de retrouver des amis ! 

  • Mercredi 5 Août :  Préparation des Elections.
    Ce matin, première rencontre de lancement de la formation d’observateurs indépendants pour les prochaines élections, dont la responsabilité a été confiée au Secours Catholique Américain. J’y participe en tant que responsable de  Justice et Paix . Nous nous retrouvons à 17 représentants d’Organisations diverses, syndicats, presse, avocats, ONG diverses, Fédérations de Femmes et de Jeunes, et des représentants des religions traditionnelles, musulmanes et chrétiennes. L’ambiance est très bonne. Il fallait choisir 10 personnes pour le  ROSE national  (un joli nom… en espérant qu’il n’y aura pas trop d’épines ! = Réseau des Organisations de la Société civile pour les Elections). Sur les 17 représentants, le choix des 10 s’est fait sans problème, ni jalousie ou compétition inutile. La majorité d’entre eux sont des jeunes. Je fais exception, à cause de la place spéciale de  Justice et Paix . Et sur les 10, il y a 6 femmes ou jeunes filles, ce qui est exceptionnel pour la Guinée… et aussi pour la France d’ailleurs.
    Nous commençons par relire le projet en détail pour bien le comprendre, puis l’amender. Et ensuite, nous mettons en forme un programme de formation pour les différents futurs intervenants : 8 ROSE pour les 8 régions du pays, 14 formateurs, 1026 animateurs (3 par sous-préfecture) qui mettront en place des cellules de la société civile, 114 superviseurs, etc… Ils ne se contenteront pas d’un travail d’observation au moment des élections, mais vont suivre tout le processus à partir d’aujourd’hui : les inscriptions sur les listes électorales, la remise des cartes, la campagne électorale, de manière à signaler au fur et à mesure les erreurs et les disfonctionnements, et de pouvoir les corriger. Ainsi, nous espérons que les choses se passeront correctement, pour le bien du pays.
    Récupération du passeport.
    En désespoir de cause, je demande à rencontrer l’ambassadeur pour me faire remettre mon passeport. C’est la dernière date limite, car il me faudra encore avoir mon visa d’entrée/sortie en Guinée (heureusement, j’ai déjà une autorisation de séjour en règle) et un visa pour la Côte d’Ivoire (j’avais prévu les photos à l’avance). Comme je le connais bien, l’ambassadeur accepte de me recevoir immédiatement sans rendez-vous, et me conduit lui-même chez le consul où après discussions et tractations je peux enfin –provisoirement- récupérer mon passeport. Je file à l’archevêché où un employé très serviable –et sérieux- pourra s’occuper de mes visas, car je dois partir à la session biblique. J’arrive juste à temps pour faire un emprunt à la Procure, car la caisse de notre communauté est vide et comme je serai absent il faut laisser quelque chose au moins pour le marché. Etant à l’Archevêché, j’en profite pour ouvrir ma boîte mail et répondre aux courriers les plus pressés. A ce moment, l’archevêque m’appelle pour un certain nombre de questions, en particulier la préparation du prochain Synode pour l’Afrique.
    Je rentre donc la nuit, et sous la pluie (il pleut beaucoup en ce moment. Tant mieux !). Je mets beaucoup de temps à trouver une place dans un taxi collectif, car ils sont tous pleins. Et ensuite, ce sont les embouteillages, aggravés par les routes inondées. J’arrive très tard et il me faut encore préparer mes bagages pour le voyage de demain, et prendre congé de Richard. 

  • Mardi 4 AoûtUne journée passée dans les bureaux, sous une grosse pluie, avec Richard, pour légaliser la photocopie de son diplôme. A cause de la pluie, les employés n’étaient pas là. Quand ils arrivent, ils nous disent de revenir demain, il n’y a pas de signature aujourd’hui !
    Puis, je vais à l’ambassade de France pour récupérer mon passeport (l’ancien est toujours valide, mais du fait de tous mes déplacements il n’y a plus de place pour les visas ; or, je dois aller en Côte d’Ivoire pour une rencontre de militants de la Non Violence Active, afin d’écrire un livre). Mon nouveau passeport est bien arrivé depuis trois semaines, mais je ne peux pas l’avoir parce que l’ordinateur de l’ambassade de France au service des passeports est en panne depuis ce temps-là. J’ai beau aller à l’ambassade chaque jour, il n’y a rien à faire ! A l’Archevêché, le cyber ne marche pas. Et à la procure, pas moyen d’avoir le chèque pour acheter le billet d’avion. Il y a des jours comme ça ! 

  • Lundi 3 Août :  Le travail habituel reprend ; je consulte ma boîte mail avant l’ouverture des bureaux. Puis les différentes rencontres habituelles. Ensuite, au menu ce matin, la suite de l’évaluation de l’atelier  Savoir Fer  et de la prochaine session biblique des jeunes. Puis visite au doyen des prêtres de Guinée, qui se remet peu à peu.
    La politique européenne.
    En début d’après-midi, l’archevêque m’appelle. Il doit rencontrer le secrétaire d’état français à la coopération, venu en Guinée rappeler au Président de la République la nécessité de tenir les élections législatives et présidentielles avant décembre 2009. Nous préparons cette rencontre. Personnellement, je ne suis absolument pas d’accord avec la politique européenne, par rapport à la Guinée. Pendant 50 ans, le pays s’est complètement décomposé. Bien sûr, le 23 décembre 2008, les militaires ont pris le pouvoir. Mais il n’y avait plus aucune autorité dans le pays. On était au bord de la guerre civile. Au contraire, quand les militaires ont pris ce pouvoir, il n’y a eu aucun mort, même pas de blessé. Et depuis, le Président essaye de relever le pays et d’y mettre de l’ordre : respect de l’Etat et des lois, honnêteté, mise au travail, lutte contre la drogue, la corruption et les détournements. Il faut donc lui laisser la chance… et le temps de réaliser ce qu’il a entrepris. C’est vrai que certaines méthodes utilisées sont contestables. Nous réagissons contre elles.Mais il ne faut pas tout casser. Or, la communauté européenne vient d’arrêter, à l’avance et sans preuves, toute aide économique à la Guinée pendant deux ans, parce qu’elle pense que les élections pourraient ne pas avoir lieu en décembre. On aurait pu au moins attendre cette date ! On risque de casser tous les efforts du pays. Si, par exemple, les salaires ne peuvent plus être payés, cela va entraîner grèves, manifestations, révoltes et peut-être même un vrai coup d’état cette fois-ci. De toutes façons, c’est encore la population qui va souffrir et le pays qui va encore s’appauvrir.
    On veut des élections à tout prix en 2009. Mais il ne suffit pas d’avoir des élections pour avoir une vraie démocratie. Il faut d’abord remettre le pays en ordre. Pour le moment, les chefs de partis ce sont justement ceux qui ont mis le pays à plat les années précédentes, en particulier les anciens premiers ministres. Il me semble qu’on voyage en l’air dans de grands principes de démocratie théorique, sans absolument se rendre compte des réalités locales. Et que l’Europe, comme les Etats-Unis, continuent à se mettre au dessus des autres pays pour régenter le monde, sans écouter les autres. Malheureusement, cela ne date pas d’aujourd’hui ! 

  • Dimanche 2 Août :Dimanche en paroisse.
    Première messe en anglais. Après cette messe, nos deux stagiaires se retrouvent longuement avec les anglophones, conformément à ce qu’on avait décidé dimanche dernier, pour organiser leur communauté et décider des actions à mener. Pendant ce temps-là, je dis la deuxième messe en français/soussou. De l’Evangile, je retiens trois phrases : 1) Croyez en moi… Celui qui vient à moi n’aura plus jamais faim, dit Jésus. Ici, ce sont des phrases qui parlent aux gens qui vivent dans la faim et la pauvreté, et au milieu des sectes, de la magie, du fétichisme et de la sorcellerie. 2) Cherchez la nourriture qui ne pourrit pas. 3) Faites les œuvres de Dieu 4) ajouté à St Paul : Laissez les habitudes païennes. Devenez des hommes et des femmes nouveaux.
    Aujourd’hui, je suis spécialement frappé par la profondeur et l’originalité des interventions des participants lors du partage de la Parole de Dieu (grâce à un micro sans fil, transportable). Ils apportent des choses auxquelles je n’aurais jamais pensé et vraiment enracinées dans leur vie et leur culture. La Prière Universelle se fait en sept langues, car je tiens à ce que l’on prie, au moins à un moment, dans la langue même des différents participants, pas seulement dans la langue véhiculaire, le soussou.
    A la fin de la messe, nous faisons le compte rendu du Conseil paroissial d’hier, auquel j’ajoute quelques commentaires et orientations. Tous restent. Ca les intéresse car ils se sentent directement concernés.
    Après cela, nous nous retrouvons encore avec les délégués de  Justice et Paix  et de la  Pastorale sociale  de chaque CCB et Mouvement, de manière à les lancer véritablement, car dans cette paroisse, jusqu’à maintenant, ces deux commissions n’existent que sur le papier.
    L’après-midi, je prends un temps de repos. Ce n’est pas du luxe ! 

  • Samedi 1er Août :  Conseil paroissial
    Nous abordons un certain nombre de problèmes, car il y a beaucoup de choses à régler : l’évaluation de la fête patronale et la préparation du 15 Août, avec une veillée de prière toute la nuit. J’ai fait ensuite de compte rendu de mes différents contacts avec les CCB (Communautés de quartier), les Mouvements et les Commissions de la paroisse. Nous en avons tiré les conclusions et vu comment faire avancer les choses. En gros, il y a un important manque d’organisation et de motivation auquel il faudra trouver une solution. Et aussi, réfléchir aux orientations : les chrétiens se retrouvent à la paroisse, mais s’engagent peu dans leurs quartiers et leurs lieux de travail, et même dans leur vie familiale. Et leur vie chrétienne se limite souvent à la prière et aux sacrements. Il y a là tout une éducation à faire et une mentalité à faire évoluer peu à peu. Nous abordons ensuite la question des jeunes. Leur bureau est inefficace : trop d’absentéisme et de laisser aller. Il y a aussi différents groupes ou associations ayant les mêmes objectifs (ou même parfois sans objectifs clairs) lancés par une personne par ambition personnelle, et qui se font concurrence, amenant disputes et jalousies. Il y a aussi trop d’activités, si bien que les parents qui n’arrivent déjà pas à nourrir leurs enfants, sont incapables de payer les cotisations nécessaires et d’en supporter les frais.
    Nous voyons comment réorganiser tout cela et nous donnons la priorité à la formation, en particulier aux sessions bibliques. Il nous faut aussi penser à la rentrée prochaine et chercher en particulier des nouveaux catéchistes. Là aussi, il faut repenser les choses. Les communautés ne s’impliquent pas suffisamment dans l’éducation des enfants. Elles laissent souvent le catéchiste se débrouiller tout seul. Et les parents également.
    Nous prévoyons des rencontres de parents. Et aussi un suivi des parrains et des marraines pour qu’ils prennent leurs filleuls en charge dès le début de la catéchèse. Nous abordons aussi la question de la communion aux malades et cherchons des volontaires pour la leur apporter. Enfin, nous relisons le rapport d’activités de cette année que nous allons remettre à l’archevêque lundi. Cela nous amène à un certain nombre de réflexions qui remettent en cause le plan d’action de la paroisse. Il faudra le revoir, pour une plus grande implication des CCB (Communautés de base) dans les quartiers et un travail plus ouvert avec tous les habitants, musulmans comme chrétiens. Un plus grand engagement des chrétiens dans la Société ; et une plus grande attention aux problèmes sociaux : la pauvreté, l’éducation des jeunes, la vie dans les quartiers avec les problèmes de vol, de drogue, de délinquance et d’insécurité, l’implication de la paroisse dans l’action pour la défense des droits des personnes et la réconciliation entre tous. Sans oublier la question du développement à la base par des petits projets, la réflexion sur l’évolution du pays et la préparation des élections.
    Il faudra reprendre tout cela à la base, pour que les chrétiens eux-mêmes, et pas seulement les responsables, donnent leur point de vue et apportent leurs idées et leurs propositions.
    Le soir, je me ménage un temps de travail tranquille à la maison. 

  • Vendredi 31 Juillet :  Je monte tôt le matin pour pouvoir ouvrir ma boîte mail. A partir de 8 heures, dès que les bureaux ouvrent, les circuits sont saturés. Ensuite, avec Bernard, nous faisons l’évaluation du travail de cette année à l’atelier  Savoir Fer . Mais nous n’arrivons pas à faire des tirages, le courant est trop faible. Finalement, nous y parvenons en utilisant le régulateur du frigidaire de la maison d’accueil.
    Je vais voir le doyen des prêtres guinéens qui est très fatigué en ce moment, et accueille les personnes qui se présentent : le vicaire général de Nzérékore, le responsable de l’OCPH, des parents qui veulent inscrire leurs enfants à l’internat de Boffa, plusieurs personnes qui ont des problèmes. Ensuite, il faut s’occuper des lunettes de l’un de nos novices, et du financement de notre maison d’accueil, car nous attendons des visiteurs.
    A midi, nous nous retrouvons avec l’aumônier de la prison et un éducateur de rue, pour préparer notre intervention au cours d’un séminaire organisé à l’ambassade des Etats-Unis avec d’autres ONG travaillant pour les droits humains, des régisseurs et gardiens de prison, des responsables de partis politiques, des avocats, gendarmes, journalistes et professeurs, et les forces de défense et de sécurité, sur le thème :  Justice et Droits du Citoyen en conflit avec la loi . Enfin, comme je l’ai signalé dans mon site plusieurs fois, il y a un certain nombre de problèmes à ce niveau : par exemple, pour les prisonniers, surtout les plus pauvres et sans soutien, et pour les enfants de la rue ; il a été demandé à l’Eglise Catholique d’intervenir spécialement et de partager sa réflexion et ses expériences.
    Nous terminons juste à temps pour que je puisse dire la messe du soir à Lambanyi. Les enfants sont là, à répéter les danses pour un festival qu’ils organisent. Ils viennent aussi participer à l’eucharistie en y apportant tout leur dynamisme. Nous partageons la Parole de Dieu et je suis dans l’admiration de leur spontanéité et de la profondeur de leurs interventions. Ca réjouit le cœur.
    A mon retour, je retrouve Richard qui a passé toute sa journée à faire réparer sa voiture sous la pluie (ici les garages sont en plein air, sur le bord de la route) ; je vais à l’ambassade du Nigeria, où je pensais faire légaliser son diplôme en son nom (voir journée du 30.07) ; mais ce n’est pas possible. Richard part donc tout de suite avec sa voiture jusqu’à Koundara et reviendra lundi en taxi brousse (car le carburant coûte vraiment trop cher) : 4 jours de voyage sur des routes très mauvaises, avec tous les frais que cela comporte… c’est un visa qui nous coûtera très cher, à tous points de vue !
    Le soir, nous parlons longuement de la vie au noviciat et de la formation qui y est donnée. 

  • Jeudi 30 Juillet :  Problèmes de visa.
    Avec Richard, nous retournons à l'ambassade de France pour son visa. Nous avions déposé sa demande, il y a 2 mois mais sans réponse. Grâce à une intervention très appréciée, nous avons obtenu un nouveau rendez-vous pour ce matin. Je dois dire qu’au Service des visas nous sommes très mal reçus et sans aucune politesse. Ensuite, on nous dit que la demande a été égarée. Il faut donc la refaire, avec des photos  spéciales  qui ne peuvent être faites que dans un seul laboratoire de photos dans toute la ville de Conakry. De plus, il n’y a pas de formulaire au Consulat. Il faut aller dans un cybercafé pour en télécharger un. Une vraie course contre la montre, pour revenir avant la fermeture du Consulat. Nous y arrivons juste à temps, payons 99 € pour la demande de visa (pour faire moins de 100 !), fournissons tous les papiers demandés (nous n’avons pas oublié de faire les photocopies nécessaires) et quand tout est fini, on nous dit qu’il faut aussi l’original du diplôme de baccalauréat de Richard, avec une photocopie légalisée. Et Richard a passé son baccalauréat au Nigéria et fait ses études de théologie en Irlande ! On ne nous avait rien dit la première fois à ce sujet. Richard a bien l’original de son diplôme à Koundara, mais il faudra le faire venir par taxi brousse, à nos risques et périls, la semaine prochaine (il n’y a qu’un taxi brousse par semaine) ; mais où légaliser la photocopie ? C’est à cause de toutes ces difficultés prévues que j’ai voulu accompagner Richard (nigérian) en tant que Français connu à Conakry. Mais je pense à tous les guinéens qui doivent se débrouiller par eux-mêmes. Je ne sais vraiment pas comment ils arrivent à s’en sortir !
    Comme nous sommes en ville, j’en profite pour passer au cybercafé de l’archevêché. Depuis cette nuit, il ne fait que pleuvoir. C’est bon pour les paysans (et nous nous en réjouissons), mais pas pour internet. Au bout de deux heures, je n’ai réussi à ouvrir que deux messages ! J’abandonne et je rentre travailler à la maison.
    A la maison, j’ai la joie de trouver Kennedy, responsable des novices de Boffa, venu faire des courses avec un des novices que je connais depuis Mongo, ancien chef scout. Je suis rentré avec Richard et le cardan d’une des roues arrières a lâché juste devant la porte. 

  • Mercredi 29 Juillet :  Retour à l’Archevêché.
    Aujourd’hui, internet fonctionne ; alors j’en profite Heureusement que je me suis levé tôt. J’ai pu venir en ville, sans problèmes. Mais à partir de 7 heures, tout est bouché. De même, les mails passent jusqu’à 8 heures, même si c’est très lent. Mais ensuite, le serveur est saturé. Et de plus, aujourd’hui, il y a du courant (pas en banlieue où nous habitons, mais au centre ville où se trouvent banques, services et ministères).
    Puis je participe à une rencontre sur la planification familiale. Je les abandonne à midi car nous avons un repas avec les apprentis de l’atelier. Ce soir, ils partent en congés et nous avons voulu marquer le coup. Ils sont un peu intimidés de manger avec leurs formateurs et les responsables de l’Association, mais le climat se dégèle peu à peu. A la fin, je les remercie pour le bon travail effectué tout au long de l’année et les encourage pour l’avenir. Un premier apprenti se lève et se lance dans un petit discours en français (ils ont des cours d’alphabétisation, mais ce n’est pas leur langue). Du coup, un 2ème, puis un 3ème… et tout le monde dit son petit mot. C’est très sympathique ! L’un des apprentis en profite pour glisser avec humour quelques remarques bien senties à un des deux formateurs qui est un peu dur avec eux. Et tous sourient en cachette. Tout cela dans une excellente ambiance. Mais il faut les quitter, eux aussi.
    Avec un journaliste de notre commission, nous allons contacter trois radios libres ; à la fois pour des émissions religieuses et pour des émissions à caractère social, à partir du travail de nos deux commissions :  Justice et Paix  et  Pastorale sociale . Il faudra du temps, mais les premiers contacts sont pris. On verra pour la suite. Cela nous semble important, car ces radios sont écoutées (au moins sur Conakry), et les journaux sont rares et coûtent cher.
    Rencontre des jeunes.
    A 16 heures, je retourne à ma paroisse de banlieue pour rencontrer les jeunes, afin de finaliser les activités de vacances. Il y a beaucoup de choses prévues : un camp de formation pour les scouts ; un camp de formation religieuse pour les enfants (CV-AV) ; trois sessions bibliques pour les jeunes ; un festival des jeunes avec danses et théâtres ; une rencontre internationale des Fondacio ; un congrès de Sant Egidio ; une colonie de vacances à l’extérieur ; un centre aéré sur la paroisse. Il faut chercher à coordonner tout cela et bien préparer les différentes activités pour en tirer un minimum de profit.
    Dans un 2ème temps, nous préparons la fête du 15 Août au cours de laquelle nous aurons un temps de réflexion sur la fête, une veillée de prière toute la nuit avec chants et théâtre religieux, et la célébration du jour. Nous voulons que les jeunes y aient une part active.
    Enfin, il est important de redynamiser l’équipe animatrice. L’année dernière, l’ancienne équipe n’avait pas bien travaillé. Une nouvelle équipe a été mise en place, mais il faut maintenant la former avant la rentrée scolaire.
    Le soir, Richard, notre responsable régional et chargé de la mission du nord, à la frontière du Sénégal, Koundara, arrive. Son remplaçant, Lucius, est déjà là ; de même que le stagiaire, Peter. Après le repas, nous tenons donc une réunion pour préparer la passation de service et le travail de l’an prochain, dans les différents domaines : travail pastoral, évangélisation, développement. Richard va suivre une formation à l’Institut Catholique de Paris, en théologie, pour être ensuite formateur au Nigéria. Lucius le remplace. Et comme nous ne sommes pas assez nombreux pour répondre à tous les appels, nous devons laisser la paroisse de Dalaba où se trouvait Lucius, à notre grand regret, car nous y faisions un travail important en milieu musulman (Peuhls) et auprès des étudiants de l’Institut d’Elevage. 

  • Mardi 28 Juillet :  Aujourd’hui, je reste à la maison. Deux choses au programme : terminer le rapport d’activités annuel des deux Commissions  Justice et Paix  et Pastorale Sociale , pour C.R.S. (Catholic Relief Services = Secours Catholique américain). C’est un très gros travail, car je ne suis pas un spécialiste en comptabilité. Mais surtout, c’est toujours difficile d’obtenir les pièces justificatives. Souvent, je dois d’ailleurs les faire moi-même, car beaucoup de gens ne savent pas écrire.
    Communautés et Mouvements.
    J’assure l’animation de la paroisse St Jacques de LAMBANYI pendant les congés de mon confrère John. C’est important pour moi de connaître au moins les responsables des différents groupes, mouvements et commissions. Comme je reste à la maison, je leur ai donné rendez-vous pour aujourd’hui. Ils arrivent les uns après les autres, ce qui me fait des récréations dans mon travail de comptabilité ! Je vois les responsables des communautés de quartier et des Mouvements et Communautés (Fondacio, venue de France qui travaille auprès des nécessiteux ; Sant Egidio, venu d’Italie, spécialement engagé pour la paix et auprès des prisonniers ; les scouts et les CV-AV). Ils ont besoin de formation et d’organisation. Pour les communautés, elles ont beaucoup de peine à se réunir. Dans ces conditions, il est difficile d’avoir des actions suivies et efficaces. D’ailleurs, pour l’année prochaine, nous avons prévu un cycle de formation sur toute l’année, pour les responsables de communautés et de mouvements Il y en a vraiment besoin.

  • Lundi 27 Juillet :  Je remonte en ville pour les différentes activités. Je n’avance pas beaucoup car internet ne fonctionne pas. Presque tout le monde est sur le même serveur et il est sans cesse saturé. Avec les coupures de courant en plus, ce qui n’arrange rien. Mais cela ne m’empêche pas de continuer les activités ordinaires : l’Atelier Savoir Fer (lien avec le site), réflexion sur le travail de l’OCPH (Organisation Catholique pour la Promotion Humaine) avec Jacques, réflexion avec les éducateurs des centres aérés, mise au point des activités de vacances des scouts avec leur aumônier, et accueil de différentes personnes chacune avec son problème. A ce rythme, la journée passe vite.

  • Dimanche 26 Juillet :  Les centres aérés (suite)
    Les éducateurs ont bien travaillé hier, et ce matin nous avons pu revoir ensemble les programmes d’activités et les projets financiers des quatre centres aérés. En fait, le budget est très serré, car nous n’avons pas pu avoir de financement. A ce niveau également, la crise financière mondiale se fait sentir ! C’est un ami, Michel, ayant travaillé de nombreuses années au dispensaire St Gabriel à Conakry, qui a décidé de nous aider personnellement. Nous le remercions beaucoup car cela va nous permettre de faire une première expérience, que nous pourrons présenter ensuite à certains organismes, comme le CCFD, pour un financement possible. Grâce à lui, nous avons pu assurer la formation de 40 éducateurs, ce qui est énorme. Pour les quatre centres aérés, le reste de l’argent nous permettra de prendre en charge les transports des éducateurs, mais ils devront travailler bénévolement et se  débrouiller  pour les repas du midi. Nous aurions voulu assurer ce repas, surtout aux enfants, car ils sont nécessiteux et venant d’un milieu très pauvre ils ne mangent pas souvent à leur faim. Malheureusement, ce ne sera pas possible. Nous offrirons un repas seulement pour le dernier jour. Nous ne pourrons pas assurer non plus les soins de santé, même les plus élémentaires. Au contraire, nous demandons aux enfants de trouver un bic et un cahier pour l’alphabétisation et le rattrapage scolaire, et de payer 1.000 francs guinéens (environ 15 centimes d’euro) par semaine. En effet, même s’ils sont pauvres nous voulons que les parents participent à l’éducation de leurs enfants, même financièrement. Nous ne voulons surtout pas en faire des assistés !
    La fête patronale.
    A 9 heures, je suis à la paroisse. Avant la célébration de la fête, nous nous retrouvons avec les anglophones. Comme tous les étrangers dans tous les pays, ils ont beaucoup de problèmes d’insertion et de survie. Il est donc important de les aider à s’organiser, pour qu’ils puissent se défendre, répondre à leurs besoins, bâtir une communauté, accueillir et aider les nouveaux. Nous tenons une réunion dans ce sens. Nos deux stagiaires (nigérian et ghanéen) participent. D’autant plus que l’un d’entre eux, Emmanuel, pourra les accompagner tout au long de l’année.
    La célébration se passe très bien, avec une procession de l’Evangile et une excellente participation, des jeunes en particulier. Ils ont bien préparé la cérémonie. Spécialement la prière universelle, en sept langues. Nous sommes à la Capitale où les différentes ethnies sont représentées.
    Les jeunes et les enfants ont préparé des théâtres, chants et danses pour présenter leur vie et leurs actions. Le repas qui suit est plus frugal encore que d’habitude. D’abord parce que la pauvreté augmente. Ensuite, parce que les fidèles ont déjà beaucoup cotisé cette année. En effet, jusqu’à maintenant, nous prions dans un hangar. Or, ils veulent commencer à construire leur église, ce qui va demander beaucoup d’efforts. Mais cela n’empêche pas de fêter notre patron, St Jacques, dan la joie. A l’homélie, faite en français, soussou (la langue véhiculaire) et anglais, je parle du service de nos frères, surtout les plus nécessiteux, et du service du pays, à partir de l’Evangile. Dans un 2ème temps, nous voyons comment vivre en apôtres, au service de tous, à la suite de St Jacques. Le tout, sous forme de dialogue et de partage avec toute l’assemblée, grâce à un micro portatif. La technique, ça aide !
    Au retour, nous saluons la communauté voisine des salésiens. Ils sont très impliqués dans la préparation des centres aérés et du travail auprès des jeunes, en général. Nous nous entendons très bien et sommes vraiment sur la même longueur d’onde. Florent, un nouveau stagiaire malien, travaillant généralement au Togo, nous a spécialement aidés. Je le présente à Emmanuel, notre nouveau stagiaire, pour qu’ils se connaissent et puissent travailler ensemble.

  • Samedi 25 Juillet :  La paroisse de LAMBANYI.
    Conseil paroissial élargi aux responsables de communautés de quartier, de commissions et de mouvements. C’est une première prise de contact avec la paroisse. Nous faisons le tour des différents groupes et de leurs activités pour apporter un certain nombre de remarques et proposer des orientations. Certains groupes marchent bien, d’autres non. C’est normal. Mais en général, les chrétiens de cette paroisse sont très orientés sur la liturgie et la prière, en délaissant leur engagement de chrétiens dans la société. Ils sont centrés sur la paroisse, beaucoup moins sur la vie du quartier, même les communautés de base. Ils ont tendance à se retrouver seulement entre chrétiens plutôt qu’entre tous et de travailler avec les musulmans, par exemple. La commission de liturgie marche bien, mais pas celle de la pastorale sociale ; et la commission justice et paix n’existe pas. Il y a donc du travail à faire, mais cela ne pourra se réaliser que peu à peu, avec beaucoup de patience.
    Les centres aérés.
    Dès la fin de la réunion, je pars pour le dernier week end de formation des éducateurs qui vont animer les centres aérés dans les différents quartiers, au mois d’Août. Il y a donc beaucoup de questions à mettre au point. D’abord, nous précisons un certain nombre de choses sur l’organisation (horaires), les programmes, la composition des équipes, les finances, les différentes fonctions à remplir. Ensuite, initiation au jeu sur les droits de l’homme, avec exercice pratique. Comme pour le jeu sur les droits de l’enfant de la semaine dernière, cela se passe très bien. Les éducateurs se prennent au jeu (c’est le cas de le dire !) et sont enthousiasmés. Cette éducation aux droits humains est très importante, surtout dans la situation où nous nous trouvons actuellement en Guinée. La soirée, chaque équipe va se retrouver pour finaliser leur programme d’activités et leur budget. Et nous en ferons l’évaluation demain matin à 7 heures, avant que je parte à la paroisse St Jacques pour la fête patronale. Il ne faudra pas perdre de temps !

  • Vendredi 24 Juillet :  Je suis monté en ville. La journée commence par la mise au point et l’impression de documents pour les trois sessions bibliques des jeunes. La première session commence ce soir dans le Fouta Djallon, à Labbé (300 km de Conakry), dans une région montagneuse au centre de la Guinée. Cette session a beau avoir lieu tous les ans, et la date être fixée à l’avance, c’est toujours au dernier moment que les choses se font.
    Ensuite, je retire des documents pour le P.A.M. (Projet Alimentaire Mondial des Nations Unies). Nous sommes en pleine saison des pluies et les documents que j’avais laissés avant mon départ ont été mouillés. Je vais aux bureaux du PAM demander de la nourriture pour nos centres aérés. Dommage… le responsable est absent ; il est en  conférence . Cela aussi, ça arrive souvent. Je reviendrai lundi !
    Je ne peux pas ouvrir ma boîte mail. Problème de serveur et d’électricité. Il y a des jours comme ça, mais je trouve qu’ils sont quand même un peu trop fréquents ! Surtout pendant la saison des pluies. J’ai donc le temps de passer rapidement dans les bureaux et les ateliers, avant de partir pour la paroisse, où il y a la messe chaque vendredi soir ; après toutes les rencontres d’aujourd’hui, je ne manquerai pas d’intentions de prières !
    Les jeunes sont venus préparer la fête de la paroisse (débroussage, nettoyage, aménagement…). Aussi, ils sont nombreux à la messe et participent très bien. C’est une bonne façon pour nous de nous préparer à la fête.

  • Jeudi 23 Juillet :  Je reste à nouveau à la maison ; ce n’est pas mon habitude, mais il va falloir que je prépare le compte-rendu d’activités et financier de nos deux commissions  Justice et Paix  et  Pastorale sociale , pour CRS (Catholic Relief Services = Secours Catholique américain). C’est un gros travail, surtout qu’il est toujours difficile d’obtenir les comptes rendus et les pièces justificatives des commissions paroissiales. Heureusement, ils sont compréhensifs ! Il faut dire qu’ils connaissent la quantité… et la qualité du travail que nous fournissons (cela sans nous vanter, ce sont eux qui le disent !).

  • Mercredi 22 Juillet :  

    L’atelier de soudure  Savoir Fer 
    Avec Xec, prêtre salésien espagnol de la paroisse voisine, nous montons à l’Atelier  Savoir Fer , où nous tenons notre réunion du Conseil d’administration. Au programme, l’évaluation du mois passé sur laquelle nous portons une attention spéciale à l’éducation des apprentis et pas seulement au travail ou à l’organisation de l’atelier. Cela nous amène à étudier un certain nombre de cas personnels. Ensuite, nous préparons la période des congés et surtout la prochaine rentrée et les orientations pour l’année prochaine. Il nous faudra encore plus de rigueur dans la formation et le travail, et pour cela nous préparons l’élaboration d’un certain nombre de fiches de travail. Nous étudions aussi spécialement le problème des vaccinations et des soins, car la santé des apprentis nous inquiète souvent, et ils n’ont pas les moyens de se faire soigner. Bernard, le coopérant, termine son temps. Il faut donc faire la passation de service avec Abdoulaye et Hervé, les deux formateurs guinéens qui vont prendre la direction complète de l’atelier à la rentrée. Bernard reste en Guinée ; il pourra apporter son appui et passer de temps en temps.
    Une autre question, c’est celle de la sécurité. L’installation électrique est très vieille, des prises sont arrachées. Bernard va acheter le matériel nécessaire et refaire l’installation avec les apprentis, ce qui leur fera une bonne initiation. De même, nous allons abattre une cloison pour améliorer l’aération de l’atelier. Nous en profiterons pour initier les apprentis à la maçonnerie. Nous ne voulons pas qu’ils se limitent à la soudure.
    Les centres aérés. L’après-midi, nous retrouvons avec Xec et Emile le responsable de l ’Association  SOS Mineurs  des enfants de la rue pour terminer la mise au point de l’organisation des centres aérés du mois d’Août et finaliser la dernière formation du prochain week end, de manière à ce que tout soit bien en ordre. Et demain, je ferai le tour des paroisses retenues pour préciser les choses en fonction de leurs réalités locales propres.
    La nuit, je lis mon courrier enregistré ce matin sur ordinateur et je prépare mes réponses. Elles ne partiront que vendredi au plus tôt car le cyber de l’Archevêché a été foudroyé. Espérons que les réparations ne tarderont pas trop, et d’abord que l’on trouvera les pièces nécessaires.

  • Mardi 21 Juillet :  Je reste à la maison. D’abord, nous tenons notre réunion de communauté avec le Frère Yvon, Peter et Emmanuel, nos deux stagiaires. Nous prenons le temps de leur présenter la Guinée, la paroisse et le travail pastoral que nous essayons de faire. Nous voyons ensemble comment organiser ce temps de vacances, jusqu’à la rentrée scolaire.
    Et tout l’après-midi, je rédige le compte rendu de la session de Bamako qu’on m’a demandé.

  • Lundi 20 Juillet :  Le soir, avec Peter, nous parlons longuement pour nous connaître et pour poser les bases de son séjour en Guinée.

  • Dimanche 19 Juillet :  Travail en paroisse.
    Notre confrère John est parti au Nigeria pour des congés, après 4 ans. Je vais prendre en charge la paroisse pendant son absence. A 7h30, messe en anglais avec les Africains anglophones du secteur. Comme je l’ai souvent écrit, ils ont beaucoup de problèmes et sont sujets de beaucoup de brimades. La messe du dimanche est l’occasion pour eux de se retrouver pour s’encourager et se réconforter. Mais il faudra aller plus loin dans l’organisation et les actions à mener. Nous prévoyons une rencontre pour cela dimanche prochain.
    A 9 heures, messe avec la communauté guinéenne. Comme d’habitude, j’essaie d’animer la célébration avec chants et danses, mais surtout par la participation des gens au moment de l’homélie (partage de la Parole de Dieu), de la prière universelle spontanée dans les différentes langues, et aussi la participation des enfants tous réunis autour de l’autel.
    A la fin de la célébration, nous présentons nos deux nouveaux stagiaires : Emmanuel, nigerian, qui va travailler avec nous à Conakry pendant un an, et Peter, Ghanéen, qui servira au nord, à KOUNDARA. Tous les deux viennent de faire une année à St Louis du Sénégal pour apprendre le français, là où j’ai travaillé 16 ans. Nous aurons donc des souvenirs communs.
    Là aussi, il faut organiser les activités des vacances. Vendredi après la messe, nous nous retrouverons avec les jeunes et samedi avec le conseil paroissial. Dimanche prochain, c’est la fête de la paroisse. La 1ère dame sera là, car c’est sa paroisse.
    Après avoir salué les fidèles, je pars rapidement à la paroisse d’HAMDALLAYE où l’église va être consacrée. Elle a été construite grâce à une grande mobilisation des chrétiens, comme d’habitude, spécialement des femmes. Mais aussi avec l’aide de l’ancienne Ambassadeur de France qui a suivi le chantier avec beaucoup d’attention et l’a financé. Merci à elle. Je tenais à être présent à cet événement.
    Ce fut une grande fête, comme les Guinéens savent en organiser. J’étais assis à côté de l’évêque anglican. Nous avons bien parlé ensemble. C’était vraiment sympathique. Et cela m’a permis de rencontrer beaucoup d’amis. Une vraie joie.

  • Samedi 18 Juillet :  Formation pour les Centres aérés.
    Le retour a été mouvementé… comme presque toujours ! L’avion n’avait pas trop de retard, mais, arrivé à Conakry, impossible d’atterrir à cause d’une tornade. L’avion a été dérouté sur Abidjan, pour faire demi-tour au bout d’une demi-heure, car la tornade avait diminué. Heureusement pour moi, car j’avais une formation à assurer pour les éducateurs des centres aérés prévus pour le mois d’Août dans les quartiers. On ne nous a rien donné à manger dans l’avion, malgré le retard, mais de toutes façons on a bien mangé pendant la session comme cela arrive souvent : on parle de ceux qui ont faim mais on continue à bien manger ! Un jour de jeûne ne me fera pas de mal. Toutefois, avec la fatigue du voyage en plus, c’est quand même un peu dur d’assurer le travail.
    15 à 19 heures : Formation des éducateurs.
    Je crois qu’elle est bienvenue. En effet, jusqu’à maintenant, la formation a été surtout théorique. J’arrive avec un jeu sur les droits des enfants, ce qui leur donne un moyen pratique et pédagogique de faire vivre ces droits (pas seulement de les enseigner) et de faire des enfants les acteurs de leurs propres droits… sans oublier leurs devoirs, bien sûr ! D’ailleurs les droits des uns sont les devoirs des autres.
    La formation se passe très bien. Les éducateurs participent activement à la formation, et l’évaluation est très positive. Ca réconforte de tant d’efforts… et de travail pour la mise au point de ce jeu.
    Le soir, j’ai de la peine à rentrer. Je suis dans un quartier éloigné, il fait nuit et il pleut (c’est la saison !). J’ai du mal à trouver un  taxi .

  • Du 5 au 18 Juillet :  Session de formation sur les questions de Justice et Paix, pour les religieux/ses d’Afrique de l’Ouest.
    Pas seulement pour parler des problèmes qui pourtant sont tellement nombreux, mais surtout pour acquérir une méthode d’analyse et d’action sur les problèmes sociaux de nos pays. Je mettrai une présentation de la session et son compte rendu dès que possible sur mon site. Pour aujourd’hui, ce que je note c’est la grande fraternité qui nous a réunis, venus de plus de 15 pays différents d’Afrique de l’Ouest où nous travaillons, occidentaux et africains ensemble. Etant tous engagés dans ce domaine de justice et paix, nous avions beaucoup à nous dire, mais la grande diversité de nos engagements a été un vrai enrichissement et une base pour continuer à travailler dans la complémentarité, grâce à l’internet en particulier. Mais pour cela il fallait d’abord nous connaître et avoir travaillé ensemble.
    Pour moi, j’ai retrouvé des amis du Sénégal et ai pu parler à nouveau en ouolof. Ca a été dur de nous séparer !

  • Dimanche 5 Juillet :  Ordinations.
    Ordinations de deux nouveaux prêtres pour le diocèse. C’est une grande joie. L’un d’eux, Louis Jacques, a fait son stage pastoral à Kataco, il y a trois ans. Nous nous connaissons très bien. Le second, Denis, vient d’une petite ethnie du nord de la Guinée, avec laquelle j’ai travaillé en 1976 à TAMBACOUNDA, au Sénégal, où cette ethnie est également présente. Cette cérémonie d’ordinations est l’occasion d’un grand rassemblement et donc de grandes retrouvailles et l’occasion de faire la connaissance des deux grandes familles des nouveaux prêtres. Mais je ne pourrai pas rester longtemps à la fête, car il me faudra préparer mes bagages. En effet, demain, je pars au Mali pour une session  Justice et Paix  pour les religieux de l’Afrique de l’Ouest francophone. De nouvelles retrouvailles en perspective, dont je me réjouis à l’avance !
    Cette semaine, dans la communauté, il y a beaucoup de passages : les étudiants qui viennent en vacances et nous donneront un coup de main dans nos différents postes, les stagiaires qui rentrent chez eux, les confrères qui passent pour des congés ou des sessions. C’est à chaque fois l’occasion d’échanges enrichissants.

  • Lundi 29 Juin au 4 Juillet  Retraite des prêtres.
    Notre retraite s’est très bien passée. Au milieu de tout ce qui se vit dans le pays, il est très important de pouvoir s’arrêter, pour faire le point et évaluer notre action dans la paix. Mais surtout d’avoir un long temps de prière pour offrir notre travail à Dieu et écouter ce qu’il a à nous dire. Et aussi de nous retrouver ensemble, tous les prêtres du diocèse, dans une ambiance décontractée, avec le temps de nous parler tranquillement.
    La retraite était prêchée par Armand, un confrère spiritain camerounais, maître des novices à Boffa, qui nous a dit des choses très profondes mais d’une manière animée et pleine de joie. Tous l’ont apprécié. Nous avons aussi prié avec une grande participation de tous, et à partir de notre vie et de nos problèmes.
    Jusqu’au mois de Juin 2010, nous sommes dans l’  Année du Sacerdoce . La veillée de prière sur ce thème qui a terminé cette retraite a beaucoup marqué les participants.
    Les plantations.
    Cette année, la saison des pluies a mal commencé. Les pluies sont rares et les paysans sont très inquiets ; certains ont déjà semé deux fois, mais tout a crevé. Mais, en retournant à Conakry, nous avons été surpris par une pluie diluvienne. Les bougies de la plupart des voitures a essence ont été noyées et il a fallu que ça sèche… et que les eaux aient le temps de s’écouler, pendant plusieurs heures. Là, vraiment, la pluie était trop forte et ce n’est pas bon non plus pour les plantations. Maintenant, beaucoup de paysans n’ont plus de semences pour semer une nouvelle fois.
    Dès mon retour, après avoir rangé rapidement mes affaires, je suis parti à l’Archevêché. C’est samedi après-midi, mais Bernard, de l’atelier, et les animateurs de nos deux Commissions, sont revenus spécialement pour que nous puissions faire l’évaluation de toute la semaine. J’en profite pour enregistrer mes mails dans mon ordinateur. Pour les réponses, on verra plus tard !
    Car à 19 heures, à la Cathédrale, nous avons la grande célébration du lancement de l’année du Sacerdoce, avec les chrétiens de la capitale. Nous ne voulons pas utiliser cette année pour nous mettre en avant, mais au contraire pour revoir notre collaboration avec les laïcs, dans un véritable esprit de service. Ce n’est pas facile. D’autant plus qu’étant une minorité, les chrétiens ont tendance à faire de nous leurs chefs, pour les mener et les protéger.

  • 29 Juin au 4 Juillet :  La retraite des prêtres.
    Cette retraite d’une semaine de tous les prêtres est très importante pour nous. C’est un temps fort de prière qui nous permet de faire le point de tout notre travail de l’année face au Christ, mais aussi de nous retrouver et de bâtir notre amitié d’une façon bien plus profonde que dans nos rencontres habituelles, et tous ensemble, autour de notre évêque. Le thème de notre réflexion cette année est :  Prêtre à la suite de St Paul  (car c’est l’année de St Paul), avec deux conférences par jour : cela aussi va nourrir notre prière tout long de l’année. Bien sûr, chaque matin nous avons la messe et nous prions le bréviaire (la prière de l’Office) ensemble, en communauté. Mais c’est essentiel de faire le point régulièrement.

  • Lundi 29 Juin :  Fête de Saints Pierre et Paul.
    Nous prenons un bon temps de prière. Puis je pars à CRS. Le Gouvernement américain nous donne un fonds pour la formation d’observateurs indépendants pour les élections. C’est très important mais aussi une lourde responsabilité pour notre petite Commission  Justice et Paix . Nous allons commencer tout de suite la préparation, bien que ce soit la saison des pluies et donc la période de gros travail dans les rizières. Et aussi le temps des vacances.
    Ensuite, je monte aux bureaux de l’archevêché pour lancer les activités car je vais être absent pendant trois semaines pratiquement. J’en profite pour parler des autres projets en cours : SOS mineurs et le foyer, les centres aérés des vacances, les petits projets des paroisses (fabrique de savon, teinturerie, jardins potagers) et une formation à Kankan sur les droits humains, etc…
    Avec Winfried, nous allons dans une imprimerie que je connais pour faire imprimer la prière du CENTENAIRE DE LA PAROISSE de MONGO et le livret de la célébration.
    Après avoir répondu à mon courrier (e.mail) et imprimé quelques documents, je vais prendre un car pour rejoindre le lieu de la retraite.

  • Dimanche 28 Juin :  Commission de  Pastorale sociale .
    Dernière rencontre de la Commission diocésaine de l’année pastorale. Dans l’Evangile de ce jour, Jésus guérit la femme qui perdait du sang et ressuscite la fille de Jaïre. Aujourd’hui, Jésus vient guérir la Guinée qui a perdu tellement de sang ces longues dernières années, dans les guerres civiles et les répressions. Il veut ressusciter sa fille, La Guinée.
    Nous commençons par organiser la commission paroissiale ; puis nous retravaillons le document sur la situation du pays en Juin 2009 et en tirons les conclusions : que pouvons-nous faire à notre niveau devant cette situation ?
    Ensuite, nous faisons le tour des différentes paroisses avec leur délégué. A partir de là, c’est l’évaluation de toute l’année, la préparation des activités de vacances en particulier les centres aérés, les cours de rattrapage et l’alphabétisation par des étudiants bénévoles. Enfin, les orientations pour l’année prochaine. Vous recevrez bientôt le compte-rendu complet.
    Je passe rapidement au cyber-café (sans café !) enregistrer mon courrier auquel je répondrai cette nuit. Je suis pressé car Emile, le responsable de SOS mineurs est là pour faire le point de la réunion d’hier. Et surtout Martin, un jeune de Mongo, entré chez les Spiritains, arrive du Sénégal et passe me voir avant de partir chez lui. Je ne veux surtout pas le manquer.

  • Samedi 27 Juin :  Rencontre SOS Mineurs.
    Je travaille régulièrement avec eux. Je connais donc bien le responsable et les éducateurs. Mais aujourd’hui, nous prenons toute la journée pour faire l’évaluation de toute l’année, voir les activités de vacances et déjà prévoir les orientations pour l’année prochaine. Nous abordons tout à tour les activités du Foyer, le suivi des enfants dans les quartiers, dans les commissariats (garde à vue) et le travail à la prison. Nous réfléchissons spécialement à la collaboration possible avec les autres organisations qui travaillent dans le même sens, à tous les niveaux. Nous n’oublions pas la vie communautaire et le travail en équipe, ainsi que la question de la formation continue. Puis nous abordons des points plus précis. La scolarisation des enfants : faut-il les envoyer à l’école  officielle  qui est très loin et compte des effectifs pléthoriques et donc enseigne mal ; ou donner leur chance aux enfants en les mettant dans une école privée qui coûte très cher ; ou faire une école  de la dernière chance  au Foyer, mais c’est rendre l’intégration des enfants plus difficile. Ce n’est pas simple. De même pour l’alphabétisation de ceux qui n’ont jamais été à l’école. Ou de la formation dans les ateliers du Foyer ou ceux de la prison. Ce n’est qu’une première initiation. Il faudrait intensifier nos liens avec les artisans de la ville pour que les enfants et les jeunes puissent ensuite gagner leur vie et s’établir. Et déjà créer des liens avec les autres associations qui travaillent dans les quartiers, comme à la prison. Ce travail en collaboration me semble très important mais difficile, certaines organisations cherchant à travailler seules, par peur qu’on prenne leur place, en oubliant l’intérêt primordial des enfants. Et ensuite, reste toute la question du suivi des jeunes. Aussi bien ceux qui sortent de prison que ceux qui sont au travail.
    Une autre question, celle de la participation des parents, quand on arrive à retrouver leurs traces. Ils ont tendance à se décharger de leurs responsabilités, en disant : on vous fait confiance, on vous donne notre enfant. Ce qui bien sûr n’est pas une solution. Et nous ne voulons surtout pas faire de leurs enfants des assistés.
    Nous avons aussi parlé pour la même raison, des relations avec les autorités locales dans les quartiers, le personnel de la Justice et celui de la Prison. Là aussi, nous avons tout un travail de réflexion et même de formation et d’éducation à mener. En particulier avec le Tribunal pour enfants qui vient juste de se mettre en place. Restent les liens à assurer avec les différents ministères, en particulier celui des Affaires sociales, et les avocats.
    Nous avons aussi en projet le lancement d’un foyer pour jeunes filles enceintes et renvoyées de leurs familles. Nous en reparlerons.
    L’ensemble constitue un gros travail. Nos éducateurs sont jeunes, mais ils sont dynamiques et de bonne volonté. Aussi les choses avancent, grâce également à l’engagement et l’expérience d’Emile, le responsable du projet.
    Pour tout cela, il faut des moyens bien sûr. Nous sommes sans cesse à la recherche de financements, mais nous voulons aussi compter sur nos propres forces. C’est pourquoi, nous allons commencer un jardin potager et un petit élevage sur un terrain que nous avons déjà trouvé.
    Nous terminons notre rencontre en abordant les questions pratiques et financières, les jours de repos, etc..
    L’après-midi, nous recevons une association : FUNDACIO, un groupe de jeunes qui vient visiter le Foyer dans le cadre du  mois de l’enfant . Et aussi deux architectes russes travaillant à Conakry, venus initier les enfants au dessin. Toutes ces visites et interventions sont très importantes pour nous et pour les enfants.
    Le soir, Winfried et Zacharie, mes deux successeurs à Mongo, arrivent. Zacharie va suivre une formation pour être Maître des Novices. Winfried l’a conduit à Conakry et va en profiter pour y rencontrer les chrétiens originaires de Mongo, en vue de la préparation des Fêtes du Centenaire de la paroisse. Bien sûr, je suis très heureux de leur venue ; ils me donnent des nouvelles de Mongo et nous parlons un bon moment. Ca fait du bien !

  • Vendredi 26 Juin :  Education aux Droits de l’Homme.
    J’enregistre mon courrier électronique sur mon ordinateur. Comme à chaque fois, je suis venu tôt, afin de le faire avant que le circuit ne soit saturé. Je lirai mon courrier et y répondrai quand j’aurai le temps, dans la journée ou ce soir. Car dès 8 heures, je me retrouve à l’atelier  Savoir Fer  pour lancer avec les formateurs notre jeu sur les droits humains pour les apprentis. C’est une manière très pédagogique de les enseigner, avec des chants, des danses, théâtres, enquêtes. On ne cherche pas d’abord à leur inculquer  un savoir , mais plutôt à les aider à réfléchir par eux-mêmes, à trouver leurs propres solutions et à passer à l’action. Et cela sert en même temps à leur formation : apprentissage du français, expression orale, lecture, écriture, dessin, etc… Le jeu est bien rôdé (depuis les années 90 !), bien que je découvre toujours des petites choses à améliorer. Aussi, ça se passe sans problèmes.
    Entre temps, le père, très handicapé, d’un enfant vient nous voir. Son enfant manquait très souvent, ne travaillait pas et ne s’entendait pas avec les autres. Nous avons tout fait pour qu’il change, sans succès. Son père nous demande le reprendre. Nous ne pouvons pas accepter, car sans un minimum d’exigences les jeunes ne pourront pas s’en sortir. Et il nous faut aussi veiller à la qualité de la vie communautaire de l’atelier.
    A la fin du jeu, trois jeunes adolescents m’attendent : ils viennent d’être libérés, sans aucune préparation, ni d’eux-mêmes, ni de leurs familles. Ils sortent de prison, mais n’ont pas d’argent pour retourner dans leur village
    Quelques projets : Ensuite, nous continuons à travailler un certain nombre de questions : le projet hydraulique, qui est très important. C’est nécessaire de continuer à faire des forages car, aussi bien en ville que dans les villages, les gens n’ont pas d’eau potable. Mais notre matériel est complètement usé.
    Puis, il y a l’audit du projet du retour en Guinée de jeunes partis plus ou moins clandestinement en Hollande. Cela, c’est le désir des Hollandais. Mais ces jeunes n’avaient pas du tout le désir de revenir en Guinée. Surtout dans les circonstances actuelles. Le projet n’a pas marché, mais des sommes d’argent très importantes ont été dépensées, qui auraient pu être utilisées de manière beaucoup plus efficaces ici sur place. C’est le cas de nombreux projets menés en Europe pour le retour des immigrés.
    Ensuite, il nous faut préparer les activités pour les deux mois qui viennent. Et récupérer une vieille armoire, une table et des chaises que nous allons rafistoler pour notre bureau. Il faut se débrouiller !

  • Jeudi 25 Juin :  Aujourd’hui, travail à la maison. Il y avait beaucoup de choses en retard sur mon bureau ! Le tout ponctué par un certain nombre de coups de téléphone : questions, demandes d’aide, demande d’intervention. Le soir, nous mangeons avec François. Il vient de passer un mois en Guinée en donnant un coup de main au dispensaire St Gabriel. Nous faisons le tour de ses découvertes et partageons ses réflexions.

  • Mercredi 24 Juin :  La situation du pays.
    Chaque jour, les choses évoluent. Hier soir, le président a convoqué les  forces vives  de la nation : société civile, syndicats et partis politiques, en présence du Corps diplomatique et des Organisations internationales pour un  dialogue  au Palais du Peuple. Le problème, c’est que ce  dialogue  a lieu au Palais du Peuple, en présence de nombreux jeunes et femmes qui crient, chantent et dansent en l’honneur du président. Mais cela ne facilite pas une réflexion en profondeur. D’autant plus que le président parle pendant 3 heures, et le dialogue se limite à trois interventions de deux minutes de  représentants  qui dans un tel état de tension ne peuvent qu’approuver ce qu’a dit le président. Les forces vives ont donc refusé, avec raison, de répondre à l’invitation du président, en demandant un lieu de rencontre plus approprié à une réflexion sérieuse. Cela me semble très positif car ça montre que les gens commencent à réagir.
    Atelier Savoir Fer.
    Le matin, je présente aux formateurs de l’atelier  Savoir Fer  un jeu sur les droits de l’homme pour qu’ils le préparent pour vendredi prochain. Cela va améliorer notre pédagogie et notre façon de travailler. Ensuite, nous examinons la question de leurs impôts et de la sécurité sociale. C’est vrai que la plupart des gens travaillent dans le secteur informel et  se débrouillent . Mais nous tenons à respecter les droits de nos formateurs… Cependant, sans nous faire exploiter. Car on nous demande de payer des arriérés depuis 2001 (des millions), alors que nous n’avons pris l’atelier en charge qu’en Janvier 2009 ! Il est vrai que les gens pensent qu’il y a de l’argent à récupérer lorsqu’ils voient des blancs ou qu’ils savent qu’il s’agit d’une organisation d’Eglise et donc internationale. Mais, comme nous connaissons bien le pays, les coutumes et la langue, il n’est pas question de nous laisser faire.
    A midi, l’évêque m’invite à un repas d’adieu avec des Sœurs. L’une d’entre elles retourne chez elle aux Philippines ; une 2ème volontaire, venue donner un coup de main à l’école, termine son année scolaire et retourne en France ; une 3ème, étudiante en droit, est venue pour un mois en Guinée, spécialement pour voir la situation des droits humains. Nous sommes un peu tristes de la séparation, mais cela ne nous empêche pas d’échanger beaucoup de choses pendant le repas.
    Pendant ce temps, j’ai branché mon ordinateur pour enregistrer mon courrier. Je le lirai et y répondrai ce soir. Après avoir rempli quelques documents, je peux rentrer à la maison.

  • Mardi 23 Juin :  Centres aérés
    Nous nous retrouvons d’abord pour préparer les Centre aérés du mois d’Août. Il y a beaucoup de choses à régler. D’abord pour la formation des éducateurs que nous allons réaliser en Juillet. Faire le recrutement après avoir défini les critères de choix, établir le programme de formation, les conditions matérielles, etc… Heureusement, nous sommes une bonne équipe de formateurs.
    Notre priorité, c’est bien sûr l’éducation de ces enfants des quartiers populaires, souvent abandonnés à eux-mêmes. Pour les éduquer et former, pas question de les faire jouer simplement au foot pour occuper le temps. Nous jouerons au ballon, mais en veillant au jeu d’équipe et au comportement de chacun. En y ajoutant des jeux éducatifs de cours de rattrapage pour ceux qui vont à l’école et une alphabétisation de base pour les autres. Evidemment, nous ferons tout cela en lien avec les parents, même si ce ne sera pas facile de les réunir. Et en impliquant les différentes organisations du quartier et les conseils paroissiaux des paroisses. Nous pouvons faire tout cela grâce à Michel, un ancien Volontaire chrétien qui a travaillé plusieurs années à Conakry, au dispensaire St Gabriel.

  • Lundi 22 Juin :  Reprise des activités de la semaine avec sa cohorte de petits problèmes. Petits pour nous, mais importants pour ceux qui en subissent les conséquences.

  • Dimanche 21 Juin :  Justice et Paix.
    Réunion d’évaluation de fin d’année de la Commission diocésaine  Justice et Paix . Les délégués des paroisses sont venus nombreux. Dans un premier temps, nous rédigeons un texte sur la situation du pays (que vous aurez reçu quand vous lirez ces nouvelles). Nous allons le distribuer largement pour faire avancer la réflexion. Cela nous semble nécessaire dans la situation actuelle du pays.
    Ensuite, nous faisons le tour des activités des paroisses, puis nous évaluons l’année. Enfin, nous préparons les activités de vacances, en particulier les Centres aérés. Enfin, nous donnons des orientations pour l’année prochaine.
    Avant la messe, je retrouve le boxeur tchadien que j’avais accueilli il y a 15 jours. Il a pris contact avec la fédération de boxe et a reçu une aide de sa famille. Il vient prier dans cette paroisse. Je le présente à la communauté pour qu’il puisse se faire des amis. L’Evangile du jour, c’est la tempête apaisée. Notre pays est en pleine tempête : c’est l’occasion de voir comment continuer l’action du Christ pour apaiser le pays. Au cours de l’homélie, chacun donne ses idées, même les enfants.
    Après la réunion, je rencontre une enseignante qui me conduit chez son père, un vieil ami que j’ai connu il y a plus de 10 ans, à Mongo, et que je n’ai pas revu depuis. Quelle joie !

  • Samedi 20 Juin :  Journée avec les enfants à notre Centre des handicapés.
    C’est la fin de l’année. Nous faisons donc la fête. Les parents et amis sont là. Nous parlons avec eux. Ensuite, nous regardons plusieurs saynètes que les enfants ont préparées pour montrer leur vie et leurs actions, et exprimer leurs soucis et leurs besoins.

  • Vendredi 19 Juin :

     Problèmes à l’atelier.
    En arrivant à l’atelier, j’apprends qu’il y a eu une grosse tension entre les apprentis et les formateurs. Les apprentis voulaient une demi-heure avant la fin du travail pour avoir le temps de se laver. En effet, nous venons de construire quatre douches avec eau courante. Mais ils sont 17. Il faut donc beaucoup de temps pour que tous puissent se doucher. Les formateurs ont voulu montrer leur autorité. Ils ont repris les tenues de travail, et la situation s’est enflammée. En fait, cela a été l’occasion de faire sortir beaucoup de problèmes, de tensions et de rancoeurs. Il me faut donc commencer à voir les uns et les autres à part, et même faire plusieurs fois la navette pour faire évoluer les positions, avant d’avoir une rencontre commune de réconciliation. Pour les douches, le problème c’est qu’il est très difficile d’avoir un car pour rentrer chez soi le soir après le travail, et il est nécessaire d’arriver assez tôt pour avoir une place. Ils préfèrent donc se laver rapidement les pieds avec un arrosoir et terminer leur toilette en arrivant chez eux, plutôt que de faire la queue devant les douches. Nos belles douches vont rester inutilisées ! Cela me conforte une fois de plus dans l’idée qu’il ne suffit pas de faire des bonnes choses pour aider les gens, même avec les meilleures intentions. Il faut d’abord parler avec les intéressés, et les écouter. Car ce sont eux qui connaissent le mieux leurs problèmes, et sont donc les mieux placés pour trouver des solutions adaptées et efficaces.
    Après cela, je retrouve plusieurs personnes qui m’attendent. En particulier une femme abandonnée par son mari. Une de plus ! Puis je vais rejoindre l’archevêque qui m’attend.

  • Jeudi 18 Juin :  Avec Igbé, mon vicaire venu de Kataco, nous cherchons une pompe pour notre puits. L’ancienne, trop vieille et épuisée, a rendu l’âme !
    Nous parlons avec une amie française, mariée officiellement au consulat de France à CONAKRY. Elle voudrait aller en France, après plusieurs années de travail dans une ONG de l’Union Européenne en Guinée, avec son mari, bien sûr. Mais il n’arrive pas à obtenir son visa. Alors que c’est un simple séjour de vacances et qu’il a son travail en Guinée. Elle est vraiment très déçue !
    Comptes rendus et revues.
    Aujourd’hui, je ne monte pas à l’archevêché. Je reste à la maison pour pouvoir travailler tranquillement. En effet il faut que je termine le compte-rendu des deux rencontres des jeunes de Katacodi et Conakry. Et à partir de là, rédiger un numéro spécial de la revue du diocèse. C’est un très gros travail et il faut le faire avec soin, car ces documents vont servir de base pour le travail auprès des jeunes. Le premier problème, c’est d’obtenir les documents de base des différents groupes et intervenants. Merci à Jocelyne qui saisit sur son ordinateur les notes enregistrées sur cassettes que je lui envoie. Ca m’avance beaucoup dans le travail.
    Le soir, Emile vient me rejoindre. Nous réfléchissons avec lui à la meilleure façon de travailler avec ses éducateurs, auprès des enfants en rupture, arrêtés dans les commissariats ou mis en prison. Ce n’est pas simple.

  • Mercredi 17 Juin :  Les foyers d’enfants en difficulté.
    Conseil autour de l’évêque au sujet de notre travail avec les enfants de la rue et autres enfants en difficulté. Des tensions sont apparues dans un foyer à partir de divergences sur les façons de travailler. Rapidement, des problèmes d’argent se sont greffés là-dessus. Et les problèmes se sont étendus aux autres foyers et maisons d’éducation. Il nous faut donc analyser nos façons de travailler et réorganiser le travail. Nous avons d’abord écouté les points de vue de chacun et accueilli toutes les propositions. Je suis délégué avec Sébastien pour rédiger des propositions pour une nouvelle méthode de travail.
    Après cela, diverses petites choses, mais qui prennent beaucoup de temps : visite à l’atelier, aller réserver les billets d’avions de retour des stagiaires, ouvrir ma boîte mail.

  • Mardi 16 Juin :

     Le projet hydraulique.
    Il était soutenu par la Conférence Episcopale italienne. Le projet de trois ans se termine. Comme à chaque fois dans ces cas-là, il nous faut voir comment le travail va pouvoir continuer, sans soutien. Surtout que le matériel est maintenant très ancien et en mauvais état : le compresseur et la 4x4 pour les déplacements sont en panne et il manque des pièces pour la foreuse. Pas facile !
    Projet SIDA. Un autre projet se termine : l’appui aux personnes vivant avec le SIDA (voir rubrique  SIDA  dans mon site). J’en ai parlé plus haut. Comme chaque fois, ce qui est normal, il faut non seulement évaluer le projet, mais en faire l’audit pour vérifier que les comptes sont clairs. Cela nous prend beaucoup de temps.
    Projet Palud. : Des choses se terminent, d’autres commencent ! En particulier une action d’envergure de lutte contre le palud et la bilharziose, qui concerne les deux diocèses de Kankan et Conakry. Il faut donc coordonner les activités. Le palud reste la cause principale de décès en Guinée, beaucoup plus que le SIDA ; Il n’y a toujours pas de vaccin ! L’action principale sera une action de prévention. Distribuer 75.000 moustiquaires imprégnées d’un produit qui chasse durablement les moustiques. Et surtout, sensibiliser les populations pour qu’elles utilisent ces moustiquaires.
    Education aux droits de l’enfant. A 17 heures, rendez-vous à l’UNICEF. Depuis mes années au Sénégal, puis dans les camps de réfugiés, nous avons beaucoup travaillé à l’éducation des droits de l’homme et de l’enfant, avec des jeux pédagogiques, composés spécialement pour cela et très bien adaptés. Mon rêve, c’est de les utiliser maintenant dans la région de Conakry. Mais il faut former des animateurs et ensuite, même s’ils sont bénévoles, leur donner au moins les frais de déplacement. Et même un peu plus. L’UNICEF travaille surtout avec les gouvernements. Mais vu l’importance et l’originalité de ces jeux, on peut envisager un soutien de leur part. Je prends donc le temps nécessaire pour leur présenter les jeux en détail et leur en expliquer la pédagogie.
    Je rentre tard à la maison et je trouve Cosmus qui m’attend. Après une année d’apprentissage du français à St Louis du Sénégal, (que je connais depuis ma jeunesse et où j’ai travaillé durant16 ans), il vient de terminer son année de stage missionnaire à Mongo (où je viens de vivre 10 ans avec les réfugiés et ai réouvert la Mission après 30 ans de fermeture). Nous avons donc beaucoup de choses à partager. Il rentre chez lui, au Kenya, pour terminer ses études de théologie.

  • Lundi 15 juin :  Atelier Savoir Fer.
    Les activités reprennent. D’abord la réunion mensuelle de l’atelier de soudure Savoir Fer. Il y a toujours des problèmes à régler sur la vie de l’atelier, la formation donnée, les relations entres les apprentis, les commandes à trouver pour faire tourner l’atelier, l’éducation à donner, etc… Quand je pourrai, je mettrai les comptes rendus de réunions sur mon site. Aujourd’hui, nous terminons de régler les problèmes de santé, grâce au dispensaire Saint Gabriel. Test de dépistage du SIDA, vaccination contre le tétanos et la fièvre jaune, assurance en cas d’accident, etc. Nous sommes heureux de pouvoir en faire profiter nos apprentis, car ce n’est pas le cas pour la plupart des gens.
    Puis, nous passons au Foyer de l’Espérance, une autre de nos actions en faveur des enfants de la rue.
    Avec l’évêque, nous évoquons l’avenir. Plusieurs de nos confrères spiritains sont rappelés dans leurs Provinces d’origine en particulier pour la formation de nos jeunes. Du coup, par manque de personnel, nous devons laisser deux paroisses : une à Conakry et l’autre en secteur rural musulman peuhl, à Dalaba. C’est une grande souffrance pour nous. Et un grand problème pour l’évêque.
    Puis nous abordons la question de la catéchèse qui d’ailleurs a été soulevée au Forum des Jeunes. C’est sûr qu’il faut revoir toute notre formation. Et en particulier sur la doctrine sociale de l’Eglise et l’engagement dans la société.
    Il me reste assez de temps pour aller à l’Ambassade de France afin de faire prolonger mon passeport qui est plein, suite à mes nombreux voyages. 

  • Dimanche 14 juin :  Comme à chaque fois que je suis à Conakry, je vais dans une paroisse pour évaluer le travail de nos deux commissions :  Justice et Paix  et  Pastorale sociale .
    Moïse, notre procureur, vient d’arriver du Sénégal. Il vient pour assurer une semaine de prière au noviciat. Il en profite pour rencontrer chacun d’entre nous. Malgré la fatigue, nous prenons un temps pour cela.
    A la messe ce matin, il y a eu un mariage devant toute la communauté. La mariée a d’abord été baptisée. Tout cela dans leur langue (kissi) et en suivant leurs coutumes, sous forme de dialogue et en veillant spécialement à la participation des enfants.
    Dans cette paroisse, les Commissions ont beaucoup de mal à démarrer. Il y a deux ou trois personnes vraiment motivées et engagées, mais elles ne trouvent pas de volontaires pour travailler avec elles. A la longue, cela devient décourageant. J’essaie bien de les soutenir, mais ce n’est pas toujours facile et il faut sans cesse recommencer. 

  • Samedi 13 juin :  Je commence à rédiger en sténo puis à enregistrer au magnétophone les notes que j’ai travaillées hier en taxi. 

  • Vendredi 12 juin :  Le matin, à la messe, je suis content de rencontrer certains de mes paroissiens et de célébrer la messe en soussou. Ensuite, je vais visiter Georges, le responsable local de  Justice et Paix , pour faire le point des actions menées et le tour des problèmes, en particulier à la prison où il n’y a plus d’eau, la source étant épuisée. On devine les problèmes : gale, maladies, etc…
    Le noviciat. A 10 heures, je retrouve les six novices de cette année. Après leur stage dont je viens de parler, ils se retrouvent pour une année de prière et de formation spirituelle. Mais cela ne les empêche pas d’avoir des engagements à la paroisse et en ville. Nous voyons donc ensemble ce qu’ils ont fait à la prison, à l’hôpital, au collège et au lycée, avec les enfants de l’école primaire, et avec les Mouvements de jeunes (ACE, Scouts, JEC). Nous en tirons des conclusions pour leur travail de l’année prochaine et pour leur propre engagement. Nous nous connaissons biens. L’un d’entre eux, Célestin, vient de MONGO. L’échange est donc à la fois très libre et très approfondi, dans un esprit très fraternel. Et je trouve très important ce temps d’évaluation, qui m’éclaire également beaucoup.
    Après le repas partagé ensemble, il est temps de partir. Armand, Camerounais, responsable des novices, m’accompagne à pied à la gare routière. Nous avons ainsi le temps de parler ensemble du noviciat. Puis il va voir si la voiture est réparée.
    Dans le taxi, comme au cours de mes voyages des deux jours précédents, je relis les notes de la rencontre des 700 jeunes du Bagataye (voir les nouvelles du 15 avril), que j’ai enfin fini de récupérer. Je veux en faire une synthèse qui constituera un dossier de base de travail pour les jeunes, pour les années qui viennent. J’en tirerai aussi un numéro spécial de la revue diocésaine.
    Après plusieurs changements de taxi –il faut profiter de chaque occasion qui se présente sinon on risque de se trouver en plan-, j’arrive le soir sans encombre à Conakry, heureux de pouvoir souffler un peu. 

  • Mercredi 10 juin :  Notre confrère, Richard FAGAH, doit partir faire une formation, à PARIS, sur la spiritualité et le charisme de nos fondateurs, pour nous permettre à tous d’approfondir notre vocation et notre façon d’être missionnaires. Comme il est nigérian, il a besoin d’un visa. Même s’il va pour des études bien précises, qu’il sera inscrit officiellement à l’Institut Catholique de Paris et sera pris en charge totalement par notre congrégation, qu’il ne restera qu’un temps bien déterminé et reviendra ensuite avec nous, c’est tout un problème ! Un vrai parcours du combattant ! Pour faciliter les choses, je l’accompagne. Nous y passons toute la matinée pour obtenir le papier de demande de visa, que nous remplissons. On nous convoquera pour la suite ! Le problème, c’est que Richard travaille à KOUNDARA, à la frontière du Sénégal : 18 heures de voyage sur des routes très mauvaises. Ce n’est pas simple. D’ailleurs en venant, les amortisseurs ont lâché. Nous devions partir ensemble à 15 heures pour KATACO, pour y passer la nuit et parler avec les confrères. Mais il a fallu chercher les pièces de rechange, d’occasion, au marché, et la voiture n’a été prête qu’à 23 heures. Nous ne partons donc que le jeudi matin, à 4 h 30. Malgré le retard, nous passons par Kataco où Igbé nous attend. Ainsi, de Kataco à Kamsar, nous avons le temps de parler avec Richard, notre responsable pour la Guinée et de faire le tour des activités de Kataco.
    A Kamsar, a lieu la réunion de doyenné. Elle regroupe les prêtres, frères et sœurs de nos cinq paroisses du Bagataye, avec une trentaine de communautés de villages. Après un temps de retrouvailles, nous faisons le tour de nos différentes paroisses et communautés. Mais le but de cette réunion, c’est d’abord de faire l’évaluation de notre travail de toute l’année. Par exemple, nos réunions de doyenné, la vie de nos communautés, la formation des différentes personnes et groupes, le vécu de l’année de St Paul, missionnaire et fondateur de communautés, notre engagement dans la vie du pays, les commissions  Justice et Paix , etc.. Comme d’habitude, l’ambiance est très bonne. Nous sommes très heureux de nous rencontrer et de partager un repas pour lequel chacun a apporté un plat. Mais il a fallu nous séparer, à grands regrets, à 16 heures pour arriver à BOFFA avant la nuit, car la route, autrefois goudronnée, est pleine de trous et de crevasses. Et nous sommes tombés deux fois en panne : la 1ère fois, à mi-route, problème d’allumage dû à un câble détaché à cause des secousses. Nous avons mis du temps à trouver la panne et comme nous étions en pleine brousse il n’y avait pas de mécanicien dans le coin. La 2ème panne était plus grave ; mais c’était à l’entrée de BOFFA, nous étions arrivés !
    Les stagiaires.
    A midi, j’ai pris un temps important avec Ugotsuku, notre stagiaire nigerian de Kataco. Ce soir, c’est le tour de Bulus, stagiaire à Boffa. Tous les deux ont d’abord fait une année à Dakar pour apprendre le français. Puis, ils nous ont rejoints en Guinée. Bulus était chargé spécialement de l’internat et de l’école primaire de Boffa, et de l’animation des jeunes. Ugotsuku après l’avoir soutenu est parti rejoindre Igbé, le vicaire de Kataco, pour un travail pastoral auprès des jeunes et des communautés chrétiennes de base. C’est un principe chez nous. Les jeunes en formation doivent obligatoirement faire un stage dans un pays étranger pour avoir une expérience missionnaire dans une autre culture, et voir s’ils sont capables de s’adapter. Ils étaient suivis chacun par un vicaire, et malgré mes nombreux déplacements et mes multiples occupations, j’ai essayé de les accompagner le mieux possible. Cependant, il est important de faire régulièrement le point de leur évolution et de leurs engagements car ce n’est pas toujours facile de vivre et travailler dans une autre culture. Nous sommes très satisfaits de leur engagement et de leur travail, nous avons vécu heureux ensemble, avec eux, en communauté. Nous voyons que la relève est assurée, même s’ils travailleront d’une manière différente de la nôtre ; il y a plusieurs façons d’être missionnaire ! Avec Bulus, nous prions ensemble et nous parlons longuement… malgré ma fatigue et mon manque de sommeil. 

  • Mardi 9 juin :  La situation du pays.
    Avant-hier, selon son habitude, le Président a convoqué des gens en masse au Palais du Peuple pour les interroger. Comme cela se fait, l’enregistrement (plusieurs heures) est passé à la télévision le soir. C’est un moyen pour le Président de faire passer ses idées, d’expliquer son projet pour le pays, et ainsi d’assurer sa popularité. Cela plaît beaucoup aux gens. Cette fois-ci, il avait convoqué les magistrats en grève pour deux raisons : 1°) faire supprimer le secrétariat d’état à la sécurité dirigé par les militaires qui arrêtent les gens et les enferment dans les camps militaires, sans jugement. Ce qui, bien sûr, est contre la justice et son indépendance ; 2°) des augmentations de salaire.
    Le Président ne veut absolument pas de grève qui pourrait entraîner des désordres dans le pays, et par ailleurs, la situation financière du pays est dramatique. Il n’est donc pas d’accord avec les revendications des avocats.
    Il est intervenu, selon son habitude, à la manière militaire, en appelant deux magistrats à la tribune et en les humiliant en public et en mettant à la retraite anticipée tous les magistrats de Conakry qui n’étaient pas présents à la réunion.
    Note : Bien sûr, le droit de grève est un droit des travailleurs qu’il faut respecter. Mais vu l’état de pauvreté du pays, la demande de 3.500.000 francs guinéens de salaire mensuel pour les magistrats semble vraiment exagérée, alors que la plupart des salariés ne reçoivent que de 300 à 500.000 FG par mois (enseignants, etc..). Ils auraient dû poser d’abord le problème du secrétariat d’état à la sécurité. En tout cas, la population soutient le Président, car il est clair que la Justice est corrompue jusqu’à maintenant ; et que, non seulement ces magistrats demandent beaucoup d’argent aux gens, mais souvent ils donnent raison à celui qui a payé le plus cher.
    Le but de cette réunion était ensuite de rassembler les anciens premiers ministres et anciens ministres des finances pour mettre en place une Commission qui va étudier les problèmes financiers, car les caisses de l’état sont vides. Mais on peut se demander si ces personnalités de l’ancien régime de Lansanna Conté, pendant lequel il y a eu tellement de corruption et de détournements d’argent, sont les mieux placées pour accomplir cette mission en vérité et en toute justice ! En tout cas, pendant la séance, le ministre chargé des douanes a été limogé d’office, sur place !
    Tout ceci se fait dans le but d’assainir le pays, dont les problèmes sont énormes. C’est pourquoi la population soutient le président, qui veut vraiment sauver le pays ; mais la façon de faire pose beaucoup de questions par rapport aux libertés et au respect des personnes. Il y a beaucoup à redire à ce niveau… sans briser l’élan du pays pour autant !
    Nous nous retrouvons avec plusieurs membres de la Commission pour en faire une évaluation et voir comment nous situer face à tout cela.
    Ensuite, travail à l’imprimerie pour ré-éditer un livret de prières, qui est très demandé. C’est un grand besoin.
    Les voyages vers l’Europe et les Etats-Unis.
    Nous faisons le point avec Marie-Antoinette, une de nos formatrices en Pastorale sociale. Son fils est aux Etats-Unis depuis de nombreuses années ; il s’y est marié et a deux enfants. Marie-Antoinette aurait voulu voir et connaître sa belle-fille et ses petits-enfants. Nous avons fourni tous les papiers nécessaires et donné l’assurance qu’elle reviendrait en Guinée au bout d’un mois. Malgré tout, sa demande a été refusée. Et ce n’est pas la seule. Il devient presque impossible de partir en Europe ou aux Etats-Unis. Ce n’est pas normal et cela nous fait beaucoup souffrir.
    Ensuite, à l’Atelier, nous voyons la question des salaires des formateurs. 

  • Lundi 8 juin :  Problème de bourse.
    Aujourd’hui, une bonne partie de la journée est prise par ce problème d’un étudiant, père de famille, parti continuer ses études au Canada, avec une bourse du gouvernement. Malheureusement, sa bourse ne lui a pas été payée. Il a dû faire des petits métiers, tout en continuant ses études. Il a dû s’endetter. Il est revenu en Guinée régler son problème ; sans succès. Maintenant, il se demande comment trouver les moyens de retourner au Canada passer son doctorat. Nous allons voir, avec un juriste de la Commission, ce que nous pouvons faire.
    Le soir, je continue à préparer mon courrier sur mon ordinateur. 

  • Dimanche 7 juin :  Justice et Paix – Pastorale sociale.
    Le curé de la paroisse de Simbaya est malade. Je vais donc le remplacer. A la fin de la messe, j’annonce la rencontre de nos Commissions et j’en profite pour relever l’importance des deux Commissions, ainsi que pour faire quelques réflexions dont j’ai déjà parlé dans ces  Nouvelles  : les arrestations des gens par les militaires, enfermés dans les camps sans jugement ; le comportement envers les prostituées à qui on rase la tête et que l’on présente en public ; les jugements populaires :  celui qui tue, on le tue . Autant de choses que bien sûr nous ne pouvons pas accepter. Reste à voir la manière la meilleure et la plus efficace d’intervenir.
    Après la messe, nous tenons une réunion avec les deux commissions. Celle de  Pastorale sociale  qui a démarré depuis longtemps intervient pour aider un certain nombre de personnes, spécialement en cas de maladie ou de décès. Mais elle a de la peine à lancer des vrais projets de développement, même limités.
    Pour la commission de  Justice et Paix , l’information est passée. Il faut maintenant entrer dans l’action. Premier problème : celui d’un étudiant envoyé faire des études au Canada avec une bourse du gouvernement, mais dont la bourse n’est pas payée. Demain, je vais chercher à rencontrer un juriste et un professeur de l’enseignement supérieur, membres de la commission, pour voir ce qu’on peut faire.
    L’ambiance de la messe comme de ces rencontres est très sympathique et décontractée. Je les quitte, en saluant les scouts qui ont leur réunion à côté. 

  • Samedi 6 juin :  Je rédige le compte-rendu de la session de Kissidougou sur  Justice et Paix  et Culture traditionnelle  ; en particulier par rapport aux questions de sorcellerie et de  maraboutage  -  fétichisme . C’est une question assez délicate. Nous avons très bien réfléchi, mais il faut voir maintenant comment rédiger les choses. ( voir L 59 : Formation à  Justice et Paix  à Kissidougou).
    Puis je reçois François, petit-fils d’une amie de l’ONG Appel Détresse qui nous aide beaucoup. Il est venu passer un mois ici pour découvrir la Guinée et l’Afrique. Il donne un coup de main au dispensaire St Gabriel. Nous passons un bon moment ensemble à partager ses découvertes.
    Nous voulons partir ensemble à la rencontre de la communauté de l’Emmanuel, mais il n’y a pas moyen de trouver un taxi. Nous faisons demi tour et nous nous débrouillons pour trouver quelque chose à manger. Du coup, j’ai du temps pour finir mon papier sur la sorcellerie. Et la nuit, je commence à travailler le compte-rendu de la rencontre des spiritains à Boffa, fin janvier, que je n’ai pas eu le temps de revoir jusqu’à maintenant. 

  • Vendredi 5 juin :  Lettre au Président.
    Ce matin, j’avais prévu de travailler à un programme d’éducation aux droits de l’enfant, avec Eugénie. Mais l’archevêque m’appelle. La grande sœur du Président de la République est décédée. Nous devons aller lui présenter nos condoléances. Mais c’est une occasion pour lui faire part de nos réflexions et de nos inquiétudes sur la situation et l’avenir du pays. C’est assez délicat. Nous réfléchissons longuement et rédigeons une lettre que nous lui remettrons à cette occasion. 

  • Jeudi 4 juin :  L’équipe des Forages.
    Rencontre avec l’équipe des  Puits et forages . Le matériel, très vieux et usé, a été bricolé et nous espérons qu’il va pouvoir tenir quelque temps. Mais le soutien de la Conférence épiscopale italienne est terminé ; il va falloir nous débrouiller par nos propres moyens, car les demandes et le besoin en eau potable ne manquent pas !
    La prostitution.
    Nous sommes invités à deux conférences : une sur la prostitution, et une sur les droits humains. Par rapport à la prostitution, il y a tout une action de moralisation de la part des autorités militaires qui nous interpelle beaucoup : les prostituées sont arrêtées par les militaires (alors que ce sont souvent les militaires qui sont leurs clients !), emmenées dans les camps où on leur rase la tête et les présente à la foule. Bien sûr, nous ne pouvons pas accepter de telles pratiques ! Même si on ne peut accepter la prostitution qui est une grave exploitation de la personne humaine, nous ne pouvons pas non plus accepter de telles façons de faire. D’abord, les prostituées pour la plupart vont continuer mais en se cachant, et elles n’auront même pas de suivi médical. De plus, la solution ne peut être qu’une véritable éducation sexuelle et au respect de la dignité de la femme. Ensuite, que l’on engage une vraie lutte contre la pauvreté, car si la plupart des femmes et jeunes filles se prostituent c’est par manque de moyens économiques. Il y a du pain sur la planche ! Avec Charlotte et Irène, nous préparons notre intervention dans ce sens.
    Les droits humains.
    Deuxième conférence à préparer. Comme je l’ai souvent expliqué les militaires au pouvoir (CNDD) essayent vraiment de relever le pays et de moraliser la vie publique. Mais les moyens sont souvent contestables. On accuse des gens en direct à la télévision devant la foule, sans qu’ils puissent se défendre et avant d’être jugés ; les militaires arrêtent des gens et les gardent dans les camps, sans jugement : c’est la porte ouverte à toutes les vengeances. Bien pire, certains militaires rançonnent les gens aux barrages routiers et même commettent des vols à main armée dans les quartiers. Face à cette insécurité, certains responsables prônent le talion :  Celui qui tue, on le tue. Celui qui vole, on le brûle . On veut mettre en place des comités de défense et la sécurité dans les quartiers. On risque d’arriver à une justice (ou plutôt une injustice !) populaire, avec tous les risques de règlement de comptes. Il nous faut chercher les meilleurs moyens de réagir, en nous faisant comprendre et accepter. Nous prenons un long temps avec Charles, qui va représenter l’Eglise Catholique, pour préparer tout cela.
    La vie monastique.
    Je suis souvent en relation avec des sœurs contemplatives bénédictines, venues en Guinée depuis quelques années. Avant de partir, nous réfléchissons à leur implantation. Comment éviter de transporter un monastère tout fait  clé en main  de l’Europe à la Guinée, mais l’enraciner dans la culture du pays. Et l’inculturer dans la vie de l’Eglise locale ? Comment vivre la pauvreté religieuse là où tout le monde est pauvre et ne rêve qu’à une chose : sortir de la pauvreté ? Que peut signifier et comment vivre une vie contemplative dans les cultures d’Afrique Noire ? 

  • Mercredi 3 juin :  Je vais donner un coup de main à Armand, venu du Noviciat de Boffa, pour qu’il puisse retirer de l’argent de la banque. C’est une véritable course d’obstacles. Et comme je connais maintenant beaucoup de gens, je peux lui favoriser les affaires. Mais cela nous prend quand même beaucoup de temps.
    Article sur le Synode. Puis, je rentre à la maison. En effet, je dois rédiger un article sur le Synode pour notre revue  Pentecôte sur le Monde  et à l’Archevêché ce n’est pas possible de travailler tranquillement. Je suis sans cesse interpellé par l’une ou l’autre personne. Après avoir composé mon article en sténo, je l’enregistre sur cassette que Bernadette, qui rentre en France, postera, et la semaine prochaine Jocelyne saisira le texte sur son ordinateur puis me l’enverra par mail pour relecture et correction. Vous le trouverez bientôt sur mon site.
    La nuit, j’ai encore le temps de relire la synthèse de deux rencontres des jeunes du mois d’Avril. Nous allons en tirer un numéro spécial de notre revue diocésaine et deux dossiers qui seront remis à chaque paroisse. Il y aura beaucoup de travail à faire pour que ce soit prêt.
    Nous approchons de la fin de l’année scolaire, il y a donc toutes sortes d’évaluations à faire des différents groupes, et de comptes rendus à rédiger pour les Organisations qui nous soutiennent. 

  • Mardi 2 juin :  Chaque jour, des personnes en difficultés viennent nous voir. Aujourd’hui, c’est d’abord un boxeur tchadien qui était parti tenter sa chance en Egypte. Comme ça n’a pas marché, il est venu essayer en Guinée (je ne sais vraiment pas pourquoi !). A la frontière du Liberia, les policiers lui ont tout pris : papiers, téléphone, argent… Cela arrive souvent, malheureusement. Je lui prête mon téléphone pour qu’il puisse appeler sa famille au Tchad. Ensuite, j’appelle le responsable de la paroisse où il s’est réfugié. En effet, à la Commission de Pastorale sociale, nous n’avons pas de moyens pour aider de telles personnes. Au niveau de la paroisse, ils vont voir si quelqu’un peut l’accueillir pour lui donner le temps de se retourner. Les gens sont pauvres mais très accueillants et ils font tout ce qu’ils peuvent quand il s’agit d’aider quelqu’un.
    Puis, nous nous retrouvons avec Bernadette, l’ancienne Ambassadeur de France en Guinée, qui m’a décoré de la Légion d’Honneur. Elle s’est engagée dans la construction d’une église dans un quartier populaire. Notre atelier participe à la construction pour les travaux de soudure. Cela nous intéresse et est un grand soutien pour l’atelier de nos jeunes. Merci à elle. A partir de là, nous échangeons sur la vie actuelle de Conakry et ce qu’il est possible de faire.
    Ensuite, je me retrouve avec Etienne. C’est un ancien Volontaire qui a justement dirigé cet atelier Savoir-Fer. Nous analysons avec lui l’évolution de l’atelier et comment ils vont pouvoir se prendre en charge par eux-mêmes. Ce n’est pas une mince affaire !
    Je peux enfin passer à l’internet et commencer à regarder les nombreux messages qui me sont arrivés pendant que j’étais à Kissidougou. Internet est un grand avantage et transforme complètement notre façon de travailler. 

  • Lundi 1er juin (suite) :  Gros problème ce matin, c’est l’avenir des malades du SIDA que nous soutenions. Nous ne pouvons plus les prendre en charge, mais nous ne voulons surtout pas les abandonner. Nous nous retrouvons avec deux ONG qui acceptent de les suivre et nous voyons ensemble comment la passation peut se faire dans les meilleures conditions possibles.
    Ensuite, je me consacre à l’atelier  Savoir Fer . 

  • Lundi 1er juin :  Le lundi de Pentecôte n’est pas férié, alors on reprend le travail avec courage ! Tout un tas de mails m’attendent ; et les problèmes quotidiens... 

  • Samedi 30 mai :  Nous avons travaillé beaucoup et très bien. Les participants ont fait le maximum pour se former très sérieusement, avec courage, dans des conditions matérielles difficiles, et sans aucune récrimination. Bien sûr, il faudra passer aux réalisations concrètes. Et dans le domaine de justice et paix, c’est délicat et difficile d’agir ; mais les débuts sont prometteurs et encourageants.
    Nous terminons à 11 heures pour que chacun puisse retourner chez lui pour la fête de Pentecôte. Tous me demandent de les accompagner ; il est vrai que je connais bien toutes les paroisses pour les avoir sillonnées pendant 10 ans, quand je travaillais dans le diocèse de Kankan, en tant que responsable de l’Evangélisation et du laïcat, puis de la catéchèse et de l’animation des communautés de base. Bien sûr, les gens de MONGO insistent tout particulièrement ; et c’est vrai que nous avons vécu ensemble des choses extraordinaires ! Je leur promets de venir pour la célébration du centenaire de la paroisse de Mongo, en février 2010.
    Avec les participants de KISSIDOUGOU, nous allons saluer officiellement les autorités, en signe de respect. C’est très important ici, surtout que les autorités ont changé depuis fin décembre. Cela permet aux personnes de Kissidougou de prendre contact, de se faire connaître, et, pour moi, de leur présenter le travail de la Commission  Justice et Paix , ainsi que de poser les bases d’une collaboration future. Nous rencontrons successivement le préfet et le maire, puis le président du tribunal car le travail à la prison est très important pour nous.
    A 17 heures, je pars à la gare routière retenir ma place.
    Voyage retour : Nous allons voyager toute la nuit. Nous sommes quatre, très serrés, sur la banquette arrière, dans une petite voiture. Avec ma grande taille, les genoux commencent déjà à me faire mal, conséquence de ma chute dans les caniveaux de notre quartier, l’année dernière, en rentrant la nuit. Toutes les heures, je demande au chauffeur de s’arrêter afin que je puisse me lever pour me décoincer les articulations, ce qu’il accepte sans problème, de même que les passagers.
    Dans la voiture, seul sur la banquette avant, est assis un militaire, portant son fusil. En effet, en Guinée, les militaires pour la plupart ne logent pas dans des casernes mais chez eux, dans le quartier. Ils se promènent donc avec leurs armes. On s’y habitue ! L’avantage pour ce voyage, c’est qu’avec un militaire à l’avant nous avons passé tous les barrages sans encombre et évité ainsi de nous faire taxer tout le long de la route. mais je me dis qu’en Europe, on est aussi taxé sur les autoroutes !.... sauf qu’il n’y a pas beaucoup d’autoroutes en Guinée.
    A 8 heures, j’arrive bien fatigué à Conakry.

  • Jeudi 28 – Samedi 30 mai :  Session  Justice et Paix .
    Le but étant le même (mettre en place des Commissions paroissiales), nous suivons le même schéma de base que lors des sessions précédentes mais chaque session a son originalité. Nous sommes en secteur rural, et cette fois-ci nous nous attardons plus spécialement sur les coutumes rétrogrades et les aspects négatifs de la culture traditionnelle. En particulier les problèmes de sorcellerie, magie et  maraboutage  qui font beaucoup souffrir un grand nombre de personnes. La discussion est passionnée, mais enrichissante. La réflexion simple, mais approfondie.
    A cette session, j’ai le plaisir de rencontrer un certain nombre d’amis avec qui j’ai travaillé de 1996 à 2006, en particulier les sept délégués de MONGO. Nous parlons longuement de leurs familles et de l’évolution des choses. Je suis très heureux de voir qu’ils restent très engagés et actifs. Et surtout nous pouvons partager longuement avec Winfried, mon confrère ghanéen qui m’a succédé à Mongo et qui est actuellement responsable justice et paix pour le diocèse. Nous sommes évidemment sur la même longueur d’onde. Bien plus, nous nous comprenons parfaitement. D’ailleurs nous nous sommes compris et estimés dès son arrivée à Mongo. Et il a compris immédiatement la méthode selon laquelle nous avions travaillé, tout en gardant sa liberté d’action bien sûr, et toute sa créativité.
    Comme quoi, les différences de peau, d’âge, de culture, de formation… et de tout ce qu’on veut, n’empêchent pas de se rencontrer en profondeur ni de s’enrichir mutuellement quand on le décide des deux côtés et qu’on prend les moyens pour cela.

  • Mercredi 27 mai :  Voyage.
    Le président du conseil militaire a rencontré les syndicats des chauffeurs de taxis. Il a assuré de son soutien les classes les plus pauvres de la population, mais rien de clair n’est décidé. C’est difficile pour les militaires de revenir en arrière. Il aurait mieux valu discuter avant !
    Le soir, j’ai toutes les peines du monde à trouver un taxi pour aller à la gare routière. Je vais voyager toute la nuit pour KISSIDOUGOU, à plus de 500 km de Conakry.
    A l’arrivée, une surprise m’attend. La session de formation justice et paix pour la mise en place de Commissions paroissiales dans le diocèse a été reportée du mardi au jeudi, au dernier moment, et annoncée pour le  jeudi 27 , alors que le jeudi était le 28 ; de plus l’information n’était pas bien passée car, d’une part, de nombreuses personnes habitent en des lieux où il n’y a pas de réseau téléphonique, et, d’autre part, les lettres font souvent  poches restantes  ou sont égarées !
    A mon arrivée, je trouve une quinzaine de personnes, certaines étant là depuis mardi. Malgré la fatigue, je décide donc de commencer le travail. Les autres participants arriveront au compte-gouttes jusqu’au vendredi soir. Pas facile de travailler dans ces conditions !
    Les réfugiés.
    A la gare routière, dès ma descente de taxi, je suis salué en anglais : ce sont des Sierra-Léonais, anciens réfugiés, avec qui j’ai travaillé dans les camps dans les années 2000. Ils ont décidé de rester en Guinée au lieu de retourner dans un pays dévasté. mais leur vie n’est pas facile. Nous parlons un bon moment pour échanger sur leur vie (je ne sais pas encore que les sessionistes m’attendent à la paroisse). En route, je rencontre le fils d’un catéchiste libérien. Il vit toujours dans un ancien camp de réfugiés, à 70 km de Kissidougou, avec des concitoyens qui, eux aussi, ont décidé de rester. Les villageois de KOUNTAYA leur ont donné des terrains pour cultiver ; mais il n’y a ni école, ni dispensaire, ni soutien du H.C.R., bien sûr (c’est terminé depuis 3 ans). Il y a de nombreux catholiques et le catéchiste continue d’animer la communauté, malgré l’isolement et le manque de soutien.
    Je vais également saluer Moussa, un mécanicien libérien, lui aussi venu au moment de la guerre civile en Guinée, un grand ami : il a fait des miracles avec notre voiture quand je travaillais à Mongo et qu’il ne trouvait aucune pièce de rechange. Je prends aussi le temps de parler avec les apprentis. En Guinée, comme dans de nombreux pays d’Afrique Noire, les apprentis ne sont pas payés et, en plus, issus de familles pauvres, ils doivent se débrouiller pour trouver à manger et s’habiller ; à la fin de leur apprentissage, il doivent payer pour pouvoir  sortir  et s’installer.

  • Mardi 26 mai :  Transport en commun en taxis. Nouvelle réglementation.
    Je me lève de bonne heure pour être tôt au travail ; je suis à 18 km des bureaux de l’Archevêché, en banlieue. mais il n’y a pas de taxi, aussi je dois retourner à la maison : 15 minutes à pied pour rejoindre la grande route. Cela ne m’étonne pas, car le CNDD au pouvoir a fixé le nombre des passagers des taxis à 4 (qui suivent des lignes fixées et font le plein de passagers : pour une berline, il y avait 3 personnes devant, avec le chauffeur, et 4 derrière !) Bien sûr, on est très serré, mais on supporte. Cette réduction du nombre de passagers de 6 à 4 est bonne ; cependant, elle entraîne un certain nombre de problèmes :
    - Le problème de fond, qui est d’abord celui du très mauvais état des taxis, n’est pas résolu ; ce sont souvent des voitures hors d’usage en Europe que l’on récupère et que l’on fait durer le plus longtemps possible, avec tous les inconvénients que cela entraîne, malgré la très grande ingéniosité des mécaniciens guinéens qui parviennent à faire circuler des voitures avec des moyens de fortune mais souvent au détriment de la sécurité.
    - Déjà les taxis ne sont pas assez nombreux. Il faut attendre de longues minutes, et on est une dizaine à se  battre  pour une seule place disponible. Comme toujours, les plus faibles sont éliminés !
    - Enfin, comment les chauffeurs vont-ils s’en sortir : 4 personnes au lieu de 6, cela fait des recettes en moins. Et les tarifs sont déjà réduits au maximum. mais si on augmente les prix, comment les gens pourront-ils payer ? Car la population devient de plus en plus pauvre.

  • Lundi 25 mai :  Aujourd’hui, c’est férié : Fête de l’Union Africaine. Elle a de la peine à fonctionner ; c’est important comme étape vers l’unité africaine.
    J’en profite pour rédiger (en sténo) et saisir sur mon ordinateur les comptes rendus de la formation à NZEREKORE et de la réunion d’hier. Je suis très heureux de cette possibilité, car souvent les choses traînent. A partir de demain, je chercherai la possibilité d’imprimer les documents.
    C’est aussi l’occasion de régler toutes mes affaires en retard et de me reposer un peu. mais d’abord, avec John mon confrère, nous allons saluer la famille de Félix, avec qui j’ai beaucoup travaillé à Mongo dans les camps des réfugiés. Sa femme, atteinte du cancer, vient de décéder après de longs mois de maladie. Comme toujours dans ces cas-là, il est très entouré par la famille, les voisins et les amis.

  • Dimanche 24 mai :  Réunion de la Commission diocésaine de  Justice et Paix  à Ste Thérèse d’ENTAG.
    C’est la première fois que je viens ici, car, en effet, nous faisons nos rencontres chaque fois dans une paroisse différente, pour mobiliser les gens. La réunion s’est très bien passée. Il faut dire que j’ai la chance de travailler avec des personnes très motivées. Bien après, à la base, c’est plus difficile car autre chose est de passer de la théorie à la  pratique, et il faut assurer le suivi.

  • Vendredi 22 mai :  Avec C.R.S., nous voyons comment continuer le suivi des personnes vivant avec le SIDA, sous une autre forme. Puis nous préparons les activités à venir dans les trois diocèses du pays. Les projets ne manquent pas. Ce sont les moyens qui manquent, et ce n’est pas facile de choisir les priorités.
    Avec le Nonce, nous parlons de la vie de l’Eglise et du pays. Il souhaite avoir le point de vue de nos deux Commissions. Nous évoquons aussi la création de nouveaux diocèses. C’est vrai que trois diocèses pour toute la Guinée, ce n’est pas beaucoup !
    Ensuite, c’est une séance de travail avec l’Archevêque pour le point des activités des différents groupes. Nous essayons de réorganiser l’O.C.P.H. (Organisation Catholique pour la Promotion Humaine = le Secours Catholique de Guinée). Nous préparons aussi la prochaine retraite des prêtres, en Juillet ; cette année est l’année du Sacerdoce. Nous voyons également comment continuer le travail du Projet Hydraulique du diocèse, car le soutien des diocèses d’Italie s’est terminé (action des chrétiens d’Italie pour le remboursement de la dette) et nous n’avons pas trouvé d’autre soutien. Heureusement, grâce à la qualité de son travail, le projet est maintenant bien connu : ils vont pouvoir trouver des clients sans problème. Le  hic , c’est que le matériel est complètement usé. Il faudrait acheter une foreuse et un compresseur. mais ces machines coûtent une fortune qui dépasse nos possibilités ! Nous avons trouvé un technicien qui a réussi à  bricoler  les machines, ce qui nous fait espérer qu’elles dureront un peu. Ensuite, le Projet pourra toujours continuer à creuser des puits et entretenir les forages déjà existants (soufflage, etc…).
    Reste la question de la mise en place du Centre de formation rural des catéchistes pour leur donner des moyens de vivre et en faire des animateurs ruraux de leurs villages.
    Après cela, je me retrouve à l’internat, pour régler différents problèmes. En particulier, inscrire un prêtre guinéen à l’Institut catholique de Paris pour une formation l’année prochaine.
    Puis, rencontre avec Gilbert, envoyé du C.C.F.D. Nous évoquons d’abord l’ensemble du travail en  Pastorale sociale  et  Justice et Paix  et nous travaillons plus spécialement deux projets : les activités de vacances d’une part, et, d’autre part, le soutien à l’Association SOS Mineurs pour les enfants de la rue. Nous revoyons les objectifs, les actions menées et les stratégies et façons de travailler. Cela nous demande beaucoup de temps, mais c’est important.
    Pour les activités de vacances, nous allons pouvoir assurer la formation des éducateurs et mettre en place une première expérience, grâce au soutien de Michel, un ancien de Guinée.

  • Jeudi 21 mai :  Fête de l’Ascension. Elle n’est pas chômée en Guinée.
    Aujourd’hui, ce qui me préoccupe, c’est toujours la question de l’Orphelinat dirigé par Aminata, que nous n’arrivons pas à faire prendre en charge. Et aussi cette jeune fille, victime de menaces de mort et que des religieuses ont accepté d’accueillir et de cacher. Cela demande beaucoup de rencontres et de démarches ; mais j’ai quand même le temps de classer tous mes papiers et de revoir les affaires en cours.
    Pour le courrier, la préparation des projets et la première rédaction (en sténo) des différents courriers et comptes rendus, je les fais chaque matin et chaque soir dans les taxis de la ville. J’ai une heure à la suite où je suis tranquille, malgré le bruit de la radio du taxi (mais j’ai pris l’habitude de me concentrer) et les coups de téléphone (ici le portable est roi et ne coûte pas cher… ce qui explique sans doute aussi qu’il ne marche pas très bien !). Nous sommes un peu serrés (4 sur la même banquette), mais là encore j’ai l’habitude et je prépare tout mon matériel à l’avance, car quand on est coincé il n’est plus possible d’ouvrir son sac pour en sortir un papier.

  • Mercredi 20 mai :  Jour  ordinaire , avec son lot de rencontres : une mère avec son enfant handicapé qui a grandi et à qui il faut refaire un appareillage à sa taille ; les éducateurs qui suivent les malades du SIDA : avec eux nous préparons une rencontre de sensibilisation pour les jeunes de notre atelier de soudure et ensuite avec les volontaires un test de dépistage.
    Puis ce sont les rencontres habituelles avec les différents services : la Procure, les Commissions, et en premier lieu l’Archevêque.
    Aujourd’hui, à l’atelier  Savoir Fer , nous accueillons notre première fille, comme apprentie. Elle est, elle aussi, d’une famille nécessiteuse, et orpheline. C’est une étape importante et une ouverture significative pour nous. Première chose à mettre au point : sa présence en tant que fille ne sera pas, pour les garçons, l’occasion de se rabattre sur elle pour le balayage !
    Ensuite, avec les formateurs, nous revoyons la possibilité de placer nos anciens élèves. Aujourd’hui deux sont pris dans un grand atelier d’électricité. Nous sommes très heureux pour eux. Ils vont pouvoir gagner leur vie, et en même temps se perfectionner.
    Pendant ce temps, la tante de nos jeunes nous attend. Nous tenons à développer au maximum les contacts avec les familles, même si les jeunes sont souvent en rupture, pour un travail d’éducation en commun. Il nous reste à voir la situation de Mamadou, blessé après une agression dans le quartier.
    Rencontre avec Philippe, responsable de Guinée Solidarité Provence. Ils ont déjà lancé un centre pour handicapés. Avec lui, nous voyons la possibilité d’ouvrir un centre d’appareillage et aussi un laboratoire d’analyses, en secteur rural, qui serait très utile ; ce qui suppose une alimentation en électricité par panneaux solaires. Nous évoquons aussi la possibilité de micro-crédits et d’assurance maladies.
    De nombreux prêtres du diocèse de Kankan sont de passage à Conakry : la plupart pour raisons de santé (opérations, soins spéciaux, etc…). Je suis très heureux de les rencontrer, bien sûr. Et également des moines bénédictins sénégalais, montés à la capitale. Ils ont fondé un monastère en Guinée. Nous sommes heureux de nous retrouver et de parler en ouoloff.

  • Mardi 19 mai :  C’est dur de se lever ce matin, mais de toutes façons je suis réveillé par plusieurs coups de téléphone. Les activités reprennent ! Cependant je me réserve le temps d’ouvrir ma boîte mail et de répondre aux messages les plus urgents (le reste, on verra demain) ! Et surtout d’enregistrer sur cassette audio les textes que j’ai rédigés en sténo pendant le voyage pour les deux prochains numéros de la revue du diocèse. Jean-Louis, notre procureur, rentre en France et expédiera la cassette à Jocelyne par la poste, pour qu’elle la saisisse et me renvoie les documents par mail. C’est ça la collaboration ! 

  • Lundi 18 mai :  Retour à Conakry.
    Il se passe bien, en gros. Nous n’avons pas d’argent pour acheter le carburant, aussi nous allons à la gare routière chercher des clients, qui nous payent le voyage à prix réduit, ce qui arrange tout le monde. mais nous ne voulons pas faire du tort aux transporteurs. Nous attendons donc que les taxis brousse réguliers soient remplis et partis, et, avec l’accord du syndicat, prenons les clients restés en rade. Nous emmenons trois femmes venues du Liberia avec leurs enfants et qui sont complètement perdues. Elles peuvent me parler en anglais et surtout je vais pouvoir leur éviter toutes les tracasseries policières et racket qu’elles auraient subies si elles avaient voyagé en taxi-brousse ordinaire.
    Le voyage est très long, plus de 24 heures. On est en train de refaire la route, mais le travail ne fait que commencer et va être bien ralenti, car la saison des pluies est commencée. Nous dépassons quelques camions embourbés ; nous arrivons à passer sans trop de problèmes, à part quelques petits ennuis  ordinaires  : amortisseurs (silent – blocks à changer), crevaisons en pleine nuit. Je m’arrange avec le chauffeur qui accepte de s’arrêter dans les différentes paroisses que nous traversons (pour lui, ça lui fait des pauses !). Je peux ainsi saluer des confrères que je n’ai pas revus depuis mon départ de Mongo, il y a 2 ans ½. Et rapidement, je les informe sur la prochaine formation de  Justice et Paix  pour le diocèse de Kankan. Dans un village, je rencontre d’ailleurs l’évêque de Kankan, en tournée pastorale.
    Nous arrivons à Conakry en pleine nuit. Il n’y a pas de taxi. Aussi mes passagers sont très heureux que nous fassions les crochets nécessaires pour les amener jusque chez eux.

  • Vendredi 15 mai :  Session  Justice et Paix .
    Dès l’heure prévue, tous les participants sont là. Nous allons travailler avec beaucoup d’intensité, de 8 à 22 heures. Les participants m’ont dit :  Nous sommes venus pour cela, il n’y a pas de problèmes . Et ils acceptent de bon cœur les conditions difficiles de travail.
    Nous commençons par un temps de réflexion, menée en commun avec participation de tous : Qu’est-ce que la justice ? Qu’est-ce que la paix ? La dimension  traditionnelle  de ces deux termes : car nous voulons enraciner notre action dans la culture et la religion traditionnelles, avec leurs valeurs. La dimension chrétienne ? Le point de vue de l’Islam.
    Ensuite, nous prenons le temps d’analyser la situation en petits groupes (carrefours) : quelles injustices et manques de paix voyons-nous ? Comment le Christ a-t-il réagi face à ces réalités ? Que nous dit la Parole de Dieu sur cela (dans les différentes religions) ? Que faire concrètement ? Quelles actions mener ?
    Nous utilisons la méthode de l’Action Catholique : Voir – Réfléchir – Agir. La mise en commun est l’occasion de débats intéressants et approfondis.
    Puis nous passons à l’aspect pratique :
    Comment mettre en place une Commission paroissiale  Justice et Paix . Comment agir : avec qui ? selon quelle stratégie ? quels moyens et méthodes utiliser ?
    Nous abordons ensuite un certain nombre de points importants :
    Notre engagement dans l’évolution actuelle du pays.
    Le travail dans les prisons.
    La protection de l’environnement.
    L’impact des sociétés minières sur l’environnement, le développement du pays et la vie des populations.
    La formation d’observateurs indépendants pour les prochaines élections.
    La migration des jeunes vers l’Europe. (Voir la rubrique  Justice et Paix ).
    Le travail en pastorale sociale. (Voir la rubrique de ce nom).
    Pour terminer cette formation, chaque paroisse (catholique ou protestante) présente son plan d’action et les actions par lesquelles ils comptent commencer.
    Après la session, nous avons une dernière séance de travail avec la commission diocésaine pour évaluer la formation donnée et préparer le travail des mois qui viennent.
    En soirée, il me reste un peu de temps pour rendre visite à des amis connus l’année dernière. Nous sommes très heureux de nous retrouver. Et nous terminons la soirée avec deux prêtres guinéens qui ont fait des études, comme moi, à Abidjan (une année de recyclage en 1975-76). Nous mangeons ensemble un bon plat d’attiéké (un plat traditionnel ivoirien), à la main, comme il se doit, dans la même assiette, c’est meilleur ! Ce qui ne m’empêche pas de parler ouolof avec la serveuse qui a travaillé au Sénégal. L’Afrique est vraiment internationale !

  • Jeudi 14 mai :  L’équipe diocésaine de  Justice et Paix  vient me rejoindre tôt le matin et nous mettons au point le programme de la formation. C’est un peu tard, mais les communications sont très compliquées entre Conakry et Nzerekore : le téléphone passe difficilement et coupe sans arrêt. Un seul cyber fonctionne, quand il n’est pas en panne. Les participants ont pu être prévenus par la radio rurale, car la poste ne fonctionne pas. Nous avons prévu la nourriture bien sûr, mais nous devons faire au plus juste car nos fonds sont très limités et le coût de la vie a beaucoup augmenté.
    Ensuite, nous allons rencontrer les autorités pour les informer de la formation et leur expliquer le but de la Commission. Nous rencontrons successivement le préfet, le maire et la présidente du tribunal, et encore beaucoup d’autres personnes. Nous sommes guidés par le responsable de la société civile, qui nous présente également un certain nombre d’ONG et d’Associations que nous invitons.

  • Mardi 13 mai :  Voyage toute la journée. Nous coupons la route en nous arrêtant visiter l’un ou l’autre prêtre. Dans une des paroisses, l’une des jeunes filles de la chorale vient juste de mourir. Nous prions avec la famille avant de continuer notre route. Nous arrivons en pleine nuit. *

  • Mardi 12 mai :  Nouveaux essais pour avoir une place dans l’avion d’une société minière : Rio Tinto. Même réponse : pas de place ! Donc il va falloir descendre par la route, et d’abord trouver une voiture ! Avant de partir, je récupère les différents documents et comptes rendus des deux rencontres des jeunes de Katacodi et Conakry (voir  Nouvelles  d’Avril) et aussi du pèlerinage de BOFFA ; je les travaillerai dans le taxi brousse en allant à Nzerekore (j’aurai le temps, il y a 18 heures de route !).
    Fin du projet SIDA.
    Nous nous retrouvons autour de l’Evêque avec 18 animateurs qui suivent les personnes vivant avec le SIDA. Malheureusement, le projet doit s’arrêter par manque de moyens mais aussi à cause d’une mauvaise gestion de la part de l’équipe responsable de l’OCPH. Cela me fait très mal car ces animateurs étaient très bien formés, suivaient et soutenaient très bien ces personnes et leurs familles. Ils ne se contentaient pas de leur apporter de la nourriture adaptée à leur condition physique et à assurer leur suivi au point de vue santé et médicaments (fournis gratuitement par l’hôpital), mais voyaient avec elles tous les problèmes psychologiques, affectifs et moraux : faut-il en parler à la famles et aussi des animateurs ayant très bien travaillé qui vont en pâtir parce que d’autres n’ont pas fait leur travail sérieusement. Et que l’on n’a pas eu le courage de prendre les décisions nécessaires à temps.
    Après cela, nous réfléchissons avec les membres de  Justice et Paix  puis de la  Pastorale sociale  comment assurer le suivi pendant mon absence. Nous préparons aussi les prochaines rencontres des deux commissions diocésaines.
    Mardi soir : bien que devant partir très tôt le lendemain matin, je ne veux pas annuler ma rencontre avec l’équipe de volontaires de la FIDESCO qui dirigent et animent le dispensaire St Gabriel . Un très gros dispensaire (plusieurs centaines de consultations par jour) reconnu dans toute la ville de Conakry pour la qualité de l’accueil et des soins, et le sérieux de la gestion qui permet d’offrir des médicaments à très bas prix, sans détournement ni corruption. Nous célébrons l’Eucharistie ensemble, puis nous échangeons longuement sur le travail au dispensaire et les autres questions de notre engagement qui nous touchent.ille ? peut-on se remarier ? doit-on avoir encore des enfants ?... Ils étaient devenus de vrais amis et savaient très bien les encourager et leur redonner la force de vivre. Et c’est à ces personnes atteintes du SIDA que nous pensons d’abord. Nous voyons comment elles pourront être prises en charge par une autre association. mais toute cette affaire nous fait beaucoup souffrir, car ce sont encore des pauvres, leurs familles et aussi des animateurs ayant très bien travaillé qui vont en pâtir parce que d’autres n’ont pas fait leur travail sérieusement. Et que l’on n’a pas eu le courage de prendre les décisions nécessaires à temps.
    Après cela, nous réfléchissons avec les membres de  Justice et Paix  puis de la  Pastorale sociale  comment assurer le suivi pendant mon absence. Nous préparons aussi les prochaines rencontres des deux commissions diocésaines.
    Mardi soir : bien que devant partir très tôt le lendemain matin, je ne veux pas annuler ma rencontre avec l’équipe de volontaires de la FIDESCO qui dirigent et animent le dispensaire St Gabriel . Un très gros dispensaire (plusieurs centaines de consultations par jour) reconnu dans toute la ville de Conakry pour la qualité de l’accueil et des soins, et le sérieux de la gestion qui permet d’offrir des médicaments à très bas prix, sans détournement ni corruption. Nous célébrons l’Eucharistie ensemble, puis nous échangeons longuement sur le travail au dispensaire et les autres questions de notre engagement qui nous touchent.

  • Lundi 11 mai :  Rencontre pour la Pastorale de l’Enfant.
    Une action qui vient du Brésil pour le suivi des femmes enceintes, des jeunes et de leurs bébés : pesage, soin… A partir de cette action pour la santé, nous greffons une éducation de la femme pour qu’elle connaisse ses droits et prenne davantage de place, non seulement dans son foyer, mais aussi dans son quartier. Ensemble, femmes et maris réfléchissent à une meilleure éducation de leurs enfants. Les mères se retrouvent chaque mois pour une fête  la célébration de la vie  qui leur permet de se connaître dans la joie et, à partir de là, d’agir ensemble dans le quartier.
    Je dois descendre à Nzerekore, tout à fait au sud du pays, avec le nouvel évêque, Monseigneur Raphaël GUILAVOGUI, pour une formation à  Justice et Paix . La distance est longue et la route très mauvaise. Quatre fois, je vais au PAM (Projet Alimentaire Mondial de l’ONU) pour partir par avion. mais à la fin, on me dit qu’il n’y a plus de place ! A mon retour, plusieurs personnes m’attendent avec chacune son problème et ses souffrances.

  • Dimanche 10 mai :  L’après-midi, avec XEC, un salésien catalan, et Emile, un béninois responsable de SOS-mineurs, une ONG qui travaille pour les enfants de la rue, nous préparons un programme pour activités de vacances dans les quartiers populaires de Conakry, en faveur des enfants nécessiteux et en difficultés.

  • Samedi 9 mai :  Réunion du conseil épiscopal, autour de l’évêque de Conakry, pour tirer les conclusions de la rencontre des évêques de Guinée qui vient de se terminer, et voir la mise en pratique des décisions : nous nous attardons spécialement sur les actions à mener dans les paroisses et au travail en équipe entre prêtres.

  • Vendredi 8 mai :  La matinée, préparation du programme d’activités des deux commissions pour le mois de mai.
    Puis, rencontre pour l’accueil et le soutien des mendiants chassés du centre ville et la scolarisation de leurs enfants, avec Nadine, une Française très engagée, veuve d’un Guinéen torturé et tué du temps de Sékou Touré, fondatrice de l’ONG Guinée Solidarité qui nous aide pour le transport du matériel depuis la France.
    Ensuite, travail avec Roberto, un prêtre du Prado, aumônier des prisons. Il s’agit de préparer une rencontre avec le Ministre de la Justice au sujet de la situation des prisonniers en général qui est vraiment déplorable. Et en particulier, celle des mineurs. Nous voudrions relancer les ateliers de formation pour les enfants prisonniers, mais pour cela, il nous faut récupérer les bâtiments que nous avons construits et qui ont été détournés de leur but initial.
    Enfin, évaluation de notre travail auprès des enfants de la rue.
    Il me reste un peu de temps pour ouvrir ma boîte mail au cyber (sans café !) de l’Archevêché et commencer à répondre au courrier, et imprimer quelques documents. mais le débit est incroyablement faible et ça n’avance pas vite, comme très souvent. La suite sera pour demain !

  • Jeudi 7 mai :  Après la rencontre avec C.R.S., les activités se multiplient : travail sur les projets avec l’O.C.P.H. nationale (Organisation catholique pour la promotion humaine).
    Jean-Paul revient d’une session de Justice et Paix, au Cameroun, sur le problème des mines et de la détérioration de l’environnement. Je profite de son passage à Conakry pour finir de préparer la session de formation que je vais assurer chez lui à Nzerekore la semaine prochaine.
    Puis, avec Suzanne, de la Pastorale sociale, nous étudions comment soutenir un groupe de femmes qui se sont mises ensemble pour gagner leur vie et faire vivre leur famille en fabriquant du savon à partir de l’huile de palme.
    Enfin, ce sont les affaires courantes en retard à régler à la procure et au secrétariat de l’archevêché. Avant de rencontrer le Nonce.
    L’après-midi, nous nous retrouvons avec la Commission de la Jeunesse pour tirer les conclusions des deux rencontres de Katacodi (voir les  Nouvelles  des 1er-4 Avril) et de Conakry (17-19 Avril).

  • Lundi 11 mai :  La situation du pays.
    Les choses continuent à évoluer en Guinée. Le C.N.D.D. (Comité National pour le Développement et la Démocratie), composé des militaires qui ont pris le pouvoir fin décembre, continue de lutter efficacement contre la drogue et la corruption, et cherche à remettre le pays en état de marche. Cela est positif.
    Beaucoup d’affaires passent en direct à la télévision. Et l’on n’hésite pas à y convoquer aussi bien les responsables étrangers des grosses sociétés minières que les ministres actuels ou anciens et à les accuser en public. Ce qui plaît beaucoup à la population (on appelle cela le  Dadis show , Dadis étant le prénom du président), et augmente la popularité du président et du CNDD, mais cela tourne souvent à des attaques très violentes, car le président est très coléreux. De plus, même si les personnes sont fautives, il ne s’agit pas d’un jugement équitable. Pour la population, les personnes qui passent ainsi à la télévision sont considérées comme coupables. Les droits des gens ne sont pas respectés et, ensuite, on ne sait même pas si elles peuvent bénéficier d’un vrai jugement.
    Même chez les militaires où nombreux sont ceux impliqués dans des affaires de drogue ou de brigandage. Et c’est sûr que le premier nettoyage et changement de mentalité seraient à faire au sein de l’armée. En tout cas, le président a été obligé d’interrompre au dernier moment un voyage en Lybie. Suite à cela, on a demandé à tous les corps d’armée de jurer fidélité au président et au CNDD, sur la Bible et le Coran, et de promettre d’arrêter toutes les formes de pillage et de vagabondage. Cette manière de faire peut étonner, mais il est vrai que la Guinée est un pays de croyants, à majorité musulmane ; et que cette façon de faire paraît normale.
    Cela ne suffit pas pour ramener la sécurité dans le pays. Il y a encore beaucoup de vols avec attaques à main armée. La dernière vient d’avoir lieu dans la nuit du samedi à dimanche, au grand marché de Madina. De nombreux magasins ont été pillés par des voleurs en tenue et armés. Les militaires disent :  Ce sont des civils déguisés en militaires !  Impossible de savoir. mais l’insécurité et les vols existent bel et bien.
    Plus grave, les caisses de l’Etat sont vides, alors que le pays est dans un état de sous développement très important. Les fonctionnaires ne seront plus payés, et ce sont encore les plus pauvres qui souffriront le plus. En effet, depuis la prise de pouvoir par les militaires, l’Union Européenne, les Etats-Unis (Banque mondiale, Fonds Monétaire International) ont arrêté toute aide et soutien au pays, parce que, pour eux, il s’agit d’un coup d’état. De notre côté, nous pensons qu’il s’agit plutôt d’une période de transition, pendant laquelle les militaires essayent vraiment de nettoyer et de relancer le pays. mais, si on leur coupe tous les fonds, le pays va tomber encore plus bas et toute la population va se révolter. La situation sera encore beaucoup plus grave. Bien sûr, les principes sur la démocratie sont importants, mais il faut voir aussi les réalités concrètes et les possibilités pratiques. Car le  coup d’état  a été mené sans aucun coup de feu ni blessé. Les objectifs poursuivis sont tout à fait valables, même si l’on peut être réticent sur la manière de faire, et la population est d’accord et soutient ces efforts. A notre avis, cela vaudrait donc la peine de soutenir le CNDD, tout en cherchant à améliorer ses façons de faire, et c’est ce que nous faisons depuis le début.
    A ce niveau, de nombreux contacts sont déjà pris. Les responsables du pays viennent de rencontrer l’Union Européenne à Bruxelles. Le groupe de contact conjoint de l’Union Africaine et l’ONU viennent de revenir à Conakry pour la 3ème fois, en particulier pour s’assurer que des élections législatives et présidentielle auront bien lieu respectivement en Octobre et en Novembre-Décembre 2009.
    Le 1er mai, les quatre syndicats qui avaient déjà mené les manifestations en Janvier-Février 2007 contre le régime de Lansana Conte, ont défilé ensemble. Ils ont décidé de  s’engager dans un nouveau rôle qui ne consiste pas seulement dans la revendication, mais aussi dans la réflexion et les propositions d’idées concrètes menant à des actions syndicales positives pour la promotion du dialogue social et du travail décent .  ……. pour atteindre les objectifs fixés, qui cadrent parfaitement avec les précédents accords tripartites signés entre les syndicalistes, le gouvernement et le patronat guinéen. Ces accords concernent le retour à l’ordre républicain par la tenue de bonnes élections, la restauration de l’autorité de l’Etat, la lutte contre la corruption, le narcotrafic et le grand banditisme, la promotion d’une justice indépendante et équitable, le plein emploi, le rétablissement des équilibres macro économiques, la mobilisation des fonds pour la construction des infrastructures, la fourniture des services sociaux de base .
     Les 12 points du cahier de charge de revendication. Dans ce cahier de charge, les syndicalistes ont adressé un cahier de charge au gouvernement guinéen, dans lequel ils ont demandé la résolution urgente des multiples problèmes auxquels sont confrontés les travailleurs, toutes sensibilités confondues, pour une meilleure amélioration de leurs conditions de vie et de travail.
    Ce sont d’abord : le respect et l’application des accords tripartites issus des négociations de 2006 et 2007, la poursuite de la révision des conventions minières, halieutiques et forestières, la relance de la commission d’enquête sur les tueries de 2006 et 2007, qui statuera sur le jugement des auteurs des crimes odieux et l’assistance des familles des victimes.
    Ensuite, la sécurisation des populations de Conakry et du pays profond, et de nos frontières, la poursuite de l’assainissement du fichier de la fonction publique, la protection sociale des travailleurs, le relèvement de leur salaire ainsi que ceux des retraités, la réduction des RTS et le renforcement de la sécurisation de nos frontières contre les sorties frauduleuses de nos produits.
    Enfin, les syndicalistes ont également demandé l’arrêt des tracasseries policières sur les routes, le relèvement et la régularisation de la situation salariale et l’immatriculation à la Caisse Nationale de la Sécurité Sociale des travailleurs contractuels. (…..).
    L’Etat a annoncé que le gouvernement s’engagera à assurer un examen judicieux du cahier de charge en vue de trouver les solutions aux différents problèmes posés, notamment la promotion de l’emploi jeunes, la revalorisation des niveaux de salaire, en privilégiant les retraités .
    Une autre chose très importante est la mise en place d’un Comité National de Transition chargé de préparer les futures élections, mais surtout de préparer une nouvelle Constitution pour éviter de retomber dans les mêmes problèmes que par le passé avec les deux présidents précédents. Déjà, le mois dernier, les syndicats et les partis politiques ont été autorisés à reprendre leurs activités. Tout cela est très positif. Reste à voir la réalisation pratique. En effet, ce Comité de transition est uniquement consultatif et l’on ne sait pas dans quelle mesure le CNDD (les militaires) est prêt à l’écouter. De même, le président actuel, Moussa Dadis CAMARA a souvent les nerfs à fleur de peau. Il est sur la défensive et a beaucoup de mal à accepter les critiques et même parfois les propositions des partis politiques, préférant s’appuyer sur la société civile et les jeunes. Il est vrai que ces partis n’ont fait preuve ni de courage ni même d’initiatives sous le régime précédent, mais il y a là un danger de démagogie et de pouvoir personnel. Par ailleurs, la population supporte de plus en plus les exactions de certains militaires et cela porte préjudice au pouvoir actuel. mais surtout les gens deviennent de plus en plus pauvres, car on a fait plus pour lutter contre la corruption que pour mettre les gens au travail et surtout leur donner les moyens de travailler. C’est cela notre souci. C’est sûr qu’il faut revoir les contrats des sociétés minières, car ils sont établis vraiment au détriment du pays, par exemple. mais notre souffrance c’est de voir les gens devenir de plus en plus malheureux, sans que l’on puisse faire quoi que ce soit.

  • Jeudi 7 mai :  Après toute cette absence, de nombreux documents m’attendaient ; je les travaillerai au fur et à mesure, la nuit. Il me faut parer au plus pressé.
    La 1ère chose, nous nous retrouvons au C.R.S. (Secours Catholique Américain) pour faire le point de nos différentes activités en cours : lutte contre le paludisme, travail avec les enfants de la rue, activités de vacances dans les quartiers, formation d’observateurs pour les élections, projets de développement dans le nord du pays, écoles de brousse, etc… Les activités ne manquent pas et les projets encore moins ! 

  • Semaine du 26 avril au 6 mai : Séjour à Dakar
    Problèmes d’avion.
    A la fin de notre rencontre, nous apprenons que la Compagnie Air Sénégal International a fait faillite. Elle était soutenue par Royal Air Maroc, mais les deux Compagnies ne se sont pas entendues. Or, j’ai un billet d’Air Sénégal pour mon retour à Conakry, prévu pour le lundi 27. Avant même la fin de notre rencontre, le dimanche 26 je pars à 4 heures du matin… au cas où il y aurait un désistement sur le vol d’Air Mali, mais nous sommes plus de 20 à attendre et il n’y a qu’une place libre en classe affaires, avec un fort supplément à payer. Je laisse la place à mon confrère camerounais, Armand, car il doit assurer une conférence et l’animation de la 1ère journée du pèlerinage diocésain de Boffa. Normalement, en tant que curé, je devrais y être et faire l’ouverture. Ils se passeront de moi !
    Et je m’empresse d’aller prendre un nouveau billet. La 1ère place que je peux trouver, c’est pour le mercredi 6 mai ! Je la réserve immédiatement. Bien sûr, tout cela ne m’arrange pas du tout. mais ça ne sert à rien de s’énerver, il vaut mieux prendre les choses du bon côté. Air Sénégal a promis de nous faire rentrer par les autres Compagnies. J’en parle à un ami sénégalais (il a plus de chances que moi d’obtenir une place !). Il va chaque jour à l’agence, et à chaque fois on lui dit :  revenez demain . Ce sera  demain  jusqu’au 6 mai !
    En fait, Air Sénégal a bien loué un avion mais c’est pour ramener en France les touristes venus au Sénégal, et autres hommes et femmes d’affaires. Il faut préserver les bonnes relations qui sont rentables ; et ce n’est pas le cas des voyageurs qui vont à Conakry : ils peuvent attendre !
    Je ne crois même pas que notre billet sera remboursé.
    Préparation du Synode.
    Heureusement, comme toujours j’ai amené des dossiers avec moi et de la lecture. Je travaille les réactions des Commissions de Justice et Paix de Guinée au document de travail du prochain synode pour l’Afrique : réconciliation, justice et paix. (Mettre un lien avec la rubrique  Justice et Paix , Synode – de mon site). J’ai profité de la présence à notre rencontre de Winfried, mon successeur à Mongo, responsable de la Commission  Justice et Paix  du diocèse de Kankan, pour finaliser le document. Je l’envoie à saisir à Jocelyne qui saisit toutes ces nouvelles (merci à elle !), et aussi à Jean-Jacques qui en fait la diffusion. Dès la réception du document sur mon ordinateur, je le transmets rapidement à Accra, au secrétariat panafricain de Justice et Paix qui préparera une synthèse générale pour toute l’Afrique.
    Compte-rendu.
    Ensuite, je prépare le compte-rendu narratif et financier pour les six derniers mois des activités des deux Commissions :  Justice et Paix  et  Pastorale sociale pour C.R.S. qui nous donne un coup de main pour nos activités. C’est un gros travail à faire tranquillement et d’un seul coup, à la suite. Aussi, finalement je suis heureux de ce temps libre qui me permet de le faire. Heureusement que j’ai amené les documents avec moi.. Et je peux également mettre à jour mon courrier qui restait en souffrance !
    Visites.
    J’apprécie ce temps pour faire un certain nombre de visites :
    Chez mes camarades de classe des années 50 à Dakar, qui me donnent des nouvelles de tous les anciens et me montrent les photos de l’époque qu’ils ont conservées avec soin. Nous les regardons avec beaucoup d’émotion.
    Je vais aussi chez Gisèle. Nous avons travaillé plus de 10 ans (dans les années 80-90) quand j’étais à St Louis, à l’éducation aux droits humains, à la réalisation de jeux pédagogiques sur les droits de l’homme et de l’enfant, et à la formation de formateurs, à partir d’Amnesty International. Je reçois quelques appels téléphoniques d’anciens collaborateurs, toujours actifs. Et nous allons présenter nos condoléances à une des formatrices de l’équipe qui vient de perdre sa mère âgée. Malgré ces tristes circonstances, nous sommes très heureux de nous revoir et prenons le temps de parler ensemble.
    Le samedi soir, le moment où ils sont un peu plus libres, je vais passer la soirée chez Félicien et Bénédicta, deux amis togolais, tous deux médecins. Avec eux, nous avons travaillé pendant 16 ans à l’éducation familiale : éducation sexuelle des jeunes, préparation au mariage, formation des couples, régulation des naissances, etc… Ils me disent où en sont ces actions qui se continuent jusqu’à maintenant. Un certain nombre des premiers éducateurs, grâce à la formation reçue, ont pris des responsabilités au niveau du pays. L’une d’entre eux vient d’être nommée Ministre d’Etat… de la famille, la femme et l’enfant, bien sûr !
    Je voudrais bien monter à St Louis revoir les amis avec qui j’ai travaillé de 1980 à 1996, avant de partir dans les camps de réfugiés de Mongo en Guinée, mais j’y renonce, car chaque jour on me promet une place pour Conakry et je ne voudrais pas la manquer, pour rejoindre le pèlerinage de Boffa qui est un moment très important de prière mais aussi de rencontres, de partage et de formation pour le diocèse et même tout le pays.
    Je vais aussi rencontrer les jeunes en formation au philisophat (1er cycle) et au théologat (2ème cycle) ; parmi eux, il y a des jeunes Guinéens de Mongo et Kataco que je connais bien. Là encore, nous sommes très heureux de nous retrouver.
    Repos…
    Finalement, comme je ne pars toujours pas, je prends plusieurs jours de repos, qui me font beaucoup de bien. Plusieurs confrères sont encore à notre maison régionale pour des soins, des courses ou autres activités. Nous prenons le temps de parler ensemble de nos différentes activités. C’est très agréable, cela nous permet de mieux nous connaître et nous donne force  et courage pour l’avenir.
    Mercredi 6 mai, départ sans problème pour Conakry. Enfin ! Je voyage en compagnie de responsables des Frères du Sacré-Cœur, venus visiter les communautés et leurs collèges en Guinée.

  • Mardi 14 avril :  L’Evêque a été appelé d’urgence au MALI pour la commission d’Afrique de l’Ouest des relations avec les musulmans et le regroupement des deux Conférences des Evêques d’Afrique de l’Ouest (francophone et anglophone). L’un ion se fait. C’est une très bonne chose, mais c’est du boulot ! Le vicaire général qui devait remplacer l’Archevêque me téléphone à 2 heures du matin qu’il est malade et ne peut pas venir. Je vais donc présider la célébration. Avec Igbé, le vicaire, nous préparons une cérémonie en langue baga. Nous y mettons beaucoup de soins car nous voulons que cette célébration marque vraiment une étape et un progrès pour la paroisse. Et qu’elle soit l’occasion d’une vraie réconciliation et d’un nouveau départ.
    Nous commençons par une longue demande de pardon où chacun vient se laver les mains devant l’autel, pour montrer qu’on veut laisser le passé. Puis un temps de réconciliation à l’intérieur des deux familles des jeunes responsables de l’assassinat, avec les autres familles, entre les différents quartiers de Kataco, avec les autres communautés de la paroisse. Comme Evangile, je repars de l’Evangile du semeur : le Frère Joseph a été semé dans notre terre : qu’allons-nous faire de cette semence ? Comment allons-nous continuer ce qu’il a fait ? Quelle terre allons-nous être ? Pour porter quels fruits ? – A la fin de l’Eucharistie, nous reprenons les différents engagements pris au moment de l’ouverture de l’église. Puis nous terminons notre célébration par une prière autour de la tombe du Frère Joseph, où un ancien s’adresse à tous pour affirmer la volonté de changement et de réconciliation. 

  • Lundi 13 avril :  Malgré les fatigues de la veille, il nous faut partir tôt pour Kataco, pour préparer la veillée mortuaire du Frère Joseph DOUET (1er anniversaire de sa mort). Nous en profitons pour tenir une réunion avec les Frères regroupés à cette occasion, au sujet de leurs activités : école primaire, collège, internat, et tout le travail d’éducation qui tourne autour. 

  • Dimanche de Pâques, dans une autre paroisse : Ste Odile.
     Ce matin, en plus du baptême des bébés,, il y a les mariages des nouveaux baptisés de la veille, où, là encore, nous partons des rites du mariage traditionnel : offrande de la noix de cola (signe d’engagement), du vin de palme, bénédiction des objets de travail, etc.. Cette fois-ci, ce sont bien sûr les témoins et les parents des mariés qui sont intervenus, avec les conseils et les bénédictions traditionnels. Au moment de partir, on me donne une partie des offrandes de la messe : ce ne sont pas des fleurs, mais des choses plus utilitaires et plus utiles : 1 litre d’huile, 3 boîtes de lait, du savon et des fruits. Cela nous permettra d’améliorer notre repas pascal de ce soir ! 

  • Samedi Saint : Très belle cérémonie de la veillée pascale, avec chants, danses, lectures partagées et commentées par l’assemblée. Baptême de 90 enfants, jeunes et adultes, où les catéchistes, parents, parrains et marraines, responsables de communautés sont intervenus, chacun selon ses responsabilités. Nous avons repris les rites de l’initiation traditionnelle, comme je le faisais déjà à Mongo. Et un certain nombre de symboles expliqués selon les valeurs culturelles et la vie de tous les jours : la noix de cola, les palmes, le fagot symbole d’unité, mais aussi l’eau, la lumière et le feu, les pierres, etc… La sortie des nouveaux baptisés, en blanc (après qu’ils aient changé d’habits), en dansant devant toute la communauté qui chantait et tapait dans les mains, a été spécialement émouvante. Nous avons terminé tard dans la nuit, mais cela ne nous a pas empêché de partager le repas de la fête avant de nous séparer. 

  • Vendredi Saint :  A la fin de la cérémonie, nous avons fait une veillée mortuaire pour Jésus, notre grand frère qui vient de mourir, comme on le fait au village : la Croix enveloppée dans un beau pagne, sur une natte, entourée de bougies, avec les chants mortuaires traditionnels. 

  • Jeudi Saint, 9 avril :  Comme ce sont les vacances, l’internat est fermé. Bulus, notre stagiaire, peut se reposer un peu, car en période scolaire il est pris 24 heures sur 24 ! Pour se changer les idées, il est venu à Conakry. Il m’accompagne toute la journée pour découvrir les différentes activités de nos deux commissions. Sa présence m’intéresse aussi, car nous pouvons parler ensemble de nos différentes activités et c’est toujours enrichissant d’avoir l’avis de quelqu’un d’autre. Surtout quand il est impliqué et intéressé.
    Aujourd’hui, comme habituellement, de nombreuses personnes se présentent : une mère qui n’a pas les moyens de changer l’appareil de son enfant handicapé et qui a grandi, des mendiants chassés par la police, des enfants de la rue, des malades du SIDA. Et, en même temps, il faut préparer le livret des marcheurs du prochain pèlerinage et le message des évêques à la nation, (Aspirations au changement. Effort de tous et de chacun) que je vous enverrai dès qu’il sera publié.
    Sur mon mail, je reçois un questionnaire pour préparer le prochain synode et une demande pour préparer une coordination des Commissions  Justice et Paix  de l’Afrique de l’Ouest. Il faudra trouver un moment pour réfléchir calmement à tout cela, et rédiger quelque chose qui se tient. 

  • Jeudi soir :  A Kataco, comme l’église centrale vient d’être réouverte, toutes les communautés vont se regrouper à Kataco-Centre. 

  • Mardi 7 avril :  Comme chaque année, nous nous retrouvons toute la journée autour de notre Evêque pour faire le point de notre travail, depuis la session d’Octobre. La rencontre se terminera par la messe chrismale avec l’ensemble des chrétiens. Le détail au prochain courrier.
    En attendant, bonnes fêtes de Pâques et toute mon amitié et ma reconnaissance pour les soutiens de toutes sortes que vous nous apportez. 

  • Lundi 6 avril :  Reprise du travail à Conakry. J’aurais bien voulu me reposer un peu, mais comme j’ai été beaucoup absent de la capitale, il y a des tas de choses à faire. 

  • Mercredi 1er avril :  Réouverture de l’église de Kataco
    Tôt le matin, avec l’Archevêque, nous quittons Conakry. A notre arrivée à Kataco, nous écoutons le compte-rendu des responsables, sur les trois jours de préparation. Puis nous commençons l’Eucharistie qui se déroule dans la joie bien sûr. Dans son homélie, l’Evêque insiste sur la vérité et l’humilité nécessaires pour construire des communautés vivantes. Et il donne ensuite un certain nombre d’orientations pratiques pour la vie des communautés de base.
    Le Forum des jeunes
    A 15 heures, nous partons en marche pèlerinage vers Katacodi, à 10 km, pour une grande rencontre des jeunes de toute la région du BAGATAYE. Elle n’avait pas pu avoir lieu fin décembre à cause de la prise du pouvoir par les militaires. Le thème en est :  Jeunesse missionnaire, avenir de l’Eglise et du Pays . En Septembre 2008, l’Evêque avait envoyé un message aux jeunes, suite à l’assassinat du Frère Joseph par deux jeunes drogués, venus le voler, sans doute poussés par des  anciens  qui se voyaient perdre leur pouvoir traditionnel, du fait de notre travail de développement
    Ce message de l’Evêque appelait les jeunes à se reprendre en mains et à réagir contre le vol, la drogue et les pratiques  fétichistes  traditionnelles. Il les encourageait à s’engager plus activement dans les mouvements d’action catholique et les actions de développement. Le message les appelait à animer les communautés de base de quartiers et de villages et à travailler pour la justice, la paix et la réconciliation. Enfin, l’Evêque invitait les jeunes à s’impliquer davantage dans la société et la vie du pays.
    Depuis Octobre, les jeunes ont travaillé ce message. La rencontre a ainsi commencé par l’écoute des rapports des cinq paroisses du pays baga (notre doyenné, qui s’étend sur plus de 200 km, chaque paroisse regroupant de nombreuses communautés, lieux de culte). Ces rapports ont été sérieusement analysés pour dégager les problèmes essentiels des jeunes et chercher des solutions, pendant trois jours de travail intense. L’analyse de la vie des jeunes nous a permis d’accueillir leurs questions et propositions sur les parents et la vie de famille, les médias, les conseils paroissiaux, les prêtres, les catéchistes, la pauvreté, le chômage et le sous-développement, etc…
    Les homélies ont été aussi un temps fort de réflexion : l’une, sur la vie et l’action du Christ, en particulier pour relever et responsabiliser les gens ; son engagement en faveur des pauvres et des petits et pour défendre les droits des enfants, des femmes, des rejetés, des étrangers, des exploités, etc… (les  païens et les pécheurs ). La seconde, sur les béatitudes. La 3ème sur l’Espérance, basée sur la mort et la résurrection du Christ.
    Tout cela a abouti à un plan d’action, dont nous évaluerons la mise en pratique périodiquement. En tout cas, voilà tracée une ligne de travail précise pour les mois qui viennent, ce qui est une grande chance.
    La rencontre avait lieu dans un Collège conçu et construit par le Frère Joseph lui-même, à environ 10 km de la ville de Kamsar. Le samedi, nous avons rejoint la ville au cours d’une marche pénitentielle. Le soir, nous avons eu une veillée de prière qui s’est prolongée jusqu’à minuit.
    Le lendemain, Fête des Rameaux : procession à travers la ville où les musulmans nous ont encouragés et regardé passer avec beaucoup de respect. La célébration a été marquée par une demande de pardon à partir de la vie des jeunes, une offrande de leurs travaux à l’offertoire, une lecture du plan d’action et une cérémonie d’engagement au cours de laquelle on a remis aux responsables du sel et un cierge allumé :  Vous êtes le sel de la terre. Vous êtes la lumière du monde .
    Tous sont sortis en dansant et en agitant les palmes des rameaux.
    Après un repas frugal (de l’eau seulement comme boisson, du riz, nourriture de base de chaque jour) mais plein de joie, nous avons repris la route de Conakry…. 5 heures de route ! 

  • Mardi 31 Mars :  La Commission de  Pastorale sociale  se réunit pour examiner les cas qui nous ont été présentés : une femme seule et sans travail, avec 5 enfants ; l’orphelinat que nous suivons depuis le mois dernier ; une école primaire qui accueille essentiellement des orphelins, du SIDA en particulier, et beaucoup d’autres cas encore. Cela nous amène à revoir le fonctionnement de nos commissions paroissiales. 

  • Lundi 30 Mars :  Longue séance de travail sur nos différents projets de développement. L’après-midi, nous devions enregistrer deux nouvelles émissions de télévision (une, sur  Justice et Paix , une sur l’Evangélisation et le Royaume de Dieu) mais la caméra, tombée en panne jeudi dernier, n’est toujours pas réparée. On ne sait d’ailleurs pas quand elle le sera et il n’y en a qu’une à la Télévision nationale pour les émissions religieuses ! 

  • Vendredi 27 – Dimanche 29 Mars :  La situation à Kataco.
    La route, goudronnée, est pleine de trous. C’est pire qu’une piste ! Nous n’arrivons qu’à 17 h 30 (partis à 13 heures). Après le Chemin de Croix, nous nous retrouvons avec la communauté de Kataco-centre et les représentants des neuf communautés de village, pour lancer la réflexion. Nous sommes venus évaluer la situation à la suite de la fermeture de l’église de Kataco-centre, après l’assassinat du Frère Joseph. Il ne s’agissait pas d’une punition collective, mais d’une décision longuement mûrie et prise en concertation avec tous, (en vue de marquer la gravité de cet assassinat, point d’aboutissement d’une longue série de menaces et d’actions négatives de blocage de notre action missionnaire) en vue de créer une réflexion approfondie, un changement de comportement et un réveil de la communauté. Il fallait donc évaluer la vie de cette communauté, tout au long de cette année.
    Cette évaluation est très délicate. Nous la préparons sérieusement la nuit. Le matin, nous nous retrouvons avec toute la population. Le Sous-Préfet, la Président du district et les autres autorités locales (chefs de village et de quartier, etc..) viennent nous assurer de leur soutien. Le responsable local de la ligue islamique et les imans de toute la région nous saluent et nous assurent de leurs prières. Puis nous commençons la réflexion. Pour nous, il s’agit de voir ce qui a été vécu tout au long de l’année passée, pour évaluer la volonté de changement de la communauté chrétienne et de toute la population. Mais c’est très difficile, les différents intervenants préférant s’orienter vers des demandes de pardon, avec beaucoup de pleurs et de lamentations, et de promesses renouvelées pour l’avenir. Ou, simplement, à demander la réouverture de l’église. Peu à peu, nous arrivons cependant à cerner la réalité au bout de plusieurs heures d’écoute et de partage. Bien sûr, les choses sont mélangées :
    la communauté de Kataco-centre a continué à prier chaque dimanche (dans la salle du Centre Culturel), mais n’a pas accepté d’aller participer à l’eucharistie dans les villages voisins) ;
    on ne vend plus et ne fume plus de drogue (chanvre indien) dans le village ; mais les jeunes ont toujours de la peine à se réunir et à s’engager. Ils ne veulent pas travailler, mais préfèrent le football. Ils attendent de l’aide et des cadeaux, plutôt que s’engager et d’agir par eux-mêmes… Bien sûr, certains jeunes sont vraiment engagés, cependant ils ont de la peine à entraîner les autres.
    Au niveau des adultes, les femmes sont beaucoup plus investies que les hommes. Et les communautés ont de la peine à se réunir, et surtout à dépasser le stade de la prière, pour s’engager dans les quartiers et transformer la société.
    Mais il vaut mieux voir ce qui va bien, plutôt que ce qui va mal, et le soutenir. Et une mesure, aussi éducative se veut-elle, ne peut pas durer éternellement. L’Evêque, après avoir longuement écouté les différents groupes (hommes, femmes, jeunes, responsables des communautés chrétiennes, responsables administratifs et musulmans) et largement pris conseil, a décidé d’ouvrir à nouveau l’église de Kataco-centre. Les différents groupes ont pris d’abord un certain nombre d’engagements et l’ouverture de l’église ne se fera que mercredi prochain, après trois jours de démarche pénitentielle et de préparation spirituelle. Demain, nous irons donc dans la communauté voisine de Maré pour célébrer l’eucharistie.
    Cette réflexion a duré très longtemps. Il a fallu que les positions évoluent peu à peu et que la réconciliation et le partage puissent se faire. Si bien que nous n’avons mangé qu’à 1 heure… du matin ! Il faut dire qu’entre deux rencontres, nous avons intercalé une réunion de mise au point de la grande rencontre des jeunes de mercredi, avec les animateurs et le comité d’organisation.
    Le dimanche, à Maré, la joie était grande et la célébration intense, pleine de joie et très belle. Avec regret il a fallu se quitter plus tôt que nous l’aurions voulu pour dépasser les plus mauvais tronçons de la route avant la nuit. 

  • Vendredi 27 Mars :  Préparation du pèlerinage diocésain.
    C’est un grand événement, avec plusieurs milliers de personnes, qu’il nous faut donc préparer sérieusement, d’abord au niveau matériel. Cela demande beaucoup de temps et ce n’est pas tellement  mon truc , mais il faut bien le faire ! Mais c’est aussi l’occasion de se retrouver, de travailler ensemble, et de faire avancer beaucoup de choses. Les chrétiens de Boffa acceptent de travailler bénévolement, car nos moyens sont très limités. Ils vont débrousser le sanctuaire, avec l’aide des élèves et tous les habitants de la ville, musulmans comme chrétiens, car c’est toute la ville qui se mobilise à cette occasion. Et c’est un très gros travail. Nous avons besoin de la participation de tous. Ils vont aussi préparer des latrines et un nouveau parcours pour la procession mariale (à défricher), tout cela gratuitement, comme participation volontaire de la paroisse, soutenue par tout les citoyens de la ville, pourtant en grande majorité musulmans.
    Là encore, il a fallu régler certains problèmes et désamorcer certaines tensions, en particulier entre les responsables de Boffa et le Comité d’organisation venu de Conakry. La lutte pour le pouvoir existe partout et à tous les niveaux ! Nous avons réglé les problèmes et nous avons décidé de nous retrouver après le pèlerinage pour une journée de prière, en vue d’une réconciliation en profondeur.
    Sans plus attendre, nous partons pour Kataco. 

  • Jeudi 26 Mars :  Kataco.
    Le Conseil épiscopal se réunit pour voir ce que l’on va faire par rapport à Kataco. En effet, l’église a été fermée pour une année, pour pousser la communauté à se reprendre et à repartir sur des nouvelles bases. Il s’agit : d’évaluer la vie de cette communauté et les efforts faits ; de voir comment réconcilier les différentes personnes concernées ; de prévoir un temps fort de pardon et de pénitence, pour ensuite ouvrir l’église afin de pouvoir y célébrer les fêtes de Pâques. Puis, ensuite, la première messe anniversaire de l’assassinat du Frère Joseph, d’autant plus que sa famille va venir au pays prier sur sa tombe et participer à notre grand pèlerinage diocésain de Boffa.
    Tout cela est très délicat et nous voulons arriver à une vraie guérison des cœurs, profonde et durable, pour repartir dans la paix et l’espérance. Nous faisons donc des propositions pour toutes ces cérémonies et activités.
    Dans un deuxième temps, nous réfléchissons au travail avec les enfants de la rue, le suivi dans les quartiers et l’animation des foyers, car il y a des tensions entre éducateurs et responsables, en ce moment. 

  • Mercredi 25 Mars :  Atelier Savoir Fer
    Rencontre de l’équipe d’animation de l’atelier de soudure des enfants de la rue. Les choses avancent très bien. Les apprentis sont bien formés et bien suivis par les formateurs, si bien que leur travail est apprécié. C’est une très bonne chose en soi, cependant le danger c’est qu’ils soient trop pris par la production au détriment du temps nécessaire à la formation professionnelle, qui est notre priorité et essentielle pour l’avenir de ces jeunes. 

  • Mardi 24 Mars :  Travail personnel et lecture, courrier. 

  • Lundi 23 Mars :  Reprise des activités – Internet. 

  • Dimanche 22 Mars :  Je vais donc à Sangoya, dans une grosse paroisse de Conakry qui n’a pas de prêtre cette année. Il faut dire qu’il y a plus de 25 paroisses pour toute la ville et les prêtres ne sont pas encore assez nombreux, malgré un nombre important de vocations. 

  • Samedi 21 Mars :  La rencontre a été annulée au dernier moment. C’est dommage, d’autant plus que j’avais prévu un travail avec la paroisse, un arrêt dans un Centre de handicapés tenu par deux jeunes coopérants français envoyés par l’ONG Guinée-Solidarité qui assure des transports de containeurs pour nous, et une rencontre avec la Commission  Justice et Paix  de Mamou. Mais de telles choses arrivent souvent. C’est toujours difficile d’organiser de telles activités. 

  • Vendredi 20 Mars :  Départ pour Dalaba, au Centre du pays, dans le Fouta Djallon, pour une réflexion avec les étudiants sur les Droits de l’Homme. 

  • Jeudi 19 Mars :  Fête de St Joseph ouvrier. Il a du travail à faire pour soutenir les travailleurs de Guinée, surtout ceux du secteur informel, des petits métiers et de tous ceux qui se débrouillent pour survivre. Sans parler des chômeurs ! Et pour protéger les syndicats de Guinée engagés dans la reconstruction du pays.
    Aujourd’hui, je travaille avec mes deux commissions pour trois choses importantes : 1) Réorganiser l’OCPH (Caritas, le Secours Catholique de Guinée). 2) Préparer notre rencontre avec le Ministre de la décentralisation. 3) Préparer deux émissions de télévision, à partir du travail de chacune des deux commissions de  Justice et Paix  et de  Pastorale sociale . 

  • Mercredi 18 Mars :  Je termine mes cours sur Justice et Paix. Mais pas moyen de rentrer. La ville est bloquée par l’enterrement du Ministre de la décentralisation, un homme très actif, sérieux et compétent, décédé brusquement. Cela a créé un grand choc. 

  • Dimanche 1er mars :  Réunion mensuelle de  Justice et Paix  à la paroisse de Dabompa.
    C’est la première fois que nous allons dans cette paroisse et nous sommes très bien accueillis. Comme d’habitude, nous cherchons à mieux organiser la commission paroissiale. Puis nous faisons le tour des activités avec les délégués de chacune des autres paroisses. Enfin, nous préparons les activités du mois à venir. 

  • Samedi 28 février : Emission à la télévision.
    Pendant le Carême, nous avons une demi-heure d’émission religieuse chaque jour à la télévision nationale. Les musulmans en ont autant pendant le Ramadan. On m’a confié deux émissions. Je les prépare ce matin. Je veux qu’elles soient animées. J’ai donc invité des jeunes de la chorale de la paroisse de Lambanyi pour qu’ils interviennent. Nos moyens sont limités, mais je me débrouille pour trouver des images et photos, et je prépare des papiers avec les renseignements nécessaires écrits au feutre. 

  • Vendredi 27 février : Deux cas dramatiques.
    Chaque jour, quand je monte à mon bureau, des gens se présentent dans des situations plus ou moins dramatiques. Mais ce matin, deux cas très sérieux que nous examinons ensemble avec l’équipe de pastorale sociale :
    D’abord le cas d’une femme bulgare qui s’était mariée pendant ses études d’architecture avec un étudiant guinéen, en Bulgarie. Ils sont venus vivre en Guinée. Mais il est parti au Mali avec leur fille, rejoindre une autre femme. La femme bulgare se retrouve à la rue et sans rien. Elle a fait une crise de nerfs terrible. On l’a conduite inconsciente dans une clinique où elle a été soignée, mais comme elle n’avait rien pour payer, on lui a pris son passeport.
    Elle vient nous voir, complètement découragée et n’ayant plus rien. Mais nous n’avons pas de centre d’accueil et il est très difficile de trouver une famille pour l’accueillir car toutes les familles sont surchargées à Conakry et les maisons surpeuplées.
    Le 2ème cas est tout aussi sérieux. Une femme a commencé à recueillir des enfants abandonnés, parfois dès la naissance, dans son quartier. Au fil du temps, le Ministère des affaires sociales lui à même confié certains enfants. Cette dame était soutenue par une ONG allemande. Mais, du jour au lendemain et sans aucun préavis, cette ONG a envoyé un mail disant que l’aide était immédiatement et totalement suspendue. Les enfants se sont retrouvés sans rien.
    Ils sont venus nous voir. Nous nous débattons de tous les côtés pour leur trouver quelque chose. En même temps, nous contactons journaux et radios libres pour faire connaître leur problème. Pour lundi, nous prévoyons une marche vers le Ministère des affaires sociales pour qu’ils fassent quelque chose. Nous les avons déjà contactés, mais ils nous ont dit que le chef de service était en voyage et qu’il fallait attendre son retour ! Nous allons voir aussi si nous pouvons obtenir un rendez-vous à l’UNICEF. Ce n’est vraiment pas facile.
    Le soir, rencontre avec  Concern Universal , une ONG catholique américaine à qui nous nous sommes adressés pour soutenir des petits projets de développement en zone rurale. Nous parlons longuement de la situation du pays, mais pour nos projets ils n’ont pas encore les moyens de nous aider. Patience ! Mais pendant ce temps-là, ce sont les gens qui souffrent. 

  • Jeudi 26 février :  Dernière série d’intervention au collège sur  Justice et Paix . A la pose de midi, rencontre avec les volontaires pour mettre en place une Commission  Justice et paix  au niveau des lycéens. 

  • Mercredi 25 février :  De 8 heures à 15 heures, interventions dans six classes du Collège de Dixim pour  Justice et Paix . Il ne s’agit pas seulement de présenter la commission et ses actions, mais d’apprendre aux jeunes à voir et à analyser ce qui les entoure et ce qu’ils vivent eux-mêmes, pour y découvrir ce qui se fait de bien, mais aussi les injustices et apprendre à s’organiser pour lutter ensemble contre elles. Ce n’est pas facile, mais les jeunes réagissent très bien pour la plupart, souvent avec beaucoup de créativité et d’originalité.
    A la pose de midi, je commence une série d’interventions avec les lycéens sur la sexualité. C’est un thème qui les intéresse et les touche directement. Comme il y a beaucoup de volontaires, je vais revenir chaque semaine.
    A la fin de mon dernier cours, on me demande au téléphone pour diriger deux célébrations des Cendres. Un confrère est malade et il me faut le remplacer à pied lever. Je saute donc dans un taxi. Je n’ai rien préparé à l’avance, mais j’ai déjà célébré cette cérémonie tellement d’années (et en tellement de langues !) qu’il n’y aura pas de problèmes. De toutes façons, je viens de préparer une émission pour la télé sur le Carême, donc j’ai des choses à dire ! La cérémonie se passe sans problème, mais je prends soin de bien donner le sens des centres dans la vie de chaque jour. Les cendres du foyer signe du feu de l’amour qui s’est éteint dans nos foyers et dans nos cœurs ; les cendres des champs brûlés pour les semailles, signe que nous voulons nous préparer pour les semailles dans nos vies et nos quartiers ; les cendres du fourneau du forgeron qui met le fer au feu pour en faire des outils solides et bien à main, signe que nous voulons être des bons instruments dans les mains du Christ, au service du Royaume. Comme il y a énormément de monde, car c’est une cérémonie qui parle beaucoup aux gens (même des musulmans y participent), on a prévu six personnes pour m’aider à distribuer les cendres. Mais ils n’ont choisi que des hommes ! Dans la culture locale, c’est normal. Mais il faut quand même que les choses évoluent ! Je demande donc qu’on ajoute six femmes. Ce que les gens acceptent d’ailleurs sans problème.
    La cérémonie terminée, je saute dans un nouveau taxi pour rejoindre la 2ème paroisse où l’on m’attend patiemment depuis une heure. Il y a plus de 2.000 personnes, mais grâce à une batterie et un micro sans fil et donc transportable, le gens peuvent intervenir pour le partage de la Parole de Dieu. 

  • Mardi 24 février :  Aujourd’hui, travail, le matin, avec le C.R.S. pour revoir toutes actions que nous menons ensemble. Et l’après-midi, c’est le tour de l’OCPH nationale ! 

  • Lundi 23 février :  La semaine commence avec les différentes activités à organiser. Aujourd’hui, le gros travail c’est de terminer la correction de la lettre de Carême du diocèse, d’en préparer l’impression et la distribution. Et aussi celle du message du Pape. Pour cette lettre, nous avons voulu faire un texte pratique, avec des questionnaires  opérationnels  en douze parties, une par semaine, jusqu’au pèlerinage de Boffa qui est le sommet de l’année pastorale. Vous trouverez cette lettre dans mon site. (Mettre un lien :  activités paroissiales  : lettre de Carême 2009). Puis, c’est le travail sur les banques alimentaires (lien :  Pastorale sociale) avec le délégué de IPHD venu des Etats-Unis et le responsable national. Ensuite, la préparation de la distribution de nourriture et de la rencontre des personnes vivant avec le VIH Sida. Puis une nouvelle réflexion avec Philippe de la DCC (Délégation Catholique à la Coopération) pour voir la possibilité d’accueillir des coopérants et là où ils seraient les plus utiles et efficaces, avec le soutien et le suivi à leur apporter. Enfin, c’est la préparation d’un projet d’école de catéchistes travaillant en zone rurale. Le but est de les former en couple, ensemble mari et femme, de les former à leur responsabilité de catéchistes capables d’animer toute la vie chrétienne de leur village et pas seulement la catéchèse : prières du dimanche et autres prières, préparation au baptême et au mariage, soin des malades et enterrements, mais aussi l’aide aux pauvres et le développement du village (la pastorale sociale), l’animation des jeunes, les mouvements d’action catholique, justice et paix, etc… Ils ont beaucoup de choses à faire. Il leur faut donc une formation sérieuse et il est important qu’ils vivent tout cela en couple.
    n même temps, nous voulons leur donner une formation de base (lecture, écriture, calcul) plus poussée, et surtout une formation technique. Spécialement dans les domaines de l’agriculture, de l’élevage et de l’artisanat (mécanique, menuiserie, etc…). Cela non seulement pour leur permettre de mieux vivre, mais surtout leur permettre d’être des moteurs, agents de développement dans leur village. Ceci en les formant à de nouvelles techniques d’agriculture et d’élevage, simples et adaptées aux réalités du pays, et aux techniques de transformation des produits, etc… C’est une œuvre de longue haleine, mais justement c’est pour cela qu’il faut la construire sur des bases solides.
    vec tout cela, sans parler des petits problèmes ordinaires et des nombreuses visites, la journée passe vite. 

  • Dimanche 22 février : Pastorale sociale.
    Toute la journée, réunion de la commission diocésaine : évaluation de la mise en place des commissions paroissiales et des actions menées. Les choses avancent et un certain nombre de groupements de développement se mettent en place, pris en charge par les personnes elles-mêmes. C’est un grand espoir pour nous. Nous prenons deux temps de formation : 1. sur le développement intégral (plan d’action du diocèse) ; 2. sur la façon de travailler avec les malades et les pauvres, à partir de la guérison du paralytique dans l’Evangile de ce jour. (Mettre un lien avec  Pastorale sociale , L 56). 

  • Samedi 21 février : La Société civile guinéenne.
    Depuis les manifestations de 2006, l’état de siège, et les tueries de 2007, la Société civile s’est encore mieux organisée et la population s’est réveillée. Et cela est encore plus vrai depuis la prise de pouvoir par les militaires le 23 décembre dernier. (Mettre un lien avec la  Situation du pays ) Il est important que notre Commission  Justice et Paix  s’y engage et que les chrétiens prennent leur part de responsabilité dans ce mouvement. Mais cela demande une réflexion approfondie. C’est pourquoi nous avons organisé une rencontre avec Madame Saran Daraba, vice-présidente du CNOSC (Coordination Nationale des Organisations de la Société Civile). C’est une femme très dynamique et engagée. Je l’ai connue quand je travaillais dans les Camps de réfugiés, en 2000-2001 à Mongo, au moment des attaques rebelles, car elle est également responsable des femmes de la Rivière Mano, une organisation regroupant des femmes du Libéria, Sierra Leone, Guinée, et maintenant Côte d’Ivoire, qui ont beaucoup travaillé pour le retour de la paix et maintenant pour la réconciliation et la reconstruction de ces quatre pays. Le deuxième intervenant est Michel Kamano, le responsable national du Conseil économique et social, un autre ami de longue date, depuis mon arrivée en Guinée en 1996.
    Nous voyons ce qu’est la Société civile actuellement en Guinée et son évolution depuis l’Indépendance jusqu’à la prise de pouvoir actuelle par les militaires. Comment y participer ? Quelles motivations nous apporte notre foi et quelles actions mener ? Il est clair que, vu la situation actuelle, il y a beaucoup à faire ; il faut être vigilants et ne pas se laisser récupérer. Nous y veillons dans notre Commission. (Mettre un lien avec  Justice et Paix  : société civile).
    Parmi les actions menées : réinsertion des  volontaires  soldats pendant les attaques rebelles, en leur donnant une formation technique afin qu’ils trouvent un emploi ; mobilisation des femmes ; revalorisation des cultures traditionnelles ; emploi des jeunes ; lutte contre la drogue ; etc. Le travail ne manque pas !
    Le soir, nous terminons la mise au point de la  Lettre du Carême pour le diocèse . En ce moment décisif pour la vie du pays, il y a beaucoup à dire… et à faire. Nous travaillons le document le plus sérieusement possible, en équipe, dans la Commission, en partant des lettres de St Paul, puisque cette année lui est consacrée. Notre thème d’année est :  Paul, missionnaire, fondateur de communautés . (Site : lien avec la lettre de Carême :  activités paroissiales ). 

  • Jeudi 19 février : Rencontre de doyenné, comme chaque trimestre.
    Nous sommes toujours aussi heureux de nous retrouver entre Prêtres, Frères et Sœurs, dans une ambiance très fraternelle. Aujourd’hui, nous avons un ordre du jour très chargé, aussi après avoir pris le temps de nous saluer et d’échanger des nouvelles, nous nous mettons sérieusement au travail.
    1. La situation du pays.
    Le pays est en pleine transformation. C’est notre devoir de prendre part à sa reconstruction, à travers tous les appels qui sont lancés par les militaires du CNDD (Comité National pour la Démocratie et le Développement) : conscience professionnelle et remise au travail ; vérité et transparence ; lutte contre la drogue, la corruption et l’insécurité, etc.. Nous nous disons que la première chose à faire c’est d’abord de vivre nous-mêmes tout cela et de nous engager personnellement avant de vouloir conseiller les autres. Au niveau de  Justice et Paix , nous nous interrogeons en particulier sur les salaires que nous donnons à nos différents employés et travailleurs. La faiblesse de nos moyens financiers ne doit pas être une excuse pour ne pas les payer normalement.
    Nous voyons ensuite comment engager nos communautés et mouvements dans cette lutte pour une société nouvelle : en commençant par la clarté dans les finances. Nous ne pouvons pas nous limiter à des discours et des conférences. Il faut vraiment nous mettre à l’action et agir efficacement.
    Dans cette action, nous voulons donner une place spéciale aux jeunes, en les écoutant et en les responsabilisant. Nous décidons que dans chaque réunion de CCB (Communauté Chrétienne de Base) et chaque groupe ou mouvement, on prenne un temps pour faire le point sur notre participation à la vie du pays et à l’avancée de la société guinéenne. Mais il n’est pas question de rester entre nous. Nous allons nous engager dans les différentes structures du pays et organisations de la société. Pas seulement au niveau national ou des commissions, mais à tous les niveaux, en partant de la base.
    1ère action : une formation dans les universités d’état sur les Droits de l’Homme, et  Justice et Paix . Nous allons commencer dans les universités de Boké et Dalaba. Ce sera une base pour élaborer nos propositions pour la reconstruction du pays, puisque le CNDD a demandé à tous leurs propositions pour renouveler la société guinéenne. C’est important d’apporter notre contribution.
    2. Le plan stratégique.
    Nous faisons le point sur la mise en pratique des quatre objectifs :
    a) la communion (entre tous et à tous les niveaux) ;
    b) la liturgie (prière, catéchèse, sacrements) ;
    c) le témoignage de vie (l’engagement dans la société et l’évangélisation) ;
    d) le service des hommes (rendre à tous leur dignité, la justice, la paix, le développement de tout l’homme et de tous les hommes).
    Ce Plan recoupe les différents domaines où nous devons agir. Mais il n’est pas suffisamment mis en pratique, parce que trop compliqué. Les chrétiens, de plus, n’ont pas l’habitude travailler à partir d’un plan d’action et d’une programmation. Et puis, il est trop compliqué. Nous voyons comment le reformuler pour le présenter d’une façon simple et plus opérationnelle.
    3. Les orientations et la session pastorale d’Octobre 2008.
    Nous reprenons ces orientations point par point :
    a) la communion entre prêtres ;
    b) les conseils paroissiaux ;
    c) la catéchèse et la formation des catéchistes ;
    d) la collaboration entre prêtres, religieux et religieuses.
    Pour ce dernier point, nous relisons et commentons le compte rendu de la réunion des religieuses du 24 janvier : Fête de la vie consacrée.
    4. Le travail avec les jeunes.
    La grande rencontre des jeunes prévue à Noël n’a pu avoir lieu à cause de la prise de pouvoir par les militaires. Et ce n’est pas facile de trouver une nouvelle date. Mais cela ne doit pas nous empêcher d’écouter les jeunes et de passer à l’action. Pour cela, nous reprenons le message aux jeunes de notre Evêque (site : lien avec le message à tous les jeunes :  activités paroissiales ) et nous élaborons un plan d’action. Puis nous nous arrêtons un moment sur la marche du scoutisme.
    Le scoutisme. Nous croyons à ce mouvement qui peut être un moyen important d’éducation des jeunes et d’engagement dans le développement du pays. Mais il rencontre bien des problèmes. Au temps de Sékou Touré, il a été supprimé et remplacé par  la jeunesse du parti  et depuis il a beaucoup de mal à se relever. Trop souvent, il se limite à des rassemblements, des chants et danses et des services d’ordre (ce qui d’ailleurs plaît beaucoup aux jeunes). Les activités se limitent à des choses formelles, comme le morse ou les nœuds, alors que cherchons un scoutisme de développement pour le service du pays. Mais beaucoup ne connaissent même pas la loi ou la B.A. pour le service des gens. Par conséquent, l’engagement de la promesse et la pédagogie du mouvement ne sont pas mis en œuvre. Cela va demander du temps, mais les choses avancent peu à peu.
    5. La paroisse de Kataco.
    Suite à l’assassinat du Frère Joseph, l’église de Kataco-Centre a été fermée. Malgré tout, nous sommes restés sur place : l’école, l’internat et le dispensaire continuent à fonctionner. En même temps, nous avons cherché comment réanimer le Centre. Aujourd’hui, nous voyons où nous en sommes. Tout n’est pas parfait, mais il y a des signes de réveil. Nous allons contacter l’Evêque pour voir comment soutenir ce réveil et que faire à l’avenir.
    Nous commençons aussi à préparer le 1er anniversaire de la mort du Frère Joseph, le 8 Avril.
    Nous prévoyons également une recollection (journée de prière) entre nous, et la prochaine rencontre (évaluation de l’année pastorale).
    Après les  Divers … affamés, nous partageons un repas très fraternel, frugal mais apprécié. 

  • Mercredi 18 février : Voyage.
    Longue attente à la gare routière…. Comme d’habitude : tant que le taxi brousse n’est pas plein, on ne part pas ! Il faut dire que le prix du voyage ne coûte pas cher, 3 € pour 150 km ce qui veut dire que les bénéfices sont minimes pour les transporteurs… même si cela fait très cher pour les gens, étant donné leur très faible niveau de vie.
    Du coup, j’arrive trop tard pour mon intervention au Noviciat. Nous ferons cela ce soir, ce qui me donne le temps de rencontrer les Sœurs, les enseignants et les paroissiens venus assister à la formation donnée chaque mercredi soir.
    Au Noviciat : Royaume de Dieu et Evangélisation : rencontre en soirée avec les novices.
    Aujourd’hui, nous reprenons le compte rendu de la rencontre des religieux et religieuses du 24 janvier (voir à cette date).
    Cela nous permet d’approfondir un certain nombre de principes de base et de fournir un cadre à notre engagement missionnaire : Que signifie  être missionnaire  aujourd’hui ? (Cela n’a rien à voir ni avec le prosélytisme, ni avec les  missionnaires  de  séminaires  scientifiques ou autres). Qu’est-ce que le Royaume de Dieu ? Un Royaume ouvert à tous, plus grand que l’Eglise, et qui est déjà là, partout où naissent et grandissent la justice, la paix, l’amour, le service des plus pauvres, le pardon, la vérité, la joie, etc. La paix, la joie et la justice de Jésus bien sûr, par n’importe laquelle ! Que signifie  Evangélisation  ? Ce n’est pas convertir, surtout pas de force, ni baptiser, mais permettre à tout homme de vivre dans l’esprit de l’Evangile, quelle que soit sa religion ou sa foi, en Dieu ou en l’homme. Et enfin, vivre notre vocation dans le monde moderne en sachant lire les  signes des temps , c’est-à-dire les appels que Dieu nous envoie à travers la vie des hommes d’aujourd’hui. Notre partage se poursuit jusqu’à minuit. Une réflexion très pratique, à partir d’exemples concrets, tirés en particulier des expériences vécues par les novices pendant leur stage de l’an passé. Il nous semble très important de leur fournir un cadre de réflexion et d’action à partir duquel centrer leur engagement. 

  • Mardi 17 février : Je me prépare à partir pour Kataco : grosse panne sur la voiture ! J’appelle le mécanicien qui a déjà réparé ce véhicule. Le téléphone, c’est quand même une belle invention ; et j’ai de la chance, car là où je suis arrêté il y a du réseau ! Je vais quand même attendre plusieurs heures. Le bloc moteur est cassé. C’est une pièce d’occasion que nous avions achetée à la casse, car nous n’avions pas assez d’argent pour acheter un moteur neuf. Il n’aura pas duré longtemps.
    La coopération. Philippe m’attendait à l’Archevêché. Il est envoyé par la DCC (Délégation Catholique pour la Coopération). Il vient nous demander si nous aurions besoin de coopérants pour nous aider pendant deux ans dans nos différentes activités. En fait les besoins ne manquent pas. Mais nous avons besoin de gens qui ont une sérieuse expérience professionnelle et qui peuvent s’adapter au contexte difficile de la Guinée. Et nous n’avons pas toujours les moyens de les prendre en charge. Par ailleurs, quand c’est possible, nous préférons donner du travail aux Guinéens qui en ont bien besoin ! Il n’empêche que ces coopérants peuvent être très utiles pour former des gens ou pour lancer des nouvelles activités, jusqu’à ce que des Guinéens puissent prendre les choses en mains.
    Avec Philippe, nous faisons connaissance et nous découvrons que la similitude de nos activités fait que nous avons de nombreux amis communs. Puis je lui présente la situation actuelle de la Guinée, et nous faisons le tour des écoles, dispensaires, centres de formation, aumônerie et autres activités de développement où des coopérants seraient les bienvenus. Je l’emmène dans un premier centre professionnel, et je dois le laisser pour poursuivre mes autres activités. Il y a en particulier plusieurs confrères venus de l’intérieur avec lesquels je dois parler pour voir comment les choses avancent. Je termine la journée à l’Atelier de soudure des enfants de la rue. 

  • Lundi 16 février : Reprise des cours sur les droits humains, au Collège de Dixinn. 

  • Vendredi 13 février : La Prison : préparation des différentes activités à venir et début de la formation pour animateurs de prison.
    Pendant cette session, nous partageons notre expériences, en particulier à Conakry, afin d’élargir notre action à toute la Guinée. Nous analysons la situation des prisonniers avec tous leurs problèmes de nourriture, de santé (maladies et manque total d’hygiène, d’où gale, tuberculose, diphtérie et des maladies qui se répandent, promiscuité (même si les mineurs ont un quartier à part, ils sont souvent envoyés  rendre service  aux prisonniers adultes), manque d’eau potable et de latrines, manque de suivi des femmes enceintes et qui accouchent en prison. Il est très difficile d’agir à ce niveau car souvent quand on apporte nourriture ou médicaments, ces produits sont détournés. De même que ceux qui sont fournis par le gouvernement. Ces derniers temps, il y a de plus en plus de prisonniers dénutris et donc de malades. A Boffa, la prison n’a reçu aucune nourriture depuis la prise de pouvoir par les militaires fin décembre. De plus, le personnel de la prison est mal formé (et aussi très mal payé), se laisse peu à peu entraîner à la violence et devient de plus en plus inhumain : coups, brimades injustifiées, punitions arbitraires, etc…. Découragé, il ne fait plus son travail sérieusement. De nombreux groupes et associations interviennent avec beaucoup de bonne volonté et même de générosité, mais en ordre dispersé et sans organisation ni suivi. Et malgré toutes leurs interventions et leurs plaintes, cela ne change rien au mauvais fonctionnement de la prison : un pansement sur une jambe de bois !
    Face à tout cela, nous nous interrogeons sur nos motivations : Pourquoi allons-nous travailler à la prison ? Après un long temps de partage, nous cherchons comment améliorer nos façons de travailler, comment transformer la vie de la prison, en particulier pour davantage de respect des prisonniers. Et il y a tous les autres problèmes : les personnes arrêtées et qui font des mois et même des années de prison sans être jugées et, pour à la fin, être déclarées innocentes ou condamnées à quelques mois avec sursis ; des peines disproportionnées, par exemple des années de prison pour le vol d’un simple magnétophone ! Un mineur a même été condamné à mort, et pourtant la Guinée a signé la Convention des droits de l’enfant. Et personne ne se soucie de ces condamnés à mort.
    Les juges condamnent mais ne s’inquiètent pas des conditions de vie ensuite à la prison. Il y a aussi toute la question de la formation professionnelle en prison. Grâce au soutien de Caritas Allemagne, nous allons pouvoir commencer quelque chose au moins pour les mineurs. Il y a aussi tout le problème de la réinsertion des prisonniers à leur sortie. Nous avons également parlé des amendes que les prisonniers doivent payer pour sortir : étant trop pauvres, ils restent sans fin en prison. Sans parler des procès truqués et des personnes incarcérées par jalousie ou vengeance !
    Il faut vraiment changer complètement le système carcéral. Et commencer par mieux former les gardiens et donner à l’administration un minimum de sens humain. Cela demande d’établir un minimum de bonnes relations avec eux. 

  • Jeudi 12 février : La Société civile.
    Depuis le coup d’état, la population se réveille et s’organise. Ce matin, nous recevons les responsables d’une deuxième organisation de la société civile. Nous, ce sont les deux commissions de  Justice et Paix  et  Pastorale sociale . Je parle de deuxième organisation. La première existe toujours, mais elle est peu à peu devenue un club fermé. Et qui ne joue plus son rôle puisque plusieurs de ses membres sont devenus ministres. De toutes façons, après tant d’années de parti unique, nous croyons à l’importance de la pluralité. Nous voyons ensemble, pendant plusieurs heures, comment organiser notre collaboration pour construire la société guinéenne.
    Rencontre au Ministère.
    L’après-midi, nous rencontrons le Ministre des audits, de la transparence et de la bonne gouvernance. Il a du pain sur la planche ! Nous l’intéressons dans la mesure où nous sommes implantés dans tout le pays et pouvons donc faire connaître les orientations du nouveau gouvernement et les actions menées, lorsque, bien sûr, nous les jugeons valables. Et aussi dans la mesure où nous avons apporté déjà à de nombreuses personnes une formation de base sur le développement, les problèmes de société, l’engagement des laïcs, les droits humains et surtout des questions qui le concernent encore plus directement, comme la lutte contre la corruption. (site : lien avec la rubrique  Justice et Paix  où vous pourrez trouver des comptes rendus de tout cela). Au Ministère, ils préparent un plan d’action et nous proposent de nous envoyer la première ébauche, afin que nous réagissions sur leur projet. 

  • Mercredi 11 février : La banque alimentaire.
    Je retourne à Kataco. Je suis heureux d’y retrouver Igbé, mon confrère, et Tchuku, le stagiaire. Mais aujourd’hui je viens pour la banque alimentaire. (site : lien avec la rubrique  Projets ). C’est un moyen important pour aider les paysans : d’abord pour conserver leurs récoltes et leurs semences en lieu sûr. Mais surtout, pour avoir une quantité de riz à mettre sur le marché à la période de soudure, au prix normal. Et ainsi lutter contre un système qui profite du manque de riz pour le vendre à un prix exorbitant. La banque accorde aussi des crédits aux paysans à un taux réduit, ce qui leur permet de travailler. Normalement, cette banque dépend du groupement des paysans et c’est le comité directeur qui la dirige et donne les orientations. Et aussi paie l’administrateur, qui est un technicien, et les autres travailleurs. Mais peu à peu, cet administrateur de la banque, au lieu de se mettre au service des paysans et de les former, a pris leur place et a voulu tout gérer lui-même, à sa manière, y compris l’argent. Ce qui cause évidemment bien des problèmes.
    Nous venons de Conakry (250 km), mais à notre arrivée, l’administrateur est absent ! Nous tenons cependant une longue réunion avec les membres du groupement pour leur rappeler leurs droits, mais aussi leurs responsabilités. Et pour préparer un audit des finances et des différentes activités. La plupart des paysans sont analphabètes. Souvent les  techniciens  profitant de leur formation, s’imposent à eux, au lieu de les former et de les responsabiliser. De plus, ils ont l’habitude de travailler entre parents, sur leur propriété familiale. Ce n’est pas toujours facile pour eux de travailler en groupement. Enfin, les questions d’argent sont toujours délicates et à suivre de près !
    Au retour, nous tombons en panne : une durite a éclaté. Il nous faut plusieurs heures pour  bricoler  une réparation qui nous amènera jusqu’à Conakry. Et cela, grâce à un mécanicien qui, nous voyant en panne, s’est arrêté spontanément. Nos routes sont tellement mauvaises et les voitures en si mauvais état, les pannes sont fréquentes et la solidarité entre chauffeurs, habituelle. 

  • Lundi 9 février :  Reprise des activités ordinaires, avec de nombreuses visites, contacts, personnes à rencontrer et problèmes à régler. Et un temps inévitable au cyber pour ouvrir ma boîte, lire les messages mails reçus et envoyer ceux que j’ai préparés sur ma clé.
    Je rentre plus tôt que d’habitude pour faire réparer la voiture de Kataco. Il faut changer la batterie, mais aussi arranger les vitres qui sont coincées. Tous ces mécanismes électriques et sophistiqués ne sont vraiment pas adaptés à nos conditions de vie. Depuis deux ans, nous devons aussi changer les amortisseurs, car la voiture a 275.000 km et sur nos routes, ce n’est pas rien ! Mais ce sera pour une autre fois : les fonds que nous avions pour cela ont été utilisés pour refaire le moteur. 

  • Dimanche 8 février : Lancement de la Commission  Justice et Paix  dans une nouvelle paroisse : Bonfi. Les laïcs semblent motivés. Il est vrai que la situation du pays pousse à s’engager.
    La nuit, j’enregistre sur une cassette audio une nouvelle circulaire que Jocelyne, une amie de très longue date de la JOC et de l’ACO, saisira pour vous. Et que Jean-Jacques, à votre adresse mail, et Marie-Cécile (avec l’aide du service missionnaire de Cholet) à votre adresse postale, vous feront parvenir comme toutes les autres nouvelles. Merci à eux tous ! 

  • Samedi 7 février : Pendant tout ce temps, les mails et les courriers se sont accumulés. Il faut répondre à tout cela. J’arrive enfin à saisir les conclusions de la rencontre de Cotonou, de début décembre, sur les migrants. Je n’avais pas pu le faire jusqu’à aujourd’hui !  

  • Vendredi 6 février :  Nous nous retrouvons dans notre communauté de Kipe pour tirer les conclusions de notre rencontre spiritaine pour notre travail dans la ville de Conakry. Il y a bien des choses à préciser. 

  • Mercredi 4 février :  Sans tarder, nous nous retrouvons toute la journée avec Serge, notre responsable, pour tirer les conclusions pratiques de notre rencontre, pour la paroisse de Boffa. Nous revoyons la répartition du travail, car je suis de plus en plus sollicité pour  Justice et Paix  dans toute la Guinée. Cela suppose que mes confrères acceptent de prendre une plus grande part du travail à Boffa et à Kataco. Ce qu’ils acceptent de bon cœur, et je leur en suis très reconnaissant. De toutes façons, l’année est bien lancée, l’école et l’internat marchent bien car les enfants sont maintenant habitués… et responsabilisés. Le deuxième stagiaire va donc pouvoir rejoindre Kataco et retrouver Igbé qui sera ainsi plus libre pour aller dans les villages.
    Le soir, départ pour Conakry avec Serge et un plombier pour acheter du matériel. En effet, notre maison est très vieille et il y a toujours des choses à réparer. Et les installations de l’internat ne sont pas terminées ; il faut aussi refaire les toilettes.
    Avant de partir, je fais un saut dans la famille de Jeannette, une chrétienne mariée avec un musulman, que j’ai enterrée avant-hier. Cela a été l’occasion de rencontres, de collaboration et de prières communes entre chrétiens et musulmans. Hier soir, à la rencontre de la communauté de quartier, nous en avons parlé longuement, de même que d’un autre problème de mariage. Les choses sont souvent difficiles à ce niveau. Nous avons terminé cette réunion en analysant trois cas d’injustices au tribunal, au commissariat et dans le quartier. Nous avons aussi préparé une réconciliation dans une famille et vu comment nous allions soutenir la famille de Jeannette. Je suis vraiment très heureux de cette réunion et je vois que les choses se mettent en place peu à peu. Mais bien sûr, il faudra suivre les affaires et soutenir les actions. Le problème, c’est toujours l’organisation et le suivi. 

  • Mardi 3 février : Les activités reprennent ! Et il faut mettre nos décisions en pratique. Je vois donc avec les six novices comment relancer leurs activités, en particulier celles des enfants (avec le mouvement CV-AV = ACE), celles des élèves du lycée et du collège (mouvement JEC), les actions à l’hôpital où il y a tant à faire, les malades qui arrivent étant souvent très démunis et se retrouvant seuls quand ils viennent de villages éloignés, sans médicament (qu’il faut payer), sans nourriture et sans réconfort. Enfin, le travail à la prison. Depuis le coup d’état, les prisonniers ne reçoivent plus aucune nourriture. Dimanche, à la messe, nous avons fait une quête spéciale pour eux. Hier, j’ai vu le préfet pour ce problème. Aujourd’hui, je vois le juge qui fait le maximum pour racler les fonds de tiroirs du tribunal afin de leur fournir quelque chose. Nous faisons appel à toutes les bonnes volontés. Dimanche dernier, ce sont les protestants qui ont préparé un repas pour les prisonniers. 

  • Dimanche 1er février :  Tous les confrères sont partis visiter un secteur rural où trois communautés se sont regroupées, sauf deux qui sont partis dans un autre secteur pour une célébration du 30ème jour (fête de funérailles, pour célébrer le 1er temps du deuil, 30 jours après la mort). Dans la culture guinéenne, c’est une célébration très importante et l’occasion de soutenir la famille en deuil. Pour moi, je reste à Boffa-Centre où je n’ai pas célébré l’Eucharistie depuis Noël. Après la messe, nous tenons une rencontre extraordinaire du conseil paroissial qui se prolonge jusqu’à 14 heures ; et à 15 heures, c’est l’assemblée générale des jeunes pour organiser les activités du trimestre. Le temps passe vite, car tout cela se fait dans une très bonne ambiance. 

  • Vendredi 30 janvier :  Rencontre des spiritains de Guinée.
    Au programme :
    1) Rétrospective de la présence spiritaine en Guinée depuis le retour des missionnaires, après Sékou Touré (mort en 1984). Notre mission.
    2) Notre présence en Guinée aujourd’hui : identité et témoignage, et la nouvelle situation du pays.
    3) Préparation du Chapitre de la Fano (Fondation d’Afrique du Nord-Ouest), c’est-à-dire la rencontre (tous les 3 ans) pour faire le point de notre travail missionnaire, donner de nouvelles orientations et choisir un nouveau responsable pour cela.
    Il serait trop long de reprendre tous les débats. Je vous ferai part des conclusions et du document que nous publierons à la suite de cette rencontre. Mais c’est très important pour nous de nous retrouver ainsi. Cela nous soutient beaucoup. Et comme nous nous connaissons bien, les échanges sont directs et francs, ce qui permet d’aller plus loin. Et ça fait du bien de nous retrouver entre amis, dans un groupe très international, où nous nous entendons très bien et nous nous enrichissons grâce à nos différences. Les débats sont parfois vifs, mais nous ne sommes pas des enfants de chœur ! 

  • Jeudi 29 janvier :  Avant de partir pour notre rencontre de Boffa, plusieurs rencontres : avec l’Evêque pour la pastorale sociale, (lien avec le secrétaire de la Conférence Episcopale de Guinée, pour la préparation du prochain synode pour l’Afrique :  Réconciliation, justice et paix - Lien avec  Justice et Paix , page Synode). Puis une interview pour KTO, la télévision catholique française, qui passera fin février en France, sur notre travail social, en particulier dans le domaine de la santé. Rencontre aussi de Winfred, spiritain, mon successeur à Mongo, également responsable diocésain de  Justice et Paix , venu pour voir la suite du travail dans le diocèse de Kankan. Puis nous allons ensemble rencontrer les responsables de CRS (Secours Catholique Américain). Là, une mauvaise nouvelle nous attend. Nous avions fait une demande au département d’état américain pour faire un gros travail d’éducation civique et de préparation civique, portant sur trois points : 1. Formation d’observateurs indépendants pour les élections. 2. Mise en place d’équipes de résolution des conflits (pendant les campagnes électorales, au moment des élections, mais aussi tout au long de la vie du pays). 3. A partir de là, mettre en place des cellules de la société civile dans toutes les sous-préfectures du pays, car ce qu’on appelle actuellement  la société civile  se limite à la capitale Conakry, et est récupérée par un groupe de politiciens. Alors que nous voulons donner la parole à la population, à la base. Nous avions beaucoup travaillé pour préparer ce projet. Et nous sommes très déçus par leur réponse : ils acceptent le 1er point, mais refusent le 2ème et le 3ème. En gros, ils prétendent soutenir et construire la démocratie, mais refusent tout soutien à un travail de formation et d’éducation en profondeur, et à la mise en place de structures pouvant construire et soutenir la démocratie. Ils se contentent d’observateurs le jour des élections, qui, à la limite, peuvent être utilisés pour cautionner n’importe quelle manipulation ou pression. C’est décourageant ! Et malheureusement c’est ce qui nous arrive souvent de la part des gouvernements, des organisations des Nations Unies ou des grosses ONG. Nous allons donc chercher à faire le maximum au cours de la formation de ces observateurs pour qu’ils puissent continuer à travailler par la suite pour la démocratie, bénévolement et avec nos petits moyens. 

  • Mercredi 28 janvier :  Travail à l’atelier des enfants de la rue. Puis avec l’association SOS-mineurs en prison. 

  • Mardi 27 janvier :  Travail à Internet. Séance de travail avec Serge, notre responsable venu du Sénégal. Le soir, tous les spiritains sont invités par notre Evêque. 

  • Lundi 26 janvier :  Arrivée de nos confrères depuis Mongo, pour la rencontre des spiritains de jeudi. Ils vont en profiter pour prendre des contacts et faire un certain nombre d’achats à Conakry, car dans les villages il manque beaucoup de choses. Nous les accueillons avec joie ; nous avons beaucoup de choses à partager.
    Puis, je continue les activités ordinaires. Ce matin, je rencontre en particulier un émigrant togolais, expulsé de Belgique, mais qui ne peut plus vivre au Togo et qui vient chercher refuge en Guinée. C’est chaque jour que de telles personnes arrivent et viennent nous voir, car ils comptent sur l’Eglise pour être accueillis et soutenus. Malheureusement, nous sommes souvent très démunis devant de telles souffrances. Avec parfois une étincelle de joie : ainsi, hier, nous avons reçu un appel téléphonique des cinq Camerounais qui avaient été arrêtés et torturés en décembre (voir les nouvelles de décembre 2008). Nous avions réussi à les faire libérer, à les protéger et même à leur obtenir des laisser passer. Hélas, ils avaient été arrêtés à la frontière sénégalaise et ramenés à la prison de Boké, capitale de la région. J’avais appris, (voir journée du 17 janvier) qu’ils avaient été relâchés et avaient rejoint leur ambassade à Dakar, en passant par le Mali. Mais hier nous avons été tellement heureux de les entendre, car nous avions été très inquiets pour eux. Quel soulagement !
    Je travaille ensuite avec deux Français qui soutiennent des actions de développement au Burkina Faso et qui s’intéressent à la Guinée. Puis avec un entrepreneur Sénégalais qui, avec tout un groupe, serait prêt à lancer des logements sociaux et des actions de développement, maraîchage en particulier.
    Ensuite, nous cherchons à relancer le projet hydraulique (lien avec  Projets  - Forages et puits). En effet, le travail est bloqué : déjà, pendant 10 ans, nous avons réussi à le maintenir en état, à coup d’imagination et de débrouillardise. Mais maintenant, la foreuse est totalement hors d’état, de même que le compresseur. Jusqu’alors, nous n’avons pas trouvé de financement pour ce matériel qui coûte très cher. Pour les techniciens pour faire marcher ce travail, eux ils ne manquent pas. 

  • Dimanche 25 janvier :  Réunion mensuelle de la Commission diocésaine  Justice et Paix  à la paroisse Ste Rita de Sangoya.
    L’accueil est sympathique, le Conseil paroissial engagé et nombreux ceux qui restent après la messe pour la mise en place de la commission paroissiale. (Lien avec L 51 pastorale sociale, et L 52, justice et paix). Ensuite, la commission diocésaine travaille jusqu’au soir, comme d’habitude.
    Nota : Le matin, à la messe, nous n’avons pas manqué de prier pour tous les morts tués par l’armée, alors qu’ils manifestaient pacifiquement en janvier-février 2007. Triste anniversaire ! 

  • Samedi 24 janvier :  Rencontre des religieux et religieuses.
    C’est un temps fort de réflexion pour notre vie et nos engagements. Demain, nous fêterons l’engagement définitif et les noces d’argent et d’or de plusieurs religieuses. C’est important pour nous et pour l’Eglise de Guinée. Nous en profitons pour nous retrouver ensemble et revoir notre vie et nos engagements. D’abord pour être fidèles à notre vocation. Mais surtout pour voir comment mieux vivre notre vocation dans le monde actuel, suite à tout ce qui se vit dans le pays : misère de plus en plus grande, corruption, coup d’état, etc… Il y a là autant d’appels de Dieu pour être proches de tous les déshérités et écrasés du pays. Ce n’est pas facile de voir clair et de savoir ce que nous devons faire… ni de le faire ensuite ! Pour cela, nous avons besoin non seulement de nous retrouver, mais d’y réfléchir sérieusement. Cela ne nous a pas empêchés de faire un bon repas et de faire la fête ! Pour le repas, les Sœurs ont apporté le solide, et les Frères le liquide ! A chacun ses compétences ! 

  • Vendredi 23 janvier :  Pour être sûr de pouvoir le faire, je commence par aller dans un Cyber pour expédier le courrier que j’ai préparé. Puis reprise des rencontres. Aujourd’hui, nous travaillons spécialement avec deux volontaires de Caritas Italie qui travaillent pour le développement (santé spécialement) et voudraient s’engager davantage avec  Justice et Paix  dans le diocèse de Nzerekore. 

  • Jeudi 22 janvier :  Je reste à la maison pour travailler un certain nombre de dossiers et continuer à répondre à mon nombreux courrier de Noël-1er janvier. Bonne année à tous ! 

  • Mercredi 21 janvier :  (Suite)
    La journée se continue par une réunion de l’OCPH. Nous préparons en particulier les visites à l’intérieur du pays. Puis ce sont plusieurs rencontres, en particulier avec la fraternité des femmes et les responsables du Centre des handicapés de Kipe. Puis je passe un moment avec un groupe de Français de Cérence, venus comme chaque année visiter la paroisse de Kamsar avec laquelle ils sont jumelés et qu’ils soutiennent activement. 

  • Jeudi 18 janvier :  A 6 h 30, comme à Ourous, je préside l’Eucharistie quotidienne. Quand un étranger arrive, on l’honore !
    Après un petit déjeuner pris rapidement, c’est le départ pour la gare routière. Départ pour Conakry. En route, en passant dans les différentes préfectures, à Pita, Dalaba, Mamou, Kindia et Coyah, j’adresse une salutation au téléphone aux confrères. Déjà hier soir, à Labbé, profitant de ce qu’il y avait du réseau, j’ai téléphoné à Conakry pour annuler mes rendez-vous d’aujourd’hui.
    Le voyage est long mais se passe bien. L’ambiance est bonne et les voyageurs très sympathiques. En cours de route, ils ne manquent pas de m’offrir morceau de pain et banane. Et même du papier, car ils voient que j’écris beaucoup. En effet, je profite du voyage pour rédiger un certain nombre de notes que je saisirai à l’ordinateur à Conakry quand il y aura du courant. Je rédige aussi ces nouvelles que vous lirez bientôt. Ce n’est pas facile d’écrire car nous sommes très serrés (quatre sur une banquette de berline), mais j’ai l’entraînement ! Merci à Jocelyne qui déchiffre ces lignes ma écrites ( ndlr : Mais non, mais non, Armel, tout va bien, pas de difficulté !) et à Jean-Jacques qui vous les envoie rapidement par mail. 

  • Mercredi 14 janvier :  Tôt le matin, je retourne à la gare routière. Toujours pas de taxi-brousse pour Conakry. Demain, peut-être ! Mais une voiture arrive pour LABBE ; De là, je pourrai sans doute avoir un taxi-brousse demain pour Conakry. Cela fait un grand détour, mais il faut à tout prix que je rentre à Conakry. Et puis, cela me permettra de voir les confrères à Labbé et de préparer la suite des activités, car ils n’ont pas pu venir à la formation de Dalaba, la semaine dernière.
    En fait, le taxi-brousse est plein, mais un jeune accepte de voyager sur le toit et de me céder sa place à l’intérieur du taxi. En Guinée, on respecte les vieux et on accueille les étrangers. Mais cela n’a rien d’extraordinaire cependant. En route, quand les barrages seront passés, nous prendrons ainsi trois autres personnes sur le toit ! Le voyage dure toute la journée.
    Soirée à Labbé. Le soir, quand j’arrive, Victor est sorti dans une communauté de quartier, mais je suis bien accueilli au presbytère par la famille qui y habite. On m’offre tout de suite un verre d’eau. Ca fait du bien ! Comme Victor tarde à rentrer, ils m’invitent à manger avec eux. En fait, quand leur père arrivera, je m’apercevrai que je connais leur mère. Elle est agent de santé et, depuis de nombreuses années, travaille à MONGO où j’ai sévi pendant 10 ans !. Elle m’a souvent accueilli chez elle, lors de mes tournées dans les villages. Malheureusement, je ne la verrai pas. Au cours d’un de ses déplacements de travail, elle a eu un accident de moto. Elle s’est faite opérer et actuellement elle est partie à l’hôpital de Conakry pour une visite de contrôle.
    Victor est arrivé. C’est un jeune prêtre, ordonné en 2005. Il est le seul prêtre, assisté d’un séminariste stagiaire, pour cette grosse préfecture. Nous ne sommes pas assez nombreux !
    Nous prenons le temps de parler. Entre temps, il a fait appeler des membres du Conseil paroissial. Quand ils sont arrivés, nous reprenons en résumé les sessions de Dalaba et Ourous, puis nous voyons ensemble comment mettre en place les deux commissions de Justice et Paix et de Pastorale Sociale. A 22 heures, nous apprenons par la radio la mise en place du nouveau gouvernement. Nous échangeons longuement sur la situation du pays et sur ce que nous avons à faire, pour que les choses se passent le mieux possible.
    Dans ce nouveau gouvernement, dix ministres sont militaires. Ils tiennent les ministères clés : sûreté, intérieur, mais aussi finances, industrie, commerce. Signe qu’ils veulent garder le pouvoir mais aussi maintenir l’ordre et la sécurité, et aussi tenir l’économie, remettre le pays au travail, lutter contre la corruption, assainir le secteur des mines pour que les richesses nationales profitent véritablement au pays. En tout cas, c’est ce qu’ils affirment et nous allons y veiller. Aussi bien le Premier Ministre que la population sont satisfaits. Affaire à suivre !

  • Mardi 13 janvier :  Toujours pas de taxi-brousse. Je vais donc voir les Sœurs. Elles aussi, elles ont la visite de leur Supérieure générale, ce qui ne les empêche pas de m’accueillir et de me consacrer tout le temps nécessaire. C’est la saison sèche, on peut circuler plus facilement, aussi les différents responsables en profitent pour visiter leurs frères et leurs sœurs. Serge, le nôtre, arrivera après-demain à Koundara.
    Ensuite, je m’assieds avec Claire et Aurélien, un jeune couple de coopérants français, enseignants, venus prendre la direction de l’école primaire et la formation pédagogique. Nous retrouvons les mêmes problèmes : salaires trop bas, formation insuffisante, problèmes d’organisation. De plus, Aurélien vient de faire deux crises successives de palu. Il a dû aller se faire soigner à Tambacounda, au Sénégal. Mais cela ne l’empêche pas de garder le moral, avec le soutien de Claire. Ils sont heureux de leur séjour et travaillent très bien. Ils ont été préparés et envoyés par la D.C.C. (Délégation Catholique à la Coopération).
    Je repasse à la gare routière : toujours pas de taxi-brousse en vue. On a même remboursé les billets de plusieurs personnes. Je rentre donc à la communauté et profite de ce contre-temps pour me reposer et me détendre un peu. Ca fait du bien et ce n’est pas du luxe !
    Richard, lui, est parti à VELINGARA, au Sénégal, là où se trouve le cyber le plus proche. Il reviendra tard dans la nuit. Tout cela pour envoyer un mail urgent. Une journée entière sur des mauvaises pistes, ça fait beaucoup de fatigue ; et au prix où est le carburant c’est un mail qui coûte très cher. Pendant ce temps, je consacre un bon temps pour faire le point, successivement avec les deux stagiaires. Ils avaient besoin de parler et les visites sont rares à Koundara.

  • Lundi 12 janvier :  Normalement, j’aurais dû retourner à KOUNDARA hier soir, car c’est le lundi que le taxi-brousse régulier quitte Koundara pour Conakry. Mais j’ai préféré rester pour voir les activités d’OUROUS et surtout parler avec les uns et les autres. D’abord, je parle longuement avec Philippe. Il est le seul prêtre à Ourous, avec un secteur rural important, le secteur de Youkoun Koun, le long de la frontière sénégalaise. Il est content d’avoir la visite d’un confrère et de pouvoir échanger des idées sur ses activités pastorales. C’est un jeune prêtre et le secteur est difficile. J’essaye de le conseiller et de l’encourager de mon mieux, après l’avoir longuement écouté.
    Ensuite, avec le Frère Jean-François, nous faisons le tour des écoles de brousse (dont j’ai parlé le vendredi 9 javnier) ce qui me permet de voir les difficultés sur le terrain : cinq éducateurs sur douze ont quitté le secteur cette année pour la ville, espérant y trouver un travail plus rémunérateur. Et il est vrai que le dernier trimestre, ils n’ont pas été payés, faute de moyens. La veille de ma venue, notre Evêque a fait racler les fonds de tiroir de l’économat du diocèse. Cela m’a permis d’amener 3 millions de francs guinéens (environ 500 euros), comme premier soutien. Dès mon retour, j’irai voir les responsables de C.R.S. (Catholic Relief Services = le Secours Catholique américain) qui soutient ces écoles. Les rapports financiers n’ont pas été fournis à temps, suite à une incompréhension (Jean-François vient d’arriver et ne connaît pas bien le fonctionnement de l’accord avec CRS). Il y a des difficultés de communication, mais aussi un manque de suivi de part et d’autre. Il faudra mettre les choses au point. Nous remercions beaucoup les ONG qui nous aident, mais c’est vrai que leur fonctionnement, parfois lourd et compliqué, est inadapté à nos réalités et à nos possibilités.
    Sur les cinq enseignants que nous visitons, deux sont malades (ce qui arrive souvent, vu le mauvais état de santé général de la population, conséquence de la grande pauvreté, d’où sous-alimentation, manque de moyens ou de possibilités : pas de dispensaire ni de médicament pour se soigner, etc…). Un autre éducateur n’est pas revenu des vacances de Noël et le dernier présent est nettement incompétent. Le problème de la formation de ces éducateurs est notre grand souci, car il est très difficile de trouver des gens ayant la base nécessaire pour être formés efficacement. Ceux qui sont un peu formés partent en ville où il y a plus de possibilités de progrès social qu’au village. Et quand malgré tout nous arrivons à former des personnes, elles n’ont qu’un désir, c’est de partir à leur tour en ville. Il faut donc reprendre les choses à zéro à chaque fois, et c’est vraiment décourageant.
    Visite des Sœurs. Je vais ensuite visiter les Sœurs. Elles sont deux jeunes de la Congrégation locale de Notre Dame de Guinée. Elles tiennent un dispensaire et un jardin d’enfants, ce qui complète bien le travail social de la paroisse. On y retrouve les mêmes problèmes et aussi le coût et le manque de médicaments.
    Avant de quitter Ourous, j’ai le temps de parler avec Raphaël, le responsable de la Banque alimentaire. C’est un moyen important pour nous pour permettre aux paysans de conserver récoltes et semences et surtout d’avoir des crédits pour leurs cultures (outils, engrais, paiement de travailleurs). Mais surtout de commercialiser du riz à bas prix au moment de la soudure, pour lutter contre les prix usuraires pratiqués par les commerçants. Malheureusement, ce dernier volet ne fonctionne pas à Ourous. C’est un autre problème que je devrai régler à mon retour à Conakry.
    Dès mon retour à KOUNDARA, je passe à la gare routière pour réserver une place pour Conakry. Mais il n’y a pas de taxi-brousse prévu. Et déjà 18 clients attendent leur tour avant moi, alors qu’il n’y aura que 10 places ! On verra demain. La nuit, je relis les notes prises pendant ces trois jours, pour les classer et ne rien oublier des choses à faire.

  • Samedi 10 et dimanche 11 janvier.  la session est très animée. Il faut dire que les problèmes ne manquent pas. Elle est marquée par ce qui se passe actuellement dans le pays et qui motive beaucoup les participants. L’année dernière, il s’agissait plus d’une sensibilisation et d’une formation de base. Et aussi d’une préparation du 2ème Synode pour l’Afrique. Cette année, il s’agit de passer à l’action. Nous voyons donc comment mettre en place nos commissions paroissiales. Nous travaillons beaucoup, car nous n’avons qu’un week end. Dès 7 h 30 du matin, le dimanche, nous sommes déjà au travail. Et la Messe est l’occasion de mobiliser toute la communauté du Centre. Pour les communautés de l’intérieur, ce sont les participants qui s’en chargeront dans les semaines à venir.
    Dans les  divers , nous abordons un certain nombre de questions. En particulier la mise en place d’une équipe d’animateurs de prison et d’une aumônerie dans chaque préfecture du pays. Nous prévoyons une session de formation pour cela. Ainsi que la formation d’observateurs indépendants pour les prochaines élections et d’équipes de conciliateurs pour la résolution des conflits. Nous cherchons aussi à mettre en place des cellules de la société civile dans chaque sous-préfecture. Actuellement, ce qu’on appelle la  société civile  est un club fermé, sans véritable indépendance et composé uniquement de personnes vivant dans la capitale, Conakry.
    La session se termine par un bon plat de riz avec de la viande, ce qui n’arrive pas tous les jours.
    Mais c’est la période des récoltes, où il y a un peu d’argent et des initiations traditionnelles. Aujourd’hui, les garçons d’un village voisin terminent leur initiation et sortent solennellement. On a tué une vache pour l’occasion et nous en profitons dans la joie. Arrosé par du vin de palme, le repas célèbre en beauté l’amitié et l’engagement que nous avons vécus pendant ces deux jours.
    Sur le chemin du retour, Emmanuel, le stagiaire ghanéen venu chercher les participants de Koundara, s’arrêtera à la fête de l’initiation car il faut qu’il découvre la culture locale. Et tous seront heureux de participer à la danse !
    Pour moi, je vais rencontrer le Frère Jean-Paul, responsable provincial des Frères de St Gabriel, venu du Sénégal pour visiter ses frères d’Ourous, de Katacodi et de Kataco. A Ourous, ils sont deux Frères : l’un responsable de l’école primaire, l’autre des écoles de brousse. Ils voudraient récupérer l’ancienne école de la Mission catholique, nationalisée du temps de Sékou Touré, pour en faire un Collège. Mais, malgré les décisions gouvernementales, les tractations traînent. Et il faudra la restaurer, car elle est dans un très mauvais état, à la fois par manque de moyens, par négligence et laisser aller. Avec Jean-Paul, nous parlons aussi de la situation de Kataco qu’il va visiter, où un nouveau Frère, Charles, est venu prendre la direction de l’école primaire. L’ancien directeur, Zachary, a repris l’internat qui était dirigé par le Frère Joseph.
    Jean-Paul est venu avec trois autres responsables de province des frères : l’un de Singapour – Malaisie, l’autre d’Inde, et le troisième d’Espagne. Ils sont venus participer à une rencontre au Sénégal, pour voir comment adapter l’organisation et le fonctionnement de leur Congrégation aux réalités actuelles : mondialisation, internet, transformations des mentalités et des sociétés, etc… Ils en profitent pour venir en Guinée connaître les réalités sur le terrain et faire un pèlerinage à la tombe du Frère Joseph.
    Nous nous retrouvons tous ensemble, avec les Sœurs, pour une soirée amicale. Cette vie fraternelle est très importante pour nous. C’est ce qui nous permet de tenir le coup.

  • Vendredi 9 janvier :  A 18 heures, départ pour OUROUS, avec huit délégués de Koundara, pour la formation Justice et Paix. La route n’est pas bonne, mais il n’y a que 25 km. Il nous faut quand même plus d’une heure pour les faire. Malgré la fatigue, nous nous retrouvons ensemble, la nuit, pour élaborer le programme de la session, à partir des préoccupations des participants.  duteil)

  • Vendredi 9 janvier (suite) - 10 heures :  Intervention au Collège, sur Justice et Paix.
    Richard m’amène au Collège, où les cours se prolongent jusqu’à 14 heures : journée continue car certains élèves viennent à pied de très loin. Je vais donc avoir une heure avec chacune des classes pour une réflexion en commun sur Justice et Paix. Les questions des élèves ne manquent pas, étant donné la situation actuelle du pays, suite au coup d’état militaire. Les élèves participent bien et apportent des réflexions intéressantes. La démarche est simple : Qu’est-ce que la justice ? Qu’est-ce que la paix ? Pourquoi une Commission ? Lancée par Paul VI, suite au Concile Vatican II, elle est le thème du 2ème Synode pour l’Afrique en Novembre 2009 : Réconciliation, Justice et Paix. C’est aussi le 4ème objectif du Plan Stratégique de tous les diocèses d’Afrique de l’Ouest : Dignité de l’homme Noir, Justice, Paix et Développement Intégral. Mais bien sûr, il s’agit de travailler avec tous. D’ailleurs, par exemple, la grosse majorité des élèves du Collège sont musulmans. L’urgence et l’importance de cette commission se sont accrues avec les événements actuels en Guinée. Mais si nous voulons que le pays avance et se transforme en profondeur, il faut que tout le monde s’y mette, en commençant par la base. Le groupe des militaires qui ont pris le pouvoir, même s’il s’appelle CNDD (Comité National de Démocratie et de Développement), ne pourra rien faire sans la participation active de la population.
    Nous continuons par une réflexion sur les Droits de l’Homme qui sont une base d’action solide et commune à tous : Comment vivre ces Droits de l’Homme en vérité en Guinée, d’une manière adaptée à notre situation actuelle et dans le respect des différentes cultures guinéennes ? Il ne reste plus qu’à passer aux conclusions et à la mise à l’action : Nous, jeunes, quels manques de justice et de paix subissons-nous ? Qu’allons-nous faire dans notre Collège, nos familles, nos quartiers et nos villages ?
    Pour terminer sur une note positive et garder l’espérance, nous relevons ce qui se fait déjà actuellement pour la justice et la paix.
    16 heures : La Pastorale Sociale.
    Nous nous retrouvons avec les responsables des Communautés de quartier et des Mouvements de Koundara, pour voir comment travailler dans les quatre directions que je viens de signaler plus haut et quels moyens prendre pour les réaliser. Nous ne faisons que déblayer le terrain et je leur demande de continuer la réflexion et de mobiliser les bonnes volontés, car le mois prochain je leur enverrai l’équipe de l’OCPH pour finaliser le plan d’action et lancer les activités.  Duteil

  • Vendredi 9 janvier :  Projets de développement.
    Richard, le curé spiritain nigérien, de son côté est rentré de tournée. Nous nous asseyons pour faire le point des différentes actions de développement à réaliser, voir ce qu’ils font et dans quelle mesure nous pourrons les soutenir à partir de Conakry. Les efforts portent dans quatre directions : l’éducation, la santé, la sécurité alimentaire (petits projets et groupements) et l’hydraulique (puits et forages).
    1°) Au niveau de l’éducation, depuis une vingtaine d’années, il y a une école primaire tenue par la Mission qui marche très bien (100 % de résultats aux examens) et qui est très appréciée. Le problème est le financement. Nous sommes pris entre deux feux, comme à Boffa, Kataco et partout. Ou bien, nous demandons une scolarité relativement élevée et nous n’aurons que des élèves de familles aisées. Ou bien, nous donnons la priorité aux enfants des villages et familles modestes (ce que nous avons choisi), mais nous sommes sans arrêt sur la corde raide et nous ne pouvons pas payer suffisamment les enseignants. Nous arrivons à former des volontaires  sur le tas  mais dès qu’ils sont formés ils passent le concours de l’école normale pour entrer dans l’enseignement public, ou partent dans des écoles publiques, où ils seront mieux payés.
    Les écoles de brousse : Dans les villages, les écoles primaires sont rares. Nous avons donc lancé ce que nous appelons des écoles de brousse. Les villageois construisent un hangar et trouvent un volontaire qui a fait un minimum d’études et que nous formons. Nous avons au moins les deux premières années, parfois le cycle primaire complet, pour donner une base solide aux enfants. A partir de là, étant plus âgés, ils peuvent aller continuer leurs études dans un Centre en logeant chez un tuteur qui souvent les logera et les nourrira, moyennant des services (travail à la maison ou dans ses champs), ce qui ne favorise pas les études. Et va même parfois jusqu’à une véritable exploitation des enfants.
    Malgré le peu de moyens de ces écoles de brousse, grâce au sérieux et à la rigueur, les élèves très motivés arrivent à avoir un niveau supérieur aux écoles  officielles . On nous demande donc dans de nombreux villages, mais nous ne pouvons pas répondre à tous les appels.
    Le collège : Nous avons voulu continuer la formation de nos élèves du primaire et avons donc lancé également un Collège, malgré des difficultés encore plus grandes, mais c’est important pour nous. Nous avions un directeur (Principal) venu du Sénégal et très compétent. Malheureusement, il nous devenait impossible de le payer. Nous avons dû nous en séparer. C’est Richard, le curé, qui assure la direction et les cours d’anglais, en plus de son travail pastoral, ce qui fait beaucoup (trop !), car il doit aussi faire des tournées pastorales dans les villages pour animer les communautés. Pour cette année, les deux stagiaires le soutiennent au collège, mais qu’en sera-t-il l’année prochaine ?
    Pour améliorer encore la qualité du Collège, nous voudrions lancer une formation de base en informatique. Pour cela nous cherchons des panneaux solaires et des batteries… mais aussi des ordinateurs ! Pour ceux qui pourraient nous en fournir, même usagés, mais encore en état de marche, ne manquez pas de nous le signaler. (mon adresse mail : armelduteil@yahoo.fr).
    2°) La santé : C’est la responsabilité des Sœurs. En plus de l’éducation sanitaire à Koundara-Centre, elles animent une Case de Santé à PAHOUNCA. Pour les médicaments, elles sont aidées par une petite association française. Mais nous voudrions étendre cette action à d’autres villages.
    3°) La sécurité alimentaire : C’est la base, bien sûr. Là encore, nous avons de nombreuses demandes de soutien. En priorité, nous voudrions soutenir un groupe de veuves pour la culture maraîchère. Nous avons déjà trouvé un terrain. Reste à trouver un financement pour le matériel. Pour vendre les produits, il n’y aura pas de problème, il y a un gros marché sur place et la demande est forte.
    Deuxième projet prioritaire : un groupement de femmes pour la fabrication de savon artisanal à partir d’huile de palme à GAOUAL. Les femmes sont motivées et nous ne voulons pas limiter notre action à KOUNDARA Centre.
    Agir par nous-mêmes. Il y aurait encore beaucoup d’autres choses à faire, mais nous ne voulons pas plaquer des projets artificiellement. C’est aux gens de voir eux-mêmes leurs besoins, de décider ce qu’ils veulent faire… et de se mettre au travail avec leurs propres moyens, même s’ils sont limités. C’est pour cela que je suis venu donner cette formation. Ensuite, nous verrons comment appuyer ce qu’ils auront commencé par eux-mêmes, avec l’aide de nombreux amis, en particulier vous qui me lisez !
    4°) Puits et forages : De nombreux villages n’ont pas d’eau potable. Ils se contentent de l’eau des rivières ou des marigots, qui est souvent polluée. D’où maladies et mortalité infantile. Il faudrait creuser puits et forages. Nous avions une équipe à Kataco qui travaillait très bien.1 Le matériel nous avait été fourni par l’Organisation catholique allemande MISEREOR. Le projet est terminé depuis 10 ans. A force de bricolage et d’ingéniosité, nous avons réussi à faire durer les machines jusqu’à l’année dernière. Mais en commençant un nouveau plan de forages à KOUNDARA, la foreuse s’est cassée irrémédiablement et il nous a fallu rendre le compresseur que nous avions emprunté. Il faudrait remplacer ce matériel défaillant, mais il coûte très cher. Et jusqu’à maintenant, malgré tous nos efforts, nous n’avons pas trouvé d’organisme de financement. Pourtant, le besoin en eau potable est immense dans la région. Avec le matériel qui nous reste, nous pourrons au moins réparer et réhabiliter les anciens forages et creuser des puits là où l’eau n’est pas très profonde. C’est le maximum de ce que nous pouvons faire pour le moment. Mais les populations que nous avions mobilisées pour cotiser leur participation locale et mettre en place des comités de gestion sont très déçues. Et nous aussi. 

  • Jeudi 8 janvier :  OUROUS et KOUNDARA. Tournée.
    Le but de ma tournée est d’assurer une formation à Justice et Paix et, à la suite, de mettre en place une Commission dans ces deux paroisses. Tout comme la semaine dernière à DALABA. Ces deux paroisses sont situées tout à fait au nord du pays, à la frontière du Sénégal et de Guinée Bissao. Loin de Conakry, la région est souvent oubliée. Le climat est chaud. Le travail de la terre est difficile et produit peu. A la saison sèche, les gens partent travailler au Sénégal pour gagner un peu d’argent. Surtout les jeunes. Je les ai connus et accueillis quand j’étais curé de TAMBACOUNDA, en 79-80.
    La population est composée d’ethnies minoritaires, au milieu des Peuhls (Coniaguis, Bassaris, etc…), marginalisées et même souvent méprisées. Les deux paroisses catholiques sont fortement engagées pour les droits de ces populations, pour l’éducation, la santé et le développement. C’est pour partager et soutenir tous ces efforts que je viens et que ce voyage est tellement important pour tous.
    Partis à 6 h 30, nous arrivons à minuit : 18 heures pour 800 km. Il faut dire que la route est très mauvaise, il y a des rivières à traverser sur des bacs de fortune et les nombreux arrêts aux barrages des militaires. Mais, Emmanuel, le stagiaire ghanéen, est encore debout pour m’attendre. 

  • Mercredi 7 janvier :  Nouvelles et vœux.
    Départ à 6 h 30, comme chaque matin, pour arriver au centre ville avant les bouchons de la rentrée des écoles et le début du travail. Du coup, j’ai un peu de temps pour consulter ma boîte mail. Et d’abord remettre à Bernard les différents messages que j’ai enregistrés sur ma clé, à partir de mon ordinateur. Il se charge lui-même de les envoyer, soit à mes différents correspondants et amis, soit aux organismes avec lesquels nous collaborons, soit pour transmettre des documents en Guinée, en envoi groupé, aux personnes avec qui nous travaillons et dont nous avons les adresses mails. Et nous en avons déjà un certain nombre (environ 200), malgré tous les problèmes du pays. Son aide me rend bien service car d’abord je ne suis pas très fort en informatique (j’apprends des  trucs  au fur et à mesure, mais je n’ai pas le temps de me former) et je n’ai pas le temps de faire tout ce travail. Merci à Bernard. Vous-mêmes vous profiterez de son travail, sans oublier mes amis de France qui prennent ensuite le relais : Jocelyne, Jean-Jacques, Solène et Jean-Michel, le Service missionnaire de Cholet, et tant d’autres ! Merci aussi à toutes les personnes et associations qui nous soutiennent dans nos actions de toutes les façons possibles (prière, amitié, conseils, argent, matériel, etc…). A tous, une bonne année 2009 pleine d’amitié, de rencontres enrichissantes, d’accueil et de partage, dans la paix et l’espérance, pour le soutien, le respect et le bonheur de tous. Et pensez à nous qui vivons dans des conditions difficiles.
    Réunion de l’O.C.P.H.
    Nous tenons une longue séance de travail pour revoir la mise en place des Commissions de  Justice et Paix  et de  Pastorale sociale  dans les différentes paroisses, groupes et associations. Nous évaluons les différentes activités menées en 2008 et commençons à préparer les actions pour 2009. Nous accueillons, dans notre équipe, Charlotte qui depuis quelque temps travaillait déjà bénévolement à Justice et Paix. Elle est la bienvenue et nous mettons des espoirs en elle, car il est nécessaire de renouveler l’équipe. Mais nous n’avons pas le temps de terminer notre réunion car je suis convoqué, avec d’autres personnes, autour de notre Evêque et son vicaire général pour régler un certain nombre de tensions. C’est inévitable que le type d’action  Justice et Paix  que nous menons entraîne des jalousies, des suspicions et même des attaques, parfois violentes. Et que nos activités en Pastorale sociale suscitent des envies, des frustrations et nous amènent nous-mêmes à faire des mécontents, mais aussi à sévir dans la mesure où il y a de l’argent en jeu. Nous le savons, cela ne nous étonne pas, mais ce n’est pas toujours facile à porter. Heureusement que nous pouvons nous retrouver ensemble et en parler franchement. A ce niveau, je dois dire que je suis très bien soutenu par les deux commissions diocésaines, au sein desquelles existe une excellente collaboration, et je les remercie de tout cœur.
    Avant de rentrer, il nous faut encore imprimer et distribuer les différents programmes d’activités pour les semaines qui viennent, car demain, à 6 h 30, je pars pour le nord, à KOUNDARA et OUROUS. Et je n’ai pas encore fini de préparer cette tournée. Nuit courte en perspective ! 

  • Mardi 6 janvier :  Reprise des activités.
    Les affaires à régler son nombreuses, car depuis mi-décembre, je ne suis pratiquement plus à Conakry. La première chose, réunion des volontaires qui accompagnent les malades du sida et leurs familles. Le P.A.M. (Projet alimentaire mondial) des Nations Unies n’a toujours pas fourni la nourriture de Novembre-Décembre. De plus, cet appui en nourriture ne s’adresse qu’aux personnes gravement dénutries et ne dure qu’un an. Après cette année, les personnes vivant avec le VIH, livrées à elles-mêmes, même si elles étaient bien retapées, retombent rapidement dans le même état de malnutrition. Nous avons bien cherché à lancer des petits projets pour qu’elles puissent gagner leur vie, mais ce n’est pas facile ! Nous ne cherchons pas seulement à fournir de la nourriture, même si c’est la première chose, nous voyons aussi comment aider ces personnes dans toute leur vie, en particulier dans leur vie conjugale et dans leurs relations avec leurs familles et leurs connaissances. Et d’abord comment vivre leur situation dans la paix. Ce n’est pas facile, surtout dans les conditions de vie très dures de la société guinéenne actuelle. De plus, vu leur état, ces personnes sont souvent très agressives. Nous réfléchissons donc en équipe comment porter tout cela et quelles solutions proposer.
    Imprimerie. Nous préparons l’impression de l’homélie de Noël et du message du 1er janvier de notre Evêque, de même que le message du Pape.
    Nous ferons déposer ces messages dans les différentes ambassades, auprès des membres du Gouvernement, des partis politiques, des journaux et radio libres. De son côté, Bernard va les envoyer par mail aux adresses que nous avons pu recueillir dans le pays, là où il y a des cybers.
    Pastorale des enfants. Nous recevons la visite de l’ambassadeur du Brésil. Dans ce pays, il existe toute une action de l’Eglise Catholique soutenue par le gouvernement brésilien, pour le soutien des femmes enceintes et des enfants de 0 à 6 ans dans les différents domaines : santé, éducation , droits civiques, etc… Ils viennent nous proposer leur service pour travailler dans le même sens en Guinée. Nous acceptons le principe, cependant il va falloir voir les modalités. Ce projet semble sérieux mais nous voyons des tas de personnes passer avec des projets bidons, montés uniquement pour récupérer de l’argent. On fait des promesses aux gens qui n’aboutissent pas, et ensuite ils sont encore plus découragés qu’avant. Et nous avons perdu leur confiance.
    Rencontres à CRS (Caritas/ Secours Catholique américain). Là aussi, il y a des tas de choses à voir. D’abord, la disparition de nos cinq amis camerounais qui ont été torturés par les militaires le mois dernier (voir journée du 30 Décembre). Après les avoir accueillis à l’Archevêché et protégés, nous avions réussi à leur obtenir un laisser passer pour quitter la Guinée, où ils continuaient à être menacés, afin de rejoindre l’ambassade du Cameroun au Sénégal (il n’y a pas d’ambassade de ce pays en Guinée et le président de la communauté camerounaise à Conakry est lui-même menacé). Mais la police sénégalaise à la frontière a mis en doute la véracité de leur laisser passer et les ont remis aux services d’émigration guinéens. Et depuis, nous n’avons plus aucune nouvelle, malgré les recherches que nous avons faites dans toutes les directions : à partir de Conakry et de Koundara (la mission catholique proche de la frontière), à partir des services d’émigration, mais aussi des chauffeurs de taxis-brousse, de personnes ayant voyagé avec eux jusqu’à leur arrestation à la frontière, et d’autres personnes encore. Sans aucun résultat. Nous sommes très inquiets. Nous avions déjà contacté la Croix Rouge Internationale (CICR), nous décidons de contacter le gouvernement camerounais, par l’intermédiaire de  Justice et Paix  du Cameroun, pour qu’il intervienne auprès des autorités sénégalaises et guinéennes. Et aussi la déléguée aux droits de l’homme de l’ambassade des Etats-Unis qui est très active et , elle aussi, très préoccupée par le sort des nombreuses personnes arrêtées sans jugement et emmenées au camp militaire Alpha Yaya, siège des militaires actuellement au pouvoir. Nous ne pouvons pas abandonner cette affaire.
    Avec CRS, qui nous soutient financièrement, techniquement -mais aussi moralement !- dans nos actions, nous abordons un certain nombre d’autres questions :
    Le soutien aux personnes vivant avec le VIH-Sida (voir plus haut).
    Les écoles de brousse de KOUNDARA. Comme je pars les visiter, j’en parlerai plus loin. Mais le problème urgent, c’est que les enseignants ne sont pas payés depuis Octobre. Nous ne pouvons par leur demander de continuer à travailler ainsi sans salaire, car ils doivent vivre avec leur famille. Nous cherchons comment régler le problème. (En attendant, notre Evêque décide, malgré les problèmes financiers du diocèse, de débloquer 3 millions de francs guinéens pour ne pas laisser les enseignants sans rien, jusqu’à ce que le problème soit réglé).
    Le trafic des enfants.
    C’est un problème très grave. Nous décidons de confier les actions que nous allons mener à SOS mineurs . La semaine prochaine, nous allons en tracer les grandes lignes d’action pour l’ambassade des Etats-Unis qui est prête à soutenir un tel projet.
    Les élections.
    Formation d’observateurs indépendants pour les futures élections législatives et présidentielles, d’équipes de résolution des conflits et de cellules de la société civile à la base, dans les sous-préfectures de tout le pays. Il y a là un gros travail de formation à réaliser en priorité. Lui aussi devait être soutenu par les Etats-Unis. Suite au putsch, les Etats-Unis ne soutiennent plus la Guinée,  sauf pour les actions humanitaires et la démocratie . Nous pensons donc que ce programme va pouvoir se réaliser malgré tout.
    Autre programme : lutte contre le paludisme. Nous avons déjà lancé une action pour les moustiquaires imprégnées d’un produit qui chasse les moustiques, dans la région du Fouta Djallon et aussi le diocèse de Kankan. Nous voudrions intensifier notre action en entrant dans le programme des Nations Unies de lutte contre le paludisme, la tuberculose et le SIDA.
    Pour le projet d’alphabétisation fonctionnelle et le soutien du foyer de l’espérance des enfants de la rue, nous n’avons pas trouvé de soutien.
    Par rapport au SIDA , il y a aussi tout le travail de prévention . Il y avait un programme avec trente jeunes volontaires formés, mais il est arrêté depuis deux ans, faute de moyens, l’organisation qui le soutenait ayant retiré sa participation. J’ai déjà tenu une réunion avec ces volontaires. La prochaine est prévue pour le 17. Nous verrons comment relancer les activités et d’abord quelles sont les propositions des jeunes, à partir de ce qu’ils ont réussi à continuer par leurs propres moyens. Dans un deuxième temps, je leur proposerai une réflexion sur l’enseignement de l’Eglise par rapport au SIDA et aux moyens de protection, car la formation qu’on leur a donnée me semble vraiment très fermée et irréaliste, pour ne pas dire erronée. Notre travail est de comprendre, soutenir et libérer les gens, pas de les écraser et décourager, encore moins de les condamner. Il est important de revenir à l’exemple du Christ et à son Evangile qui est une Bonne Nouvelle. Il ne faudrait quand même pas l’oublier ! Et assurer une saine éducation sexuelle.
    Il fait nuit quand nous terminons. J’aurai du mal à trouver un car pour rentrer à KIPE dans notre communauté, qui se trouve dans un quartier populaire à 15 km du Centre. Et je n’ai pas eu un moment pour ouvrir ma boîte mail dans un cyber-café. Pourtant, j’ai énormément de messages à l’occasion de Noël et du Nouvel An, qui me font bien plaisir et m’encouragent beaucoup. Merci à tous ceux qui pensent à nous, nous encouragent et nous soutiennent. J’ai aussi beaucoup de documents de travail. Il faudrait qu’au moins je puisse les mettre sur ma clé, s’ils sont en pièces jointes ce qui me permettrait de les consulter sur notre ordinateur à Kipe, car bien sûr nous n’avons pas internet à la maison. Et puis, il y a aussi toutes les questions au sujet du putsch et de la situation actuelle du pays.
    A ce sujet, ça évolue vite. Le Président du Comité militaire insiste toujours sur la lutte contre la corruption. Il vient de nommer un premier ministre civil (un des quatre qui avaient été proposés après l’état de siège de février 2007 pour être déjà premier ministre), reconnu pour son sérieux et qui semble bien accepté. Tout cela est positif et mérite d’être soutenu. Mais d’autres choses nous inquiètent beaucoup. En particulier les arrestations et détentions sans jugement au camp militaire. Toutes ne sont pas motivées par la lutte contre la corruption. Il nous faut rester attentifs car le président et les membres du CNDD (Comité National pour la Démocratie et le Développement) sont soumis à toutes sortes de pressions, souvent de personnes ni claires ni désintéressées. A l’inverse, notre Evêque est très souvent visité, par exemple aujourd’hui par le secrétaire d’état à la coopération de France, mais aussi par le secrétaire de l’OCI (Organisation des Etats Islamiques). Il est souvent consulté par le président et le comité, et maintenant le premier ministre, car à cause de son action passée et de son engagement au service du pays, l’Eglise Catholique est respectée et reconnue dans le pays. Simplement, il nous faut à la fois rester vigilants et garder notre indépendance et notre liberté, tout en nous mettant au service du pays. Ce n’est pas facile.

  • Du 2 au 5 janvier :  La session Justice et Paix de DALABA s’est bien passée. Les participants étaient convaincus et très actifs. Malheureusement, ils étaient très peu nombreux. En effet, le carburant est bloqué dans les stations services. On ne peut s’en procurer qu’au marché noir, difficilement et beaucoup plus cher. Du coup, peu de taxis-brousses ont circulé. Et les gens n’ont pas pu venir. Derrière tout cela, il y a une complicité des pompistes qui disent que le carburant est terminé mais qui le vendent la nuit à des petits marchands du quartier, avec bénéfice bien sûr, pour les uns comme pour les autres. Le pays est loin d’être stabilisé !
    Malgré la fatigue du voyage… et des fêtes (mais nous avons choisi ces dates pour que les personnes soient disponibles, les cours et beaucoup d’activités ne reprenant vraiment que le 5), nous avons une première séance le vendredi nuit pour faire le tour des questions et des problèmes à traiter. Et aussi organiser le programme de la session. Il faut trier, car les problèmes sont nombreux ! L’année dernière, c’était la première session, et donc une session d’initiation et aussi de préparation au 2ème Synode pour l’Afrique. Cette année, ce sera plus  opérationnel  : Comment mettre en place un commission paroissiale  Justice et Paix . Mais bien sûr tout cela dans le contexte actuel du pays, la préparation des élections, etc… Vous en trouverez le compte-rendu sur mon site, référence L 51 : Session Justice et Paix de Dalaba.

  • Le 4 janvier :  La communauté chrétienne de Dalaba.
    Le dimanche, nous participons à la Messe de la Paroisse et, à la demande du curé, je parle de justice et paix dans le cadre de l’Epiphanie. A la fin de la messe, l’un des participants fait le compte-rendu de la session, que tous écoutent avec beaucoup d’attention. La paroisse se situe dans le Fouta Djallon, peuplé presque uniquement de Peuhls, islamisés depuis longtemps et de tendance dure. Les chrétiens sont donc une toute petite minorité, étrangers à la région, venus pour des raisons d’études ou de service (fonctionnaires). En effet à Dalaba, depuis quelques années, il y a un Institut supérieur de médecine vétérinaire. Cette minorité chrétienne est soumise à toutes sortes de pressions : on demande aux étudiants de se convertir à l’Islam pour avoir un logement ; ils sont victimes de toutes sortes de brimades, ils doivent payer les produits plus cher au marché. Ne parlant pas la langue (le poular) les relations n’en sont que plus difficiles. Tout cela est ressorti tout au long de la session et ça n’a pas été facile d’en parler avec sérénité et objectivité, car il y a quand même des gens très accueillants et serviables. Ainsi l’un des étudiants nous a raconté combien il avait été bien accueilli et qu’actuellement ils sont cinq à loger gratuitement dans une maison qui leur a été offerte.
    Nous parlons aussi de la vie des étudiants. L’année dernière, suite à des mauvais résultats et des fraudes aux examens, les étudiants se sont révoltés. Ils ont brûlé tous les documents du secrétariat, y compris les dossiers des étudiants ce qui a entraîné de nombreux problèmes. La police est intervenue, de nombreux étudiants ont été mis en prison, un peu pris au hasard il faut le dire. Libérés sans jugement et seulement après plusieurs mois, ils ont été exclus définitivement de l’Université. Cette année, la situation est plus calme, mais les problèmes restent. D’abord les problèmes de nourriture, de logement, de médicaments. La prise en charge des étudiants est théorique. Ils doivent se débrouiller comme ils peuvent en se soutenant les uns les autres. La paroisse a mis en place une Caisse de Solidarité.
    Les études sont uniquement théoriques. Il n’y a pas de ferme école (alors qu’on est en pleine région d’élevage), ni même de travail en laboratoire. Malgré leur bonne volonté, ces étudiants auront de la peine à être vétérinaires performants. Et c’est toute l’économie qui en souffrira. Tout cela à cause du manque de moyens. C’est vraiment un cercle vicieux. C’est cela le sous-développement !
    Les relations avec les protestants sont très bonnes, en particulier à cause de la situation minoritaire partagée par tous. Au moment de partir, Mathieu, responsable de la communauté protestante, vient me voir. Il regrette de ne pas avoir participé à la formation, comme l’année dernière ; il n’était pas au courant ! Nous prévoyons une prochaine rencontre avec les étudiants (l’année dernière, j’étais intervenu deux jours, sur les questions de sexualité). Nous parlons de l’organisation de la Prière pour l’Unité qui va commencer bientôt.
    Sur le chemin du retour, je passe la nuit à MAMOU pour rendre visite à un jeune prêtre guinéen qui est seul en paroisse. Je lui fais le compte-rendu de la formation et nous voyons que faire dans sa paroisse pour Justice et Paix. Nous parlons bien sûr de la situation du pays et des nouveaux responsables, et je lui explique ce que nous voulons faire à l’occasion des prochaines élections, dans tout le pays : former des observateurs indépendants, mettre en place des équipes de résolution des conflits et également dans chaque Sous-Préfecture une organisation de la société civile. C’est un travail énorme mais essentiel. Nous préparons la prochaine visite de la paroisse par l’OCPH, pour mettre en place des projets de développement et lancer des activités économiques et des petits projets. Tout cela ne nous empêche pas de parler de nos activités pastorales, de la vie de la ville, de nos soucis et de notre vie quotidienne. Nous passons une soirée très agréable. Et tôt le matin (6 heures) je me remets en route pour Conakry où nous arrivons à 13 heures, toujours avec les mêmes problèmes de carburant et les barrages des militaires. Mais ça me fait sept heures à pouvoir travailler sans être dérangé (ou pas trop !).

  • Vendredi 2 janvier 2009 :  Session Justice et Paix dans le doyenné du Fouta.
    Tôt le matin je pars pour la gare routière, car la route est longue. Et j’ai bien fait. Nous sommes tombés sur un taxi-brousse en mauvais état : problèmes de suspension. Arrivés au kilomètre 36, point d’entrée de la ville, nous refusons d’aller plus loin et demandons au chauffeur d’appeler un autre taxi brousse. Cela met du temps. Et quand il arrive, il dit qu’il n’a pas de carburant. Or, suite aux rumeurs d’avant-hier, les stations services sont fermées. Il faut acheter du carburant au marché, le double du prix normal. C’est ainsi que les revendeurs se font de l’argent, à chaque fois qu’il y a des problèmes ou simplement pénurie. Enfin, on part. Les barrages des militaires se sont multipliés sur la route. Et le chauffeur n’a pas les papiers de la voiture. Il s’en sort en donnant de l’argent aux gendarmes.
    La session va regrouper les volontaires de cinq paroisses du Fouta Djallon pour une formation en Justice et paix. Ensuite, ils devront s’organiser par eux-mêmes car ils sont loin de Conakry et nous n’aurons pas le temps de les visiter souvent.
    Finalement, le carburant a baissé de 5.500 FG à 4.800 (environ 0, 60 € par litre) le gas-oil. C’est mieux que rien. En ce temps de grande pauvreté, toute baisse est bonne à prendre. 

  • Jeudi 1er janvier 2009 :  Bonne année à tous. Amour, paix et joie pour tous. Réconciliation et Vérité pour la Paix. Le message de Benoît XVI nous rejoint au cœur de nos problèmes : pour vivre vraiment dans la paix, luttons contre la pauvreté.
    Je célèbre l’Eucharistie dans une paroisse de la ville. Après la messe, nous mettons en place une commission paroissiale de  Justice et Paix . Ce n’est pas parce que c’est le 1er janvier que nous allons nous arrêter ! Au contraire, l’année nouvelle est l’occasion de commencer des choses nouvelles.
    Après cette rencontre avec Madeleine de Laurentia nous réfléchissons au fonctionnement de l’OCPH. Puis je vais saluer la communauté anglophone. Nous parlons des conditions de vie difficile des étrangers en Guinée et des problèmes des migrants et de leurs souffrances.
    Nous sommes toujours à la recherche de nos amis camerounais. Je parle avec Gérard qui revient des services d’émigration. Sans résultat. Il est vrai que ce ne sont pas les meilleurs jours pour les recherches. Nous allons continuer.
    Comme je suis en ville et qu’il me reste un peu de temps, je vais ouvrir ma boîte mail à nouveau, sans arriver au bout de mes messages. Et je regrette de ne pouvoir répondre à chacun que quelques mots, faute de temps. Que faire ?