Mercredi 31 décembre 2008 :
« Rédaction du message du 1er Janvier.
Toute
la journée se passe à la rédaction du message
de demain, à partir des nombreuses réflexions d’hier.
Il y a beaucoup d’idées. Il faut choisir et aller à
l’essentiel.
Nous sommes toujours à la recherche de
nos amis camerounais disparus. Roberto, l’aumônier de la
prison, vient me rejoindre pour cela.
Les messages de vœux
et coups de téléphone arrivent nombreux pour l’année
nouvelle. Cela fait plaisir !
L’année nouvelle
me trouve à ma table de travail, la tête pleine de
pensées et d’amis. C’est une bonne façon
de commencer l’année. Qu’elle soit pleine
d’amitié, de rencontres épanouissantes et de
partage pour nous tous. Pleine de force et aussi d’espérance
devant les difficultés qui ne manqueront pas. »
(Armel Duteil)
Mardi 30 décembre :
« Préparation d’un message.
Les deux
commissions « Justice et Paix » et « Pastorale
sociale » se retrouvent autour de l’Evêque
pour préparer un message à l’occasion du 1er
Janvier aux autorités et au pays.
Je suis spécialement
frappé ce matin par la cohésion de notre équipe.
Et aussi par le sérieux et l’engagement de chacun.
Malgré les risques et les exigences. C’est très
encourageant ! Nous insistons sur le rôle et la
responsabilité des laïcs. Et ils nous assurent qu’ils
sont prêts à prendre leurs responsabilités.
Pourtant, ce n’est pas facile dans la situation
actuelle.
Après cette rencontre, nous nous réunissons
pour mettre au point le programme de janvier avec les visites des
paroisses pour la mise en place des commissions paroissiales et les
rencontres des deux commissions diocésaines. Je communique
les dernières informations au sujet des cinq camerounais dont
j’ai parlé plus haut (voir jeudi 11 décembre).
Comme ils étaient menacés, nous les avons abrités
à l’Archevêché. La Croix Rouge
Internationale (CICR) ayant fourni les fonds, nous avons cherché
à les faire rentrer au Cameroun. Mais à cause du
putsch, cela n’a pas été possible, l’aéroport
étant fermé. Ils ont donc décidé de
partir par la route au Sénégal, munis de laisser
passer, pour rejoindre leur ambassade. En effet, il n’y a pas
d’ambassade du Cameroun en Guinée. Malgré ces
laisser-passer, ils ont été arrêtés à
la frontière sénégalaise et remis à la
police guinéenne pour vérification. Depuis, nous avons
perdu leur trace. Nous faisons tout pour les retrouver.
Ensuite,
je travaille plus spécialement avec ceux qui vont visiter les
paroisses le mois prochain. Puis, avec Charlotte qui va entrer dans
l’équipe diocésaine de l’OCPH (Secours
Catholique, Caritas Guinée : Organisation Catholique
pour la Promotion Humaine). Charlotte est Guide et termine ses
études universitaires. Très engagée, elle a
suivi toutes nos formations et travaille efficacement dans sa
paroisse et son Mouvement. C’est un défi que nous
relevons. Ce n’est pas évident dans le contexte
culturel où nous évoluons de confier une
responsabilité diocésaine à une jeune fille.
Mais j’ai confiance. Et c’est important pour faire
évoluer les mentalités. A nous de la soutenir !
Cela
fait 15 jours que j’ai été absent de Conakry, il
y a donc beaucoup de choses en suspend à traiter, surtout que
je vais être à nouveau absent jusqu’au 5 janvier.
Nous nous retrouvons d’abord avec l’équipe OCPH,
puis avec le service santé, avec la Procure, puis le
secrétariat de l’Archevêché et le Vicaire
général. Il y a aussi des problèmes personnels
à régler : d’abord celui d’un
Français, venu travailler en Guinée pour une
entreprise coréenne ; voilà 6 mois qu’il
n’est pas payé et il n’a plus rien pour vivre.
Ils ne sont pas rares les Européens qui viennent ici, attirés
par des contrats mirobolants et qui se retrouvent sur le carreau.
Ensuite, un handicapé venu de Kissidougou : il sollicite
un coup de main pour construire un petit abri au marché et
pouvoir ainsi gagner sa vie.
Je n’ai pas ouvert ma boîte
mail depuis plus de 15 jours. Il fait déjà nuit, mais
je repique rapidement les pièces jointes sur ma clé
car ce n’est pas tous les jours que je me retrouve près
d’un cyber. Je pourrai les consulter plus tard sur mon
ordinateur ou celui d’un copain et préparer mes
réponses. » (Armel Duteil)
Dimanche 28 décembre :
« Fête de la Sainte Famille.
Il y a beaucoup
de choses à dire sur la famille vu tous les problèmes
que nous vivons actuellement (pauvreté, instabilité,
problèmes d’éducation, changements culturels…).
Les interventions sont nombreuses au moment de l’homélie
qui dure plus longtemps que d’habitude. Ce n’est pas
grave, tout le monde est intéressé. Et après la
messe, exceptionnellement, il n’y aura pas de réunion.
Seulement des salutations et rencontres amicales. C’est Noël !
Les CV-AV (mouvement des enfants) et les scouts se réunissent
bien, mais nous avions préparé ces réunions à
l’avance. Je me contente donc d’aller les saluer avant
de retrouver les novices. Après le repas, je trouve un moment
pour parler avec Armand, le maître des novices, revenu de
Dalaba, pour faire le compte-rendu et l’évaluation de
la session que j’ai donnée aux novices, et voir comment
la prolonger. Nous abordons aussi les autres aspects de la vie du
noviciat ainsi que de la paroisse. Car ils sont sur place et nous
donnent un sérieux coup de main.
Après midi,
quartier libre : je peux prendre un temps de repos.
Annulation
de la rencontre des jeunes. Normalement, nous devions partir à
Kataco pour notre grande rencontre régionale. Mais à
cause du coup d’état, il n’a pas été
possible de préparer les choses normalement. Nous devons donc
annuler cette rencontre au dernier moment. C’est vraiment
dommage et nous ne savons pas quand nous pourrons la tenir
maintenant. Cependant, nous y tenons beaucoup.
Retour sur
Conakry. Le soir, je prépare mes bagages, mais surtout je
prépare papiers, livres et document pour travailler pendant
le voyage. En effet, dans les taxis-brousse nous somme très
serrés (10 personnes dans une berline-Break, au Sénégal
c’était « seulement » 7), mais
j’ai l’habitude et depuis le temps j’ai trouvé
les moyens non seulement pour lire mais aussi écrire, même
si ce n’est pas très facile. Selon la distance, cela me
permet de travailler de 5 à 18 heures tranquille, sans être
dérangé. Il suffit de bien préparer le matériel
à l’avance. Même à Conakry, j’ai une
heure de transport entre la banlieue de Kipe où j’habite
jusqu’au centre ville. C’est pendant ce temps que je
rédige ma correspondance et prépare mes différentes
réunions ou formations. L’Evêque voudrait
rencontrer les deux commissions « Justice et Paix »
et « Pastorale sociale » mardi matin, pour
réfléchir à la situation du pays et préparer
un document pour le 1er Janvier. Je profite des moments où il
y a du réseau au téléphone pour avertir les
quelques membres que je peux contacter. Ils se chargeront de
prévenir les autres depuis Conakry. En Guinée, le
téléphone marche très mal. Mais depuis ces
dernières années où les portables se sont
généralisés et coûtent moins cher, on
arrive quand même à transmettre quelques messages, même
si c’est avec difficultés, ce qui était
impossible autrefois. » (Armel Duteil)
Samedi 27 décembre :
« Nous prenons le temps d’aller saluer le
nouveau Préfet, qui nous reçoit très bien avec
son équipe. Ensuite, nous continuons notre réunion de
communauté. Ce matin, nous abordons les questions de l’école
et de l’internat. Là aussi, il y a beaucoup à
dire… et à faire !
Le midi, repas au noviciat
comme chaque samedi. Demain ce sont eux qui viendront chez
nous.
Hermann apprend que son grand-père et une vieille
tante religieuse viennent de mourir. A peine arrivé, il doit
donc repartir à nouveau pour le Sénégal (en
Casamance, en passant par Dakar… Ce n’est pas la route
directe !). Il ramènera la voiture, une vieille Kangoo
camionnette de plus de 250.000 km, à Conakry au garage. Nous
avons un mal fou à la faire démarrer : problèmes
d’allumage entre autres. (En fait, il tombera en panne, mais
pourra se faire réparer en route, pour arriver à
Conakry en pleine nuit). » (Armel Duteil)
Vendredi 26 décembre : « Nous nous reposons un peu le matin et accueillons les nombreuses personnes venues nous visiter. L’après-midi, réunion de communauté : Hermann nous fait le compte-rendu de son séjour au Sénégal et nous amène les nouvelles des confrères et de notre Fondation d’Afrique de l’Ouest. En effet, au niveau des spiritains, notre district s’organise pour devenir une province missionnaire autonome, pour être plus adapté aux réalités et aux besoins du pays. C’est important et très intéressant, mais pas facile à mettre en place. Ensuite, nous examinons avec Hermann ce que nous avons fait depuis trois mois. C’est nécessaire pour qu’il puisse prendre la suite, car je ne pourrai pas être souvent à Boffa dans les mois qui viennent » (Armel Duteil)
Jeudi 25 décembre :
« Fête de Noël.
Avec Buzus, l’un
des deux stagiaires, nous partons tôt car nous avons deux
communautés à visiter à plus de 100 km, sur des
routes très mauvaises (plus de 3 heures de route). Ugochukwu,
le second stagiaire, est parti depuis hier avec Kennedy, l’un
des deux formateurs du Noviciat, pour assurer la préparation
et la célébration de Noël dans deux autres
communautés. Armand, l’autre formateur, est parti
donner un coup de main à Dalaba (400 km), une paroisse des
montagnes du Fouta Djallon.
Il ne s’agit pas seulement de
dire la messe de Noël. Nous commençons par une réunion
de communauté pour voir ce qui a été vécu
depuis notre passage en juin, avec l’Evêque. Et préparer
les activités des deux mois qui viennent.
A Kudinde, la
1ère communauté, j’avais déjà
assuré une formation de 5 jours pour les catéchistes.
Mais les choses n’ont pas beaucoup avancé. Ce n’est
pas facile de dépasser le laisser aller et de rejeter les
habitudes passées. C’est un travail à reprendre
sans cesse. Les chrétiens viennent régulièrement
et nombreux à la prière du dimanche. Le problème,
c’est leur engagement dans la vie du village en tant que
chrétiens. Nous reprenons donc les différents point
que nous avons fixés ensemble pour la vie de nos
communautés : nouvelles du village, partage de la Parole
de Dieu, catéchèse, lutte pour la justice, paix et
réconciliation, soutien des pauvres et de ceux qui souffrent,
développement, évangélisation, travail
communautaire et questions financières.
Chaque communauté
est différente. La première est une communauté
rurale, regroupant une quinzaine de villages. La seconde, Tugnifizy,
sous-préfecture, est composée de fonctionnaires et
personnes travaillant dans des services et ONG, et donc étrangers
à la région. Les problèmes sont très
différents et il faut s’adapter à chaque fois.
Nous rentrons à la tombée de la nuit, bien
fatigués mais heureux. Je retrouve Hermann, notre vicaire qui
était parti se soigner au Sénégal, qui est
rentré la nuit de Noël avec une voiture qui est restée
deux mois au garage à Conakry mais est toujours en mauvais
état, malgré cela. Hermann a célébré
la messe du jour au Centre ; sinon, les catéchistes
auraient dirigé une célébration de la Parole de
Dieu et les Sœurs auraient donné la communion. C’est
ce qui se fait habituellement.
Pendant tout ce temps-là,
nous suivons à la radio nationale, mais aussi sur RFI (Radio
France Internationale), la BBC, radio Vatican et autres radios
étrangères, les différentes déclarations
du Comité militaire et de son Président, celles des
partis politiques et anciens responsables du pays et celles des
organisations internationales. C’est une belle invention que
le transistor. Nous pouvons avoir des nouvelles un peu partout dans
le pays, même sans électricité, simplement avec
deux petites piles ! Nous remercions spécialement RFI
qui malheureusement ne peut pas être captée en France,
sauf en région parisienne, ce qui est scandaleux :
question de monopole. RFI donne la parole aux Guinéens aussi
bien de l’intérieur que de l’étranger,
nous soutient beaucoup et nous donne des nouvelles claires et
« indépendantes ». Mais aujourd’hui,
c’est l’enterrement de l’ancien président
Lansana CONTE que nous suivons sur la chaîne nationale. »
(Armel Duteil)
Mercredi 24 décembre :
« Les putschistes s’organisent en Comité
National pour la Démocratie et le Développement. Le
gouvernement reconnaît ce Comité et l’ensemble
des militaires se rallie à eux, sans effusion de sang. Merci
à Dieu. Le capitaine, Moussa Dadis CAMARA est proclamé
Président.
A Boffa, je vais voir la directrice
préfectorale de l’enseignement pour nous mettre
d’accord sur les sanctions à prendre au niveau de notre
école, suite aux fuites au moment des compositions. Puis nous
allons présenter nos condoléances au Préfet,
pour la mort du Président.
Ensuite, nous retrouvons
les responsables du Conseil paroissial, de la Fraternité et
du Groupe de Prière charismatique, pour tirer les conclusions
pratiques suite à la réconciliation de samedi. Il faut
que tout cela soit fait avant Noël, pour célébrer
la fête dans la paix et l’entente.
La Messe de
« minuit » est célébrée à
19 heures, couvre-feu oblige ! La messe est très belle :
les choristes l’ont bien préparée et tout le
monde participe. L’ambiance est très priante et
recueillie. Nous ne manquons pas d’intentions de prières
cette année. Au moment de la communion, on vient chercher un
des militaires chrétiens, le responsable du port, pour lui
annoncer qu’il est nommé Préfet ! Tous les
anciens préfets du pays sont ainsi changés et
remplacés par des militaires.
La coopération
décentralisée. Après la messe, nous nous
retrouvons chez un des responsables de la communauté pour un
petit réveillon, avec trois jeunes Français qui
travaillent à Boffa pour les puits et forages, et leurs
responsables venus de Charente Maritime. (Mettre 2 liens, avec
« pastorale sociale » et « album
photos », page : Projet hydraulique – puits et
forages). Je trouve cette idée de coopération
décentralisée intéressante. J’y étais
très impliqué pendant 10 ans au Sénégal,
dans le cadre du Partenariat entre « Lille et la région
du Nord » et « St Louis et la région du
Fleuve ». Ce type de coopération permet des
contacts directs entre personnes. Et cela permet à l’aide
d’arriver directement à la base, au lieu d’être
récupérée et détournée au sommet,
au niveau des autorités. Le problème, c’est que
les Français qui interviennent ne connaissent pas très
bien la culture et les vrais problèmes africains. Ni les
vrais problèmes du développement, les écueils à
éviter et les solutions à trouver. C’est pour
cela que nous sommes souvent consultés à ce niveau,
car nous avons une bonne connaissance du terrain et sommes bien
intégrés à la population dont nous parlons la
langue. Cela est très important pour la participation de tous
et la défense des plus faibles, en particulier des
analphabètes qui ne peuvent pas s’exprimer en français,
et qui sont très nombreux dans les villages. Cependant, je
dois dire qu’avec le temps et l’expérience, cette
coopération s’est beaucoup améliorée.
Les
voyages en Afrique. Je ne reste pas longtemps au réveillon,
car la conversation tourne autour des différents pays que les
responsables ont « faits » en venant en 4x4
depuis la Charente Maritime. Ce n’est pas mon « truc ».
Je n’aime pas beaucoup que des gens qui passent trois jours
dans un pays dont ils ne parlent même pas la langue, et qui
prétendent tout en connaître, se permettent de tout
juger avec une grande assurance ! Et les problèmes
humains m’intéressent plus que les cascades, les
animaux, les forêts… ou les grottes du pays dogon. Il
n’empêche que ces voyages peuvent être très
enrichissants et profitables pour tous s’ils sont bien
préparés, avec des bons contacts dans le pays et vécus
avec un minimum de respect… et d’humilité. Et
aussi d’esprit critique par rapport à ce que les
habitants peuvent raconter pour faire plaisir aux étrangers
de passage. » (Armel Duteil)
Mardi 23 décembre :
« Mort du Président Lansana CONTE.
A 3
heures du matin, notre Evëque m’annonce la nouvelle au
téléphone. Nous voyons quelle attitude avoir :
vigilance de notre part et demander calme et retenue à la
population.
La situation évolue vite : un groupe de
militaires, dirigés par un capitaine, affirme avoir pris le
pouvoir. Mais le président de l’Assemblée
Nationale qui constitutionnellement doit assurer la transition,
affirme tenir les choses en main. De même que le premier
ministre. L’armée semble divisée. Heureusement,
chacun reste sur sa réserve et il n’y a pas de
mort !
Réunion de communauté. Tout cela ne
nous empêche pas de continuer notre travail. Aujourd’hui, l
nous nous retrouvons avec les deux stagiaires pour faire le points
de toutes les rencontres de la semaine passée et en tirer les
conclusions pour nos activités paroissiales et notre vie de
communauté. Suite à cela, je retrouve les responsables
du Conseil Paroissial et des différentes commissions. »
(Armel Duteil)
Dimanche 21 décembre :
« Aujourd’hui la messe est une célébration
pénitentielle. Nous célébrons les
réconciliations d’hier avec le rite de l’eau.
Puis c’est un geste de pardon entre maris et épouses,
entre parents et enfants et entre responsables et autres chrétiens.
Alors la joie peut éclater et le geste de paix prend toute sa
signification. La journée de demain lundi sera réservée
aux confessions et aux rencontres personnelles.
Après la
messe, rencontre des deux commissions de « Justice et
Paix » et « Pastorale sociale ». Il
faut reconnaître que c’est nouveau à Boffa et
c’est un engagement exigeant qui peut même être
dangereux. Il faudra du temps pour arriver à des actions
concrètes mais nous allons continuer. (Mettre un lien avec
« Justice et Paix » et « Pastorale
sociale »).
Les jeunes. Depuis Octobre, ils se
retrouvaient chaque dimanche pour réfléchir au message
de l’Evêque aux jeunes. Aussi, nous nous retrouvons tous
ensemble pour faire la lecture finale. C’est l’occasion
de préciser un certain nombre de choses, en particulier sur
l’Evangélisation (qui n’est absolument pas du
prosélytisme) et sur le Royaume de Dieu, un Royaume de
justice et de paix, ouvert à tous et à construire dans
le monde (la société). Il nous faut approfondir tout
cela, car les jeunes sont plus enclins à s’engager dans
l’Eglise où ils se sentent à l’aise que
dans la vie du pays. Il faut dire qu’ils ne sont qu’une
petite minorité (5 % de chrétiens, et 90 % de
musulmans), que les problèmes du pays sont énormes et
l’engagement difficile et très risqué
(corruption, impunité des auteurs de violences, laisser aller
et découragement général, …). Mais on ne
peut pas laisser les choses comme ça, il faut bien
réagir.
L’équipe des responsables va se
retrouver tous les jours cette semaine pour mettre au point la
rédaction finale, à partir des réactions du
groupe. Cela va faire un très bon document qui pourra servir
de base de réflexion pour l’ensemble des jeunes. »
(Armel Duteil)
Samedi 20 décembre :
« La session se termine bien. Aux novices, …et
à moi-même, de la vivre maintenant. J’aime
beaucoup de telles sessions avec des jeunes missionnaires en
formation ! Cela me rajeunit et me permet d’approfondir
ma propre vocation missionnaire, pour mieux en vivre… ou, en
tout cas, essayer !
L’après-midi, rencontre du
Conseil Paroissial. Cette rencontre est un peu le sommet de la
semaine. Nous faisons le point des activités menées
depuis mon départ de Boffa début novembre, en passant
successivement en revue le travail du Conseil paroissial, des
communautés de quartier, des Mouvements et des différents
groupes. Et aussi le travail des différentes commissions.
Personnellement, à ce niveau, je suis satisfait. En Novembre,
nous avions assuré la formation de ces différents
groupes et les avions organisés. Depuis, chacun s’est
mis à l’action. Les choses ne sont pas parfaites bien
sûr, il y a beaucoup à améliorer, mais au moins
ça commence à bouger.
Le 2ème point, c’est
la préparation de la rencontre des jeunes. Après le
compte rendu de la réunion de vendredi, nous voyons avec les
jeunes ce qu’ils vont faire. Autrefois, dans le Conseil
paroissial, il n’y avait que des personnes âgées,
des hommes pour la plupart. Nous avons décidé de
donner leur place aux femmes et aux jeunes. Chaque Mouvement et
groupe de jeunes envoient maintenant au Conseil paroissial deux
responsables, un garçon et une fille. Mais là encore,
il a fallu mettre en place une responsable fille à côté
du garçon. Cela ne se fera pas sans mal, et nous ferons ce
qu’il faut pour y arriver.
Le 3ème point, c’est
bien sûr la préparation de la fête de Noël à
tous les niveaux, avec tout ce que cela comporte : pas
seulement le repas, ni même la messe, mais aussi la
réconciliation pour vivre cette fête dans la paix. Nous
demandons à chaque famille, à chaque communauté,
groupe et Mouvement, de prendre un temps de réconciliation et
de pardon. Nous voyons aussi que faire pour tous ceux qui n’ont
pas les moyens de célébrer cette fête. Et aussi
pour tous ceux qui sont seuls ou découragés, enlisés
dans des problèmes de toutes sortes.
4ème point :
Cette réconciliation nous la commençons déjà
sur place. Il y a des grosses tensions entre les différents
responsables du Conseil paroissial : jalousies, rancunes,
problèmes passés mal résolus. Cela amène
des dissensions et disputes entre les différents groupes dont
ils font partie. Nous décidons de prendre le taureau par les
cornes. Cela va durer jusqu’à 16 heures. Mais il faut
ce qu’il faut. Il nous faut régler les tensions entre
les membres du Conseil paroissial, mais aussi entre communautés
de quartier, fraternité et groupe charismatique.
Heureusement, les gens n’ont pas perdu totalement les valeurs
de leur culture traditionnelle, en particulier le sens du pardon et
de la réconciliation, et l’habitude de régler
les palabres sans condamner mais en cherchant à obtenir
l’entente et l’accord de tous. Nous pouvons nous appuyer
sur cette base pour régler les problèmes.
5ème
point : Il ne restait qu’à voir la question du
repas pour le noviciat : les communautés et autres
groupes se sont proposés de fournir le repas au Noviciat
chaque samedi, à tour de rôle. Ils ont « tenu »
pendant deux mois, mais pour le deuxième tour, cela devient
un problème. Nouveau signe de pauvreté croissante. Il
est de plus en plus difficile aux gens de trouver simplement la
nourriture pour chaque jour. Quand nous récitons le Notre
Père, ce n’est pas de la poésie ! »
(Armel Duteil)
Vendredi 19 décembre :
« Préparation de la rencontre des jeunes.
Nous
avons prévu pour les vacances de Noël une grande
rencontre des jeunes de la région (le pays baga :
bagataye). Cette rencontre a été préparée
depuis Octobre par un message aux jeunes de l’Archevêque.
Il
s’agit de donner la parole aux jeunes et de les écouter
pour mieux connaître leur vie et leurs problèmes, et, à
partir de là, leur permettre d’établir un plan
d’action pour la suite. En effet, le Frère Joseph a été
assassiné par deux jeunes qui se droguaient. Les jeunes
rencontrent beaucoup de problèmes (mauvaise qualité de
l’enseignement, chômage, etc..). Ils font face à
l’ethnocentrisme, la corruption et le favoritisme. Les
chrétiens sont une minorité (5 % de la population).
Les jeunes chrétiens se sentent marginalisés et même
rejetés et écrasés. Résultat, ils se
découragent, ou se replient sur eux-mêmes ou l’Eglise.
Ils ont donc beaucoup de peine à s’engager dans la vie
du pays et les structures officielles ou les actions
gouvernementales. Il y a tout un travail de réflexion et
d’action à mener avec eux. Mais d’abord, il
s’agit pour nous de les écouter et de comprendre leurs
problèmes. Et à partir de là de leur permettre
de trouver leurs propres solutions.
Il s’agit d’une
rencontre importante. Nous nous retrouvons prêtres,
religieuses, frères et laïcs de toutes les paroisses de
la région, autour de notre Evêque venu de Conakry (5
heures de voyage aller, autant pour le retour) pour cette journée.
Cette rencontre est une nouvelle occasion pour nous de nous
retrouver tous ensemble dans l’amitié, et ces occasions
sont trop rares. En effet, chacun est pris par son travail et nous
sommes très distants les uns des autres. Pour moi qui ai la
responsabilité de toute la région, c’est
l’occasion de revoir chacun et de partager ses soucis d’une
manière amicale, décontractée et informelle. En
particulier pour Kataco. Je suis toujours le responsable, mais je
n’ai pas le temps d’y aller souvent. C’est Igbe,
spiritain nigérian, mon vicaire depuis deux ans, qui assure
le travail sur le terrain. Nous revoyons donc le travail pastoral
effectué et les problèmes à régler. Il y
en a un gros avec la banque alimentaire qui ne fonctionne plus
normalement. Là, il faudra que j’y aille car c’est
grave. Au retour, avec l’Archevêque, nous passons bien
par Kataco, mais la nuit approche et la route est très
mauvaise. Nous voulons rouler le plus possible tant qu’il fait
jour. Nous rentrons donc tard et fatigués. Mais demain matin,
il me faudra terminer la session de formation avec les novices. »
(Armel Duteil)
Jeudi 18 décembre : « Ce soir était prévue une réunion avec une autre communauté de quartier. Mais les enfants sont au catéchisme, les jeunes à la chorale pour la préparation de Noël et les adultes dans la famille de notre Sœur que nous venons d’enterrer. En effet, quand il y a un décès, après l’enterrement tout le monde va dans la famille pour continuer à prier avec elle, l’encourager et la soutenir, mais aussi travailler pour elle : aller puiser de l’eau et chercher du bois pour préparer le repas pour les gens venus d’ailleurs. Et cela se continuera les jours suivants. La mort est très présente parmi nous, mais elle est vécue en communauté. La réunion est reportée à mardi prochain (en fait, elle n’aura pas lieu à cause du putsch militaire). J’en profite pour voir quelques personnes en difficulté et régler quelques problèmes en retard. » (Armel Duteil)
Mercredi 17 décembre 2008 :
« Rencontre avec l’équipe apostolique
(prêtres et religieuses).
Là aussi, suite à
des maladies et différents problèmes, notre équipe
s’est aussi distendue. Le problème est d’ailleurs
général et nous en avons parlé à la
session pastorale de lancement de l’année autour de
notre Evêque.
L’équipe des religieuses a
changé et je suis également nouveau dans la paroisse.
Nous faisons le tour des différentes activités de la
paroisse et nous voyons donc comment répartir nos différentes
responsabilités. Mais nous voulons baser notre engagement sur
la prière : nous décidons de réciter
ensemble l’office (le bréviaire) tous les matins à
l’église, avant la messe, et tous les soirs chez les
sœurs. C’est très important pour nous et nous y
tenons.
L’école primaire.
A midi, j’ai été
obligé de laisser la session pour venir régler un
certain nombre de problèmes. D’abord la question des
salaires. Nous avons prévu une augmentation de salaires à
partir du 1er Janvier. Ils vont passer en moyenne de 150.000 à
200.000 francs guinéens (environ 30 euros). C’est
insuffisant, mais c’est le maximum que nous pouvons faire sans
trop augmenter la scolarité des élèves. Sinon,
les parents pauvres n’enverront plus leurs enfants à
l’école et l’enseignement sera réservé
aux enfants de familles riches, ce que nous voulons à tout
prix éviter. Nous sommes pris entre deux feux, et ce n’est
pas facile de tenir les deux fronts en même temps.
Il y a
aussi des tensions à régler. Nos deux stagiaires
nigérians, venus pour relever l’école et
l’internat, font très bien leur travail, toutefois il y
a beaucoup de choses à changer et ce n’est pas facile
d’abandonner les habitudes passées et le laisser-aller.
Nos deux stagiaires sont exigeants et ils ont raison, mais cela
entraîne un certain nombre de tensions qu’il faut
apaiser. Il faut du temps et beaucoup de tact !
Les fuites
aux compositions. Un des enseignants a vendu à l’avance
à certains parents les sujets des compositions pour que leurs
enfants aient de bonnes notes. Cela est absolument inadmissible.
Nous parlons longuement du problème et décidons de
commencer les compositions à la rentrée de janvier. Il
va falloir sévir, car, en plus, nous nous sommes aperçus
que ce n’est pas la première fois que cet enseignant
fait le coup ! Je vais avertir l’inspectrice préfectorale
de l’enseignement pour que les choses soient claires. Mais il
nous faut chercher un nouvel enseignant compétent en pleine
année scolaire. Et aussi un surveillant pour le dortoir.
L’ancien a réussi un concours et va continuer des
études. » (Armel Duteil)
Mardi 16 décembre :
« Les communautés de quartier.
Ce soir,
rencontre avec la communauté du quartier ALMAMIYA. Là,
il y a vraiment beaucoup à faire. A mon dernier passage,
j’avais longuement expliqué ce qu’est une telle
communauté. Les gens m’ont assuré qu’ils
avaient bien compris et qu’ils étaient d’accord.
Mais pour passer à la réalité, c’est
autre chose ! Au lieu de voir les situations d’injustice
dans le quartier, les personnes à aider et les
réconciliations à faire, on passe toute la réunion
à parler du repas à préparer pour l’offrir
aux novices samedi prochain. Et cela accompagné d’attaques
personnelles, de jalousies et de sous-entendus. Je leur dis ce que
j’en pense et nous voyons comment faire à l’avenir.
Mais il faudra reprendre les choses en profondeur samedi, à
la rencontre du conseil paroissial. » (Armel Duteil)
Lundi 15 décembre :
« Le matin, à 6 heures 30, je dis la messe pour
la paroisse. Il n’y avait pas eu de messe en semaine depuis le
2 Novembre. (Le dimanche, les prêtres du Noviciat viennent).
Et dès 8 heures, je pars justement au Noviciat pour commencer
ma session sur le célibat consacré et la vie
religieuse.
Pendant toute la semaine, j’anime donc cette
session sur le célibat consacré (religieux) avec les
six novices. Ce temps de noviciat est un temps de formation
spirituelle et de préparation à la vie religieuse et
missionnaire. Il est important de poser des bases solides. En
particulier pour qu’ils puissent vivre leur célibat
d’une manière heureuse et épanouissante. Une
semaine entière, ce n’est pas trop et cela se passe
très bien car ces novices sont de jeunes adultes qui ont déjà
terminé le premier cycle de leur formation et fait un stage
en pays étranger. Ils sont, de plus, motivés et
engagés. Cela me fait aussi du bien à moi-même
de vivre cette session et ça me rajeunit !
Mais je ne
suis pas revenu à BOFFA depuis début Novembre. Il y a
donc beaucoup de choses à voir. Il faut aussi continuer les
formations, réorganiser les activités et relancer la
paroisse. Aussi, chaque jour à 17h, je quitte le noviciat
pour rencontrer un groupe différent. Ce lundi, je commence
par les catéchistes.
La catéchèse a commencé
dès le lancement de l’année scolaire et se
déroule normalement. Ce qui est un bon point. Mais il y a
quand même beaucoup à améliorer. D’abord
le suivi par les parents de la catéchèse donnée
aux enfants. Ensuite, le soutien par les parrains et marraines, car
chaque enfant (et adulte) doit avoir un parrain ou une marraine dès
le début de sa catéchèse ; mais cela a de
la peine à se mettre en place. Les problèmes ne
manquent pas non plus du côté des catéchistes.
La catéchèse est encore trop un enseignement théorique
et moralisant. Alors qu’il s’agit de faire découvrir
une personne, le Christ, et une Bonne Nouvelle, l’Evangile. Il
ne suffit pas de les connaître théoriquement, mais d’en
vivre. Nous voyons comment améliorer notre éducation
religieuse. En effet, les catéchistes parlent trop et ne font
pas assez participer les enfants. Nous cherchons aussi comment aider
les enfants à vivre pendant la semaine ce qu’ils ont
découvert pendant la catéchèse (mettre en
pratique ce qu’ils ont appris). Et comment évaluer, la
semaine suivante, ce qu’ils ont vécu ; ce n’est
pas facile et les catéchistes n’y sont pas habitués.
Ils auraient plutôt tendance à faire la catéchèse
simplement comme on enseigne les matières profanes à
l’école. C’est plus facile ! Mais, comme
tous, nous cherchons à faire pour le mieux, j’ai bon
espoir. Nous évaluerons tout cela à ma prochaine
visite. » (Armel Duteil)
Dimanche 14 décembre :
« Justice et Paix.
Ce matin, je pars dans une
paroisse que je n’ai pas encore visitée à
Conakry (il y en a 19 pour la capitale). J’y viens pour lancer
une commission « Justice et Paix ». J’en
dis quelques mots aux annonces et nous nous retrouvons avec les
volontaires après la messe. Ils sont nombreux à être
restés, beaucoup de jeunes, et ils semblent décidés.
Nous mettons donc tout de suite en place les actions à mener.
Dans toutes les communautés de quartier, les différents
groupes et mouvements, ils vont d’abord mener une enquête
pour voir les situations d’injustices et de manque de paix
autour d’eux. Dans un mois, un délégué de
chaque groupe viendra apporter les résultats de leur enquête
et ils en feront une synthèse. A partir de là, ils
décideront des premières actions à mener. Avant
de les quitter, je me retrouve avec Joseph, membre de la commission
diocésaine qui continuera à les suivre, et avec le
conseil paroissial. Puis je pars à la gare routière,
où j’attends 4 heures avant que le taxi-brousse pour
BOFFA se remplisse. Car on ne part jamais avant que le taxi soit
plein : il faut rentabiliser le voyage. C’est vrai que ça
ne coûte pas cher : 20.000 FG, soit 3 € pour 150 km,
bien qu’un litre d’essence coûte près d’1
€, malgré la dernière diminution. Alors, pour
s’en sortir, il faut charger à bloc : 7 personnes
dans une petite berline, 10 dans un break !
J’arrive
en pleine nuit, mais pas besoin de réveiller mes confrères,
j’ai les clés ! » (Armel Duteil)
Samedi 13 décembre :
« Je retrouve les animateurs-jeunes pour la prévention
du SIDA.
C’est un groupe qui travaillait très bien,
du temps où il était soutenu financièrement par
une ONG américaine. Mais le soutien s’est arrêté
et les activités aussi ! Et vu les conditions
économiques dramatiques du pays, on ne peut par leur demander
de travailler à plein temps, bénévolement.
C’est un problème auquel nous nous trouvons confrontés
en permanence. Il y a énormément à faire, mais
les moyens manquent. Nous voyons comment relancer les activités
malgré tout. Non pas à temps plein, mais en profitant
des occasions qui se présentent dans leurs différentes
activités. Pas seulement pour parler du SIDA, ce qui est
facile, mais pour participer à une véritable éducation
sexuelle des jeunes, ce qui est moins simple. Et aussi leur donner
le courage et les accompagner pour passer un test de dépistage.
C’est la première fois que je rencontre les membres de
ce groupe et ils semblent très heureux de cette rencontre qui
les relance. Nous allons continuer.
Jeux éducatifs aux
droits de l’homme et de l’enfant.
Je vous en ai déjà
parlé plusieurs fois. Nous les avions composés au
Sénégal avec Amnesty International. Je les ai adaptés
à Mongo à la culture des Kissiens, traduits en anglais
pour les utiliser dans les camps de réfugiés du
Libéria et Sierra Leone, et aussi en Kissi, en Kono et en
Menda, trois langues de la Forêt.
Depuis que je suis venu à
Kataco, je n’ai pas eu la possibilité de les faire
utiliser, faute de moyens pour prendre en charge les animateurs. Je
suis maintenant sur une piste. Mais le pays a beaucoup changé
à cause de tous les événements de ces deux
dernières années, et puis Kataco ce n’est pas la
Forêt du sud de la Guinée. Et Conakry non plus. Nous
avons commencé à jouer ce jeu avec les enfants de
l’internat de Boffa pour observer comment ils réagissaient ;
maintenant, avec l’aide des deux commissions nous cherchons
comment les repenser pour la situation nouvelle dans laquelle nous
nous trouvons actuellement ; et il faut les repenser presque
complètement. C’est à cela que j’occupe
mes soirées depuis quelque temps, ainsi que mes quelques
autres (rares) temps libres. » (Armel Duteil)
Vendredi 12 décembre :
« Ordination épiscopale du nouvel Evêque
de NZEREKORE, Raphaël GUILAVOGUI.
C’est une
célébration très importante, car il n’y a
que trois diocèses dans toute la Guinée (90 % des
Guinéens sont musulmans) et nous attendions la nomination de
cet évêque depuis longtemps. Bien sûr, je suis
invité, mais il y a deux jours de voyage à faire, sur
une route très mauvaise (c’est à la frontière
de la Côte d’Ivoire) et je n’ai vraiment pas le
temps d’y aller, vu tous mes engagements. Nous espérons
que cette nomination permettra un nouveau démarrage du
diocèse. Et qu’elle fera grandir les liens et une vraie
collaboration entre tous les chrétiens de Guinée. Car
il y a une grande mobilisation à cette occasion. C’est
important que cela continue ! » (Armel Duteil)
Jeudi 11 décembre :
« Les actions et manifestations contre le SIDA se
continuent. Dimanche, il y a eu un grand rassemblement dans la
paroisse de Nong comme prévu. Un autre se prépare pour
demain. Aujourd’hui, nous nous retrouvons avec les 12
animateurs qui suivent une centaine de personnes vivant avec le
SIDA. Nous faisons le point sur les actions menées qui sont
très délicates et ne vont pas sans poser de nombreux
problèmes. Nous échangeons nos idées pour
améliorer nos façons de faire.
Je trouve un moment
pour parler avec Nuno, responsable du SCD (Service de Coopération
et de Développement) qui est venu visiter les volontaires
envoyés par son Organisation, en Guinée. En
particulier Bernard, responsable de l’atelier de soudure,
Savoir-Fer, pour les enfants de la rue. (Mettre un lien avec
« Savoir-Fer » - texte – rubrique
« Pastorale sociale », et photos). Nous
faisons le tour des activités, visitons l’atelier pour
contacter les formateurs et apprentis, évaluons les façons
de faire et allons voir l’Evêque pour préparer
l’avenir.
Je suis très heureux de revoir Nuno, car
nous nous connaissons depuis plus de 30 ans et j’ai participé
à plusieurs sessions de préparation au départ
des volontaires, dans les années 1976-1979 et encore, lors de
mes congés, plusieurs fois par la suite. Nous parlons de ces
trois années que j’ai passées en France en
animation missionnaire : d’abord avec les travailleurs
immigrés, les étudiants africains et à propos
des relations avec les autres religions ; mais aussi dans les
écoles et quartiers, auprès des Français, sur
les problèmes du développement, et dans les paroisses
et Mouvements, sur la vie des autres Eglises. Je garde un excellent
souvenir de ce travail, en particulier avec les jeunes, français
ou étrangers.
Souffrances de cinq camerounais. Je me
prépare à partir au Lycée présenter la
Commission Justice et Paix, quand arrivent deux camerounais qui me
racontent leur histoire. Avec trois autres amis, ils mangeaient
tranquillement chez eux, à côté d’un bar,
quand arrivent des militaires, dont le meneur de la mutinerie d’il
y a quelques mois. Ils étaient sans doute saouls et drogués,
en tout cas ils ont sérieusement tabassé le
propriétaire du bar. Quand ils se sont aperçus que ces
cinq camerounais avaient été témoins de
l’affaire, ils les ont furieusement frappés en les
accusant d’avoir volé un rétroviseur de leur
voiture. Ils leur ont tout pris : téléphones
portables, argent, papiers, passeports… Et les ont amenés
au camp. Là, ils ont continué à les frapper, à
leur verser de l’acide de batterie sur le corps et à
les menacer en leur disant que de toutes façons ils pouvaient
faire ce qu’ils voulaient, personne ne pourrait rien leur
dire. Finalement, ces Camerounais ont été chassés
du camp, mais ils continuent à être menacés et
se retrouvent sans protection. Le certificat médical qu’ils
ont fait établir à la sortie du camp a été
pris par la police. Bien sûr, ils voudraient rentrer au
Cameroun, mais ils n’ont plus aucun papier. Ils ont été
voir une association des droits de l’homme qui leur a dit
qu’on ne pouvait rien faire pour eux. Ils ont été
au HCR, mais on leur a dit qu’ils ne sont pas déclarés
comme réfugiés. Alors, ils sont venus me voir. Avec
l’Evêque et Roberto, l’aumônier de prison,
nous avons cherché ce que nous pourrions faire. En Guinée,
il n’y a ni ambassade, ni même consulat du Cameroun. Il
faudrait aller à Dakar ou Abidjan. Il y a bien une
association des Camerounais, mais le président a été
menacé par les militaires et depuis il a peur. Nous
contactons le CICR (la Croix Rouge) pour qu’ils aient au moins
un laisser-passer, mais ils ne peuvent pas les recevoir avant lundi
prochain. Nous leur assurons le maximum de protection et de moyens
de vivre. Mais il reste le coût du voyage pour le Cameroun :
2.000 € pour cinq personnes. Bien sûr, cela dépasse
nos possibilités. Nous allons nous tourner les Caritas
(Secours Catholique) d’Allemagne et des Etats-Unis. Roberto va
suivre les affaires, car je dois absolument aller à BOFFA
pour préparer les fêtes de Noël. »
(Armel Duteil)
Mercredi 10 décembre :
« 60ème anniversaire de la Déclaration
Universelle des Droits de l’Homme.
C’est important
pour nous. Pour la première fois, cet anniversaire sera
célébré en Guinée, à l’intérieur
du pays, dans le Fouta Djalon, à Lake. A Conakry, une
conférence est donnée à l’université
par Andréa RICCARDI, le responsable de Sant Egidio,
organisation qui travaille beaucoup pour la paix et la
réconciliation en Afrique. Pour moi, plus prosaïquement,
je continue mes interventions dans les différentes classes du
lycée de Dixina pour présenter la commission « Justice
et Paix ». (Mettre un lien avec cette rubrique) C’est
important pour faire réfléchir les jeunes à la
situation actuelle du pays et à leur responsabilité.
J’espère installer une Commission Justice et Paix au
sein du Lycée. On verra ! » (Armel
Duteil)
Mardi 9 décembre : « Au retour, bien des choses m’attendent. En particulier pour les activités contre le SIDA qui se continuent et pour la célébration du 60ème anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, demain. Je prends d’abord le temps de saluer Jean-Louis et Jacqueline qui sont venus nous donner un coup de main pour la Procure et les autres services de l’Archevêché. Ils nous ramènent le calendrier 2009 sur le thème du prochain synode pour l’Afrique : Réconciliation, Justice et Paix qu’ils ont imprimé pour nous. Nous allons pouvoir le mettre en vente immédiatement. Jean-Louis et Jacqueline m’ont apporté quelques « victuailles » (saucisson, fromage) introuvables ici ! Cela permettra de marquer le coup pour les fêtes de Noël ! Ensuite, je me dépêche de rejoindre l’Evêque, car il y a de nombreux problèmes en suspend à régler ; ça se fera au fur et à mesure. » (Armel Duteil)
Lundi 8 décembre 2008 : « Nous avons du retard pour décoller, mais au moins nous arrivons à bon port. C’est la Tabaski, mais aussi la fête de l’Immaculée Conception, fête du diocèse. J’arrive juste à temps pour participer à l’Eucharistie qui est célébrée le soir. Une bonne façon d’atterrir en Guinée. » (Armel Duteil)
Dimanche 7 décembre :
« Prière et visite en famille.
Raymond, le
directeur du Centre qui nous accueille, m’a demandé de
présider l’Eucharistie. Je me sens à l’aise
pour l’homélie, car dans la 2ème lecture, Pierre
explique : Nous attendons une terre nouvelle où la
justice habitera… pour la paix de tous !
A midi, je
suis donc reçu dans la famille d’Emile. La rencontre
est très agréable malgré le décès
récent de leur fille. Ensemble nous prions pour elle et je
ramène un DVD de l’enterrement pour
Emile.
L’après-midi, nous partons à PORTO
NOVO, la capitale, où se trouve un Centre de développement
qui m’intéresse beaucoup car ils font des
transformations et conservations de produits locaux : légumes,
fruits, viande et poisson. Nous pensons d’ailleurs y envoyer
l’une ou l’autre personne pour s’y former.
Malheureusement, c’est dimanche, et le centre est fermé !
Dommage. » (Armel Duteil)
Samedi 6 décembre 2008 :
« Echanges sur la non violence.
Nous échangeons
un long moment avec Geneviève qui travaille depuis de longues
années au Niger et assure des formations sur la Non Violence
Active. Cela m’intéresse beaucoup, en particulier pour
le travail en Justice et Paix. Nous échangeons de nombreuses
idées et préoccupations et posons les premières
bases d’une collaboration possible,…. si
possible !
L’après-midi, nous nous retrouvons
avec Jean-Paul pour tirer les conclusions du Colloque et voir la
suite à leur donner en Guinée. Il y a du travail à
faire, aussi bien auprès des réfugiés et autres
étrangers venus chez nous que pour ceux qui sont en transit
pour l’Europe, la plupart du temps clandestinement, sans
oublier ceux qui ont été expulsés et reviennent
complètement démolis. » (Armel Duteil)
Jeudi 4 décembre 2008 :
« Rencontre amicale.
A mon départ de
Conakry, Emile, responsable de l’Association SOS-Mineurs, m’a
remis une lettre destinée à son grand frère
vivant à Cotonou, pour présenter ses condoléances
à la suite du décès de sa nièce, car il
n’a pas pu venir à l’enterrement depuis la
Guinée. J’achète une puce pour pouvoir les
prévenir. Ils viennent me saluer et m’invitent pour le
dimanche, si je suis encore là !... En effet, le
vendredi, il y a bien un avion, mais pour le vol « Cotonou-Conakry »
le billet revient à 1.500 dollars. En restant jusqu’à
lundi, le billet ne coûtera que 700 dollars, mais ce n’est
pas sûr qu’il y aura un avion, d’autant plus que
c’est la fête de la Tabaski (Ard el Kebir, la fête
du mouton), une grande fête musulmane. Je tente le coup et je
décide d’attendre lundi, ce qui me permet de rester
trois jours supplémentaires à Cotonou et de prendre un
certain nombre de contacts. » (Armel Duteil)
Mercredi 3 décembre 2008 :
« Livres et retrouvailles.
Les expéditions
coûtent très cher en Afrique. Profitant de ma venue à
Cotonou, j’ai amené une valise de mes livres.
(Jean-Michel : lien avec la liste de mes livres). A l’occasion
d’une pause, je vais à la librairie Notre-Dame où
nous avions un dépôt de nos livres dans le passé.
J’ai la surprise d’y trouver comme directrice, Agnès,
une vieille amie avec qui j’avais travaillé autrefois
pour l’Action Catholique de l’Enfance. Et dont la sœur,
enseignante, avait été ma collaboratrice à St
Louis du Sénégal. Le monde est petit ! Ces livres
les intéressent d’autant plus qu’ils préparent
une semaine du livre africain, et ils m’en demandent d’autres.
Je ne sais pas si je pourrai trouver une occasion pour les
envoyer. » (Armel Duteil)
Mardi 2 décembre 2008 :
« Rencontre sur les problèmes des
migrants.
Malgré la fatigue, nous rejoignons le groupe qui
a commencé le travail depuis hier. Au moins, nous avons évité
les discours protocolaires ! Je retrouve, avec beaucoup de
joie, un certain nombre d’amis connus aux rencontres
précédentes d’Abidjan et de Kinshasa. C’est
cela le plus important : la possibilité d’échanger
nos idées, nos questions, et nos réalisations.
Le
rencontre regroupe des responsables de Justice et Paix, de Pastorale
sociale et de Caritas (Secours catholique) pour réfléchir
à la situation des migrants : leurs problèmes
aussi bien dans les pays de départ (en Afrique), de transit
et d’arrivée (en Europe). Et ce que nous pouvons mettre
en place pour que cela se passe moins mal ici et là-bas. Et
aussi pour accueillir ceux qui sont expulsés d’Europe
et reviennent chez nous humiliés, complètement
perturbés, en très mauvais état de santé,
rejetés par leur famille et leur milieu et sans aucun moyen
pour redémarrer dans la vie. Ce qui fait qu’ils n’ont
qu’un seul désir : repartir dès qu’ils
seront en état de le faire, quitte à retrouver à
nouveau de grandes souffrances et même la mort.
Dès
que possible, je mettrai les conclusions du Colloque, car ce serait
beaucoup trop long de tout reprendre ici. » (Armel
Duteil)
Lundi 1er décembre 2008 : « Je passe toute la matinée à me battre pour trouver une place dans l’avion. Car il y en a un encore aujourd’hui, mais nous ne sommes pas sur la liste ! Ce n’est qu’à midi que nous arrivons à nous faire accepter par la Compagnie, puisque c’est elle qui a supprimé le vol, sans même nous prévenir ! Mais l’heure a passé. Nous sautons dans un taxi pour l’aéroport….. Heureusement, l’avion a plusieurs heures de retard. Nous pouvons donc partir…. et arrivons après minuit : l’équipe d’accueil a été très patiente et nous a attendus. Heureusement, car ni Jean-Paul ni moi ne connaissons Cotonou, l’argent guinéen n’est pas valable dans le reste de l’Afrique de l’Ouest francophone et le réseau téléphonique guinéen ne fonctionne pas au Bénin !Le lundi 1er décembre était aussi la Journée Mondiale contre le SIDA. » (Armel Duteil)
Dimanche 30 novembre 2008 :
« Faux départ pour le Bénin.
Avant
mon départ, je devais célébrer l’Eucharistie
dans la paroisse voisine. Le Frère Yvon devait m’y
conduire. Mais la voiture, qui pourtant sort du garage, refuse de
démarrer. Nous trouvons un voisin au bout d’un certain
temps pour me conduire à l’aéroport, car pour la
messe, c’est trop tard. J’ai téléphoné
au catéchiste pour qu’il dirige une liturgie de la
parole et donne la communion. Heureusement qu’il y a le
téléphone portable… et que cette fois il a
marché ! J’arrive donc à l’aéroport
où Jean-Paul, mon compagnon de voyage, m’attend avec
impatience. Nous retrouvons tout un groupe de personnes devant le
comptoir de la Compagnie « Air-Ivoire » qui
n’est même pas ouvert. Nous attendons plus d’une
heure sans voir personne. Le vol est annulé. Mais la
Compagnie ne nous a pas prévenus. Et elle n’a même
pas envoyé un agent pour nous avertir. Il y a bien une autre
compagnie, Air-Mali, qui part pour Cotonou, mais ils refusent les
billets d’Air-Ivoire. Et, bien sûr, je n’ai pas
d’argent pour acheter un autre billet. Déjà, le
premier m’a été envoyé par les
responsables du Colloque auquel je dois participer.
De telles
situations arrivent chaque jour. Le pays est en pleine
décomposition. Cela fait un mois que nous cherchons à
ouvrir un compte à la banque : il y a toujours un papier
qui manque ou quelqu’un d’absent ! Et celui qui
doit faire le travail commence par chercher quelqu’un d’autre
qui pourra faire le travail à sa place, ou sinon un autre
moment pour le faire. Ce n’est pas toujours facile de rester
calme dans ces conditions ! » (Armel Duteil)
Samedi 29 novembre 2008 :
« Education aux droits de l’enfant.
Nous nous
retrouvons ensemble pour un séminaire de formation aux droits
de l’enfant, avec 50 enseignants de l’école
primaire. Après un temps de recherche sur la façon de
faire vivre ces droits et de les faire respecter, nous présentons
le jeu que j’ai composé autrefois avec Amnesty
International au Sénégal et réactualisé
et adapté en Guinée quand j’étais dans
les camps de réfugiés. C’est un très bon
moyen pour initier les enfants aux droits des autres enfants et les
aider à les mettre en pratique. Tout cela se passe dans une
très bonne ambiance, très joyeuse.
Vendredi 28
novembre 2008 : Arrivée de Jean-Paul, responsable
« Justice et Paix » du diocèse de
NZEREKORE.
Nous allons participer ensemble à un séminaire
sur les migrants, au BENIN. Nous sommes heureux de nous revoir, car
nous travaillons dans le même sens et nous nous entendons
bien. Nous en profitons pour travailler ensemble, car Nzérékoré
est loin (près de la frontière ivoirienne) et les
routes en très mauvais état. Jean-Paul a mis plus de
24 heures pour arriver. Et en plus, ça coûte
cher !
Nous allons ensemble à CRS pour voir comment
trouver des moyens pour coordonner le travail dans le diocèse,
d’autant plus qu’un nouvel évêque vient d’y
être nommé. Nous revoyons les différentes
actions qui ont été menées, pour les analyser
et les réorienter. Nous préparons notre participation
et mon intervention au séminaire du Bénin. Jean-Paul
m’accompagne au Lycée Ste Marie où je dois
intervenir sur « Justice et Paix » ; il y
participe activement, apportant son éclairage et le
témoignage de leurs actions. » (Armel Duteil)
Lundi 24 au vendredi 28 novembre
2008 : « Suite des activités.
Les
activités habituelles de Conakry reprennent, en plus de
l’accueil des gens et des réunions diverses.
Lundi,
travail avec CRS ; mardi, conseil d’administration de
Savoir-Fer ; mercredi, réunion de l’équipe
OCPH ; jeudi, rencontre avec l’UNICEF ; vendredi,
travail à l’Archevêché.
Formation à
Justice et paix dans les lycées.
Aujourd’hui, je
commence toute une série de rencontres avec les élèves
du Lycée Ste Marie (une heure par classe). Ce n’est pas
beaucoup, mais cela permet quand même de présenter la
Commission Justice et Paix, ses bases humaines (la Déclaration
Universelle des Droits de l’Homme) et religieuses (dans
l’Evangile et le Coran), de faire une première
sensibilisation et de commencer à répondre aux deux
questions :
Nous, jeunes, quelles situations d’injustices
et de manques de paix vivons-nous ?
Que pouvons-nous
faire ?
L’objectif, c’est d’arriver à
mettre en place une commission justice à l’intérieur
du Lycée. » (Armel Duteil)
Dimanche 23 novembre 2008 :
« Lancement de « Justice et Paix ».
Je
me retrouve à nouveau dans la paroisse de LAMBANYI. Cette
fois-ci, avec Charlotte, membre de la commission diocésaine,
nous sommes venus mettre en place la Commission paroissiale de
Justice et Paix. Les gens sont nombreux à rester après
la messe, et leurs questions pertinentes montrent qu’ils sont
très intéressés. Il faut dire que les problèmes
sont nombreux et importants. Il y a donc beaucoup à
faire.
Depuis hier après-midi, les enfants CV-AV (ACE :
Action Catholique de l’Enfance) du secteur se sont réunis
pour une grande fête de lancement de l’année.
J’aime beaucoup ce Mouvement qui donne leur place aux enfants,
les forme et les responsabilise. Bien sûr, ce sont eux qui
animent notre prière aujourd’hui. Ils le font très
bien, à la grande joie de tous. Nous avions prévu une
rencontre avec les jeunes sur leur engagement dans les quartiers et
la vie du pays, mais il y a trop de choses à faire. Ce sera
donc pour une autre fois. » (Armel Duteil)
Samedi 22 novembre 2008 :
« Nouvelle formation en Pastorale sociale.
Nous
voyons où en sont les différentes commissions
paroissiales que nous avons lancées. Après un travail
avec l’Evêque, je vais rejoindre un groupe
d’anglophones. Ils cherchent à se regrouper pour
pouvoir se soutenir et porter ensemble leurs problèmes. En
effet, ici comme ailleurs, les étrangers sont souvent des
boucs émissaires, victimes de toutes sortes de tracasseries
policières, arrestations illicites, chantage et pillage. Et
comme ils ne sont pas du pays, et parfois ne parlent même pas
la langue locale, ils ont beaucoup de mal à s’en
sortir. Et on les accuse de tous les maux : drogue,
prostitution, etc. Nous parlons de leurs différents problèmes
et voyons ce qu’il est possible de faire. Demain, je les
mettrai en relation avec les chrétiens de LAMBANYI pour
qu’ils soient connus et accueillis, aimés et soutenus.
Pour eux, c’est déjà important d’être
reconnus et de pouvoir parler de leurs problèmes. Et pour
moi, je retrouve l’ambiance et la culture des gens avec qui je
travaillais à Mongo dans les camps de réfugiés. »
(Armel Duteil)
Du 19 au 21 novembre 2008 : « Ce sont les activités habituelles : accueil, visites, rencontres, réunions avec les différents groupes et associations, réflexions sur nos actions avec les différents responsables. Nous reprenons aussi avec CRS les différents points que nous avions travaillés, car il y a toujours des détails à préciser si l’on veut avancer. Surtout sur des questions aussi délicates…. et dangereuses, que les prochaines élections. » (Armel Duteil)
Mardi 18 novembre 2008 :
« Réunion de doyenné.
D’abord,
ce qui est important pour nous, c’est de nous retrouver pour
resserrer nos liens d’amitié, nous soutenir les uns les
autres et nous encourager mutuellement. Mais, plus profondément,
nous ne pouvons pas faire grandir l’unité et amener la
paix autour de nous, si nous ne sommes pas d’abord
profondément unis entre nous. Certains sont partis en
juillet, d’autres sont arrivés. Nous sommes heureux de
les accueillir. Nous prenons donc le temps de faire connaissance.
Ensuite, nous reprenons les orientations et décisions de la
session de lancement de l’année pastorale pour voir
comment les adapter et les mettre en pratique : pour le travail
des catéchistes, celui des conseils paroissiaux et la
responsabilisation des laïcs en général. Nous
faisons le point de la catéchèse et de la marche de
nos communautés de base.
Dans un troisième temps,
nous réfléchissons à l’animation des
jeunes. C’est un point essentiel pour nous et nous lui
accordons toute notre attention. En particulier, la marche des
mouvements de jeunes. Cette année, notre Evêque a
envoyé un message aux jeunes pour leur donner la parole et
leur demander ce qu’ils veulent faire, non seulement dans
l’Eglise, mais aussi dans le pays. Une grande rencontre de
tous les jeunes du doyenné est prévue pendant les
vacances de Noël. Nous la préparons activement, car
c’est une grande affaire.
Nous voyons ensuite comment mieux
nous aider et travailler. Et en particulier soutenir Kataco dans la
mesure où Igbé se retrouve souvent seul, car je dois
relancer la paroisse voisine de Boffa et me consacrer aux deux
commissions de « Justice et Paix » et de
« Pastorale sociale ». (Voir les deux
rubriques du même nom).
Nous terminons en abordant les
questions diverses qui nous tiennent à cœur. La
rencontre se termine par un repas simple et fraternel, qui fait la
joie de tous.
Dès la fin de la réunion du doyenné,
je devais partir pour la tournée des communautés de
villages. J’ai tout préparé à l’avance.
Le problème, c’est la voiture. Elle est très
vieille et à chaque fois que nous sortons, il y a quelque
chose qui lâche. Nous essayons toujours de la bricoler, mais
sans succès. Elle est à nouveau au garage depuis deux
jours. C’est une vieille Renault camionnette. Finalement, elle
arrive et nous partons. Je suis accompagné de Bernard,
responsable de Savoir-Fer, l’association qui forme des enfants
de la rue en soudure, et de Véronique, qui vient de terminer
ses études d’assistante sociale et qui est venue
travailler pendant deux mois avec les enfants de la rue dans
l’Association SOS Mineurs. Ils souhaitent tous deux partager
la vie des communautés de village. Mais les choses ne se
passent pas comme prévu ! Le mécanicien a enlevé
la bobine et l’a remplacée par un bobinage de fils plus
ou moins soudés les uns aux autres. Au bout de 30 km, ils ont
chauffé et pris feu. Plus de circuit électrique.
Heureusement, nous étions dans un coin où il y avait
un peu de réseau. Nous avons réussi à joindre
Kennedy, un confrère ghanéen nouvellement arrivé
au noviciat. Il vient nous chercher et nous remorque jusqu’à
Boffa. Je suis très déçu, car c’est la
2ème fois que je tombe en panne et que je dois ainsi annuler
ma tournée. Cela ne me plaît pas du tout, car je sais
qu’ils m’attendent et se sont préparés, et
ils seront déçus. Et moi, ça ne me plaît
pas du tout. Je passe la nuit à Boffa et nous retournons tous
les trois à Conakry, car beaucoup de problèmes
m’attendent et j’ai beaucoup de travail en retard. »
(Armel Duteil)
Lundi 17 novembre (suite) :
« A 17 heures, réunion des parents
d’élèves.
Dès 16 heures, ils
commencent à arriver, alors que je suis en réunion
avec les catéchistes pour réajuster le programme et la
façon d’enseigner en sissou, la langue de la région.
Ils semblent vraiment intéressés, car en général
les gens arrivent en retard ! Mais je crois que c ’est
la première réunion du genre, où ils pourront
poser leurs questions et faire leurs propositions. D’habitude,
on les convoque pour leur faire un discours et leur demander de
l’argent ! La salle est trop petite, de nombreux
participants sont dehors, mais ils écoutent attentivement.
Les choses tournent toujours autour de la question :
comment mieux éduquer nos enfants ? Aussi bien en
famille et dans le quartier qu’à l’école.
On nous demande d’organiser des cours d’informatique :
mais pour cela il faudra non seulement des appareils mais aussi du
courant et des moyens. Ils demandent aussi une initiation à
l’anglais. Cela sera plus facile, avec nos deux stagiaires
nigérians. Nous leur annonçons que les enfants et
enseignants sont maintenant assurés contre les accidents. Et
que le salaire des enseignants va passer de 150.000 à 200.000
francs guinéens (environ 30 €) pour les plus bas. C’est
bien normal, vu l’augmentation énorme du coût de
la vie. Et ce salaire est possible grâce à l’effort
fourni par les parents, car la scolarité est passée de
10.000 à 20.000 francs guinéens par mois cette année,
en raison de toutes les augmentations subies. Cela, les parents le
comprennent très bien, d’autant plus que nous leur
donnons toutes les explications nécessaires sur
l’organisation de l’école et l’utilisation
de l’argent cette année.
Bulus et Ugo Tshuky, les
deux stagiaires, interviennent ensuite sur les questions de
discipline, de propreté (malgré la pauvreté) et
l’éducation en général.
Mais la nuit
tombe et il n’y a pas de courant. Nous devons donc nous
séparer, au grand regret de tous. Jusqu’à la
prochaine fois !
La réunion du doyenné.
Pendant
ce temps, les prêtres, frères et sœurs de tout le
bagataye (le pays baga) ont commencé à venir. Nous
sommes bien sûr heureux de les accueillir. Et nous échangeons
des nouvelles des vacances et autres. Cela fait très plaisir
de se revoir ; la conversation joyeuse se poursuit pendant tout
le repas.
La nuit, chacun profite de cette rencontre pour
échanger des idées, poser des questions et chercher
des solutions à ses problèmes particuliers. Avec le
Frère Charles, le nouveau responsable de l’école
primaire de Kataco, nous faisons le point de la rentrée et
voyons comment mieux faire fonctionner l’école. Et
aussi comment l’aménager, grâce au soutien des
amis du Père Bienvenu, un ancien curé de Kataco,
décédé il y a 2 ans. Les besoins ne manquent
pas : refaire les escaliers, cimenter le sol des classes,
refaire la peinture, confectionner des tables bancs supplémentaires,
mais surtout refaire le toit. Le nombre des enfants à l’école
maternelle ne fait qu’augmenter également. Aussi, Sœur
Renée, la directrice, demande une aide elle aussi, pour
construire une nouvelle classe, et ce en complément de
l’argent reçu de sa paroisse d’origine.
Il
reste à voir ensemble, Boffa et Kataco, comment organiser le
travail des stagiaires cette année. Mais il est trop tard,
nous reprendrons cela demain matin. » (Armel Duteil)
Lundi 17 novembre 2008 : BOFFA:
« Je suis arrivé à Boffa hier,
accompagné de Véronique qui vient de terminer ses
études d’assistante sociale. Elle a voulu voir ce qui
se passait en Guinée et comment nous travaillons. Elle vit
pendant 3 mois au Foyer de l’Espérance et participe au
travail des éducateurs de SOS mineurs du foyer, dans la rue,
dans les commissariats et à la prison. Je l’amène
avec moi pour qu’elle puisse voir la vie et l’action des
communautés chrétiennes dans les villages de Boffa.
(Jean-Michel : mettre un lien avec SOS mineurs : Pastorale
sociale).
Le matin, célébration de l’Eucharistie
pour une chrétienne qui a beaucoup travaillé dans la
communauté. L’assistance est nombreuse. Puis nous
passons toute la matinée à faire le tour des activités
de la paroisse, avec les deux stagiaires qui assurent le suivi
pendant mon absence. Il y a beaucoup de choses à mettre au
point en ce début d’année pastorale.
A 14
heures, j’apprends la maladie de Roland, le responsable de la
communauté de Marara, une île de la mangrove. On l’a
amené à l’hôpital en pirogue pendant la
nuit. Je me prépare à aller lui donner le sacrement
des malades quand j’apprends qu’il est décédé.
Nous nous rendons immédiatement à l’hôpital
où déjà de nombreuses personnes se sont
rassemblées, en particulier des musulmans, car Roland vivait
en bonnes relations avec tous et avait des responsabilités au
niveau du secteur. Nous faisons une longue prière. Les gens
restent autour de lui parce qu’il faut attendre l’heure
de la marée pour pouvoir le reconduire dans l’île
de Marara.
L’après-midi, nous épluchons les
comptes de l’école primaire et du dortoir. En effet,
nous voulons que la scolarité soit la moins coûteuse
possible pour permettre au maximum d’enfants d’être
scolarisés, mais il faut bien que l’école tourne
et que les enseignants soient payés. Nous sommes sur la corde
raide !
A 17 heures, je retrouve la 2ème communauté
de quartier et nous tenons notre réunion, comme hier. Encore
une bonne journée ! La nuit, nous prenons le temps de
partager sur toutes nos activités avec les deux stagiaires. »
(Armel Duteil)
Dimanche 16 novembre 2008 :
« Rencontre diocésaine de « Justice
et Paix » dans la paroisse de Nongo.
Nous en profitons
pour lancer la commission dans cette paroisse. Ensuite, nous faisons
le point du travail des commissions qui existent déjà
et préparons les activités du mois à venir.
Puis nous mettons au point les actions à mener au niveau du
diocèse. Et le travail des sous-commissions justice, santé
et relations avec les pouvoirs publics. Comment organiser la
commission dans les mouvements : scouts, femmes catholiques,
Légion de Marie. Nous cherchons des volontaires pour lancer
la commission dans les paroisses où elle n’existe pas
encore. Nous préparons aussi les activités du 1er
décembre et du mois sur la lutte contre le SIDA.
Dès
la fin de la rencontre, je saute dans un taxi, avec Véronique
jeune Française venue travailler 3 mois avec les enfants de
la rue à SOS mineurs. En effet, toute la semaine prochaine je
suis à Boffa, l’une de mes deux paroisses.
Une
décision difficile. Depuis un an, dans le cadre de la
Pastorale Sociale, j’ai pris la responsabilité de
l’OCPH, le Secours catholique de Guinée (Caritas). En
2000-2001, au moment des attaques rebelles (j’étais
alors dans les camps de réfugiés sierra léonais
et libériens et travaillant avec les Guinéens déplacés
par la guerre), l’OCPH a reçu beaucoup d’argent
des Caritas étrangères. C’était normal,
il y avait tellement à faire ! Et l’argent reçu
a été bien utilisé, pour les réfugiés
et déplacés à qui il était destiné,
j’en suis témoin. Mais peu à peu les gens de
l’OCPH ont pris les habitudes des grandes ONG. Gros salaires,
rouler en 4x4 climatisées, rester assis dans leur bureau,
etc… Ils ont perdu leur idéal et oublié les
pauvres, alors qu’ils étaient à leur service.
Depuis octobre 2007, j’ai essayé de remonter le
courant, mais sans succès. Malgré mes conseils et mes
encouragements, je n’ai pas pu redresser la barre. Les
habitudes prises étaient trop ancrées. Les animateurs,
choisis par relations personnelles et affinité, se pensaient
intouchables, ne faisaient rien, attendant seulement leur salaire.
Alors, la mort dans l’âme, j’ai pris la décision
de renvoyer le responsable de l’équipe. Pour moi, c’est
un échec. De plus, je sais que cela va me causer beaucoup de
problèmes, car ceux qui le protègent vont intervenir
et me créer des ennuis. D’autant plus que je suis
étranger et que, dans l’Eglise comme dans le reste de
la société, en Guinée comme ailleurs,
l’étranger a presque toujours tort. C’est ainsi.
Mais je ne pouvais pas garder quelqu’un qui était
choisi pour aider les pauvres et qui ne pensait qu’à
son intérêt personnel, qui, en un an, n’avait mis
en place aucun projet, ni aucune équipe paroissiale, mais
utilisait l’argent de l’OCPH uniquement pour son
salaire. Pour moi, c’est une question de justice et de respect
des pauvres qui ont le droit d’être respectés et
aidés.
Ce n’est pas un travail facile. »
(Armel Duteil)
Samedi 15 novembre 2008 :
« Formation à Justice et Paix.
Au cours de
cette formation, nous réfléchissons longuement à
la situation du pays et, en particulier, à la préparation
des élections. (Voir L 50) » (Armel Duteil)
Mardi 11 novembre 2008 : « Aujourd’hui, 11 Novembre, nous prions pour tous les morts de la Première guerre mondiale. Heureusement, une réflexion critique commence à se généraliser sur cette guerre inutile qui a causé tant de souffrances. Encore faut-il en tirer les conséquences pour aujourd’hui. » (Armel Duteil)
Lundi 10 novembre 2008 (suite) :
« Semaine à CONAKRY.
Nouvelle semaine avec
son lot d’activités ordinaires, mais aussi d’imprévus,
de rencontres inopinées et souvent fructueuses. Travail avec
l’OCPH, l’atelier « Savoir-Fer »,
l’association SOS mineurs, etc… Chaque soir de cette
semaine, rencontre d’une des cinq communautés de
quartier de la paroisse St Jacques, de Lambanyi : comment mener
des actions à la base pour justice et paix, le développement
et le soutien des pauvres (pastorale sociale). »
(Armel Duteil)
Lundi 10 novembre 2008 : « En
ce moment, la situation est à nouveau très tendue à
Conakry. Il y a un mois, la population s’était révoltée
à Kindia où il y une grosse usine d’extraction
de bauxite (CBK), avec tous les moyens modernes. La population
voulait en recevoir quelques avantages en particulier eau,
électricité et école. L’argent pour tout
cela ayant été détourné, la population a
manifesté et l’armée a tiré dans la foule
à balles réelles. Bilan 10 morts, viols, vols, pillage
des magasins par les militaires.
La semaine suivante, même
chose à Boke et Kamsar avec la CBG. Route et chemin de fer
ont été bloqués par la population pour les
mêmes raisons. Heureusement, cela s’est terminé
sans morts ni violences.
Lundi dernier, le 3-11, je suis descendu
de Boffa et comme tout le monde, j’ai été bloqué
à l’entrée de la ville de Conakry pêndant
toute la journée. La circulation était complètement
bloquée à cause de nombreux barrages mis en places
par des jeunes et même des enfants, des pierres à la
main. Ils manifestaient contre le prix du carburant, mais surtout
contre le coût de la vie en général. Et c’est
vrai que les gens n'arrivent plus à vivre. Dans de nombreuses
familles, on ne fait plus qu’un seul repas par jour, sans
viande ni poisson, juste quelques feuilles pour faire de la sauce.
Cette année, à Boffa, les enfants de notre internat
sont 2 fois moins nombreux que l’an dernier car de nombreux
parents ne peuvent plus envoyer leurs enfants à l’école,
même si nous ne demandons que 20.OOO francs guinéens
par mois pour scolariser un enfant (environ 3 euros). Cette fois
encore, les policiers ont tiré à balles réelles :
2 morts par balles perdues, dont un bébé.
Le soir,
nous avons réussi à nous faufiler dans les quartiers
pour éviter les points chauds, là où il n’y
a même pas de rues tracées. Nous avons roulé à
plusieurs taxis-brousse en convoi, en étant obligés de
descendre de voiture pour les alléger et de les pousser sur
des ^pierrailles et rochers.
Ce matin, nouvelle manifestation du
côté de l’aéroport. Les écoles ont
été fermées.
La population voit que les
dirigeants ne font rien pour le pays ou pour améliorer la
situation. Leurs enfants font leurs études en Europe ou aux
Etats Unis et reviendront au pays prendre les premières
places ensuite. La population devient de plus en plus pauvre, mais à
côté de cette grande masse de pauvreté,
certaines personnes étalent sans honte leurs richesses,
souvent acquises malhonnêtement ou par corruption. Les gens
sont à bout de nerfs et prêts à tout. La
situation peut éclater d’un jour à l’autre »
(Armel Duteil)
Dimanche 9 novembre 2008 : « En
paroisse, à LAMBANYI.
Notre confrère John est parti
se reposer au Sénégal. J’assure l’intérim.
La liturgie est toujours aussi animée avec interventions des
gens à l’homélie et une grande participation des
enfants. A la prière universelle, je propose une intention
libre et spontanée dans les six langues principales de notre
assemblée, ce qui est accepté avec joie. Nous en
profitons pour faire la rencontre diocésaine de pastorale
sociale, -et d’abord d’expliquer le but de cette
commission- et mettre en place une commission paroissiale. (Voir L
48, 7ème réunion de Pastorale sociale). »
(Armel Duteil)
Samedi 8 novembre 2008 :
« Récollection.
Au milieu de toutes ces
actions et réunions, il est important de s’arrêter
un peu, de faire le point devant le Seigneur, de le prier et de
l’écouter. Nous avons donc prévu cette journée
de prière pour ceux qui travaillent en pastorale sociale.
Nous partons de l’Evangile (Mtt 25, 30-45) : « J’avais
faim, et vous m’avez donné à manger. Venez les
bénis de mon Père, entrez dans le Royaume. Tout ce que
vous avez fait au plus petit de mes frères, c’est à
moi que vous l’avez fait ». Chacun présente
ce qu’il fait et surtout les appels de Dieu qu’il
perçoit par rapport à son travail et son engagement.
Ce partage dans la confiance renforce les liens entre nous et
approfondit notre engagement. »(Armel Duteil)
Vendredi 7 novembre 2008 : « Je
travaille aujourd’hui avec Jorge, de Caritas Allemagne. Ils
viennent de nous accorder une aide pour travailler auprès des
enfants mineurs en prison. Et une autre pour former des animateurs
de prison, dans toutes les prisons du diocèse.
Le soir,
rencontre avec Madeleine, responsable de notre sous-commission pour
les relations avec les pouvoirs publics. Elle vient d’Afrique
du sud où elle a participé à un séminaire
sur ce thème : « Rôle de l’Eglise
dans la vie publique en Afrique ». Nous préparons
avec elle une rencontre avec les chrétiens engagés
dans la politique (députés, …) et dans les
structures de l’Etat. Nous verrons ensuite comment élargir
notre action aux musulmans. (Je mettrai les documents concernant
cette question dans la rubrique « Justice et Paix »). »
(Armel Duteil)
Mardi 4 novembre 2008 : « Je
suis bloqué dans notre quartier de Kipe, mais c’est à
peu près calme. J’en profite pour classer mes papiers
et faire avancer le travail en retard.
Travail avec CRS (Catholic
Relief Services).
A partir de mercredi, nous pouvons reprendre
les activités ordinaires avec l’OCPH, les différents
services de l’Archevêché. Avec l’Archevêque,
nous recevons le nouveau responsable de CRS, le Secours Catholique
américain. Ils nous soutiennent déjà pour le
lancement des commissions au niveau des paroisses.
Aujourd’hui,
nous voyons comment participer, avec leur soutien, à la
région nord-ouest du pays. En effet, c’est une zone
aride où il fait très chaud. Elle est oubliée
car éloignée de Conakry. Beaucoup de fonctionnaires
refusent de s’y établir et il y a très peu d’ONG
ou associations qui y travaillent. La mission catholique (paroisses
de Koundara et Ourous) y ont lancé des écoles de
brousse à la fois pour scolariser les enfants et pour les
former à l’agriculture et l’élevage ;
elles fonctionnent très bien. Des projets soutiennent en
particulier les femmes. Il y a déjà un projet pour les
veuves à Koundara (maraîchage) et à Gaonal
(teinture).
A partir de là, nous voyons comment élargir
notre action. Mais nous ne voulons pas décider des choses à
faire dans un bureau, à la place des gens. Nous allons donc
envoyer une mission de l’OCPH sur le terrain, à la fois
pour écouter les gens et savoir ce qu’ils veulent faire
par eux-mêmes, et les aider à s’organiser en
mettant en place des commissions paroissiales de pastorale
sociale.
Préparation des élections.
Les
élections se préparent, même si nous ne
savons pas quand elles auront lieu, avec CRS nous décidons de
nous y préparer. Nous voulons mettre en place dans les 369
sous-préfectures du pays un groupe d’observateurs
indépendants des élections (avant, pendant et après)
qui seront en même temps le noyau sur lequel nous appuyer pour
mettre en place une organisation de la société civile
au niveau des sous-préfectures. Bien sûr, il va falloir
former tous ces gens-là. C’est un gros travail. Les
fonds sont fournis par le gouvernement américain.
L’organisation et la réalisation sont confiées à
CRS, avec participation de « Justice et Paix ».
Plus
précisément, Justice et Paix sera chargée
d’installer une cellule pour la résolution des
conflits. Après une formation de nos membres, nous les
enverrons animer un séminaire dans chaque préfecture,
et, à partir de là, mettre en place cette cellule pour
résoudre les conflits, pas seulement au moment des élections,
mais aussi par la suite. Cela demande un très gros travail de
préparation et de formation, mais vu l’importance de la
chose, nous avons décidé d’en relever le défi.
D’autant que les organisations indépendantes et
motivées ne sont pas tellement nombreuses en Guinée.
(JM : mettre un lien avec « Justice et
Paix »).
Autres actions avec CRS.
Nous revoyons
aussi les autres projets que nous avons avec CRS. Une action de
prévention contre le paludisme (éducation, prévention,
utilisation des moustiquaires imprégnées de produit
anti-moustiques). Un soutien au Foyer de l’Espérance
pour les enfants de la rue. Un projet d’alphabétisation
fonctionnelle dans les quartiers. Le lancement de jeux éducatifs
sur les droits de l’homme et de l’enfant ; et
d’autres projets pour les groupements productifs et
coopératifs. » (Armel Duteil)
Lundi 3 novembre 2008 :
« Manifestations contre la vie chère.
Tôt
le matin, je trouve un taxi qui a du carburant pour descendre à
Conakry. Pour entrer dans la ville, nous essayons trois itinéraires
différents, et à chaque fois nous sommes bloqués
par des barricades, des jets de pierres et autres manifestations.
Par précaution, nous rebroussons chemin. Le taxi retourne à
Boffa, mais je préfère rester à l’entrée
de Conakry. Toute circulation est bloquée jusqu’au
soir. A 17 heures, nous essayons de tenter notre chance avant la
tombée de la nuit ; je trouve une place dans la voiture
d’un ancien élève de l’école-internat
de Boffa, avec qui j’ai fait connaissance dans la journée,
qui me propose de m’amener. Nous nous organisons en convoi
avec trois taxis qui connaissent bien la ville, pour pénétrer
à l’intérieur des quartiers et nous faufiler
entre les maisons, là où il n’y a pas de routes,
et donc pas de barricades. Plusieurs fois nous sommes obligés
de descendre des voitures pour les alléger, et même les
pousser sur les rochers. Certains jeunes, en nous voyant arriver,
ramassent des cailloux. Ce qui est très grave, c’est
que ce sont souvent des enfants de 7 à 10 ans et que les
parents les regardent faire et n’osent rien dire. C’est
très inquiétant pour l’avenir. Heureusement, des
gens compatissants nous protègent et nous indiquent par où
passer, jusqu’à ce que nous arrivions dans des
quartiers plus calmes. Car bien sûr c’est dans les
quartiers les plus pauvres que les réactions sont les plus
vives.
Pourquoi ces manifestations populaires ?
Ce qui
les a déclenchées, c’est paradoxalement la
baisse du carburant. En effet, le coût du baril de pétrole
a été presque divisé par 3. Les gens auraient
donc voulu que le prix de l’essence soit divisé par 3 !
Or, il est passé de 7500 à 5000 francs guinéens.
La population a trouvé cette diminution insuffisante et elle
espérait beaucoup mieux. En fait, ce qu’il y a
derrière, c’est que les populations sont épuisées.
Les gens n’arrivent plus à vivre car le coût de
la vie a énormément augmenté mais les salaires
n’ont pas bougé. Alors, ils sont à bout de
forces. Et la moindre étincelle peut embraser la
situation.
Il y a des problèmes, surtout il y a des
sociétés minières. Elles sont très
modernes et organisées pour leurs cadres qui ont tout le
confort possible ; elles font d’énormes bénéfices
grâce à des contrats très profitables, obtenus
par la corruption du gouvernement, mais ne font pratiquement rien au
niveau social pour la population. Alors celle-ci se révolte
et demande au moins de la lumière (électricité),
de l’eau courante, des écoles et des routes là
où les usines sont implantées. La plupart du temps
sans succès.. Le mois dernier, des manifestations à
Kindia s’étaient terminées par des morts et des
pillages, l’armée ayant tiré sur la foule. Cette
semaine, il y a eu à nouveau des manifestations à Boké
et Kamsar (près de Kataco). La grand route a été
coupée et un train de minerais arrêté sur les
rails. Mais heureusement, cela n’a pas dégénéré. »
(Armel Duteil)
Dimanche 2 novembre 2008 : « Comme
prévu, à la Messe c’est l’engagement des
catéchistes.
Après la messe, nous allons prier pour
les morts, d’abord au sanctuaire marial, au cimetière
diocésain des prêtres, frères et sœurs.
C’est très émouvant de voir ces nombreuses
tombes de missionnaires très jeunes, qui, au bout de quelques
mois de présence, sont morts d’épuisement ou de
maladie (paludisme, bilieuse….). Nous continuons jusqu’au
cimetière de la paroisse, où l’émotion
est grande, en particulier devant les tombes de ceux qui sont
décédés cette année. Certains ne sont
pas enterrés au cimetière, mais dans la cour
familiale. Leurs parents ont apporté un peu de la terre de
leur tombe que nous bénissons au cours de la prière et
qu’ils rapporteront chez eux.
Nous avons pris le temps de
prier, et, malgré tout, les volontaires délégués
de leur groupe pour travailler dans la Commission de pastorale
sociale-, prennent encore le temps de s’asseoir. Nous voyons
comment mettre en place la Commission, maintenant que les membres
ont été choisis : commencer par une enquête
pour connaître les personnes en difficultés et recenser
les situations de souffrances et de pauvreté sur notre
territoire. A partir de là, choisir les premières
actions à mener : les plus urgentes, mais sur lesquelles
nous avons des moyens d’agir. Et aussi mettre en place une
caisse pour avoir les moyens de mener nos actions. Tout ce travail
se fait dans une très bonne ambiance.
A 21 heures, retour
de Conakry d’Hermann, le vicaire. Il était parti depuis
plusieurs jours à Conakry pour réparer la voiture et
le groupe électrogène. Mais pour la voiture, on n’a
pas retrouvé de pièces de rechange : c’est
une très vieille voiture ! Pour le groupe, il n’est
pas prêt. Cela nous gêne beaucoup : d’abord pour
l’éclairage, en particulier de l’internat pour
les enfants. Mais, on peut encore trouver des bougies ou du pétrole
pour les lampes dans le quartier. Par contre, nous n’avons pas
d’électricité pour faire marcher nos différents
appareils, en particulier la pompe pour remplir notre réservoir.
Il va falloir organiser des « voyages » au
puits du quartier.
Nous sommes heureux d’accueillir Hermann
qui est resté bloqué plusieurs jours à Conakry,
où il n’y avait plus de carburant. On a parlé
d’une baisse du carburant, alors toute vente a été
arrêtée. » (Armel Duteil)
Samedi 1er novembre 2008 :
« Toussaint.
La fête n’est pas fériée
en Guinée, mais comme c’est samedi, nous la célébrons
à 9 h 30 comme le dimanche, car beaucoup de gens ne
travaillent pas. Les élèves ont obtenu l’autorisation
de venir assister à la prière.
Après la
messe, récollection des catéchistes pour se préparer.
Demain, ils s’engageront pour un an devant toute la communauté
et ils s’y préparent sérieusement. C’est
Armand, le responsable du noviciat qui s’en occupe. Pendant ce
temps-là, je tiens une autre rencontre pour lancer la
Commission de « Justice et Paix » de la
paroisse.
Vers 14 heures, pour fêter la Toussaint, nous
nous retrouvons tous ensemble au Noviciat dans la joie. Chaque
semaine, en effet, une des communautés de la paroisse nous
prépare le repas, ce qui est un bon soutien pour nous et nous
permet aussi de donner son jour de congé à notre
cuisinière.
De retour à l’internat, nous
jouons pour la première fois avec les enfants le jeu des
droits de l’homme que j’avais composé au Sénégal
avec l’équipe d’Amnesty International. Les
éducateurs y participent bien sûr, et ils pourront
continuer quand je serai absent.
A 17 heures, nous nous
retrouvons pour la clôture du mois du Rosaire. Nous ne nous
contentons pas de réciter le chapelet. Nous commençons
par un partage de la Parole de Dieu (Evangile de la visite de Marie
à Elisabeth) avec une bonne participation. Ensuite, les
participants ont proposé leurs intentions de prières
en différentes langues pour demander l’intercession de
Marie et le soutien de Dieu dans nos problèmes
actuels.
Enfin, je rencontre Marie-Louise, la responsable des
sœurs, qui est à Boffa depuis plusieurs années
et qui connaît donc bien la situation et les problèmes. »
(Armel Duteil)
Vendredi 31 octobre
: « BOFFA
Nous
avons finalement réussi à démarrer notre
voiture et Hermann est descendu à Conakry pour essayer de la
remettre en état de marche… une nouvelle fois, car
elle est très vieille. Il descend aussi notre groupe
électrogène qui revenait pourtant de réparation.
Nous n’avons pas d’électricité pour faire
marcher nos différents appareils et, en particulier, la pompe
immergée de notre puits. Nous n’avons plus d’eau,
ce qui pose de sérieuses difficultés pour les enfants
de l’internat. En effet, l’eau de
la ville n’arrive que par intermittence et seulement tous les
3 ou 4 jours.
Les réparations durent car on ne trouve pas
de pièces de rechange. Il faut donc en bricoler. A cause de
tout cela, Hermann n’est pas revenu et je dois le remplacer au
pied levé pour animer une journée de réflexion
et de prière (récollection) au Noviciat sur
le thème : Evangélisation et Témoignage.
Cela ne me pose pas trop de problèmes, car c’est
évidemment un thème auquel j’ai réfléchi
depuis longtemps.
A midi, je laisse le Noviciat pour rencontrer
les enseignants sur la question de la sécurité
sociale et des impôts. C’est une question
complexe, car il est absolument nécessaire de respecter les
droits des travailleurs, mais il faut bien voir les différents
aspects de la question. En effet, le pays est tellement pauvre et
désorganisé que les taxes sont très élevées
mais que, en plus, beaucoup de travailleurs n’arrivent pas à
toucher les allocations familiales, les remboursements des soins
médicaux ou leur retraite,…. Et encore moins les
veuves, au décès de leur mari. Quant à tous les
travailleurs du secteur informel, bien sûr, ils ne touchent
rien du tout !
Et l’insécurité dans le
travail est tellement grande que peu de travailleurs arrivent à
cotiser 15 ans. Comme, en plus, les cotisations sont très
élevées (ainsi que les impôts) pour ceux qui ont
un travail régulier, et que la vie est très
difficile, ils préfèrent ne pas être à la
sécurité sociale et toucher davantage d’argent à
la fin du mois. Bel exemple d’une très bonne chose (la
sécurité sociale) mais qui, transportée telle
quelle, est inadaptée, car les salariés sont très
peu nombreux et les autres ne bénéficient pas de cette
sécurité sociale. Pas facile de savoir ce qu’il
faut faire !
Pendant que nous évaluons tout cela, le
Ministre des Transports arrive à la paroisse. Il était
en ville pour la réhabilitation des transports publics :
ils en ont bien besoin ! Il est musulman, mais il a tenu à
visiter la Mission catholique. Nous l’accueillons simplement,
sans protocole, et allons visiter le cimetière des
missionnaires. C’est très impressionnant de voir le
nombre de ces prêtres, frères et sœurs morts si
jeunes au bout de quelques années et souvent quelques mois de
maladie ou autres causes. Avec le ministre, nous évoquons
leur travail de développement, d’éducation et de
santé au profit du pays. Et aussi pour valoriser les cultures
guinéennes (grammaires, dictionnaires, etc…). Le
ministre nous transmet la demande du Président de la
République de prier pour sa santé. Nous le ferons
demain, à la messe de la Toussaint. Et aussi pour qu’il
ait la sagesse nécessaire pour diriger le pays.
Il est
temps pour moi de retourner au Noviciat pour ma deuxième
intervention. »(Armel Duteil)
Jeudi 30 octobre
: « Boffa. Nouvelle formation au
Noviciat.
La semaine dernière,
c’était sur « Justice et Paix ».
Cette semaine, c’est sur la pastorale sociale. Toujours dans
le cadre de leur préparation à leur futur travail
missionnaire
A 16 heures : Nouvelle rencontre avec les
catéchistes et les catéchumènes.
Les choses se mettent en place peu à peu.
A 17 h 30,
rencontre avec la première des deux communautés
chrétiennes de base (CCB) de BOFFA Centre.
C’est une rencontre très importante pour moi, car le
bon fonctionnement de ces communautés de quartier est l’une
des bases de notre travail missionnaire.
Après un temps de
présentation, je leur demande de me parler de leurs activités
de l’an passé, que nous évaluons ensemble.
Ensuite, je leur précise ce qu’est véritablement
une CCB et je leur propose un schéma de réunion. Après
une série de questions et d’explications, nous mettons
au point un premier programme d’activités jusqu’à
Noël. L’ambiance est très amicale, décontractée
et les gens ont le souci de se former. Le problème, ce sera
de vraiment passer à l’action ensuite. »(Armel
Duteil)
Mercredi 29 octobre
: « Boffa
Comme il y a beaucoup de choses en suspend, je
reprends les contacts. Puisque nous commençons une nouvelle
année avec une nouvelle équipe, il nous a semblé
nécessaire, depuis la tournée avec l’Evêque
au mois de Juin, de renouveler le Conseil paroissial qui est en
place depuis 10 ans, et de trouver des nouveaux responsables pour
apporter du sang neuf et des idées nouvelles. C’est
l’une des charges que notre Evêque m’a confiée
pour Boffa. Mais il faut avancer prudemment et prendre le temps de
réfléchir. Aussi, je profite de cette journée
« libre » pour prendre un certain nombre de
contacts et recueillir le maximum d’avis. Et la nuit, nouvelle
séance de langue soussou, après avoir lu et classé
nombre de dossiers et préparé divers contacts de
travail. »(Armel Duteil)
Mardi 28 octobre
: « Repos
Je
décide prendre une journée de repos, car depuis mon
retour en Guinée je n’ai pas eu beaucoup le temps de
souffler. J’en profite pour avancer dans la lecture du livre
de Jean-Claude Guillebaud que Bernard, un volontaire français,
m’a prêté. Je travaille aussi les documents sur
la non-violence que j’ai ramenés de ma session en
France et que je n’ai pas encore eu le temps de lire.
En
fait, dès lundi soir, j’avais prévu de faire le
tour des communautés de village. Mais notre voiture est en
panne et nous n’arrivons pas à la réparer sur
place. De plus, ceux qui devaient m’accompagner pour cette
tournée ne sont pas libres. Les gens sont encore trop pris
par les travaux et ne seraient pas libres, car le riz est mûr
et il faut le garder en permanence sinon il va être mangé
par les oiseaux. Nous reportons la tournée de trois semaines.
Je ne cache pas que je suis très heureux de ce temps de repos
imprévu. »(Armel Duteil)
Lundi 27 octobre
: « Après la messe du matin, la journée
commence par le lever des Couleurs à l’école.
C’est une cérémonie très importante pour
donner aux enfants un début de conscience nationale. C’est
le moment où je m’adresse pour la première fois
officiellement aux élèves, en présence d’un
certain nombre de parents, pour leur expliquer en langage simple
notre projet éducatif et le fonctionnement de l’école
cette année.
Les stagiaires.
Aussi
bien à l’école qu’à l’internat,
j’ai la chance d’être très bien secondé
par Patrick BULUS, un jeune spiritain du Nigeria, formé et
compétent dans ce domaine de l’éducation, envoyé
à Boffa pour son stage missionnaire d’une année.
Il vient de vivre un an à St LOUIS au Sénégal,
à la fois pour apprendre le français et se
perfectionner en audio-visuel et techniques de communication.
Pendant l’absence d’Hermann, notre vicaire, il sera
assisté de Flavian TSHUKU, un autre stagiaire nigérian
qui, ensuite, rejoindra Kataco. En effet, nous ne sommes pas assez
nombreux et il nous faut souvent jongler au niveau du personnel.
Heureusement, tous sont de bonne volonté et s’adaptent
de bon cœur aux situations, pour répondre aux urgences.
Ainsi, comme le maître des novices prévu a dû
renoncer au dernier moment, Armand, Camerounais, qui travaillait en
France, est venu en deux jours à Conakry alors qu’il se
préparait à aller enseigner la théologie à
Dakar.
Après un temps de travail avec le directeur et le
secrétaire de l’école, nous nous retrouvons avec
les stagiaires pour une réunion de communauté qui va
durer jusqu’au soir. Nous sommes nouveaux tous les trois et
il y a beaucoup de choses à régler. »(Armel
Duteil)
Dimanche 26 octobre
« Première messe en soussou.
Ma
prononciation n’est pas parfaite et je suis encore très
loin de posséder la langue, mais même si je ne
comprends pas tout ce que je lis, les gens, eux, le comprennent.
C’est le principal. J’ai essayé d’animer la
messe, non seulement par des danses et battements de mains, mais par
une homélie (en soussou) dialoguée, des interventions
libres et des prières spontanées, à partir de
la Parole de Dieu. Comme j’ai expliqué les choses à
l’avance, tout se passe bien et les gens répondent. Mon
souci, c’est la participation des enfants. Je sais bien ce que
je vais faire, mais il faut aller doucement (ce qui n’est pas
mon fort !) et on ne peut pas tout changer en même
temps.
A la fin de la messe, assemblée générale
de la paroisse au cours de laquelle nous transmettons les réflexions
et propositions du Conseil paroissial. Tous en comprennent
l’importance et tout le monde reste jusqu’au
bout.
Après-midi : Nouvelle séance de soussou.
Il me faut préparer les textes de la Toussaint et les prières
pour les morts pour le dimanche 2 novembre. Mes piles (ou plutôt
celles de mon magnétophone !) seront bientôt
usées. »(Armel Duteil)
Samedi 25 octobre
: « Boffa
Le
matin, séance de travail avec le directeur et la secrétaire
de l’école. Nous faisons le point de la rentrée
et précisons un certain nombre de choses. Heureusement,
Hermann mon confrère sénégalais, était
là l’année dernière. Il peut donc nous
apporter un certain nombre d’éclaircissements. Nous en
profitons, car il doit rentrer au Sénégal se faire
soigner dès la semaine prochaine.
Hier, avec les novices,
nous avons précisé les activités pastorales et
les engagements qu’ils vont prendre cette année, chacun
selon ses goûts et capacités. Il me faut donc prendre
les contacts nécessaires pour cela avec les autorités.
Accompagné de Georges, le responsable de « Justice
et Paix » pour Boffa, je vais donc saluer le Préfet,
que je retrouve avec joie. Nous faisons le tour des activités
à mener et des dispositions à prendre pour cela. Comme
deux des novices vont s’engager à la prison et à
l’hôpital, avec l’autorisation du préfet,
je vais donc contacter successivement, le juge, le régisseur
de la prison, puis le directeur préfectoral de la santé.
Avec chacun, nous évoquons les différents problèmes
qui se posent et ce qu’il serait possible de faire dans un
premier temps. En particulier, pour la santé, en faveur des
sidéens et des tuberculeux. Et aussi l’éducation
à la santé et la prévention. En particulier
face au choléra. Les cas sont nombreux dans la Guinée
Bissao voisine. Il est urgent d’assurer la protection
nécessaire. Nous parlons aussi longuement des besoins de
l’hôpital, où matériels et médicaments
manquent cruellement. Ils viennent de recevoir de l’OMS
ordinateur et imprimante. Mais il n’y a pas de courant pour
les faire fonctionner. Il y avait bien des panneaux solaires, mais
ils ont été volés, de même que ceux du
lycée voisin. L’énergie solaire commence à
se répandre et les panneaux sont très recherchés…
et faciles à voler ! Nous terminons par une visite à
l’hôpital.
Comme c’est samedi, les gens sont
plus libres et les visites vont se succéder. Nous nous
asseyons d’abord avec les catéchistes puis, pour une
longue réunion, avec le Conseil paroissial. La nuit, pour me
détendre et mieux connaître les enfants, je participe à
la veillée organisée par les enfants de
l’internat.
L’internat.
Comme je l’explique par ailleurs, à Boffa
comme à Kataco, nous avons une école primaire et un
internat, de manière à ne pas nous limiter à un
enseignement de qualité, mais à assurer en même
temps une bonne éducation où les enfants apprennent à
se prendre en main et à vivre ensemble entre jeunes d’ethnies
et de religions différentes. Pendant les vacances, nous avons
voulu améliorer les structures de l’internat pour que
les enfants puissent y vivre dans des meilleures conditions
d’hygiène, de santé, de logement et de
nourriture. Nous avons donc commencé à réaménager
cuisine et dortoir, mais avons dû arrêter faute de
moyens. Il faudrait pourtant construire un château d’eau
pour avoir de l’eau potable et éviter ainsi les
diarrhées et autres problèmes intestinaux des années
passées.
Nous avons conçu cet internat spécialement
pour permettre à des enfants de familles pauvres ou des
villages de recevoir instruction et éducation comme les
autres enfants. Mais il faut les loger, les nourrir et les prendre
en charge, car leurs familles n’en ont pas les moyens. C’est
pour cela que nous cherchons à mettre en place un système
de parrainage pour soutenir ces enfants. D’ailleurs, même
les familles moins démunies ont des problèmes pour
assurer la scolarisation de leurs enfants, vue la dégradation
du pays au niveau économique et la pauvreté qui
s’étend. L’an dernier, nous avions 73 internes
chez nous. Cette année, seules 37 familles ont pu nous
envoyer leurs enfants, malgré la confiance qu’elles
nous font et nos efforts pour réduire au maximum le coût
de la pension. »(Armel Duteil)
Vendredi 24 octobre
: « La matinée commence par la visite
de l’école primaire : 12 classes. Là
encore, il ne s’agit que d’un premier contact qu’il
faudra approfondir. Mais cette rencontre est sympathique.
Sans
plus attendre, je pars à vélo au noviciat
voisin pour une première formation des six jeunes
en formation cette année. Armand, leur responsable
camerounais, m’a demandé d’intervenir
régulièrement, ce que j’ai accepté avec
joie. D’ailleurs, je les connais bien, l’un étant
même originaire de Mongo, la première mission où
j’ai travaillé en Guinée. La relève prend
forme ! Malgré tout, pour cette première
rencontre, ils sont un peu timides ! L’atmosphère
se détendra peu à peu, car je n’ai pas
l’intention de leur donner des cours théoriques mais
de mener une réflexion avec eux.
Nous prenons le repas
ensemble ce qui nous permet d’échanger des souvenirs,
en particulier sur les camps de réfugiés et les
attaques rebelles de 2001-2002. Le temps passe vite ! Ce
matin, la réflexion a justement porté sur le travail
de justice et paix : présentation de la commission et de
ses activités, pour les préparer à leur travail
futur.
A 17 heures, première rencontre avec le bureau
des jeunes. Je leur demande de me préparer une
présentation de chaque groupe ou mouvement présent sur
la paroisse, avec ses objectifs et ses propositions d’activités
pour cette année. Nous nous retrouverons avec tous les jeunes
le dimanche de la semaine prochaine.
Dans le bureau, il y a deux
responsables garçons. Je leur demande d’ajouter deux
filles pour qu’elles soient en responsabilité à
égalité avec les garçons. Il y a encore des
choses à faire dans ce domaine !
Tout au long de
cette semaine, dès que j’ai un moment de libre, je
saute sur mon magnétophone où, depuis Conakry, j’ai
enregistré des textes en soussou, la langue de la région
de Boffa. Encore une nouvelle langue à apprendre !
Heureusement, celle-ci a été très bien étudiée
et il existe de nombreux documents, ce qui n’était pas
le cas pour le baga, il y a deux ans, quand je suis arrivé à
Kataco. Mais je tiens absolument à dire la messe en soussou
dès mon premier dimanche à Boffa, comme je l’ai
toujours fait dans mes postes précédents. Avec un
catéchiste, j’enregistre donc les textes liturgiques
sur mon petit magnétophone à piles et je les réécoute
jusque tard dans la nuit. »(Armel Duteil)
Jeudi 23 octobre
: « Arrivée à Boffa.
Dès
mon arrivée, je vais saluer les novices. Ensuite, je rejoins
les deux stagiaires qui tiennent la mission. Nous sommes très
heureux de nous revoir. Je vais aussi saluer les internes. Ils sont
arrivés pendant mon absence. Ils me donnent un très
bon accueil.
A 16 heures, je vais rencontrer les catéchistes.
Nous faisons l’évaluation de la catéchèse
de l’année dernière et préparons la
rentrée du catéchisme. Nous sommes déjà
en retard. Nous allons chercher à commencer dès
samedi, avec les enfants qui viendront. Et les autres s’ajouteront
peu à peu ; sinon, rien ne commencera ! Les choses
sont souvent difficiles à mettre en place, par laisser aller,
imprévoyance ou manque d’organisation. Et il me faut
aussi connaître les réalités. J’ai
pratiquement tout à découvrir ; il me faudra du
temps pour cela, même après la tournée de toute
la paroisse en juin avec l’Evêque. Tout se fera peu à
peu. Patience ! »(Armel Duteil)
Jeudi 23 octobre
: « L’Ambassade de France.
Nous
sommes reçus au Centre culturel français pour
présenter un dossier que nous avons préparé en
vue d’un soutien de l’ambassade à notre atelier
« Savoir-fer » qui nous permettrait de le
faire tourner pendant deux ans. Nous avons très bien préparé
ce dossier, et vu le sérieux de notre travail et la garantie
de la commission de pastorale sociale, il est accepté sans
problème. Cela va nous permettre de continuer à former
des jeunes en difficultés qui traînent dans la rue. On
nous demande simplement quelques précisions et renseignements
complémentaires sur l’utilisation des fonds prévus,
le suivi et le soutien des jeunes après leurs deux années
de formation, la possibilité pour eux de trouver du travail
(vue la qualité de la formation reçue, ils en trouvent
sans difficulté), la mise en place d’un conseil
d’administration pour déterminer les orientations,
évaluer la formation et continuer à chercher des
fonds. La formation donnée est un équilibre entre
formation et production, par alternance, à l’intérieur
de l’atelier. Nous allons prendre des contacts avec le
Ministère de l’Enseignement technique pour faire
reconnaître la formation donnée et l’authentifier
par un diplôme attribué aux jeunes. »(Armel
Duteil)
Lundi 20 octobre :
« Réflexion sur le
SIDA.
Nous avons un groupe de 12 volontaires
qui suivent 137 personnes vivant avec le VIH, en mauvais état
nutritionnel, suite à leur séropositivité, ce
qui augmente encore leur manque de résistance aux maladies.
Nous faisons une distribution de vivres, grâce à un don
régulier du PAM (Projet Alimentaire Mondial des Etats-Unis).
Il s’agit souvent de maïs, mais auquel les gens ne sont
pas habitués puisque la base de la nourriture en Guinée
c’est le riz. Il faut donc d’abord leur apprendre à
préparer cette nourriture.
Mais il n’est pas
question de se limiter à distribuer de la nourriture.
D’abord, nous les avons aidés à lancer des
groupements (teinture, commercialisation d’huile de palme) qui
leur permettent de gagner leur vie et de faire vivre leur
famille.
Dans une autre ligne, les volontaires cherchent à
apporter à ces personnes un soutien psychologique, moral et
spirituel, à elles et aussi à leur famille. Et les
aider à résoudre un certain nombre de problèmes
difficiles qui se posent à eux : faut-il faire connaître
son état à son conjoint ou à sa famille ?
Comment le faire ? Que faire si on veut se marier ? Ou,
pour les veuves qui, selon la coutume, doivent être remariées
dans la famille du mari défunt, si elles sont séropositives ?
Que faire quand une femme séropositive est enceinte ?
Comment encourager ses ami(e)s à passer un test de dépistage
et à en accepter les résultats s’il est
positif ?... Nous n’avons pas de réponses toutes
faites, mais d’abord c’est important d’en parler
ensemble, car ça reste un sujet tabou. Ainsi, pendant plus de
trois heures, nous partageons nos soucis, nos idées et les
expériences que nous avons vécues, réussies ou
non. Cet échange est très profond et très
riche. Chacun repart encouragé pour continuer ce travail qui
est parfois très lourd.
L’après-midi, nous
devions recevoir des reporters de la télévision
nationale pour une interview de l’atelier « Savoir-Fer »,
mais ils ne sont pas venus ! »(Armel Duteil)
Dimanche 19 octobre : « Rencontre de la Commission Justice et Paix dans la paroisse Saint Augustin à TAOUYA, selon le modèle habituel. »(Armel Duteil)
Samedi 18 octobre
: « Rôle et responsabilité
des laïcs.
Formation sur l’engagement
des laïcs dans l’Eglise et dans la Société.
Cette fois-ci, nous nous adressons à tous, adultes comme
jeunes. Il y a plus de 50 personnes, ce qui nous encourage car la
communication n’était pas passée. Nous avons une
très bonne formation qui débouche sur des engagements
concrets.
L’après-midi, rencontre avec un groupe de
la paroisse N.D. des Champs de PARIS qui avait accueilli André,
un prêtre guinéen malade. Il est guéri et ils
sont venus l’accompagner pour son retour et ainsi découvrir
un peu l’Eglise de Guinée. Nous leur expliquons notre
travail pour Justice et Paix. Nous sommes heureux de partager avec
eux nos soucis et nous sommes intéressés par leurs
questions et leurs réactions. »(Armel Duteil)
Mercredi 15 octobre
: « Les spiritains en
Guinée.
J’accueille
Jean-Claude, un de nos responsables, qui vient d’assurer 10
jours de formation au Noviciat et qui retourne au Sénégal.
Nous réfléchissons longuement à la formation à
donner aux jeunes et à la vie de nos communautés
spiritaines en Guinée. »(Armel Duteil)
Lundi 13 au vendredi
17 octobre : « Suite du travail
Après
toutes ces sessions et rencontres, le travail ordinaire a pris du
retard. D’abord mon travail personnel (classement, réflexion,
préparation des activités). Il faut aussi rédiger
et saisir les différents comptes-rendus et autres documents à
préparer. Et reprendre le travail à l’Archevêché,
avec l’OCPH et les différentes organisations. Cela va
être aussi la rentrée des classes, qui a été
très retardée encore cette année à cause
de nombreux problèmes économiques mais aussi par
manque d’organisation.
Pour moi, il s’agit en
particulier d’organiser le recrutement de nouveaux apprentis
pour l’atelier « Savoir-Fer » où
nous proposons à des jeunes sortis de la rue une formation
sur le travail du fer (soudure, etc…) pour leur donner les
moyens de s’en sortir et qu’ils aient un métier
en main. Jusqu’alors nous étions soutenus par une
association française. Maintenant, nous cherchons à
devenir une association guinéenne pour plus d’autonomie
et de responsabilité. Mais, bien sûr, il nous faudra
continuer à chercher des fonds, car un tel travail de
formation ne peut pas être rentable, même si notre
production est de qualité et recherchée, grâce à
Bernard, un volontaire français venu nous aider. Il va nous
quitter bientôt, mais les deux formateurs guinéens,
Abdoulaye et Hervé, sont tout à fait capables de
poursuivre l’action. Ils seront d’ailleurs soutenus par
un comité que nous allons mettre en place.
La
communication. En même temps, je termine la
mise au point du dernier numéro de la Revue du diocèse
qui parlera en particulier du Frère Joseph. Nous préparons
aussi un calendrier 2009 sur le thème du prochain Synode pour
l’Afrique (Réconciliation, Justice et Paix), un agenda
liturgique pour les messes et autres prières, et un pagne de
Noël sur le même thème. Tous les moyens sont bons
pour communiquer et éduquer !
Je passe aussi beaucoup
de temps à l’Internat, d’autant plus que les
installations sont très anciennes, avec du matériel de
récupération, que souvent il n’y a pas de réseau
ou de très mauvaises connexions. Les conditions de travail
sont rarement idéales. »(Armel Duteil)
Dimanche 12 Octobre
: « Rencontre Justice et Paix
à la paroisse Saint Kisito.
Cette paroisse très
populaire se trouve au km 36, c’est-à-dire à la
sortie de la ville. L’année dernière nous avions
déjà fait une formation. Depuis, les chrétiens
se sont mis à l’action. Aujourd’hui, je viens les
visiter, les encourager et les aider à structurer leurs
activités. Après la messe, tous les participants
acceptent de rester 30 minutes pour une nouvelle sensibilisation.
Puis nous nous retrouvons avec la Commission pour approfondir la
réflexion. En particulier, comment travailler avec les chefs
de quartier et les autres autorités locales, et aussi avec
les musulmans. »(Armel Duteil)
Samedi 11 octobre :
« Les foyers St Joseph.
Ce
matin, je me suis levé à 3 heures du matin pour aller
accueillir à l’aéroport Véronique, qui a
terminé ses études d’assistante sociale et qui
vient travailler avec nous avec les enfants en difficulté, à
SOS mineurs.
Pour l’aider à
découvrir le travail et les réalités de la
Guinée, je l’amène avec moi dans ma visite aux
foyers Saint Joseph qui regroupent des foyers pour les enfants de la
rue, pour les personnes âgées, pour les femmes
abandonnées et les malades du SIDA.
Rencontre
avec les jeunes.
Cette année,
nous mettons l’accent sur la formation des jeunes pour qu’ils
puissent prendre davantage leur place dans l’Eglise et
s’engager davantage dans la Société. C’est
pourquoi nous avons prévu cette rencontre d’aujourd’hui
afin de leur présenter les deux commissions de « Justice
et Paix » et de « Pastorale sociale ».
Ensuite, l’Archevêque a présenté sa
« Lettre aux jeunes » qui
fixe une ligne de travail et propose des actions pour toute l’année,
pour l’engagement des jeunes dans l’Eglise et dans la
Société. A la fin de la rencontre, l’Evêque
remet officiellement leur diplôme aux jeunes qui ont suivi
leur formation d’éducateurs pour les centres
aérés. »(Armel
Duteil)
Lundi 6 au vendredi
10 octobre : « Session de lancement de l’année
pastorale.
Dès le lundi soir, tous les prêtres
du diocèse se retrouvent autour de l’Evêque pour
évaluer le travail de l’année dernière et
préparer celui de l’année prochaine. Chaque
paroisse avait envoyé à l’avance son rapport
annuel, selon un questionnaire qui reprenait les différentes
activités et engagements menés tout au long de l’année
passée. Ces rapports ont été analysés,
pour en tirer des lignes de réflexion. L’Evêque
nous en présente la synthèse. C’est à
partir de celle-ci que nous allons travailler pendant quatre
jours.
Nous travaillons dans une très bonne ambiance, ce
qui resserre les liens entre nous et renforce le désir de
travailler ensemble tout au long de l’année. Avec cette
nouvelle méthode de travail, nous avons pu aboutir à
des décisions précises. La dernière matinée
est consacrée à une séance de travail entre
prêtres et religieux(ses), particulièrement
intéressante et prometteuse d’avenir. »(Armel
Duteil)
Samedi 4 octobre
: « Fête de St François
d’Assise.
Un Saint que j’aime
beaucoup et que j’ai pris comme patron lors de ma profession
religieuse. Nous prions ensemble. Le président du Conseil
paroissial, plusieurs anciens et des responsables de communauté,
viennent nous saluer. Mais il me faut déjà redescendre
à Conakry. L’Evêque vient de me téléphoner
qu’il a besoin de moi. Demain, ce sera la réunion de la
commission diocésaine de pastorale sociale. La vie
continue…
Igba me conduit à Kamsar où je
vais prendre un taxi-brousse pour Conakry. La route de Kataco-Kamsar
(en terre) a été réparée il y a quelques
mois. Malgré la saison des pluies, il n’y a pas eu trop
de dégâts, si bien que nous arrivons à passer
sans trop de problèmes.
Vendredi 3 octobre
: « Installation à
KATACO.
Comme Igbe et moi avons
été absents plusieurs mois, il nous faut remettre la
maison en état. D’abord, il n’y a pas d’eau.
Et malgré tous nos efforts, et ceux de mécaniciens,
nous n’arrivons pas à faire redémarrer notre
vieux groupe électrogène (pourtant, une chance, nous
avions du carburant en réserve) pour faire fonctionner la
pompe à eau. C’est vrai qu’il n’a pas
tourné pendant plusieurs mois. Alors, les jeunes se
mobilisent pour aller puiser de l’eau au puits du village et
pour nettoyer la maison. Nous n’avons ni réserve
alimentaire, ni cuisinière pour le moment, mais les Frères
nous invitent à manger. Ce matin, nous nous sommes déjà
retrouvés tous ensemble avec les Sœurs pour prier.
Depuis plusieurs mois ils n’ont pas eu la messe à
Kataco.
Les gens se succèdent pour nous donner de leurs
nouvelles et nous demander les nôtres, surtout sur les
« funérailles » de ma mère et du
Frère Joseph. A Kataco, pendant notre absence, deux anciens
catéchistes sont décédés ; le
deuxième, deux jours seulement avant notre arrivée.
Ils ont beaucoup travaillé et tenu l’Eglise aux temps
très difficiles de Sékou Touré. Je regrette
beaucoup de ne pas avoir été là pour leur
enterrement. Nous allons présenter nos condoléances à
leur veuve et leur famille avec beaucoup d’émotion.
Mais
il faut aussi nous mettre au travail. Le responsable des catéchistes
qui habite la communauté voisine de Mare est arrivé.
Il nous fait le compte-rendu des activités de vacances. Avec
lui, nous préparons la rentrée et les tournées
de village.
A 15 heures, rencontre avec l’équipe de
la Banque alimentaire. La récolte n’a pas été
bonne cette année et les cultivateurs ont de la peine à
rembourser les crédits qui leur ont été faits.
Il y a aussi un certain nombre de choses à revoir au niveau
de l’organisation. Et nous tenons à avoir des
comptes-rendus d’activités et des rapports financiers
clairs et précis. C’est une nécessité
pour que la confiance règne et que les choses
avancent.
L’équipe
apostolique.
Dès 16
heures, rencontre de l’équipe apostolique :
prêtres, frères et sœurs. Nous accueillons le
Frère Charles, sénégalais, qui va prendre la
direction de l’école primaire, et Ugotshuku, notre
stagiaire nigerian, qui va travailler avec nous cette année.
Chacun se présente, raconte ce qu’il a fait durant les
trois mois passés : ceux qui sont partis en congés
et ceux qui sont restés. Cet échange est très
important pour nous, pour mieux nous connaître et créer
entre nous une ambiance fraternelle et un soutien mutuel dans la
situation difficile qui est la nôtre à Kataco.
Nous
posons les premières bases de notre travail de cette année.
Mais ce n’est pas compliqué car nous sommes rôdés
et habitués les uns aux autres. C’est vrai que, devant
m’occuper en plus de la paroisse voisine de Boffa, je serai
souvent absent, mais mon confrère Igbe restera à
Kataco en permanence avec le stagiaire. Ils pourront assurer le
suivi du travail sans problèmes.
La nuit, je passe
plusieurs heures à analyser les différentes rencontres
pour en tirer les conclusions et orientations les plus
importantes. »(Armel
Duteil)
Jeudi 2 octobre
: « Retour à Kataco.
Je
ne participerai malheureusement pas aux cérémonies à
Boffa car Igbe, mon confrère, est rentré de congés
et nous devons monter à Kataco avec le nouveau stagiaire qui
va vivre avec nous cette année. Sœur Rosa, la
responsable du dispensaire qui était descendue à
Conakry pour chercher des médicaments, remonte avec nous.
Elle nous parle de ses congés en Inde et des tensions très
fortes actuellement entre hindous et chrétiens, allant
jusqu’aux assassinats.
Notre arrivée, très
tardive le soir, n’était pas annoncée.
Cependant, les personnes qui sont là nous accueillent avec
joie. La nouvelle se répand rapidement et le lendemain les
visites sont nombreuses et les retrouvailles pleines
d’amitié. »(Armel
Duteil)
Mercredi 1er
octobre : « Fête de la
Korité (Aïd el Fita) qui marque la fin
du Ramadan.
Avec Armand et les deux stagiaires, conduits par le
responsable du Conseil paroissial, nous allons souhaiter une bonne
fête aux chefs religieux musulmans. L’imam ratib
(principal) ne peut pas nous recevoir, mais nous avons un très
long entretien avec son adjoint qui habite justement à côté
de l’église ; nous sommes donc voisins. A la fin
de notre conversation, nous lui remettons la lettre du Vatican aux
musulmans à l’occasion de cette fête. Au passage,
nous saluons le maire-adjoint, en promettant une vraie visite pour
la prochaine fois à Madame le Maire, car c’est une
femme qui administre Boffa.
Rencontre avec
le Préfet.
Nous allons ensuite nous
présenter au préfet, qui nous reçoit avec son
secrétaire général, bien que ce soit un jour de
fête. Nous avons ensemble une longue conversation et évoquons
la vie du pays et la façon dont nous allons collaborer. En
effet, il est musulman, mais la mission catholique a d’excellentes
relations avec lui et la collaboration est très bonne. C’est
normal, nous sommes au service du pays. De son côté, le
préfet apporte son appui lors du pèlerinage annuel du
diocèse à Boffa (voir les photos). Jusqu’à
maintenant, je me contentais d’y participer. A partir de cette
année, je serai beaucoup plus impliqué en tant que
curé de Boffa. Heureusement, je ne serai pas seul pour
cela !
Le 50ème
anniversaire de l’Indépendance.
Demain,
nous célébrons le 50ème
anniversaire de l’indépendance du pays. Ce fut un
grand événement : la Guinée a tracé
la voie en demandant son indépendance deux ans avant tous les
autres pays d’Afrique francophone. Malheureusement, les
espoirs ont été vite déçus.
Nous
assurons le préfet de notre prière pour le pays et
formulons des bénédictions, comme cela se fait
traditionnellement ici. Demain, nous aurons une messe pour le pays à
l’église paroissiale.
Malheureusement, cette fête
de l’Indépendance se passe dans une ambiance très
morne. L’indépendance a débouché sur une
dictature sanglante et la Guinée a dû supporter les
conséquences des guerres du Liberia et de Sierra Leone, ce
qui a entraîné plus de 500.000 réfugiés
que le pays a accueillis de son mieux. (voir mes lettres-circulaires
de 1996 à 2006). Actuellement, le pays se trouve dans une
situation sociale, économique et politique déplorable.
Les gens sont complètement découragés. Ils
n’ont ni envie, ni les moyens de faire la fête.
D’ailleurs, faute de moyens et par manque d’organisation,
les préparatifs ne sont pas terminés. Beaucoup ont
demandé qu’avant cette célébration, il y
ait une réconciliation nationale, ce qui n’a pas eu
lieu. On a seulement rendu à leurs familles les corps de
trois jeunes tués il y a 8 ans. Mais il y a beaucoup de
charniers cachés ou pas encore découverts jusqu’à
maintenant. De nombreuses familles ne savent pas où ont été
jetés les cadavres de leurs parents assassinés pour
des raisons politiques. Comme je l’ai déjà
souvent expliqué, le climat social est très tendu, car
les droits des gens ne sont pas respectés et la situation
économique ne fait que se dégrader. Dans un tel
contexte, ce n’est pas facile de redonner confiance et
espérance aux gens. »(Armel
Duteil)
Samedi
12 juillet : « Rencontre de la Commission de
pastorale sociale.
Vous trouverez les comptes rendus de
ces deux rencontres dans ce site. » (Armel Duteil)
Vendredi 11 juillet : « Rencontre de la Commission « Justice et Paix » (Armel Duteil)
Jeudi 10 juillet : « Le matin, rencontre mensuelle avec l’OCPH pour faire le point des actions caritatives, humanitaires et de développement. L’après-midi, avec l’association « SOS-Mineurs » au Foyer de l’Espérance qui travaille avec les enfants de la rue et jeunes en difficulté. » (Armel Duteil)
Mercredi 9 juillet : « Je participe à la formation des éducateurs des Jardins d’enfants du diocèse. » (Armel Duteil)
Du
7 au 13 juillet : « Evaluation de
l’année.
Toute la semaine, je reste à
CONAKRY. En effet, c’est la fin de l’année
scolaire et pastorale. Il faut donc faire le point du travail de
toute l’année, l’évaluer et en tirer les
orientations pour l’année prochaine. Les besoins ne
manquent pas, mais il nous faut trouver les moyens, financiers et
autres, pour y répondre. Je passe donc un temps important à
finir de rédiger des comptes rendus et à faire des
demandes de soutien. Et aussi à visiter des ONG et des
ambassades de la capitale.
Les projets : les idées ne
manquent pas. Des centres aérés dans les quartiers
pour les enfants de familles démunies qui ne peuvent pas
partir en vacances ; formation d’animateurs pour toutes
les prisons du pays ; formation d’observateurs pour les
élections législatives prévues en décembre
pour qu’elles se passent le mieux possible et dans la
transparence ; lancer des AGR (Activités génératrices
de revenus) pour permettre aux personnes nécessiteuses de
gagner leur vie par elles-mêmes, en lançant des
groupements coopératifs pour se former et travailler
ensemble. Malheureusement, dans l’immédiat nous ne
recevons aucune réponse positive à nos demandes
d’aides à différentes ONG ou ambassades. Il va
falloir creuser un peu plus les choses et continuer à
prospecter. » (Armel Duteil)
Dimanche
6 juillet : « Ordinations.
Trois nouveaux
prêtres sont ordonnés pour le diocèse. C’est
une grande joie qui est fêtée grandiosement comme on
sait le faire ici. L’Evêque en profite pour donner une
nouvelle parole de l’Eglise sur la situation actuelle du pays
et appeler chacun à se remettre en cause pour ensemble
changer les choses. A partir de là, il propose aux nouveaux
ordonnés ce que doit être le prêtre guinéen
dans la situation actuelle. C’est un message important, vous
le trouverez dans ce site. Nous en tirons des copies que nous
adressons aux différents partis politiques, aux responsables
syndicaux, aux personnes engagées dans la société,
aux ambassades et bien sûr aux journaux, ainsi qu’aux
radios privées puisqu’elles existent depuis deux ans
maintenant. Cela a été une des exigences de l’Union
Européenne, avec des élections libres que nous
préparons avec soin. » (Armel Duteil)
Contacts avec différents groupes et suivi des contacts précédents. En particulier, avec le groupe des Volontaires Catholiques et avec l’OCPH (Organisation catholique pour la promotion humaine = Secours catholique – Caritas de Guinée) qui est en pleine transformation. Malheureusement, nous n’arrivons pas à sortir ce que j’ai saisi sur mon ordinateur et enregistré sur disquette. Cela ne m’arrange pas ! En même temps, je dois me battre pour obtenir un billet d’avion pour participer au Congrès panafricain "Justice et Paix" à KINSHASA au Congo."(Armel Duteil)
" Pendant que nous étions en Côte d’Ivoire, les concertations de l’Eglise Catholique avec les différents acteurs et responsables du pays se sont continués tout azimuts. Car si la grève générale a été évitée, avec toutes ses conséquences, les problèmes ne sont pas résolus pour autant. La vie devient de plus en plus difficile, surtout pour les plus pauvres ; les grands projets de développement, de lutte contre la pauvreté ou d’emploi des jeunes ne donnent pas les résultats espérés. Les gens sont de plus en plus découragés, les prix augmentent de plus en plus et beaucoup sont tentés de se tourner vers la violence. Les différents groupes au pouvoir cherchent à manipuler les jeunes ou à les acheter. Les gens sont divisés entre le bien du pays et leur intérêt particulier, personnel ou de groupe. L’Eglise a été choisie par les différents responsables du pays et de la société civile pour amener les gens à se parler et à s’accepter pour chercher ensemble des solutions pour sortir le pays de la crise. Cette semaine, nous avons donc rencontré de nombreux responsables, en particulier des syndicats et de la coordination des jeunes, pour chercher ensemble les lignes d’actions qui nous semblent les meilleures pour l’avenir du pays et le bien de tous.
En même temps, j’ai continué à prendre des contacts et à visiter différentes réalisations pour la mise en place effective de nos deux commissions : "Justice et Paix" et "Pastorale sociale". Dès ma descente d’avion, je vais à Sonfonia en grande banlieue, visiter le Foyer de l’Espérance qui suit dans le quartier et accueille des enfants en difficultés, et où des éducateurs les aident à se stabiliser et à voir plus clair dans ce qu’ils veulent faire. Ou bien ils suivent des cours d’alphabétisation ou de rattrapage scolaire, ou bien ils reçoivent une formation technique en menuiserie, ou soudure pour les garçons, en broderie et couture pour les filles, pour leur permettre de s’en sortir en gagnant leur vie. Toute une équipe d’éducateurs les suit dans la rue et dans les commissariats. Et aussi à la prison où ils ont fait construire un quartier spécial pour les mineurs.
Mardi, je travaille avec les Responsables de Wanep, une association ouest africaine pour la défense des droits humains. Nous nous retrouverons la semaine prochaine pour mettre au point les jeux d’éducation aux droits de l’homme et de l’enfant que nous avions créés au Sénégal avec Amnesty International et adaptés à la Guinée et aux réfugiés quand j’étais à MONGO. Car c’est un excellent moyen pédagogique pour l’éducation des enfants et des adultes. Ensuite, il faudra former des éducateurs et trouver les moyens financiers pour les prendre en charge.
Mercredi, visite du dispensaire St Gabriel, dont j’ai déjà parlé (voir aussi la page qui lui est consacrée) et d’autres responsables. A mes temps libres, je travaille à la rédaction de la lettre pour le Carême. Il me faut aussi reprendre les différentes interventions du Colloque d’ABIDJAN. Je profite d’être à Conakry pour saisir tout cela sur ordinateur et l’envoyer aux différentes personnes intéressées, par mail. A KATACO , ce ne sera pas possible.
Jeudi, inauguration du Centre Dream pour les personnes vivant avec le VIH/sida (voir également plus haut).
Vendredi, séance de travail avec Roberto, prêtre italien du Prado qui coordonne les activités à la prison. Puis rencontre avec le frère Alphonse, des frères du Sacré-Cœur qui travaille spécialement auprès des mendiants et assure la scolarité de plus de 800 infirmes et enfants de mendiants, pour les aider à s’instruire.
Samedi, toute la journée, 3e réunion de la Commission de Pastorale sociale dont vous pourrez lire le compte rendu dans la rubrique du même nom.
Dimanche, je célèbre la messe dans le quartier populaire de LAMBANYI et j’en profite pour sensibiliser les participants aux actions à mener dans les circonstances actuelles du pays et à la nécessité de la mise en place de nos deux commissions dans la paroisse. Dès la fin de la rencontre, je pars à la gare routière pour saisir au vol un taxi brousse qui me permettra d’arriver à la ville de Kamsar avant la nuit."(Armel Duteil)