Armel Duteil

Declarations




Veillée Pascale, 22 mars 2008
Cathédrale Sainte Marie de Conakry

Homélie de Mgr. Vincent COULIBALY

Bien Chers Frères et Sœurs,

Notre Carême prend fin aujourd’hui. Pour nous, le Carême est un temps fort de conversion personnelle et communautaire. Un temps que nous devons vivre dans la rencontre quotidienne avec Dieu et dans l’écoute attentive de sa Parole qui donne vie afin que nous soyons en communion les uns avec les autres. Un temps marqué par le combat spirituel, en vue de convertir notre vie d’homme et de femme, ainsi que toutes nos structures sociales qui s’opposent à l’Evangile, à l’Amour et à la Vérité. Un temps où nous « apprenons à rejeter le péché et les passions d’ici-bas, pour vivre dans le monde présent en hommes raisonnables, juste et religieux » (Tite 2, 12).

Pendant le carême 2008, la lecture et la méditation de la Parole de Dieu nous ont fait mieux comprendre que la parcours humain de Jésus a pris fin sur la croix, comme un malfaiteur et un bandit. Joseph d’Arimathie et Nicodème l’ont enveloppé d’un linceul, en employant les aromates selon la manière juive d’ensevelir les morts ; et l’ont déposé dans un tombeau neuf où on n’avait encore mis personne. C’est le troisième jour que cette nouvelle extraordinaire se répandit partout : Jésus est ressuscité, son corps n’est pas dans le tombeau. Elle fut annoncée en tout premier lieu aux femmes qui s’étaient rendue au tombeau à l’heure où commençait le premier jour de la semaine : <<Vous, soyez sans crainte ! Leur dit l’ange du Seigneur. Je sais que vous cherchez Jésus le Crucifié. Il n’est pas ici, car il est ressuscité, comme il l’avait dit. Venez voir l’endroit où il reposait. Puis, vite, allez dire à ses disciples : « Il est ressuscité d’entre les morts ; il vous précède en Galilée : là, vous le verrez ! » Voilà ce que j’avais à vous dire >>. Et ces braves femmes quittèrent vite le tombeau vide, tremblantes et toutes joyeuses, pour aller porter la nouvelle extraordinaire aux disciples.

Jésus est donc Ressuscité après sa Passion et sa Mort. Telle la foi qui nous a conduit cette nuit à nous réunir, au tour du cierge pascal et des Sainte Ecritures, pour veiller et prier, et pour célébrer la Victoire de Jésus sur la mort.

Mais pourquoi Jésus est-il mort ? Jésus est mort pour nous libérer de la mort éternelle et pour nous donner la paix. Cette paix qui semble de plus en plus compromise dans notre cher pays, la Guinée. Parce qu’il y a encore une crise profonde au sommet de l’Etat et aussi beaucoup d’injustices qui écrasent les petits et les pauvres. Une crise profonde alimentée par des personnes qui ne cherchent que leurs propres intérêts et ceux de leurs familles.

Il nous faut donc prier aujourd’hui Jésus, le Prince de la paix, pour qu’il soutienne les efforts des guinéens patriotes qui privilégient le dialogue dans la résolution des problèmes que nous rencontrons sur le chemin de notre développement. Car le sang doit cesser de couler en Guinée. Le massacre des guinéens par des guinéens, fait monter vers Dieu une plainte, des pleurs et de grandes lamentations. C’est la Guinée qui pleure ses enfants, et elle ne veut pas être consolée, car ils sont morts, ses fils et ses filles pour des raisons inavouées.

Il nous faut prier le Prince de la paix pour qu’il donne à nos dirigeants la sagesse nécessaire pour mieux s’entendre dans l’intérêt supérieur de tous les guinéens. Que nos dirigeants travaillent ensemble dans le noble souci du développement harmonieux de notre pays et ils mériteront ainsi la confiance du peuple de Guinée qui les a choisis. Car c’est le peuple de Guinée qui détient le véritable pouvoir au terme de notre constitution et selon la devise de notre République, et c’est seulement ce peuple qui doit avoir raison et non pas une personne, ni une ethnie, ni une région encore moins un parti politique ou un clan. Que tous les dirigeants mettent au premier plan l’intérêt de la Nation. Parce que nous sommes des êtres fragiles. Ces entités passeront, et le peuple de Guinée demeurera. Ne laissons donc pas un lourd héritage à nos fils et à nos petits fils. Le sang ne doit plus couler sur notre sol, car le commandement de Dieu est clair : « Tu ne tueras pas. » Et « tous ceux qui useront de l’épée périront pas l’épée » (mt 26, 52). Encore une fois, nos jeunes ont besoin d’être formés et de trouver des emplois ; ils n’ont pas besoin d’être recrutés pour tuer ou se faire tuer.

Pendant le carême 2008, nous avons encore suivi le chemin de la croix de Jésus. Cette croix qui est l’instrument véritable du salut de tout homme. Aujourd’hui, il ne suffit pas de nous attendrir et de pleurer sur les souffrances de Jésus, ou même sur nos propres souffrances. Nous devons nous saisir du sens profond de la croix rédemptrice et des souffrances du Sauveur, pour agir dans ce pays avec amour et désintéressement afin de corriger rapidement toutes les situations de misère qui caractérisent actuellement nos populations surtout rurales.

Jésus disait : « Tout ce que vous faites aux plus petits de mes frères, c’est à moi que vous le faites » (mt 25, 41). Et il demandait à Saul, qui mettait les chrétiens en prison : « Pourquoi me persécutes-tu ? » Saul est devenu après l’Apôtre Paul. Quand nous faisons souffrir nos frères, c’est donc Jésus lui-même que nous faisons encore souffrir aujourd’hui. Et Pascal, cet autre croyant, écrivait : « Jésus est en agonie (dans la souffrance de la mort) jusqu’à la fin du monde. Il ne faut pas dormir pendant ce temps-là ! »

Oui, Jésus est en train de souffrir en ce moment dans le monde, partout où il existe l’oppression et l’injustice. Il est en train de souffrir dans notre pays, la Guinée, confrontée à des difficultés de tous ordres. De plus en plus de familles ne peuvent plus vivre normalement ni nourrir et éduquer leurs enfants. Nous mœurs sont transgressées. Cette situation perdure et semble justifiée par la flambée du prix du baril de pétrole qui connaît de nos jours une montée exponentielle. Nos commerçants, sous l’œil indifférent des autorités, continuent impitoyablement d’exploiter le peuple.

L’enrichissement des sociétés pétrolières, alors qu’il n’y a aucune retombée bénéfique sur nos populations et qui ne payent que des maigres salaires des travailleurs, interpelle plus que jamais nos politiques. La Guinée doit trouver des solutions alternatives dont le premier choix est de retourner à la terre en vue de l’autosuffisance alimentaire.

Notre pays regorge de ressources minières. La Guinée est un scandale géologique, dit-on. Mais où vont ces richesses ? Dans beaucoup de pays, on a mis en place l’opération : « Publiez ce que vous payez ». Il s’agit pour les sociétés d’exploitation de déclarer tous les impôts, taxes et charges qu’elles donnent au pays, et pour le gouvernement de dire ce qu’il reçoit et les bénéfices des sociétés. Pourquoi ne pas en faire autant en Guinée ? Des dispositions urgentes doivent être prises pour un partage de nos richesses au profit du peuple tout entier. Parmi ces dispositions, on ne devra pas oublier celles qui sont profitables aux non salariés, comme les paysans, et à ceux qui exercent les petits métiers. Dans le cadre de la lutte contre la pauvreté, on se contente bien souvent de belles déclarations dans les médias ou de séminaires qui n’enrichissent que les participants à travers les perdiem. Il faut des actions concrètes, par exemple, l’amélioration des techniques agricoles et l’acquisition par les paysans des intrants à des prix modérés et des variétés de semences pour qu’ils produisent plus et ainsi gagner dignement leur vie.

Jésus est mort, mais il est ressuscité. Il vit d’une vie nouvelle. Il est mort pour nous. Il est vivant pour nous. Il nous donne la force de lutter contre la pauvreté et le courage de lutter contre les injustices. Il nous permet de construire une terre nouvelle. Grâce à Lui, nous retrouvons l’espoir. Avec Lui, bâtissons une Guinée nouvelle dans la paix, l’entente et la réconciliation.

Pour cela, mettons nous en marche pour la Galilée, où Jésus nous donne rendez-vous, où Jésus donne rendez-vous à tous les hommes et à toutes les femmes, car il est l’Unique Sauveur du monde hier, aujourd’hui et à jamais.

En marche pour la Galilée, mettons en pratique ces paroles de l’Apôtre Paul : « Vous devez donc vous débarrasser de votre vieille nature, qui déterminait la façon dont vous vous conduisiez dans le passé, cette vieille nature que ses désirs trompeurs mènent à la ruine. Il faut que vous soyez complètement renouvelés dans votre cœur et dans votre esprit. Revêtez-vous de la nouvelle nature, qui est créée à la ressemblance de Dieu et se manifeste dans la vie juste et saine qu’inspire la vérité » (Eph 4, 22-24). Il s’agit d’abandonner nos vieilles habitudes qui empêchent notre pays de prendre sa place dans le peloton de tête des pays producteurs. Nos vieilles habitudes qui nous empêchent de comprendre que l’avenir du pays n’est pas dans la rue, dans le mensonge et la démagogie, mais dans le travail. Nos vieilles habitudes qui nous empêchent de bannir à jamais la corruption, le vol, les détournements, l’ethnocentrisme et la recherche du profit personnel au détriment de notre pays.

Chers frères et sœurs, Christ est ressuscité ! Alléluia ! Il nous donne rendez-vous en Galilée, c’est-à-dire aux carrefours des nations, des races, des peuples et des cultures. C’est là que nous le verrons pour construire avec lui, une Guinée nouvelle.

Répands, Seigneur, ta grâce en nos cœurs. Fais grandir ton Eglise et attire à toi tous les hommes pour qu’ils vivent de ta vie. Nous te le demandons, par Jésus ressuscité, qui vit et règne avec toi, dans l’unité du Saint-Esprit, pour les siècles des siècles. Amen !

Vincent COULIBALY

Archevêque de Conakry




Allocution de Mgr Vincent Coulibaly à l'ouverture du pèlerinage de Boffa 2008

Bien Chers Pèlerins

Soyez les bienvenus au Sanctuaire Marial de Boffa. Soyez les bienvenus en ce haut lieu de la prière connu de tous les guinéens, où Marie nous accueille chaque année avec sa grande tendresse, pour nous conduire à Jésus, qui est uni au Père et à l'Esprit-Saint. Jésus, la pierre qui avait été rejetée par les bâtisseurs et qui est devenue la pierre d'angle. En ce haut lieu de la prière, nous n'oublions pas que nous sommes sous le regard souriant et protecteur de Saint Joseph.

C'est avec une immense joie, que je rends grâce à Dieu qui nous donne l'occasion d'accueillir pour la première fois à Boffa, Son Excellence Monseigneur Clet FELIHO, Evêque de Kandi, au Bénin. Merci, Excellence, pour votre présence à ce pèlerinage. Merci d'avoir accepter de présider l'Eucharistie de demain et d'assurer le ministère de la prédication. Vous êtes né à Conakry, et vous avez fait le petit séminaire Bienheureux Jean XXIII de Kindia, où je vous ai connu. Veillez vous lever, Excellence, pour que la communauté diocésaine de Conakry vous salue et vous rende l’hommage de nos acclamations.

Mon immense merci, s'adresse également à toutes les personnes dont l'engagement et la disponibilité ont permis de préparer matériellement et spirituellement ce rendez-vous annuel de Boffa. Il s'agit surtout des autorités préfectorales et communales de Boffa. Il s’agit aussi des responsables des paroisses (prêtres, religieux, religieuses, conseils paroissiaux et commissions paroissiales) et des commissions diocésaines de Conakry. Je suis sensible à l'engagement effectif et aux sacrifices consentis par tous pour préparer ce pèlerinage de Boffa. Que le Seigneur vous bénisse. Que le Seigneur reçoive comme une offrande agréable tout ce bagage que vous portez en vos cœurs : vos soucis, vos problèmes, vos vœux, vos offrandes, votre désir de conversion, de sainteté, de guérison, de paix pour vos familles et pour la Guinée.

Chers pèlerins, chaque année à Boffa, le Christ nous invite à aimer nos frères et nos sœurs à aimer comme lui. Aimer le Christ et aimer le prochain sont des conditions à remplir pour mettre en pratique notre thème d'année: la Communion Fraternelle.

« Une spiritualité de la communion, cela veut dire la capacité d'être attentif, dans l'unité profonde du Corps mystique, à son frère dans la foi, le considérant donc comme «l'un des nôtres », pour savoir partager ses joies et ses souffrances, pour deviner ses désirs et répondre à ses besoins, pour lui offrir une amitié vraie et profonde. Une spiritualité de la communion est aussi la capacité de voir surtout ce qu'il y a de positif dans l'autre, pour l'accueillir et le valoriser comme un don de Dieu: un « don pour moi », et pas seulement pour le frère qui l'a directement reçu. Une spiritualité de la communion, c'est enfin savoir « donner une place» à son frère, en portant « les fardeaux les uns dans autres» (Ga 6, 2) et en repoussant les tentations égoïstes qui continuellement nous tendent des pièges et qui provoquent compétition, carriérisme, défiance, jalousies. Ne nous faisons pas d'illusion: sans ce cheminement spirituel, les moyens extérieurs de la communion serviraient à bien peu de chose. Ils deviendraient des façades sans âme, des masques de communion plus que ses expressions et ses chemins de croissance. » (NMI N° 43).

Aimer Dieu et aimer le prochain, sont des conditions à remplir pour vivre dans la paix. «Le monde a plus que jamais besoin d'espérance : espérance de paix, de justice et de liberté. Mais il n'y a pas d'espérance sans l'amour mutuel qui vient du Christ », disait récemment le Pape Benoît XVI.

Ici à Boffa, nous ne pouvons nous empêcher de penser à l'Afrique et de prier pour elle. L'Afrique souvent endeuillée par des catastrophes naturelles, et par des violences avant ou après les élections. Notre pays aussi a connu ces violences, suscitées par ses fils et ses filles. Et des signes montrent aujourd'hui que notre pays n'est pas encore à l'abri de nouvelles crises. C'est pour cela que la structure de veille invite toujours les guinéens à la prière pour que Dieu donne chaque jour la paix à notre pays.

Pendant ce pèlerinage 2008, nous prierons donc pour notre pays, pour que ses fils et ses filles privilégient toujours la voie du dialogue dans le règlement des différends entre eux. Nous prierons pour la paix en Guinée, pour la santé du Chef de l’Etat et pour l’entente entre nos dirigeants à tous les niveaux. Car nous ne pourrons rien faire sans la santé et l’entente. Nous prierons pour que les africains comprennent davantage que les jeunes ont besoin d’être formés et de trouver des emplois, mais pas d’être recrutés pour tuer ou se faire tuer. Nous prions pour que Dieu aide la Guinée à prendre sa place dans le peloton de tête des pays producteurs du continent africain. Nous prierons aussi pour que le sang cesse de couler en Guinée. Des guinéens ont tué d’autres guinéens. Des guinéens viennent de tuer un missionnaire. Que le massacre s’arrête ! Car le commandement de Dieu est clair : Tu ne tueras pas.

Frères et Sœurs, ici à Boffa, nous sommes réunis autour de Marie comme au cénacle dans l’attente de la descente de l’Esprit-Saint. Car à nous aussi le Seigneur dit : vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit-Saint, qui viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. Par notre vie de communion, par nos œuvres et nos engagements sociaux, politiques, nous devons annoncer la Bonne Nouvelle et contribuer à faire venir le Règne de Dieu dans le monde, un règne de justice et de paix.

Je vous souhaite un saint et fructueux pèlerinage 2008.

Que Dieu vous bénisse pour les siècles des siècles. Amen !




Lettre pastorale de la conférence des évêques de Guinée

Aspirations au changement : Effort de tous et de chacun

Bien Chers Compatriotes,

Une série d’évènements importants ébranlent la vie politique de notre pays depuis la seconde quinzaine du mois de décembre 2008 : la disparition de l’ancien Chef de l’Etat et le coup d’Etat sans effusion de sang et dans un calme étonnant, opéré par un groupe d’officiers et de civils, constitué en Conseil National pour le Développement et la Démocratie (CNDD). Tous ces évènements graves se sont produits à quelques jours de la célébration de la fête de Noël.

A plusieurs reprises, la Conférence Episcopale de Guinée a invité les chrétiens et le peuple de Guinée au jeûne et à la prière pour exorciser les démons qui pervertissent le cœur et l’esprit de chacun d’entre nous, nous empêchant d’être des serviteurs du bien commun de notre pays. C’est pourquoi elle salue le courage des dirigeants actuels et leurs efforts de s’attaquer de front aux maux qui minent notre société guinéenne. Et elle saisit cette opportunité pour faire ici quelques propositions au CNDD et à tous les guinéens, comme sa modeste contribution, en vue de la reconstruction de la Guinée.

Notre réflexion s’articule autour de trois axes : sur le plan historique, la Guinée est fortement marquée par une histoire mouvementée, ponctuée par de nombreux rendez-vous manqués. Les Guinéens veulent le changement. Au fond, de quel changement s’agit-il ? Quel pourrait être la signification de ce changement ainsi que son contenu ? Enfin, nous développerons les principes et les conditions de changement pour mieux mettre en lumière les responsabilités des gouvernants, d’une part, et des gouvernés, d’autre part, dans cette nouvelle étape dans laquelle se trouve notre pays.

I- Le regard sur le passé : une histoire mouvementée et des rendez-vous manqués

Depuis 1958, l’année à laquelle notre pays, la Guinée, opta pour l’indépendance immédiate, rompant tout lien avec la France, son histoire n’a cessé d’être une histoire mouvementée.

Les années 1958-1974 constituent la période rouge de cette histoire tourmentée ; car elles marquent le point culminant de la direction dictatoriale de Ahmed Sékou TOURE ; elles enregistreront de nombreux complots et procès.

Il faut attendre les années 1975-1978 pour voir une timide tentative de rapprochement avec la France. Cette première expérience douloureuse du peuple se clôt le 26 mars 1984 par la mort du Président Sékou TOURE. Une ère nouvelle, pleine d’espérance, s’ouvre devant un peuple martyr.

C’est ainsi, que le 3 avril 1984, le peuple de Guinée commence la rédaction d’une autre histoire : une histoire au menu garni de plats invitant à toutes sortes de bonheur pour les populations. Une histoire qui inspira des chants de liberté sans précédent dans la vie de nos citoyens. Et à la tête de cette nouvelle aventure, il y a le Colonel Lansana CONTE, nouveau Chef de l’Etat, qui se voit tout de suite confronté à de graves difficultés économiques mais qui peut compter sur l’enthousiasme et l’adhésion de tous, hommes et femmes, jeunes et adultes, au programme de reconstruction de la nation.

En 1990, une nouvelle Constitution, approuvée par référendum, met fin au régime militaire et introduit le multipartisme. Mais au lieu d’être un facteur positif, ce passage au multipartisme devient une autre page noire de l’histoire de la nation. Pendant toute cette période, la vie sociale, économique et politique du pays fait une chute jamais connue dans l’histoire de notre chère patrie. Comme par ironie du sort, il faut attendre la mort du Général Président Lansana CONTE pour voir le peuple guinéen contempler un autre espoir, une autre chance offerte par le destin pour sortir de ce tunnel. L’avènement du CNDD marque le troisième rendez-vous que la providence fixe à la Guinée et aux guinéens.

Nous voici donc, une fois encore, au point de départ, contemplant l’avenir avec optimiste certes, mais aussi avec des interrogations : N’est-ce pas le temps opportun pour sortir de cette histoire tourmentée, ou faut-il en attendre un autre ? Que sera de l’espoir de ce peuple crucifié par ses propres fils ? Quelle autre surprise l’avenir nous réserve-t-il ?

II- La Guinée Aspire au changement

a) Un changement concret

Etant donné l’état actuel de pauvreté généralisé, le changement souhaité prend des formes très concrètes : ce que les guinéens souhaitent, c’est la baisse du prix de l’essence, du riz et des autres produits alimentaires, une meilleure éducation et un meilleur système de santé, de l’eau et de l’électricité. Les paysans ne veulent pas être oubliés, les chômeurs souhaitent avoir un travail, les travailleurs veulent un meilleur salaire. Tous veulent davantage de sécurité et sortir de la situation actuelle pour profiter des richesses du pays, au lieu qu’elles partent à l’étranger.

b) Un changement plus profond

Mais peut-on se contenter d’un changement économique pour que le pays puisse se redresser durablement ? Le Christ disait : « l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Mt 4, 4). Pour arriver à un développement économique vrai et qui profitera à tous, il est nécessaire de commencer par un changement de mentalité au niveau personnel et communautaire. Sinon il n’y aura pas de changement de comportement et les choses resteront comme avant. Il faut donc utiliser toutes les possibilités pour faire réfléchir et éduquer les gens : télévision, journaux, radios, rencontres dans les quartiers et les villages… A tous les niveaux : écoles, associations de jeunes, centres culturels, associations de femmes, groupes divers. Et en utilisant des moyens accessibles aux analphabètes.

Ce changement de mentalité devra aboutir à un engagement de tous et de chacun, sans attendre que les choses soient décidées d’en-haut. Pour cela, il faut que tous, en particulier les analphabètes, les gens du secteur informel, les paysans etc… se sentent respectés et soient écoutés. A ce moment-là, ayant compris les choses, ils accepteront de faire des efforts personnels.

Il faut éduquer toujours à la vérité et susciter une volonté forte de se mettre au travail. Mais cela suppose que les gens soient sûrs de profiter du fruit de leur travail et de leurs efforts. D’où l’importance d’assurer par exemple un avancement au mérite dans les services et non pas par favoritisme et népotisme ni seulement par ancienneté. Cela suppose que chacun cherche à se former afin d’acquérir les compétences nécessaires. Ce qui pose toute la question de l’enseignement et de la formation à tous les niveaux, avec une pédagogie adoptée. La formation initiale, mais aussi la formation continue.

III- L’Expérience de l’Eglise en matière de société

Pour bâtir la société, l’Eglise Catholique peut s’appuyer sur une expérience et un enseignement éprouvés de plusieurs siècles. Nous voudrions rappeler ici les points essentiels de cet enseignement qui pourra servir de base, avec d’autres éléments, pour construire la société guinéenne, comme cela s’est fait dans de nombreux autres pays. En fonction de cette doctrine sociale, l’Eglise Catholique est prête à s’engager pour le bien commun et le bonheur des guinéens et guinéennes. Depuis longtemps, nous formons déjà nos fidèles dans ce sens. Car c’est Dieu qui a créé le monde et qui nous a donné notre pays pour que nous construisions «une terre nouvelle, où la justice habitera», comme le dit Saint Pierre à la suite du prophète Isaïe.

Voici donc les dix principes sur lesquels repose l’enseignement social de l’Eglise. Ils offrent une base solide pour construire notre société guinéenne.

1) La dignité de la personne humaine.

Tout être humain est créé par Dieu et c’est cela sa dignité. Il mérite le respect. Comme le rappelle également le premier article de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, que notre pays a signé dès son accession à l’indépendance.

« Tous les hommes naissent libres et égaux en dignité et en droits ». Par conséquent, les hommes doivent être respectés pour eux-mêmes, et non pour ce qu’ils peuvent apporter : travail, argent, etc… Il est urgent de donner à tous les hommes la place à laquelle ils ont droit dans la société guinéenne. Ce n’est pas l’argent, ni l’ethnie, ni la région qui fait la dignité d’un homme.

Mais il ne s’agit pas ici d’individualisme. Au contraire, la personne humaine est communautaire : elle est faite pour vivre avec les autres. Il s’agit de développer dans la formation (à l’école par exemple) et la pratique, le sens communautaire et l’action en commun.

2) Le respect de la vie humaine.

Le commandement de Dieu : « Tu ne tueras pas » est valable pour tous. Chaque homme a droit à la vie. Aucune loi humaine ne peut remplacer cette volonté de Dieu.

Dans notre pays où se multiplient les avortements et les assassinats, on devra donc lutter contre l’insécurité et chercher à protéger davantage la vie, dès la naissance. On devra aussi interdire les exécutions sommaires. Et réfléchir sérieusement à la suppression de la peine de mort.

3) Le principe d’association.

L’homme est une personne sociale. Les initiatives et les activités des partis politiques, des syndicats et de toutes les associations qui ont fait preuve de sérieux et qui aident les citoyens à grandir en communauté, doivent être soutenues, encouragées et protégées. En se rappelant que la première association c’est la famille : c’est la première communauté à soutenir et à promouvoir.

4) La participation.

Les gens ont le droit et le devoir de participer à la société pour chercher ensemble le bien commun et le bien-être de tous, spécialement des pauvres et des personnes vulnérables. Empêcher cette participation, c’est conduire les gens à ne pas prendre leurs responsabilités. Les choses ne devraient donc pas être décidées toujours d’en-haut, sans consultation de la base. Ce qui ne supprime pas la mise en place d’un suivi et d’un système de contrôle et d’évaluation des actions.

5) La protection des pauvres et des personnes vulnérables.

Ils sont les privilégiés de la société. Dans le programme de la reconstruction de notre nation, une place de choix doit leur être réservée. Le pouvoir a le sacré devoir de penser d’abord à eux, et de susciter une vraie lutte contre la pauvreté et toute sorte de situations qui contribuent à les maintenir dans cet état de vulnérabilité. Mais hélas, on s’est souvent contenté jusqu’à maintenant de discours, quand le peu de fond destiné à cette noble cause n’était pas détourné par les chargés d’affaires.

6) La Solidarité.

Citoyens du même pays, nous avons le devoir de travailler pour la justice sociale. Et de mettre en place des structures sociales plus justes, pour le bien de tous.

7) Le respect de la création.

Dieu nous a donné notre terre, la terre guinéenne. Notre devoir est de la respecter et de l’entretenir pour qu’elle produise beaucoup de fruits. Cela veut dire que nos quartiers et nos villages doivent être protégés. Nous devons lutter contre les feux de brousse, la déforestation et la pollution (par les mines en particulier). Tous les services de l’Etat, en particulier ceux des Eaux et Forêts, doivent travailler davantage dans ce domaine.

8) La subsidiarité.

Elle signifie, laisser les gens de la base prendre leurs responsabilités, ne pas chercher à tout diriger d’en-haut. Ou encore, ne pas faire au niveau supérieur ce qui peut être fait au niveau inférieur. Ainsi chacun pourra apporter sa contribution pour étudier les problèmes et les réalités, et trouver des solutions plus adaptées.

9) Le principe de l’égalité humaine de tous les citoyens.

Il faut absolument traiter tous les citoyens à égalité ; lutter contre toutes les formes d’exclusion et discrimination. Cette notion d’égalité est un des premiers principes de la justice. Car la justice, c’est de rendre à chacun ce qui lui revient et d’abord la dignité et le respect. Par conséquent, les riches ne doivent pas avoir raison aux dépends des pauvres ; les scolarisés ne doivent pas minimiser les analphabètes ; les nationaux ne doivent pas exploiter les étrangers ; etc…

10) Le bien commun.

Il ne s’agit pas seulement du bien-être matériel, mais de toutes les conditions sociales qui permettent aux gens d’atteindre leurs pleines potentialités et de réaliser leur dignité humaine. Cela suppose le bien être et le développement social, le maintien de la sécurité par l’autorité publique pour le juste développement des personnes et des familles. Sans l’esprit communautaire, c’est la guerre et le pays s’écroule.

A partir de ces principes essentiels, nous pouvons nous poser deux questions : Quelles conclusions tirer pour la vie de notre pays ? Et quels changements opérer ? Nous proposons ici quelques réponses à ces questions.

IV- Les lieux et domaines du changement

1) L’homme guinéen.

Il est nécessaire que le guinéen se libère de la peur et de la superstition  qui conduisent à la fatalité et à l’inaction. Il faut que tous les guinéens se mettent au travail, qu’ils laissent la tricherie et la corruption, pour vivre dans la vérité et l’honnêteté. Il faut que chacun se décide fortement à traiter chaque homme et chaque femme vivant dans le pays à égalité et avec respect. Il est essentiel que tous ceux qui ont des responsabilités montrent l’exemple et changent leur comportement, car « si tu es blessé à la tête, le sang coule sur tout le corps ». D’où l’importance de l’audit, du contrôle et des évaluations du travail de chacun. Mais il faut aussi faire comprendre à toute la population que nous sommes tous responsables des maux et des difficultés du pays, par notre laisser aller, notre manque de courage au travail, par le manque de rigueur et de bon entretien de ce que nous avons, par la dilapidation des ressources du pays et le gaspillage de nos ressources propres. D’où la nécessité d’une éducation à la base et dès le début de l’enfance, à l’école mais d’abord dans la famille.

2) La famille.

C’est dans la famille que l’enfant est éduqué en premier lieu. Il est donc important que les parents prennent maintenant leurs responsabilités et jouent mieux leur rôle. Par exemple en participant aux réunions des parents d’élèves… à condition que l’Association des parents et amis de l’Ecole (APAE) ne soit pas récupérée par quelques uns pour leur profit personnel. A côté des syndicats, l’Etat devrait susciter des associations de parents et des organisations familiales. Il est également important d’étudier la culture guinéenne traditionnelle pour en tirer le positif et par exemple, redonner à la femme et à l’enfant la place à laquelle ils ont droit.

Cela demande aussi de la part de l’Etat un contrôle des médias publics et privés. Il y a trop de films pornographiques qui transmettent aux enfants le culte de l’argent, leur présentent comme modèles des gens qui ne vivent que pour eux-mêmes et qui construisent leur avenir en écrasant les autres et en vivant dans la violence. Est-ce avec de tels modèles que l’on va construire le pays ?

Si l’Etat et les familles démissionnent devant les jeunes, et ne les éduquent pas, nous ne devrons pas être étonnés qu’ils se lancent éperdument dans l’alcool, la drogue et l’immoralité.

Un soutien aux familles consiste à se lancer concrètement et efficacement dans la lutte contre la pauvreté. Pour que chaque père de famille puisse nourrir ses enfants. Sinon, comment sera-t-il respecté par sa femme et ses enfants ? Comment alors s’étonner que les jeunes ne pensent qu’à quitter le pays ? Qui pourra alors développer la Guinée ?

3) L’école.

Elle doit assurer non seulement un enseignement valable (l’instruction), mais aussi une vraie éducation. D’abord, il faut sortir du par cœur pour apprendre aux élèves à réfléchir. Sinon, ils ne seront jamais des citoyens responsables et engagés. Ensuite, l’enseignement doit être plus adapté aux réalités du pays, être pratique et beaucoup moins théorique.

On devra alors revoir par exemple la situation de nos lycées où on fait de la chimie sans laboratoire, et celle de nos Instituts Supérieurs d’élevage où il n’y a ni ferme ni laboratoire. Pour qu’on n’apprenne plus à soigner les animaux dans les livres ou sur un tableau noir. On devra aussi créer des écoles techniques et donner des moyens de travailler aux centres professionnels. Enfin, on devra mobiliser les enseignants non seulement par des augmentations de salaires mais surtout par une conscientisation et une motivation morale et des sanctions positives. Il s’agit d’adopter un système de reconnaissance, d’encouragement et de promotion basée sur le mérite et le travail réalisé et pas seulement sur l’ancienneté, encore moins sur les relations et la corruption. Il s’agit aussi d’éviter d’envoyer prioritairement en secteur rural les enseignants incompétents ou manquant de conscience professionnelle, car ce sont les enfants et finalement tout le pays qui vont en souffrir.

4) La Société Civile.

Qu’on lui donne vraiment la liberté et les moyens de s’exprimer au lieu de chercher à la récupérer et à l’utiliser. C’est dans la mesure où la société civile est responsable qu’elle peut apporter des idées positives et aussi mobiliser tous les guinéens pour l’avancée du pays.

On devra alors développer les associations tout en veillant à ce qu’elles travaillent pour la paix sociale et l’intérêt de tous, et non pas des intérêts partisans ou inavoués. C’est ainsi que la population toute entière passera à l’action avec ses petits moyens, au lieu de tout attendre de l’Etat. On veillera aussi à ce que ces associations restent ouvertes pour éviter l’ethnocentrisme et acquièrent peu à peu un sens national.

5) Les Syndicats.

Ils ont joué un rôle, reconnu par tous, en 2006-2007. Mais il faudra veiller à ce qu’ils ne s’enferment pas dans un égoïsme de classe ou de groupe professionnel. Qu’ils cherchent vraiment le bien de tous les travailleurs, y compris ceux du secteur informel ou du monde rural. Car, jusqu’à maintenant, il n’y a pas de syndicats de paysans. Et qu’ils ne se préoccupent pas seulement de leurs intérêts politiques ou financiers, sinon ils ne pourront pas jouer leur rôle.

6) Les partis politiques.

La Guinée en compte plus de cinquante (50) ! Est-ce raisonnable ? En réalité, ces partis sont liés à une personne ou à base ethnique. Ce qui constitue un gros danger potentiel pour le pays et un risque de guerre civile.

On devra alors revoir les règles pour le choix et la reconnaissance des partis politiques. Par exemple, n’accepter désormais que les partis ayant une représentation véritablement nationale et qui soient pluri ethniques, ou encore, supprimer l’agrément à tout parti qui n’obtiendra pas 5% des voix aux prochaines élections. Il faudra aussi exiger que ces partis présentent un véritable programme. Et que les candidats fassent preuve de sagesse et de probité morale, qu’ils n’aient pas été condamnés pour détournements ou autres fautes graves.

Cela aussi demande une éducation de toute la population, car c’est elle seule qui pourra exiger des chefs politiques un changement de comportement et les sanctionner par son choix au moment des élections. Cette éducation commence à l’école, où l’on doit mettre en place une instruction civique qui soit une véritable éducation citoyenne et pas seulement un apprentissage formel de notions théoriques qui n’ont aucune efficacité ni influence sur la vie concrète.

7) Le CNDD.

Son immense service consiste à poser dès aujourd’hui des bases solides et irréversibles et à donner une nouvelle orientation au pays. IL s’agit avant tout de créer un esprit attaché aux valeurs de paix, de justice, de réconciliation, d’égalité et de solidarité. Mais aussi d’honnêteté, d’engagement et de persévérance, marqué par l’amour des autres et du pays tout entier. Le succès de ce programme suppose l’adhésion du maximum de citoyens. Cela nécessite beaucoup d’explications et surtout un bon exemple de la part du CNDD et un changement de comportement des militaires. Et aussi, comme on l’a souvent dit, une responsabilisation de la société civile. Qu’elle se sente écoutée, si non elle va rapidement se démobiliser. Le rôle du CNDD est donc de donner la parole à tous, tout en maintenant la cohésion entre les différents acteurs, pour une action coordonnée au profit de tous.

Nous ne pouvons aujourd’hui qu’être d’accord avec les décisions du CNDD, en particulier pour tout ce qui touche la lutte contre la drogue et la corruption, la sécurité et la baisse du coût de la vie, et également la lutte contre le mensonge. Mais toute la population n’attend que des actions, pas des paroles. Car elle a été trop souvent trompée. Le souhait de tous est que ces actions soient menées d’une manière réfléchie et dans le respect des personnes. La présence d’un véritable esprit de concertation au sein du CNDD est une des conditions pour la réussite de leur louable programme de reforme.

Parmi les actions attendues du CNDD, on peut citer la revue du fonctionnement de toutes les institutions nationales et une plus grande responsabilisation du gouvernement. Il y a aussi la réforme de la justice pour qu’on juge désormais selon le droit en se libérant du pouvoir de l’argent et de toute vénalité. Nous signalons ici la nécessité impérieuse de juger aussi bien les responsables des tueries de janvier-février 2007, que les auteurs de détournements et les trafiquants de drogue. Et tout cela dans le respect de la justice et de leurs droits. Nous signalons aussi l’urgence d’assurer non seulement l’hygiène et un minimum vital aux prisonniers, mais aussi le respect et la dignité.

8) Le gouvernement

Son travail devra être évalué aussi bien par le CNDD que par la société civile. Le premier problème qu’il doit régler est celui du secteur économique. Il s’agit de s’attaquer aux causes véritables de notre pauvreté. Il s’agit aussi de chercher à produire par nous-mêmes, en particulier par l’agriculture et l’élevage, en donnant plus d’importance au monde rural. Cela permettra de limiter l’exode rural, donc aussi le surpeuplement des villes, les bidonvilles non aménagés, la délinquance et la pauvreté. Et pour cela, donner aux paysans les moyens de travailler. Par exemple, que les services d’agriculture, d’élevage et des eaux et forêts fassent vraiment leur travail de formation, d’encadrement et de soutien au monde rural. Il s’agit enfin d’amener les guinéens à compter sur leurs propres forces, et de les mettre sérieusement aux travail pour produire et non seulement consommer. Sinon, nous serons de plus en plus pauvres.

Conclusion.

Le changement espéré ne viendra donc que grâce à l’effort courageux et persévérant de tous et de chacun. La présente lettre des évêques de Guinée se veut un soutien pour l’accomplissement de cet effort. Le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob encourage à lutter contre le mal sous toutes ses formes. Autrement dit, nous ne devons pas être complices des personnes et des institutions dans le vol et les détournements de deniers publics, le mensonge, le trafic de drogue, les situations d’injustice, etc… Nous devons construire une Guinée nouvelle où tous sont heureux et pourront vivre en paix et où chacun aura sa place.

Conakry, le 12 Avril 2009
Fêtes de Pâques de notre Seigneur Jésus 2009
Pour la Conférence des Evêques de GUINEE
Vincent COULIBALY
Archevêque de CONAKRY
Président




Notes pour l'homélie de Pâques 2010 (L71)

Paroisse St Augustin, de Taouyah (Guinée Conakry)

1. Nous sommes rassemblés dans la joie et la lumière de Pâques pour fêter et dire merci à Jésus Ressuscité. Lui, l’homme bon que les hommes méchants ont tué injustement et qui est revenu à la vie, une Vie remplie de force et d’espérance. Lui, l’homme de foi, tué par ceux qui ont refusé d’écouter ce qu’Il disait au nom de Dieu, car cela leur aurait demandé de changer trop de choses dans leur vie. Mais Dieu ne peut accepter que l’on tue ainsi un innocent. C’est pourquoi il a ressuscité Jésus. Aujourd’hui, c’est Jésus Ressuscité que nous fêtons dans la joie, en disant merci à Dieu notre Père qui nous aime et qui nous sauve par Jésus.

2. Jésus n’est pas ressuscité pour lui tout seul. Il est ressuscité pour nous tous, pour que nous vivions une vie nouvelle. Pendant le Carême, nous avons cherché à changer de vie. Par la confession de Pâques, nous avons reçu le pardon de Dieu. Pâques vient nous donner la chance de commencer une vie nouvelle avec Jésus. Allons-nous en profiter ? Qu’allons-nous faire pour cela ? Relisons Colossiens 3 et Ephésiens 4 et 5.

3. Mais Pâques, ce n’est pas seulement une fête pour nous. C’est une fête pour tous les hommes. Et la vie nouvelle que Jésus nous offre, ce n’est pas seulement une fête dans le cœur. Jésus vient faire de nous des hommes et des femmes nouveaux. Comment allons-nous aider nos frères et nos sœurs chrétiens à ressusciter avec Jésus ? Avec Jésus Ressuscité, nous sommes sûrs qu’il est possible de vivre une vie nouvelle.

A Pâques, nous échangeons des cadeaux et partageons notre repas avec nos voisins, qu’ils soient chrétiens ou non. Le plus beau cadeau à faire, c’est d’aider tous ceux avec qui nous vivons à changer leur cœur, pour commencer à vivre une vie nouvelle, dans l’amour. Comment allons-nous aider nos frères et sœurs des autres religions à vivre cela avec nous ? Car Paul nous dit : « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés » (Tite 2, 11) Et Jésus, pendant toute sa vie, a aimé tous les hommes sans distinction.

4. Jésus est ressuscité avec son corps. La vie nouvelle que Jésus nous offre, ce n’est pas seulement une fête dans le cœur. C’est la fête pour notre personne tout entière. Pâques nous appelle à mieux vivre dans toute notre vie. Comment allons-nous travailler ensemble pour que les gens aient de quoi manger ? Et que les parents puissent habiller leurs enfants et les envoyer à l’école ? Pour que les malades soient mieux soignés dans nos hôpitaux et que leurs familles s’en occupent mieux et abandonnent toutes les affaires de sorcellerie et de charlatan ? Comment nous mettre ensemble, avec la force du Christ Ressuscité, pour que les jeunes trouvent un emploi, que les chômeurs trouvent un travail et que tous les travailleurs soient mieux payés et respectés (pas seulement les militaires ou les fonctionnaires) ?

5. Pâques, ce n’est pas une fête pour chacun de nous, individuellement. C’est une fête pour nous, tous ensemble.

D’abord pour l’Eglise. Comment allons-nous ressusciter (faire revivre) nos CCB, nos mouvements et nos différents groupes ? Comment allons-nous renouveler nos paroisses ? Comment allons-nous commencer cette nouvelle évangélisation, demandée depuis longtemps déjà par le Pape Jean-Paul II ?

Pâques, c’est une fête pour toute la Guinée. Déjà, le Prophète ISAIE disait au nom de Dieu : « Je vais créer des cieux nouveaux et une terre nouvelle » (Isaïe 65, 17 – 66, 22). Et St Pierre ajoute : « Nous attendons des cieux nouveaux et une terre nouvelle, où la justice habite ». C’est cela la fête de Pâques : la fête d’une Guinée nouvelle, dans la justice de Dieu.

Pâques, c’est la fête de la vie, de la lumière et de la joie. A nous d’apporter cette vie, cette joie et cette lumière à tout le pays. Bien sûr, cette fête ne va pas supprimer tous nos problèmes d’un seul coup. Mais Pâques, c’est la fête de l’espérance. Si Jésus est ressuscité, la mort est vaincue. Avec Jésus, nous devenons capables de lutter contre toutes les forces de mort qui tuent la Guinée. Pas seulement la pauvreté, la faim, la maladie et le sous-développement. Mais aussi la violence et la méchanceté, la corruption et les détournements d’argent, la paresse et le manque de conscience professionnelle, l’égoïsme et le chacun pour soi où le plus fort écrase le plus faible, la soif de l’argent qui nous fait exploiter nos travailleurs et travailler pour nous seuls ou lieu de travailler pour le pays, l’oubli des pauvres, des petits de la société et du monde rural, l’ethnocentrisme, et le manque d’amour des autres religions, et tant d’autres choses.

Nous croyons qu’avec Jésus Ressuscité nous pouvons vaincre tout cela. C’est cela notre espérance. C’est cela notre volonté solide de baptisés, c’est cela notre engagement.

Chaque fois que Jésus Ressuscité apparaît à ses disciples, Il leur dit : « La paix soit avec vous ». Nous croyons qu’aujourd’hui Jésus vient apporter la paix à la Guinée. Mais cela ne se fera pas sans nous. Car c’est nous les disciples du Christ d’aujourd’hui.

6. La première chose pour vivre Pâques, c’est de regarder les autres avec un cœur bon, comme Jésus. C’est de les accueillir, accepter de vivre ensemble et chercher à travailler ensemble. C’est de nous faire confiance les uns les autres. C’est de voir les bonnes choses qu’ils font au lieu de voir les mauvaises. C’est de voir ce qui va bien dans le pays, pour le rendre meilleur, au lieu de tout critiquer et de décourager ceux qui veulent faire le bien. Pour que nous retrouvions l’espérance.

Comme le disait le Prophète Isaïe en parlant de Jésus (Mtt 12, 18) : « Voici mon Serviteur Bien Aimé… Il annoncera le droit aux nations. Il ne cherchera pas de querelles. Il n’éteindra pas la mèche qui fume encore, jusqu’à ce qu’il conduise le droit à la victoire. Et les nations mettront leur espérance dans son nom ». De même, Pierre dit à la foule, le jour de la Pentecôte : « Ma chair repose dans l’espérance, car tu n’abandonneras pas ma vie au séjour des morts » (Actes 2, 26) Et Paul continue (2ème Cor 1, 9) : « Nous avions reçu en nous-mêmes notre arrêt de mort. Aussi notre confiance ne pouvait plus se baser sur nous-mêmes, mais sur Dieu qui ressuscite les morts. Il nous a déjà arrachés à la mort. Il nous en sauvera encore ».

7. Qu’est-ce que cela veut dire concrètement, en cette période de transition ? Nous sommes en période de transition et préparons les élections. Des manifestations ont commencé. Saurons-nous manifester dans le calme, sans rien casser ou brûler, pour les manifestants ; et sans frapper et réprimer, de la part des forces de l’ordre ?

Des partis politiques ont commencé à s’affronter. Il y a eu des bagarres. Serons-nous capables d’arrêter tout cela immédiatement ? Quelle éducation allons-nous donner à nos militants : pour qu’ils se rassemblent dans la paix ? Pour qu’ils respectent les gens des autres partis ? Pour que la campagne électorale se passe dans le calme ? Pour que nous acceptions de perdre ? Car un seul sera élu président. C'est-à-dire que tous les autres candidats vont perdre. Avons-nous commencé à éduquer nos militants dans ce sens ?

Que cherchons-nous véritablement dans tout cela : le bien véritable du pays, ou le pouvoir pour nous-mêmes, par intérêt et pour en tirer du profit ? Dans notre programme, quelle place donnons-nous aux paysans, aux pauvres, aux chômeurs, et à tous ceux qui font des petits métiers ? Allons-nous soutenir le secteur informel, ou seulement les fonctionnaires et les militaires ? Quelle place donnons-nous aux jeunes, non pas pour les manipuler et les acheter pour gagner des voix, mais pour préparer leur avenir ? Respectons-nous les femmes et sommes-nous à l’écoute de leurs besoins, ou cherchons-nous surtout à les utiliser pour nos meetings et autres manifestations. Et vous les femmes, que faites-vous pour vous faire respecter et prendre vos responsabilités ?

Est-ce que nos programmes sont un vrai engagement ou des promesses creuses pour attirer les gens ?

Plus profondément, nous devons nous demander : Sommes-nous vraiment prêts pour ces élections ? Sinon, qu’allons-nous faire ? Des élections mal préparées ne seraient pas un remède pire que le mal ?

8. Pâques est la fête de la Vie. Il n’y a pas de vraie vie sans union et acceptation de l’autre. Mais il y a encore trop de tensions et d’incompréhensions entre nos différentes ethnies et religions, qui risquent d’éclater un jour ou l’autre. Il est important d’améliorer nos relations sociales. Et cela dépend de chacun d’entre nous. Que chacun cherche à créer des liens d’amitié avec ses voisins ou ses camarades de travail des autres ethnies et des autres religions. On parle sans cesse de pardon et de réconciliation ; mais au-delà des belles paroles ou des grandes déclarations, que fait-on réellement pour cela ?

9. Pâques, c’est la fête de la Lumière. Or, il y a trop de mensonges ou de volonté de tromper dans nos paroles. Il faut à tout prix que nous retrouvions le chemin de la Vérité, pour recevoir cette vie nouvelle de Jésus Ressuscité. Jésus disait : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jn 14, 6) et également : « Celui qui fait la vérité, vient à la lumière » (Jn 3, 21). Pour sortir notre pays de la nuit pour le faire entrer dans la lumière de Pâques, il ne suffit pas de dire la vérité. Il faut la faire. Etre des hommes et des femmes vrais dans toute notre vie. Etre clair dans tout ce que nous faisons.

10. Le deuxième but de la transition, c’est la reprise en main de l’armée. Que se fait-il réellement pour cela ? (à développer).

Je souhaite donc à tout, et à tout le pays, d’entrer dans la Lumière de Pâques et la joie de la Résurrection,

P. Armel Duteil




Clôture du pèlerinage de Boffa (dimanche 2 mai 2010)

Après avoir rappelé que cette année était l'année des prêtres et expliqué le thème du pèlerinage et de toute l'année: vivre la messe en famille, Monseigneur Vincent Coulibaly a déclaré: Aujourd’hui, quelle sera notre offrande spirituelle ? Quelles sont nos intentions de prière ?

  1. Nous prions pour le pays. Pour que la campagne électorale annoncée se passe dans la paix. Pour que les élections qui vont suivre se déroulent dans le calme et sans tromperie. Pour que les perdants acceptent les résultats des élections. C’est à vous, laïcs chrétiens d’agir pour cela : en entrant dans les partis politiques et en participant à l’élaboration et à l’étude des programmes. Le choix de votre candidat doit être fait non pas à partir de son ethnie ou de sa religion, mais à partir de son programme et de sa personnalité, en voyant ce qu’il a fait dans le passé. Telle est notre première offrande spirituelle.

  2. La Campagne agricole vient de commencer. Nous prions pour que Dieu nous donne la pluie. Mais, en même temps, nous nous engageons à soutenir le monde rural, selon nos possibilités. Et nous évitons de casser notre terre par les ordures, la pollution, le déboisement et les feux de brousse. Le pain que nous offrons à la messe est « le fruit de la terre et du travail des hommes ». Nous ne pouvons pas célébrer valablement l’eucharistie le dimanche, si nous n’avons pas d’abord travaillé pendant la semaine. Et nous ne pouvons pas recevoir la communion en vérité à la messe, si nous ne cherchons pas à faire grandir la communion dans nos familles, nos quartiers et nos lieux de travail.

  3. Notre 3ème offrande spirituelle d’aujourd’hui, c’est la vie des jeunes et leurs engagements : tout ce qu’ils font pour transformer le monde des jeunes et en faire un monde d’amour. A l’espace-jeunes, les jeunes se sont plaints en particulier du chômage et ont demandé aux adultes chrétiens et au diocèse de les aider. C’est normal. C'est pour cela que l’Eglise de Guinée a mis en place l’OCPH (Organisation Catholique pour la promotion de l’homme) et la commission de pastorale sociale.

Mais est-ce que les jeunes participent aux commissions de pastorale sociale de leur paroisse pour apprendre à élaborer des projets de développement valables, avec l’aide de nos partenaires comme le réseau Caritas, en particulier CRS (Caritas des Etats-Unis) et la Caritas Italienne ? Plus profondément, ne faudrait-il pas que, tous ensemble, nous nous demandions ce qui cause le chômage dans le pays. Et que faire pour que tous les jeunes puissent avoir du travail. N’est-ce pas une question essentielle à poser en ce temps de campagne électorale ? Les commissions justice et paix sont là pour vous soutenir dans Votre engagement politique. En sachant que cela nous demandera beaucoup d’efforts et de souffrances. Mais ce sont justement ces souffrances pour notre jeunesse que nous offrons à Dieu notre Père à la messe, unies au sacrifice du Christ. Saint Pierre nous dit : « Soyez des pierres vivantes qui servent à construire le Temple Spirituel. Et vous serez le sacerdoce saint qui présente des offrandes spirituelles, que Dieu pourra accepter à cause du Christ Jésus » (1 P2,4-5).

Le rôle des laïcs, c’est de vivre leur foi dans la vie de tous les jours. Et de s’engager dans la société, pour y construire le Royaume de Dieu : un Royaume de justice et de paix, de vérité et de réconciliation. Alors, le dimanche, ils viennent offrir au Père, dans les mains de Jésus, tout ce qu’ils ont vécu pendant la semaine, avec les autres hommes. Pour cela le prêtre chante ou dit : « Par lui, avec lui, et en lui, à toi Dieu le Père tout Puissant, tout honneur et toute gloire pour les siècles des siècles ». Et l’assemblée répond : Amen. C’est cela le sacrifice spirituel dont parle Saint Pierre.

Après avoir rappelé aux prêtres les exigences de leur engagement, Monseigneur Vincent a donné à tous l'exemple de Marie et de Saint Jean Marie Vianney à qui cette année est consacrée.




Messe pour la paix en Guinée
Homélie de Mgr. Vincent COULIBALY (Cathédrale Ste. Marie de Conakry, 26 juin 2010)

Bien chers frères et sœurs,

Nous sommes à la veille des élections Présidentielles qui vont se dérouler demain 27 juin 2010. C’est un événement important pour notre pays, car nous allons, à cette occasion, choisir le président qui nous guidera les cinq années à venir. Fidèles à nos us et coutumes africaines et comme peuple croyant, nous avons pensé que notre devoir consiste aujourd’hui à offrir un sacrifice à notre Dieu, pour que nos élections se déroulent dans la paix. C’est pourquoi vous avez accepté de vous rassembler nombreux ce soir dans notre maison de famille qui est la Cathédrale Sainte Marie de Conakry. Soyez les bienvenus et merci pour votre présence massive.

Le sacrifice que nous voulons offrir à Dieu aujourd’hui est celui de la messe, pour qu’il donne la paix à notre pays.. Il faut rappeler qu’à chaque célébration de la messe, nous prions pour la paix. Ce jour n’est donc pas une exception. Nous ne prions pas seulement pour les chrétiens. Nous prions pour tous les hommes, puisque Dieu est le Père de tous.

Comme le Roi Salomon à Gabaon dans le premier livre des Rois (cf 1R 3,5.7-12), nous nous trouvons dans ce lieu bâti pour le Nom du Seigneur, afin d’offrir notre sacrifice et brûler notre encens pour la paix dans notre cité.

Aussi, avec confiance, nous demandons à Dieu qui a toujours traité notre pays, la Guinée, avec grande fidélité et amour, de donner à celui qui va être élu comme Président, « un cœur qui ait de l’entendement pour gouverner » notre peuple qui n’a que trop souffert ; qu’il donne à notre pays un président qui ait un cœur capable de discerner le bien du mal qui gangrène depuis longtemps la vie socio-politique et économique du pays ; qu’il donne à notre président un cœur sage pour gouverner avec droiture le peuple ; qu’il éloigne de celui qui va être élu toute tentation de s’enrichir au détriment des pauvres et tout esprit de vengeance qui conduit à chercher la mort de ses « ennemis politiques ». 

Pour nous, peuple de la Nouvelle Alliance, les holocaustes et les sacrifices de paix de l’ancienne Alliance trouvent leur achèvement dans la célébration de la Messe. En effet, la messe constitue le véritable sacrement de la paix. Elle est le lieu par excellence où des semences de paix sont déposées dans le cœur des fidèles à travers la communion au Corps et au Sang du Christ. A condition que nous accueillions cette paix de tout notre cœur. Et que nous cherchions à la faire grandir au tour de nous. C’est pour cela que nous devons beaucoup prier pour la paix et chercher à être partout des artisans de paix.

Dans ce cadre, la Conférence Épiscopale de Guinée a invité tous les chrétiens, depuis bientôt deux mois, à prier pour la paix en Guinée. Et elle leur a proposé une prière que tous devaient faire monter chaque jour vers Dieu. Dans cette prière, nous sommes tous invités à prendre conscience que Dieu nous a donné notre pays pour que nous le fassions grandir dans la paix et l’amour, pour que tous ses habitants puissent y vivre heureux. De même, Dieu nous demande de faire de la Guinée un pays où la justice habite. Pour cela, nous devons travailler pour que les pauvres, les petits et les personnes mises à côté, retrouvent leur dignité, et qu’il soit mis fin au système conduisant à oublier ou à rejeter des citoyens. Nous devons travailler aussi pour éliminer toutes les formes de méchanceté, de mensonges et de violence qui cassent notre pays, et nous empêchent de vivre ensemble, dans la paix et l’amour.

Frères et sœurs, c’est Dieu qui nous rassemble ce soir pour nous parler comme un sage du village le fait avec ses enfants à la veille de décisions graves. Il veut surtout nous dire ce que Jésus nous a toujours enseigné :

  • Heureux les miséricordieux, ils obtiendront miséricorde ;

  • Heureux les cœurs purs, ils verront Dieu ;

  • Heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu

(mt 5,3-10).

En acceptant l’invitation de Dieu ce soir, nous prouvons notre ferme volonté de communier au précieux bonheur d’être comptés parmi les artisans de paix aujourd’hui en Guinée. Nous prouvons aussi notre ferme volonté de vivre dans la paix et l’amour, avec tous les hommes et femmes de notre pays ; ainsi que notre volonté d’accepter nos différences et de construire la Guinée dans la solidarité.

Pour être aujourd’hui des artisans de paix, nous devons travailler ensemble pour que pendant ces élections, la dignité de l’homme soit préservée, la sérénité et le calme règnent partout, et les attitudes que commande la civilisation de l’amour soient recherchées par tous les guinéens. Travailler dans ce sens, c’est ouvrir son cœur à la voix de Dieu qui nous appelle chaque jour à la Paix, à l’Unité, et à la Responsabilité.

Ouvrir son cœur à la Voix de Dieu qui nous appelle à la Paix, à l’Unité, et à la Responsabilité. Tel est le message commun des chefs Religieux Musulmans et Chrétiens de Guinée, à l’intention de leurs compatriotes à la veille des élections présidentielles de 2010. Oui, Peuple croyant de Guinée, en ce moment crucial que tu traverses, tes chefs Religieux Musulmans et Chrétiens t’invitent à ouvrir largement ton cœur pour écouter la Parole de Dieu qui s’adresse à toi aujourd’hui. Dieu t’a confié la Guinée, ce beau pays, pour que tu le rendes plus beau. Tu ne réussiras dans cette mission de Dieu qu’en travaillant et en vivant dans la paix et dans l’unité.

Le principal chemin qui conduira notre peuple à la paix et à l’unité, c’est la vérité. En effet une société n’est dûment ordonnée, bienfaisante, respectueuse de la personne humaine, que si elle se fonde sur la vérité, selon l’avertissement de saint Paul : « Rejetez donc le mensonge ; que chacun de vous dise la vérité à son prochain car nous sommes membres les uns des autres » (Ep 4,25).

Frères et sœurs, ne nous faisons pas d’illusion, ce n’est que sur la vérité qu’il est possible de construire une société renouvelée et de résoudre les problèmes qui l’ébranlent, le premier d’entre eux consistant à surmonter les formes les plus diverses du totalitarisme pour ouvrir la voie à l’authentique liberté de la personne, image de Dieu.

La vérité, principal chemin de la liberté, de l’amour, de la réconciliation, et de la paix, exige aussi et avant tout que l’on élimine toute trace de discrimination raciale, ethnique, régionaliste, idéologique, religieuse, politico-économique et sociale dans nos relations.

La naissance de l’Union Sacré des Religieux de Guinée, que j’appelle de tous mes vœux depuis bientôt un an, peut-être ici un pas considérable vers le progrès. Car une telle organisation dans toutes les villes et tous les villages du pays permettra aux Imans, aux Pasteurs et aux Prêtres de se retrouver régulièrement pour se connaître, échanger leurs réflexions et créer des liens entre eux, sans attendre que des problèmes surgissent. A ce moment-là, quand ces problèmes arriveront, les religieux seront unis pour les résoudre ensemble. Et c’est dans la mesure où il y aura l’unité entre les chefs religieux, qu’ils pourront prêcher l’unité des guinéens et qu’ils seront écoutés.

La Sagesse traditionnelle nous enseigne que : « Deux mains se lavent bien l’une l’autre », ou encore : « Un seul pied ne trace pas un sentier ». Par ce que si puissant et si intelligent que soit un homme, il y a bien des choses qu’il ne peut faire tout seul et qui exigent le concours de plusieurs. Ainsi la construction de la Guinée n’est pas le travail d’un seul homme, mais de tous les guinéens sans exclusive. Nous sommes tous responsables du pays, et nous devons rendre compte de notre gestion à nos compatriotes ici bas, et à Dieu au terme de notre pèlerinage terrestre. Nous ne devons pas brader ce que nos anciens nous ont légué à la sueur de leur front. Nous devons corriger les erreurs et les fautes du passé : les tueries, les coups qui entraînent de nombreuses blessures, les viols, les kidnappings, la corruption, les attentats, et autres actes qui portent atteinte à l’honneur et à la dignité du guinéen.

En ce moment crucial où tout le monde retient son souffle en Guinée, dans l’attente du verdict des Urnes, n’oublions pas que Dieu veut notre bonheur et qu’il veut que nous travaillions pour ce bonheur. Prions pour qu’il nous soutienne et nous inspire les paroles et les gestes qui rapprochent et réconcilient. Qu’il nous envoie la « Sagesse assise auprès de lui ». Ainsi la paix règnera dans notre pays, même après la proclamation des résultats des votes. Nous savons bien que dans beaucoup de pays africains en conflit, tout à éclater après les élections.

Au terme d’une campagne Présidentielle, nous avons été témoins de manifestations et de propos qui montent encore l’antipathie entre les protagonistes de la course. J’invite donc les candidats à dominer tous les sentiments ethnocentriques pour ne voir qu’une Nation guinéenne unie et indivisible. Que celui qui sera élu président tende la main aux autres pour constituer un gouvernement représentatif de tout le peuple.

D’où ce message important des chefs religieux musulmans et chrétiens de Guinée : «  Au nom du Dieu Unique, en ce moment crucial que notre pays et notre peuple traversent, à tout croyant et à toute personne de bonne volonté nous disons : ouvrons nos cœurs à la voix de Dieu qui nous appelle à la Paix, à l’Unité, et à la Responsabilité ».

Chers frères et sœurs, avec ce sacrifice de la messe, je souhaite que nous entrions dans le « match » électoral sans rancune et avec la volonté ferme non pour être servis mais pour servir loyalement notre peuple au nom du Dieu Vivant, qui rassemble les hommes créés à son image et sa ressemblance, Lui qui vit et règne pour les siècles des siècles Amen !




Christ Roi de l’Univers : Centenaire de la Paroisse Sainte Croix de Kindia

Excellences Messieurs les Membres du CNDD et du Gouvernement,
Excellences Messieurs les Membres du Corps Diplomatique et Consulaire,
Excellences Messieurs et Mesdames les représentants des autorités civiles, militaires et religieuses,
Bien chers confirmands,
Bien chers paroissiens de Kindia,

« Que la Croix du Christ soit notre seule fierté » (Ga 6,14) !

C’est avec cette invitation de l’Apôtre Paul aux Galates que nous nous sommes mis en marche pour célébrer les 100 ans de fondation de la paroisse de Kindia. N’est-ce pas une grâce immense d’avoir su faire de la Croix notre seule fierté pendant un siècle ! N’est-ce pas aussi le lieu opportun pour exprimer notre reconnaissance filiale à tous les missionnaires dont Dieu s’est servi pour communiquer son amour immense et inconditionnel aux fils et aux filles de Kindia. Notre pensée va, naturellement, à la Congrégation des Pères du Saint Esprit, et en particulier au Révérend Père Philippe Lacan qui fonda cette Mission en 1907.

Providentiellement, la clôture des festivités de ce centenaire se fait en la solennité du Christ Roi de l’univers, où le Seigneur Jésus lui-même se donne le titre de « Roi » dans sa passion, douloureuse et triomphante à la fois.

Oui frères et sœurs en Christ, « Que la croix du Christ soit notre seule fierté », parce que le seul Roi qui mérite aujourd’hui et en tout temps notre adoration est un Roi crucifié, couronné d’épines et non pas de pierres précieuses. La royauté de celui qui nous rassemble au cœur de cette messe d’action de grâce pour les 100 ans de la paroisse de Kindia, n’est pas à l’image de celle de Pilate. Ce Pilate, chef de l’armée d’occupation romaine, Préfet d’un des plus grands empires qui aient dominé et marqué le monde. C’est devant ce magistrat tout-puissant, Pilate, que Jésus se déclare Roi mais, en précisant que sa « royauté ne vient pas de ce monde ».

Au cœur de cette révélation, Jésus réaffirme la mission fondamentale de l’Eglise, peuple de Dieu : « Je suis venu dans le monde pour ceci : Rendre témoignage à la vérité » !

Et ce courage en vue du témoignage nous fait confesser aujourd’hui « que notre seule fierté, c’est la croix du Christ ». Et par conséquent que c’est dans la faiblesse, dans l’humilité que la royauté du Christ se révèle.

Oui Frères et sœurs, le Christ est Roi, et sa royauté ne vient pas de ce monde, il n’est pas un pouvoir triomphaliste, il se révèle dans le service de la vérité. C’est dans la Passion douloureuse, sur la Croix qu’il est intronisé Roi de l’univers ! N’est-ce pas là déjà une preuve du fait que sa royauté n’est pas à confondre avec celle que nous connaissons dans les domaines politiques ou militaires.

En effet, l’évangile de ce jour attire notre attention sur plusieurs manières d’être roi :

  1. La royauté dans le domaine politique : C’est cette royauté qui, très souvent, met en place des systèmes malicieux pour dominer les autres en les asservissant. Comme le Prince régnant du temps de Jésus, appelé Tibère, avait réussi à mettre en place une politique de domination implacable des peuples de son temps. Aujourd’hui les Tibères de notre temps s’activent à mettre en place des politiques de domination qui mettent l’homme dans les conditions d’une bête de somme dont la vie et la mort dépendent de leur seule volonté. Comme au temps de Jésus, au service des Tibères de notre temps, il y a souvent des Pilates chargés d’imposer, par des violences atroces, le pouvoir « royal ». Comme Pilate, chargé par le pouvoir d’arrêter des insurrections qui éclataient assez régulièrement dans le milieu juif, aujourd’hui encore, des hommes et des femmes pourtant investis pour défendre les personnes et leurs biens posent des actes contraires à leur vocation. Au lieu de défendre la vie, ils s’organisent pour la détruire ; au lieu de défendre la dignité et la sacralité de la personne humaine, ils la déshonorent sans pudeur. On ne peut oublier de citer ici les avortements qui se multiplient dans le pays. Le personnel de la santé devra davantage protéger la vie humaine, dès la naissance.
    Devant un tel type de royauté, la voix du Christ à travers son Eglise, se fait entendre et exhorte ceux qui détiennent la destinée de nos peuples à se ressaisir.

  2. La royauté messianique à la manière de l’attente juive ; elle est apparentée aux systèmes politiques ou idéologiques qui se servent de la religion et de l’ethnie pour atteindre les intérêts égoïstes d’un homme ou d’un groupe d’hommes. On se met sous le mentaux de Dieu ou on se réclame d’une région et d’une identité culturelle déterminées pour attaquer et écraser les autres considérés comme ennemis. Dans cette politique malsaine, on se sert très souvent et bien volontiers de l’appartenance ethnique et de la religion pour diviser un peuple.

  3. La royauté à la manière de Jésus. Elle est une royauté mystique qui ne contraint ni n’écrase personne ; une royauté qui laisse le roi se faire livrer sans défense à ses ennemis.

Etre roi à la manière du Christ, c’est accepter de mettre l’homme, image et incarnation de Dieu, au centre de tout. Etre roi à la manière du Christ, c’est accepter que la vie humaine est sacrée et que toute atteinte à cette vie est, en même temps, une atteinte à la vie même de Dieu. Ce n’est pas l’argent, ni l’ethnie, ni la région qui fait la dignité d’un homme. Etre roi à la manière du Christ c’est avoir la conviction qui nous pousse à dire : celui qui tue son frère porte aussi atteinte à la vie de Dieu.

Combien de fois alors la conscience des Tibère et des Pilates de notre temps, de nos peuples et de notre histoire est souillée par le sang innocent de l’homme et aussi de Dieu ! Combien de fois la conscience des commanditaires et des exécutants de tous les crimes atroces subis par les peuples du monde et par notre peuple est souillée par le sang innocent! Depuis les indépendances et jusqu’à nos jours, combien de victimes sur la conscience des Tibères et des Pilates de notre peuple ?

Nous, peuple chrétien, nous avons reçu de Dieu lui-même la grave mission de servir son « règne de vie et de vérité, règne de grâce et de sainteté, règne de justice, d’amour et de paix ». Nous accomplissons cette mission dans un monde dominé par le mensonge et par l’injustice. En effet, le mensonge et la manipulation de la vérité sont répandus et habituels aujourd’hui au niveau interpersonnel et au niveau de l’information. Ils semblent être acceptés par tous et admis de façon tacite comme règle de la vie. Des valeurs importantes de la culture africaine sont négligées, comme la pratique de l’arbre à palabre, la solidarité, le respect des aînés ou des cheveux blancs, l’éducation ou l’instruction, la cohésion sociale, la retenue, la pudeur. Il y a une tendance à l’uniformisation, une sorte de nivellement « vers le bas ».ce qui rappelle un temps que nous avons connu dans ce pays, où le fils appelait camarade, son père, sa mère, son grand frère, son oncle et son professeur.

Face à cette réalité, témoins du Christ, nous réaffirmons que rien de solide, de durable ne peut être construit dans le mensonge, puisque seule la vérité nous rend libre.

En plus du service de la vérité, l’Eglise doit aussi s’impliquer dans les œuvres de justice. L’annonce et l’implication efficace pour la justice et tout ce que cela implique est vocation de l’Eglise : amour libérateur et fraternité, paix et réconciliation entre les hommes et les classes sociales, droit de l’homme et dignité de la personne humaine.

Face à cette réalité de notre monde, nous devons construire le Royaume de Dieu dans nos familles et nos CCB, qui sont le soubassement de la paroisse et du diocèse. La famille est le lieu de l’éducation des enfants et de l’apprentissage à l’amour et à l’engagement. La famille est la première école de la foi. Pour cela, les parents doivent envoyer leurs enfants au catéchisme, mais aussi chercher à savoir ce qu’ils ont appris au catéchisme et les encourager à le mettre en pratique. Ils doivent s’occuper de leurs enfants et dialoguer avec eux. Ils doivent suivre et encourager leur progrès dans les lieux de formation ou d’éducation.

Quant aux CCB, elles doivent travailler et vivre toute l’année, pas seulement pendant le mois de rosaire ou pendant les événements heureux ou malheureux. Elles doivent être le lieu où on partage la Parole de Dieu, base de notre vie et notre lumière. Elles doivent travailler dans le quartier ou le village pour la justice, la paix et la réconciliation : elles ne sont pas seulement des groupes de prière. Elles doivent évangéliser le village ou le quartier. Elles doivent aider les pauvres de toutes sortes.

Les familles et les CCB me font penser aux catéchistes et aux élèves. Nombreux sont les catéchistes qui ont travaillé dans nos paroisses, en particulier, dans la paroisse Sainte Croix de Kindia. Ils ont soutenus le travail des missionnaires. Que Dieu accueille auprès de lui ceux qui nous ont précédés dans mort ; qu’il bénisse les vivants et soutiennent leur apostolat.

Quant aux élèves, nous connaissons bien leur situation et leurs conditions d’étude. Ils rencontrent de plus en plus de difficultés qui constituent de toute évidence des entraves réelles à l’atteinte des objectifs de qualité. Parmi les problèmes des élèves, je note : les rentrées scolaires sont souvent retardées et les cours sont souvent arrêtées, pour des raisons extrascolaires. Depuis 2002-2003, les élèves et étudiants perdent en moyenne entre 40 à 50 jours de classe chaque année, presque deux mois. Ce qui est énorme. Tous ceux qui favorisent cette situation travaillent au détriment des jeunes et du pays.

Face à la situation du monde et de notre pays, l’Eglise veut s’impliquer davantage dans l’éducation. Nous considérons cela comme un des moyens permettant de fixer les jeunes en Afrique, particulièrement en Guinée.

Ici je salue et encourage fortement la coopération missionnaire du Kanya avec Notre Dame des Champs de Paris, l’Association du Quartier Montparnasse, l’Alliance Notre Dame de Fidélité et l’Association « Une Guinée à Construire ensemble ». nous voulons aider notre pays à assurer non seulement un enseignement valable (l’instruction), mais aussi une vraie éducation de la jeunesse.

Bien chers confirmands et vous tous frères et sœurs baptisés dans la mort et la Résurrection du Christ. Telle est la mission qui nous incombe aujourd’hui ; nous sommes dans le monde pour ceci : « rendre témoignage à la Vérité ».

Nous sommes dans le monde pour dire qu’à la royauté du Christ, nul ne peut échapper ; car être homme c’est opter pour ou contre la « vérité » ; être homme c’est opter pour des valeurs comme la paix, la fraternité entre les peuples et les hommes, la recherche de la cohésion sociale, de l’entente, le respect des valeurs fondatrices du peuple dont nous nous réclamons, l’éducation, etc.…

Honorer le Christ-Roi, ce n’est pas d’abord lui mettre de l’encens, ce n’est pas lui faire des cérémonies grandioses, ressemblant aux vanités des rois de la terre…c’est écouter sa voix, et conformer notre vie personnelle et communautaire à cette voix.

Le centenaire d’une Eglise nous rappelle la mission essentielle de l’Eglise universelle, peuple de Dieu, en obligeant notre conscience de peuple croyant à un examen de conscience, pour une nouvelle marche vers la sainteté.

Puissions nous, aujourd’hui, louer Dieu le Père Tout-Puissant, qui a institué son Fils, Jésus-Christ, Roi et Seigneur universel de toute créature avec un pouvoir et un règne éternel.

Que Dieu bénisse la paroisse et la Préfecture de Kindia ! Que Dieu bénisse notre pays et tous ses habitants !




Rencontre des Caritas et des commissions de Justice et Paix d'Afrique pour mettre à l'action le 2 ème Synode pour l'Afrique Maputo - 23-26 mai 2010 (L73)

 « Une nouvelle pentecôte pour l’Afrique »

On pourra lire par ailleurs la Déclaration Finale. Je voudrais simplement dire ici ce que nous avons fait pendant la rencontre. Nous nous rappelons tout ce que nous avons déjà expliqué et les documents que nous avons envoyés. Nous nous sommes d’abord retrouvés par région. Pour la région de l’Afrique de l’Ouest, voici les points les plus importants sur lesquels il nous semble nécessaire d’agir 

  1. La construction de la paix. Comment empêcher les conflits, spécialement au niveau politique, entre ethnies et entre religions ? Comment réconcilier les gens, en commençant par l’Eglise ? Comment apporter la sécurité dans le pays ? Comment augmenter les actions de réconciliation dans les CCB ?

  2. La bonne gouvernance. Les élections, la démocratie, la participation aux prises de décisions par la société civile, la lutte contre la corruption, le respect de la Constitution, l’engagement politique des chrétiens.

  3. La gestion des ressources naturelles, matérielles et humaines. Les mines = nécessité de la transparence : quel argent est gagné et comment est-il utilisé ? Les salaires et les inégalités dans la Société, le budget du Gouvernement et l’utilisation réelle de l’argent du pays.

  4. La promotion des droits humains. Les faire connaître. Voir comment ils sont appliqués. Le respect des droits des femmes, des enfants, des prisonniers, des étrangers. Lutte contre la corruption, la prostitution et le trafic des enfants.

  5. La lutte contre le SIDA . Education, prévention, soutien des malades.

  6. La sorcellerie et toutes les pratiques traditionnelles mauvaises : excision, coutumes qui font souffrir les veuves, les orphelins, etc…

  7. La lutte contre la pauvreté. Les inégalités sociales, le chômage des jeunes, le manque de nourriture et d’eau potable, le manque de respect et de responsabilisation des paysans, la difficulté de se faire soigner.

  8. Les conflits entre religions et dans notre propre religion : conflits entre évêques et agents pastoraux, dans nos paroisses et nos CCB. Les menaces de l’islamisme et des sectes.

  9. La migration. Les gens qui quittent notre pays et ceux qui arrivent d’autres pays. Les déplacés à l’intérieur du pays.

  10. L’unité du pays et les bonnes relations avec les pays voisins. La lutte contre l’ethnocentrisme et le régionalisme.

  11. La famille. Comment garder les valeurs familiales. Lutter contre les violences et la méchanceté dans les familles ; l’entente entre mari et femme et avec les deux familles, l’éducation des enfants et la délinquance des jeunes (vol, violence, drogue, etc…).

  12. Faire connaître la doctrine sociale de l’Eglise. NB1 : Nous avons noté que ces problèmes se retrouvent aussi dans l’Eglise. Il faudra donc agir à la fois dans l’Eglise et la Société.
    NB2 : Beaucoup de choses se font déjà, il faudra les continuer, en les rendant meilleures (par exemple, l’éducation à la doctrine sociale de l’Eglise). Mais il y aura aussi des choses nouvelles à commencer. Par exemple : un groupe de réflexion avec les députés quand ils seront élus. Créer un Centre d’accueil pour les migrants. Faire des sessions d’éducation à la paix et à la non violence, etc… Faire la vérité et guérir les mémoires après tous les meurtres commis depuis l’indépendance.

Trois actions à mener en premier

Nous nous sommes ensuite retrouvés tous ensemble, et pour toute l’Afrique nous avons choisi trois choses à faire en premier :

  1. la bonne gouvernance ;

  2. la promotion de la femme ;

  3. la construction de la paix. (Alors que pour l’Afrique de l’Ouest, pour le 2ème point, nous avions choisi : la formation et le soutien des jeunes. Et aussi le soutien au monde rural et la lutte contre la pauvreté. (Voir l’homélie de Mgr Vincent COULIBALY, à Boffa)).

Nous avons commencé à réfléchir à ce qu’il est possible de faire dans l’Eglise par rapport à ces trois points. Mais il faudra compléter cette réflexion et l’adapter dans chacun des pays. Et voir comment agir dans la Société. Voici quelques idées.

  1. Par rapport à la bonne gouvernance. Dans l’Eglise, il faudrait avoir des idées plus claires de ce que nous voulons faire dans la Société. Il n’y a pas assez d’engagement de l’Eglise dans le domaine social. L’Eglise doit se mettre clairement du côté des pauvres. Former des laïcs chrétiens pour qu’ils prennent davantage leur place dans la Société. Soutenir la Société civile. Ne pas seulement dénoncer ce qui ne va pas dan la Société, mais proposer des solutions et surtout agir pour que ça change.

  2. Pour la promotion de la femme. Dans l’Eglise, soutenir les Mouvements des femmes. Donner des responsabilités aux femmes dans toutes les organisations de l’Eglise. Augmenter l’éducation des filles et la formation des femmes. Eduquer les garçons et les hommes au respect de la femme. Demander l’avis des femmes sur toutes les questions.
    N.B. : Il ne s’agit pas seulement de donner des places aux femmes, mais de leur permettre d’humaniser l’Eglise et la Société.

  3. Par rapport à la paix. Fonder l’action pour la paix sur la doctrine sociale de l’Eglise. Former tous les chrétiens à cette doctrine, spécialement les séminaristes, les religieux et religieuses, les laïcs engagés (catéchistes, responsables de CCB et de Mouvements). Augmenter les structures de dialogue dans l’Eglise. Former des éducateurs à la paix. Participer aux actions pour la paix. Travailler avec les autres organisations.

Pour continuer cette réflexion, nous partirons des propositions des évêques et du message des évêques à la fin de ce 2ème Synode, concernant ces trois thèmes d’action. :

  1. Pour la gouvernance :

  • Propositions numéros 14 : justice ; 15 : sécurité de la Société ; 24 : bonne gouvernance ; 25 : politique ; 26 : élections ; 27 : liberté religieuse ; 29 : ressources naturelles ; 32 : respect de la diversité ethnique.

  • Messages numéros 19, 23, 34, 37.

  1. Pour les femmes :

  • 42 : les femmes en Afrique ; 38 : la famille.

  • Message : 25.

  1. Pour la paix :

  • Propositions 21 – Paix dans l’Eglise : 45+46, Eucharistie source de communion ; 51, la réconciliation Dialogue : 10, œcuménique ; 11, interreligieux ; 12, l’Islam ; 13, les religions africaines traditionnelles.

  • Messages n° 19, 39 – 41.

Mettre en œuvre le synode

Pour agir, nous avons choisi quatre principes.

  1. Travailler pour la réconciliation, la justice et la paix, c’est continuer la mission de Jésus.

  2. Pour être vraiment la Famille de Dieu, l’Eglise doit travailler pour la réconciliation, la justice et la paix.

  3. Notre réponse aux problèmes politiques, économiques et sociaux doit s’appuyer sur la Doctrine Sociale de l’Eglise.

  4. Pour vivre une deuxième Pentecôte de l’Eglise, toutes les structures de l’Eglise doivent mettre en pratique les orientations des deux Synodes pour l’Afrique, et passer de la théologie (la théorie) à l’action pastorale (action sociale, justice et paix).

Nous avons ensuite vu comment travailler ensemble, à tous les niveaux. Et en particulier, comment la Caritas (OCPH) – Pastorale sociale et Justice et Paix peuvent travailler ensemble. Il faudra préciser ces points par des actions précises.

Nous avons aussi rappelé certains points : Comment travailler ensemble, avec tous, en acceptant nos différence pour nous compléter. Mettre en place des micros crédits pour les pauvres. Comment aider les plus pauvres ? La protection de la terre (l’environnement). Surveiller l’utilisation de l’argent du pays et des dons qui sont faits.

Et par rapport au Synode : Faire connaître les documents. Emissions dans les radios rurales et radios locales. Composer une prière pour le suivi du Synode. Faire un forum sur le 2ème Synode, présidé par les deux évêques qui y ont participé. Introduire les trois actions proposées dans le prochain plan pastoral, sans oublier les autres points importants : les jeunes, la lutte contre la pauvreté, etc…

Enfin, nous avons rédigé la déclaration finale de Mumemo que je vous enverrai dès que j’aurai le texte officiel.